Intervention de Christian Bourquin

Réunion du 11 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Christian BourquinChristian Bourquin :

Nous projetons aussi de montrer l’exemple à l’échelle de notre institution en obtenant la certification « égalité professionnelle hommes-femmes » décernée aux collectivités. Bien entendu, nous sommes vigilants pour que les femmes soient en première ligne dans les postes de direction. Ce n’est qu’un début, mais c’est absolument nécessaire.

Et pourquoi, madame la ministre, ne pas généraliser ce type d’initiatives, qui visent à promouvoir l’égalité en traitant de front les phénomènes que tous les féministes, c’est-à-dire les femmes et les hommes de progrès, veulent combattre ?

Avant de conclure, madame la garde des sceaux, j’aimerais évoquer un aspect du projet de loi.

Le texte issu des travaux de la commission opère une distinction entre deux formes de harcèlement sexuel. Si la nouvelle définition du harcèlement stricto sensu me semble relever d’une atteinte à la dignité de la personne, celle du harcèlement « assimilé » remplit pleinement les conditions caractérisant une agression sexuelle inscrites dans notre code pénal, qu’il s’agisse des moyens employés ou de la finalité poursuivie.

C’est précisément la confusion possible entre le nouveau délit « assimilé au harcèlement sexuel » et celui d’agression sexuelle qui m’inquiète. La question du chantage sexuel aurait mérité en elle-même un débat dans cet hémicycle. Le sujet est éminemment sensible et comporte de vrais enjeux pour les victimes. Nous l’avons tous affirmé : les victimes sont la priorité de nos travaux. Il ne faudrait pas, en éludant ce débat, ouvrir une brèche dans l’arsenal protecteur des victimes. Le risque n’est-il pas de voir des faits relevant de l’agression sexuelle sous-qualifiés en harcèlement ?

Je sais bien, madame la ministre de la justice, que les procureurs garderont la possibilité de retenir l’une ou l’autre qualification, et qu’ils n’hésiteront sans doute pas à citer les deux chefs de poursuite.

Je tiens aussi, madame la garde des sceaux, à saluer votre engagement de respecter le principe de séparation des pouvoirs, dans le prolongement des déclarations du Président de la République François Hollande, et du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Aucun ordre individuel ne devrait donc venir perturber les procédures. Aujourd’hui, soit, mais qu’en sera-t-il à l’avenir ? Je m’éloigne quelques instants du sujet pour vous dire, madame la garde des sceaux, que j’ai eu à subir un ordre individuel… J’en ai donc la lamentable expérience.

Aussi, je crois qu’il est de la responsabilité du législateur de rester vigilant. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement de suppression de la disposition du projet de loi créant le délit « assimilé » au harcèlement sexuel. J’ai en effet été convaincu par les arguments de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail, laquelle estime que le risque de voir des actes relevant de la tentative d’agression sexuelle sous-qualifiés est bien plus grave que celui d’attendre encore pour voir le délit de chantage sexuel inscrit dans notre droit.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, mesdames les ministres, cette difficulté que je me devais de soulever ne conditionne en aucune façon le soutien que j’apporte à ce texte. Je voterai donc ce projet de loi, tout comme mon groupe, le RDSE.

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