Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 11 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

En effet, ce constat a également été dressé par certains des orateurs précédents, du fait de cette décision, le délit de harcèlement sexuel a purement et simplement disparu du code pénal, créant un vide juridique et faisant tomber toutes les affaires de harcèlement sexuel actuellement pendantes devant les juridictions pénales.

Cette situation, nous le savons, a été douloureusement ressentie par les victimes de ces agissements – des femmes, dans la très grande majorité des cas – qui avaient eu le courage de les dénoncer.

Ces personnes étaient, pour beaucoup, en procédure depuis de nombreuses années. Elles se trouvent aujourd’hui contraintes de reprendre tout leur combat depuis le début, quand elles peuvent encore le faire. C’est un nouveau préjudice moral et financier.

Des solutions doivent, partant, être trouvées pour ces victimes.

Il était donc urgent qu’une nouvelle définition du délit de harcèlement sexuel soit adoptée et que les dispositions du code du travail, du code de procédure pénale et de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires soient adaptées en conséquence.

Au-delà des divergences politiques, le groupe de travail constitué au Sénat et coprésidé par la présidente de la délégation aux droits des femmes, par le président de la commission des lois et la présidente de la commission des affaires sociales, entendait – je tiens à le souligner, par un travail collectif rigoureux et studieux – répondre à la nécessité de parer à cette urgence.

Parallèlement, plusieurs propositions de loi ont été déposées, dont celle du groupe CRC. Le nouveau gouvernement s’est ensuite saisi du sujet pour présenter un projet de loi tenant compte de certaines recommandations du groupe de travail mais aussi de certaines des sept propositions de loi.

En déposant une proposition de loi dès le 25 mai, le groupe CRC avait pour but de proposer la définition du harcèlement sexuel la plus protectrice possible pour les victimes, dans la limite des exigences constitutionnelles, afin de ne pas encourir une nouvelle censure.

Nous disposons, certes, d’une définition européenne donnée par les directives du 23 septembre 2002 et du 5 juillet 2006, mais la reprise, mot pour mot, de cette définition ne va pas totalement de soi. En effet, le Sénat a fait valoir à deux reprises, pour certains de ces éléments, que cette définition, d’une part, paraissait difficilement compatible avec les principes qui fondent notre droit pénal ; d’autre part, qu’elle procède d’une approche différente de celle du droit interne en ce qu’elle assimile le harcèlement à une discrimination. Elle nous a néanmoins servi de base pour élaborer notre proposition de définition.

Nos interrogations ont porté sur l’élément matériel de l’infraction, sur l’élément intentionnel, sur la question de la peine et sur celle de la charge de la preuve.

Les éléments de réponse apportés nous ont permis d’aboutir à cette définition : « Constitue un harcèlement sexuel tout comportement à connotation sexuelle qui porte atteinte à la dignité d’une personne, ou crée un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant, répété ou revêtant un caractère manifeste de gravité ».

Tout d’abord, concernant l’élément matériel de l’infraction, notre souci a été de ne pas nous livrer à une énumération des formes du harcèlement sexuel. De fait, une telle liste présenterait, au total, un caractère restrictif, puisqu’elle conduirait à considérer que « les actes harcelants » qui n’y figurent pas sont autorisés. De plus, on peut craindre que l’imagination des agresseurs ne la déborde rapidement.

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