Intervention de Maurice Antiste

Réunion du 11 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Maurice AntisteMaurice Antiste :

Madame la présidente, mesdames les ministres, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, nous avons le devoir et la responsabilité de légiférer en urgence pour combler le vide juridique résultant de l’abrogation par le Conseil constitutionnel de la loi sur le harcèlement sexuel, considérée non conforme à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen prévoyant l’obligation de définir les crimes et délits en des termes suffisamment clairs et précis.

En effet, en mai dernier, à la suite du dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité, l’incrimination de harcèlement sexuel prévue à l’article 222-33 du code pénal a été déclarée trop floue et comportant de nombreuses imprécisions quant à la qualification du délit.

Les conséquences de ce vide juridique sont dramatiques : tous les plaignants – il s’agit majoritairement de plaignantes – se retrouvent dans une situation impossible puisqu’aucune qualification pénale de remplacement, celle d’agression sexuelle, par exemple, n’est envisageable au vu des faits dénoncés. Cette abrogation a provoqué l’incompréhension et plongé dans une détresse plus grande encore des femmes ayant porté plainte pour harcèlement sexuel et osé parler, bravant ainsi, souvent au prix d’efforts extrêmes, les pressions et la honte.

En Martinique, et de manière générale dans les départements d’outre-mer, les femmes commencent à peine à oser dénoncer de tels actes. Le contexte économique difficile et le taux de chômage important favorisent, par ailleurs, ce silence des victimes. Les difficultés qu’elles rencontrent, la peur qui les habite, les effets catastrophiques du harcèlement sur elles et l’impunité dont bénéficient les harceleurs représentent autant de barrières difficiles à franchir…

L’urgence de légiférer est d’autant plus grande que l’article L. 1153-1 du code du travail, qui interdit « les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers », est dès lors susceptible de faire l’objet, à son tour, d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Oui, mes chers collègues, depuis dix ans, l’impérieuse nécessité de réformer cette loi, de mieux définir et encadrer un délit créé il y a vingt ans à la suite de l’adoption d’un amendement de la députée socialiste Yvette Roudy a régulièrement été soulignée, mais en vain ! Ce dossier majeur pour des milliers de femmes et d’hommes victimes de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail ou dans leur vie quotidienne n’a pas été traité.

J’évoquerai un exemple d’occasion manquée.

Lors du débat sur la proposition de loi relative aux violences faites aux femmes, en février 2010, l’Assemblée nationale avait adopté à l’unanimité une définition plus précise du harcèlement sexuel. En effet, celui-ci avait alors été défini par l’article 19 de cette proposition de loi comme « tout agissement à connotation sexuelle subi par une personne et ayant pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

Malheureusement, le 16 juin 2010, lors de l’examen de la proposition de loi par le Sénat, la secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité a soutenu, devant la commission des lois, un amendement déposé par un sénateur visant à supprimer cet article 19. C’est ainsi que, le 24 juin 2010, le Sénat a entériné sans aucune discussion cet amendement de suppression, ce qui a conduit à la censure du 4 mai dernier et à la situation d’aujourd’hui.

Dans mon action politique, j’ai toujours affirmé mon engagement en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes.

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