Madame Cartron, il ne faut pas opposer vision éducative et vision budgétaire. J'ai connu des réformes qui ont consommé de l'argent et donné peu de résultats. Le Président de la République offre une chance à l'école, ce qui confère au ministère de l'éducation nationale une responsabilité certaine. La France est très endettée. Des décisions difficiles devront être prises, y compris pour d'autres catégories de fonctionnaires, tout aussi dévoués à leurs missions que ceux de l'éducation nationale. Nous sommes le seul budget à bénéficier d'autant d'ouvertures de crédits au collectif. C'est une responsabilité, en termes de résultats et d'action, par rapport au reste de la nation. Au-delà des choix de Bercy, nous replaçons la pédagogie au coeur de nos pratiques. En vertu d'une tradition pédagogique française, nous avons un devoir d'exemplarité. Il serait inconvenant et incompréhensible pour nos concitoyens de gaspiller l'argent public, au moment où ils doivent se serrer la ceinture. Chaque dépense dans l'éducation nationale, qu'elle soit nouvelle ou ancienne, sera précisément évaluée et nous en rendrons compte à l'ensemble de la nation. Telle est ma responsabilité et je ne m'interdis pas de proposer des baisses de dépenses dans certains secteurs.
Sur les pré-recrutements, il n'y pas de raison, Madame la Présidente, de vous inquiéter de ce que nous ferons. Nous allons donner les moyens à ceux qui ne les ont pas aujourd'hui, de réaliser leur vocation enseignante, en leur permettant, dès la L3, de faire des études, ce qui coûte de 800 à 900 euros par mois pour un étudiant. Tel est l'objectif que nous nous sommes fixé. J'espère, dans les conditions budgétaires actuelles, pouvoir garantir à 30 000 étudiants d'accéder à ces emplois d'avenir, pour préparer les concours de l'éducation nationale. Le Président de la République a demandé en contrepartie qu'ils fournissent un travail, justifiant une rémunération. Nous réfléchissons à huit heures hebdomadaires environ.
La formation en maternelle sera rétablie. Il existe un module de 70 heures. Nous publions un rapport de très grande qualité de l'inspection générale, pour avancer sur ce sujet. Nous ferons très attention au cycle pré-élémentaire, qui peut créer beaucoup de troubles chez l'enfant. En voulant faire écrire des enfants de moyenne section, on invoque des problèmes de motricité pour les envoyer consulter des médecins... C'est un enseignement très particulier. Nous avions, par tradition, une école maternelle excellente, dont beaucoup a été conservé. Essayons de la retrouver ! Quant à l'accueil des moins de trois ans, nous sommes tombés bien bas. N'allons pas trop vite ! Sans céder aux excès de langage de M. Darcos, procédons progressivement, avec prudence.
L'une des difficultés auxquelles est confronté l'enseignement professionnel tient à la réforme en cours. Les enseignants et les parents sont las de ce bougisme. Nous poursuivons de grands objectifs. Je ne suis pas pour tout rouvrir en même temps, alors que nous ne disposons même pas d'évaluations justes de certaines réformes. Nous avons déjeuné hier avec le Président de la République, lors de la réception à l'Élysée des titulaires de mentions Très Bien, dont de nombreux bacheliers de l'enseignement professionnel. Il est très sensible à la baisse de six points que vous avez évoquée. Faisons la part des choses, mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain !
L'une de nos premières préoccupations est l'évaluation des élèves et des professeurs. Nous allons mener une réflexion globale. Le dispositif actuel n'est pas convenable. Ces derniers temps, la DGESCO (direction générale de l'enseignement scolaire) prescriptrice pédagogique, était aussi évaluatrice, se substituant à la DEP (direction de l'évaluation et de la prospective), ce qui fut source d'incompréhensions et de difficultés. Nous sommes revenus à des pratiques plus normales. Il faudra refonder l'évaluation, en la rendant indépendante du ministre, en permettant l'engagement des parlementaires ; il ne s'agit pas de manipuler les chiffres mais de faire prévaloir l'intérêt des élèves.
Sur le lycée et le lycée professionnel, je ne proposerai pas de réforme importante dans les mois qui viennent, nous n'avons pas de recul suffisant pour analyser ce qui est fait sur le terrain.
Sur les GRETA (groupements d'établissements), je vous demande de lire les propos du Président de la République et les miens, plutôt que tel texte qui circule. Nous avons réuni la semaine dernière les directeurs académiques. Nous suspendons la réforme des GRETA en GIP (groupements d'intérêt public). Nous nous donnons le temps de l'analyse. La loi Warsmann prévoit une traduction législative. Avant le printemps 2013, au terme des consultations avec l'ensemble des partenaires, que nous avons commencées, nous arrêterons les bonnes mesures.
L'innovation est un sujet majeur. Je me suis rendu immédiatement auprès des enseignants qui la pratiquent à Orléans. Nous devons reconnaître la qualité du travail accompli et ne pas décourager ceux qui se sont engagés dans cette voie, en peignant un tableau trop noir du système éducatif. Il est vrai qu'elle porte certains résultats. Les collectivités nous ont demandé de réfléchir aux expérimentations que nous mènerons dans le cadre de la loi, mais aussi du conseil de l'innovation, que nous remettrons en place, avec ma collègue George Pau-Langevin.
Sur « l'après-école », je trouve les élus locaux beaucoup plus allants aujourd'hui qu'ils n'ont pu l'être, réserve faite de leurs inquiétudes sur les finances de leurs collectivités...