Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 11 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès, rapporteur pour avis :

Le harcèlement sexuel peut se produire, nous le savons, dans les circonstances les plus variées : engagement associatif, activités sportives, parcours scolaire ou universitaire, relations de voisinage, recherche d’un logement... Cependant, il faut bien admettre qu’il se déroule souvent dans un cadre professionnel, que ce soit dans les entreprises privées ou dans les administrations. C’est ce qui justifie que l’interdiction du harcèlement sexuel figure aussi dans le code du travail et dans le statut de la fonction publique.

Par conséquent, la question du harcèlement sexuel entretient des liens étroits avec des sujets qui sont au cœur des préoccupations de la commission des affaires sociales. Je pense à la qualité de la vie au travail, à la prévention des risques psychosociaux et à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

La décision rendue par le Conseil constitutionnel, le 4 mai dernier, a conduit à l’abrogation de l’article du code pénal qui définissait, de manière trop imprécise, le délit de harcèlement sexuel. Il en résulte un vide juridique qui, comme vous l’avez dit, mesdames les ministres, laisse sans protection les victimes, parmi lesquelles figure une grande majorité de femmes. Il nous appartient, en tant que législateur, de remédier au plus vite à cette situation.

Le Sénat a apporté rapidement la preuve de sa détermination à agir.

Dès l’annonce de la décision du Conseil constitutionnel, un groupe de travail a été mis en place. Il a auditionné toutes les parties intéressées et les discussions menées en son sein ont permis de faire émerger de nombreux points d’accord concernant la nouvelle définition du harcèlement sexuel.

Dans le même temps, sept propositions de loi ont été déposées par des sénateurs et sénatrices siégeant sur différentes travées de notre assemblée, ce qui démontre, s’il en était besoin, que la lutte contre le harcèlement sexuel est un objectif qui transcende les clivages politiques.

Certains ont regretté que le Gouvernement n’ait pas laissé prospérer ces initiatives parlementaires et qu’il ait préféré déposer un projet de loi. Pour ma part, je vois surtout dans ce choix un signe de la volonté du Gouvernement de se mobiliser contre le harcèlement sexuel et je me réjouis, à cet égard, que deux ministres soient présentes aujourd’hui pour en soutenir la discussion.

Dès l’origine, le texte du Gouvernement tenait compte des réflexions qui ont été menées au Sénat ; il a été encore amélioré par les amendements adoptés par la commission des lois, de sorte que nous examinons aujourd’hui le fruit d’un véritable travail conjoint qui répond à nos préoccupations.

Le texte qui nous est soumis nous donne satisfaction pour plusieurs raisons.

Premier motif de satisfaction : comme cela a déjà été indiqué, le présent projet de loi parvient à concilier deux impératifs qui pouvaient paraître contradictoires au premier abord, non seulement une exigence de précision dans la définition des éléments constitutifs du délit, afin de satisfaire au principe constitutionnel de légalité des délits et des peines, mais aussi l’obligation de retenir une incrimination suffisamment large pour couvrir tous les cas de harcèlement sexuel.

Le harcèlement consiste, généralement, en une succession de gestes, de propos, de comportements, qui ne sont pas nécessairement très graves pris isolément, mais qui peuvent entraîner, du fait de leur répétition, des conséquences dramatiques sur la santé psychique de la victime ; parfois, il s’apparente davantage à un « chantage sexuel », par exemple quand un employeur menace une salariée de la licencier si elle refuse de céder à ses pressions.

Le projet de loi – c’est l’un de ses principaux mérites – permettra de réprimer ces deux types de harcèlement, puisqu’il retient une double définition du délit, comme Mme la garde des sceaux a déjà eu l’occasion de le rappeler.

Deuxième motif de satisfaction : le texte ne fait plus de la recherche de « faveurs » sexuelles l’objectif exclusif du harcèlement. Les auditions du groupe de travail ont montré que les victimes avaient souvent du mal à prouver que le harceleur poursuivait cette fin, ce qui explique que de nombreuses plaintes aient été classées sans suite ou aient abouti à une relaxe. L’abandon de cette condition devrait permettre aux victimes d’obtenir plus facilement justice. Il leur « suffira » de montrer que le harcèlement a porté atteinte à leur dignité ou a créé pour elles un environnement hostile, intimidant ou offensant pour que le délit soit constitué.

Troisième motif de satisfaction : le texte alourdit les peines encourues en cas de harcèlement sexuel. Jusqu’à ce jour, la sanction prévue était d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Il est proposé de la porter à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 euros d’amende, et même à trois ans de prison et à 45 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes. Cette mesure, qui a une vertu pédagogique évidente, devrait exercer un effet dissuasif.

Quatrième motif de satisfaction : le projet de loi introduit dans le code pénal une disposition qui permettra désormais de réprimer les mesures discriminatoires dont peuvent faire l’objet les victimes de harcèlement sexuel. Ainsi, un employeur qui licencie une salariée ou qui refuse d’embaucher une candidate lors d’un recrutement parce qu’elle aurait résisté à ses avances pourra être sanctionné.

Permettez-moi, mesdames les ministres, mes chers collègues, de m’attarder un instant sur les articles qui portent sur le code du travail, sur le code du travail applicable à Mayotte et sur le statut de la fonction publique.

Je voudrais d’abord rappeler qu’il est indispensable de modifier le code du travail dans la mesure où, actuellement, il définit le harcèlement sexuel dans les mêmes termes que ceux qui ont été censurés par le Conseil constitutionnel.

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