Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 10 juillet 2012 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission entend M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale, et Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous sommes heureux de vous recevoir tous les deux, tant la curiosité est grande et l'ambition que vous nourrissez partagée sur tous les bancs. Nous sommes aussi très intéressés par la notion de réussite éducative qui nous mobilise tous, et souhaitons savoir comment nous pourrons vous aider dans ce domaine.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Comme vous le savez, l'éducation nationale est une priorité du Président de la République et du Gouvernement tant sur le plan budgétaire que sur le plan politique, au sens le plus noble du terme. L'analyse du Président de la République, que nous avons défendue durant les récentes campagnes électorales, part du constat du pessimisme de nos concitoyens quant à notre devenir collectif ; la France souffrirait davantage que d'autres pays européens d'une crise de l'avenir. Cela explique l'acuité des interrogations sur l'identité nationale française depuis le début du XXIe siècle, certains ayant été amenés à ne définir cette identité que dans le rapport à l'étranger, voire à l'immigration, rompant avec la tradition selon laquelle dans l'ensemble, depuis la Révolution française, notre identité est républicaine. De Condorcet au Conseil national de la résistance, cette identité nationale s'est en effet construite par l'école de la République autour des valeurs du libre examen, du jugement, de la connaissance et du savoir de l'école gratuite, obligatoire et laïque, qui rassemblent les Français, ce qui avait été malheureusement quelque peu perdu de vue.

La crise de l'avenir et celle de l'identité républicaine se croisent et renvoient toutes deux à la question de l'école, à la fois ciment national et porteuse de la France de demain. C'est ce qui a justifié que la jeunesse, l'école, l'éducation et l'instruction figurent, au-delà de la seule question de moyens, au coeur des priorités du Président de la République et du Gouvernement.

Notre action est destinée à rassembler les Français et les nombreux acteurs du monde éducatif. Nous sommes actuellement en période de concertation, en vue de l'élaboration d'un projet de loi d'orientation et de programmation appelé à être déposé à l'automne. Puis à plus long terme, il faudra s'assurer que la loi est bien appliquée, ce qui n'est hélas pas toujours le cas.

Notre analyse des difficultés du système éducatif est finalement assez simple, même si le terme de système est sans doute assez inapproprié pour qualifier notre école. Ce diagnostic, partagé par des personnalités très diverses, accorde la priorité à l'école primaire, réaffirmée par le Président de la République. Les classements nationaux et internationaux soulignent que nombre d'élèves entrant au collège rencontrent de grandes difficultés : les estimations vont de 15 % - c'est déjà beaucoup trop - à 40 %. Les processus de réparation étant coûteux, inefficaces et souvent discriminants pour ces élèves, il est évidemment préférable que les premiers apprentissages s'effectuent dans les meilleures conditions possibles, ce qui justifie qu'un accent particulier soit mis sur l'enseignement primaire.

Le taux d'encadrement des écoles élémentaires dans notre pays est le plus bas de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Si ce retard doit être rattrapé avec les moyens nécessaires, il ne pourra l'être véritablement qu'en satisfaisant une double ambition. Il s'agit à la fois d'une ambition pédagogique - exprimée par le principe : plus de maîtres que de classes - et d'une ambition de réforme en profondeur sur laquelle nous reviendrons dans les prochains mois. En substance, il s'agit de « primariser » un peu le système éducatif français, alors que notre souci de l'excellence conduit, dès la maternelle, à ne considérer chacun des niveaux que comme l'antichambre du suivant.

Le centre de l'action de ce ministère doit être la relation pédagogique si précieuse et si difficile entre le professeur et son élève. Nous avons l'ambition de mener une révolution copernicienne par rapport à un élitisme républicain qui a en réalité mené à la faillite des élites et à très peu de républicanisme. Aujourd'hui, nous ne contentons pas de reproduire les inégalités, nous les accroissons. Pour l'école maternelle, le Président de la République a insisté sur la nécessité de pouvoir davantage accueillir des enfants de moins de trois ans, après plusieurs années de régressions sur ce sujet. Je viens de faire publier un rapport de l'inspection générale sur ce sujet, et il y aura durant la concertation un groupe dédié à cette question. L'école maternelle est bel et bien un temps particulier, et non une simple école pré-primaire.

La priorité au primaire, qui se traduira dans les moyens alloués par la loi de programmation, recueille un consensus politique et aussi syndical puisque, pour la première fois encore, même les professeurs du secondaire reconnaissent la nécessité de mettre l'accent sur cette priorité.

Notre seconde orientation est évidente, à mon sens consensuelle mais complexe à mettre à oeuvre : il s'agit de la création des écoles supérieures du professorat et de l'éducation. Notre pays jouit d'une grande tradition de formation des maîtres qui a contribué à façonner notre école. Elle a bénéficié de personnels d'une grande qualité - conseillers pédagogiques, maîtres formateurs dans les écoles normales - en particulier dans le primaire. Elle a de plus permis la promotion républicaine de classes entières de populations à qui était enseigné un métier difficile.

En effet, enseigner dans un CP est aussi difficile que dans la plus grande des universités, et il faut accorder à ceux à qui nous confions cette tâche tout l'accompagnement et le respect nécessaires. Pourtant, la formation des maîtres et des professeurs a été profondément abîmée ces dernières années, et se révèle aujourd'hui disparate en fonction des académies. Parfois, certains professeurs arrivent avec des services d'enseignement complets sans avoir jamais été stagiaires, ni même avoir reçu de formation initiale ou en alternance ! Il est terrible de constater que de ce fait, notre pays n'arrive plus à recruter ses enseignants.

Mais qu'il n'y ait pas de malentendu : nous ne considérons pas qu'il faille revenir à l'état ex ante et que les instituts universitaires de formations des maîtres (IUFM) tels qu'ils avaient été mis en place en 1990 étaient satisfaisants. Les écoles supérieures du professorat et de l'éducation que nous projetons de créer ont vocation à créer les écoles de demain, au travers du rétablissement de l'année de stage, des formations en alternance et de la valorisation de personnels compétents dans l'acte d'enseigner, parallèlement à leurs savoirs universitaires. Le tissu de maîtres formateurs pour l'école primaire est toujours présent, bien qu'il ait été abîmé ces dernières années. Nous devons le constituer pour le secondaire et, après des discussions avec les syndicats du supérieur, j'ai même souhaité que, pour figurer sur les listes d'aptitude, les professeurs d'université passent aussi par ces écoles afin d'y partager un moment commun avec les autres professeurs.

Dans le fond, le système reproduit partout les mêmes ignorances des uns envers les autres. Certains de ceux qui considèrent qu'ils ne sont là que pour chercher nourrissent un certain mépris envers ceux qui se destinent à enseigner en école maternelle ou primaire. De la même façon, ce ne sont pas toujours les meilleurs qui, par le passé, ont été choisis pour enseigner aux professeurs. Il nous faut donc mélanger les cultures pour que les uns et les autres apprennent à se connaître et à se respecter. Enseigner est un métier, que ce soit à l'école maternelle, primaire, dans le secondaire et même à l'université. Il y a eu un moment heureux de la République où l'on croisait des professeurs du Collège de France dans les conférences des institutrices et des instituteurs, et où les programmes étaient élaborés en commun, ce qui n'est plus le cas malheureusement.

En outre, les expériences étrangères, comme celle de la Finlande souvent citée, démontrent que la réussite est au rendez-vous non seulement lorsqu'il y a plus de maîtres que de classes, mais aussi lorsque les carrières d'enseignants se caractérisent par une diversité des parcours et la possibilité de se consacrer à des travaux de réflexion et de recherche sur leur propre métier. Nous allons être rapidement amenés à élaborer les maquettes de ces écoles supérieures du professorat et de l'éducation pour une ouverture dès 2013. La logique de division des deux ministères qui a prévalu sous la droite, et qui a conduit aux difficultés que nous connaissons, doit être surmontée malgré le maintien de cette division dans l'actuel Gouvernement. Pour éviter les tiraillements, notre ministère travaille ainsi très étroitement avec le ministère de l'enseignement supérieur. Bien sûr, remettre en place une formation initiale digne de ce nom pour l'ensemble des professeurs est extrêmement coûteux, surtout lorsqu'on prévoit d'en recruter davantage, puisque si nous renouvelons les départs à la retraite nous aurons 35 à 40 000 professeurs à former chaque année.

Notre préoccupation porte aussi sur la façon d'amener aujourd'hui des étudiants à exercer le métier d'enseignant. Outre la pénurie de candidats, nous assistons à des évolutions sociologiques inquiétantes du fait de la mastérisation qui conduit à recruter des professeurs qui ont dû payer leurs études pendant cinq années pleines, alors que la condition étudiante se paupérise terriblement et qu'il y a une corrélation étroite entre les étudiants obligés de travailler pour payer leurs études et l'échec. Ce recrutement fait que les nouveaux professeurs, ne ressemblant pas beaucoup à leurs élèves, sont vite découragés et ne permettent pas la poursuite de cette promesse républicaine qui avait permis à des gens de milieux modestes d'entrer dans cette vocation, de jouer un rôle dans la cité, et de se construire eux-mêmes des destins différents. C'est en effet un bon exemple pour les élèves quand l'enseignant vient des mêmes quartiers. Nous cherchons donc à instituer des pré-recrutements, notamment par ces fameux emplois d'avenir, dont l'éducation nationale souhaite obtenir un certain nombre - le chiffre de 30 000 ayant été affiché pendant la campagne - pour permettre à des étudiants à partir de L3 de se destiner à ce métier.

La troisième grande orientation, de nature moins législative, concerne les rythmes scolaires. Après les rapports parlementaires, la consultation organisée par mon prédécesseur, la position de scientifiques ou de l'académie de médecine, personne ne peut plus se satisfaire que l'école de France offre aux enfants 140 jours de classe par an. C'est une violence considérable faite aux nouvelles générations, car tous ceux qui enseignent savent qu'il faut du temps pour apprendre et assimiler. Plus on est d'un milieu modeste, plus c'est à l'école que l'on trouve les éléments de ce savoir. Cela était déjà admis depuis des années, mais on a fait le contraire. Il faut désormais opérer une reconquête du temps scolaire. Nous n'avons pas assez de journées de classe et celles-ci sont trop chargées. L'intérêt des élèves étant en cause, il faut que nous soyons capables de surmonter un certain nombre d'intérêts particuliers pour permettre cette réforme sur laquelle mon prédécesseur était arrivé à un quasi-consensus. Nous travaillerons sur cette question avec insistance, pour aboutir. Il ne saurait toutefois être question de se contenter d'un diktat du pouvoir central. Il nous faut au contraire travailler avec les communes, les départements, les territoires qui jouent un rôle essentiel, ainsi qu'avec les associations et les mouvements périscolaires.

Afin que les orphelins de 16 heures ne deviennent les orphelins de 15 heures, nous voulons en effet articuler différemment le temps scolaire et le temps éducatif. Nous avons eu l'occasion de rencontrer l'ensemble des associations d'élus et le Conseil supérieur des territoires, qui n'avait été réuni qu'une fois mais qui le sera régulièrement tout comme le Conseil supérieur de l'éducation. Car l'école n'appartient pas aux professionnels de l'éducation nationale, mais à la nation toute entière.

Une réforme de l'école doit donc impliquer toute la nation, même si elle ne se fera pas sans ou contre les professeurs. Elle ne se fera pas non plus sans ou contre les parents d'élèves, ni les collectivités locales, les associations, ou les acteurs du monde économique. C'est pour cela que j'ai veillé à ce que la concertation permette d'associer tout le monde, faute de quoi nous connaîtrons de nouveau des réformes sans lendemain ! Cette mise en mouvement se fera dans le respect de chacun, notamment de l'enseignement privé.

Indépendamment de ces trois orientations, se pose aussi la question de l'orientation. Le Président de la République s'est engagé à constituer un service public territorialisé de l'orientation ; les faiblesses de notre système sont connues : elles tiennent aux orientations négatives et aux difficultés à faire travailler ensemble les différents niveaux. Les collectivités locales seront également étroitement associées à notre action.

Nous croyons aussi au rôle de l'Internet. Les collectivités locales ont assumé en grande partie leurs responsabilités en équipant les établissements, mais nous n'avons n'a pas su mettre au point les usages pédagogiques de l'Internet, même si des organismes tels que le CNDP (Centre national de documentation pédagogique) et l'ONISEP (Office national d'information sur les enseignements et les professions) disposent de compétences en la matière. La e-éducation est une façon formidable de démocratiser l'excellence et de préparer une France moderne. Si nous avons réussi à républicaniser la France par les salles de classe, nous devons aujourd'hui opérer une reconquête républicaine des écrans, et l'école peut le faire. Il y a aussi beaucoup à faire pour que les données pédagogiques soient accessibles et mutualisées, mais le ministère de l'éducation nationale n'a toujours pas d'intranet ! C'est un sujet sur lequel nous devrons avancer à marche forcée.

J'ajoute, en remerciant Mme la sénatrice Cartron pour son rapport sur la carte scolaire, que nous aurons à repenser complètement l'enseignement prioritaire du fait notamment de la multiplication des sigles et des dispositifs et des effets pervers qu'ils produisent. Nous devrons aussi reparler de la carte scolaire, de la mixité scolaire et sociale.

D'autres sujets sont sur la table à propos desquels je vous inviterai à une concertation. Votre présidente et certains d'entre vous étaient déjà présents à la première réunion, et beaucoup de choses restent à faire d'ici fin octobre, le Sénat pouvant, dans le cadre de ses prérogatives, se saisir d'un certain nombre de ces questions d'ici là.

Il y a aussi cette question du métier d'enseignant, abordée dans votre commission en particulier par Mme la sénatrice Gonthier-Maurin, qui est l'une de nos préoccupations pour l'avenir. A ce propos, le statut ou les horaires d'enseignement ne me semblent pas être une bonne entrée au vu des problèmes que nous avons déjà à résoudre. En revanche, la refondation de l'école nous conduira à reposer la réalité de ce métier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

La question du pré-recrutement a fait l'objet d'un grand intérêt de la part de cette commission, y compris sous d'autres présidences.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre délégué, chargée de la réussite éducative

J'apprécie d'être parmi vous, connaissant la qualité de travaux du Sénat, tels ceux de Mmes Gonthier-Maurin et Cartron.

Que signifie la réussite éducative ? Si la dénomination de mon ministère a pu susciter des commentaires ironiques, cette notion correspond pourtant à une réalité bien concrète pour les nombreux acteurs qui s'y consacrent. Alors que cette réussite est un objectif de notre système scolaire, force est de constater que chaque année 150 000 jeunes - dit-on - en sortent sans diplôme ni qualification, et donc avec des perspectives d'accès à l'emploi réduites. Lorsque j'étais jeune, l'on disait à ceux qui ne souhaitaient pas apprendre « l'agriculture manque de bras », mais on ne pourrait plus le dire aujourd'hui tant le métier d'agriculteur, comme d'ailleurs toutes les activités professionnelles, exige désormais des connaissances incontournables.

Non seulement, malgré le dévouement des enseignants et les moyens accordés, le système ne compense pas les inégalités, mais le plus préoccupant est qu'il les augmente. Les écarts constatés dans l'acquisition sont plus grands en troisième qu'en CM2, et la situation des zones prioritaires s'aggrave. Cet écart entre les intentions et la réalité place la France en très mauvaise position au sein de l'OCDE.

Nous devons repenser nos méthodes afin que, dans notre système, égalité et efficacité aillent de pair. Les enfants comme les parents se rendent bien compte que l'école ne respecte pas complètement les promesses du pacte républicain. Lorsqu'on a le sentiment que l'école vous élimine, cela peut alimenter une certaine amertume à l'encontre de ce pacte, et c'est alors l'ensemble de la cohésion sociale qui est en cause.

L'école ne pouvant résoudre toute seule les difficultés de la société, c'est donc à l'enfant, au futur citoyen dans sa globalité, que nous devons nous intéresser en prenant en compte l'ensemble des facteurs économiques, culturels ou liés à la santé qui influent sur sa réussite.

Mon premier travail portera sur ceux qui ont quitté le système scolaire, les décrocheurs, et notamment sur les moyens de les raccrocher.

Il concernera aussi l'orientation. Si cette dernière a pu donner lieu à des petites luttes feutrées, à propos de la répartition des compétences notamment, je sais en tout cas que l'orientation est souvent mal vécue par les jeunes. Lorsque partir en lycée professionnel est ressenti comme la mise sur une voie de garage, il y a démotivation qui conduit à l'échec. Nous devrons travailler avec les collectivités et en particulier avec les régions, compte tenu de leur rôle en matière de formation professionnelle.

S'agissant de la réussite des élèves en situation de handicap, si le principe de l'inclusion est excellent et que beaucoup a déjà été fait, rappelons qu'accueillir ces élèves dans une classe sans une assistance suffisante rend difficile le travail du professeur. Or, non seulement les budgets prévus pour reconduire ces accompagnements ne sont pas suffisants, mais en plus la qualification professionnelle, pourtant nécessaire, des personnes qui les encadrent n'est pas assurée. C'est un sujet sur lequel nous allons travailler avec Mme Carlotti.

Mon action devra en effet être interministérielle et transversale.

Elle s'accomplira avec le ministère de la famille, les difficultés scolaires de beaucoup d'enfants étant liées au contexte familial difficile, et avec le ministère de la ville qui gère conjointement avec nous la plupart des dispositifs d'éducation prioritaire. De même, je travaillerai avec le ministère de la justice, un certain nombre de nos gamins en difficulté relevant aussi de l'intervention de la protection judiciaire de la jeunesse, et avec le ministère des affaires sociales, puisqu'une grande partie de la protection de l'enfance relève de l'action sociale et des départements. L'action du ministère sera aussi menée main dans la main avec l'ensemble des acteurs tels que les mouvements d'éducation populaire. Il s'agit en fait d'un travail de pilotage prenant en compte ces diverses préoccupations.

La méthode retenue consistera de plus à étudier les innovations et expérimentations déjà menées, de façon à identifier celles qui sont susceptibles d'être étendues. Il ne s'agit donc pas du tout d'un ministère de l'éducation nationale bis, mais d'un ministère qui s'intéressera aux difficultés rencontrées sur certains sujets, ainsi qu'aux bonnes pratiques existantes.

J'aurai fréquemment l'occasion de venir devant vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Toutes ces questions étant suivies par trois rapporteurs budgétaires au sein de notre commission, commençons par Mme Françoise Férat, rapporteure d'un domaine qui fut parfois oublié, celui de l'enseignement agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Alors que sa contribution est forte à l'excellence et à la réussite scolaire, l'enseignement agricole a été l'objet de nombreux reports, gels ou annulations de crédits. Aussi, dans le cadre du prochain projet de loi de finances, conviendra-t-il de prendre en compte la singularité de cet enseignement afin de favoriser son développement, tant pour l'enseignement public que pour le privé. J'ajoute que nous avons eu l'an dernier quelques frayeurs sur le maintien du programme 143 au sein de la mission « enseignement scolaire ». Nous avons été obligés de batailler ferme !

Si la synergie entre le ministère de l'agriculture et celui de l'éducation nationale a progressé, des avancées sont encore possibles, surtout au plan local, l'étau budgétaire pouvant être desserré par une mutualisation des moyens. Il n'y a pas concurrence mais complémentarité entre les deux ministères, et ce travail en réseau est souhaité par de nombreux chefs d'établissement. Enfin, l'enseignement agricole pratique depuis toujours les expérimentations et innovations qui viennent d'être évoquées.

Monsieur le ministre, quelle est votre position face à cet enseignement d'excellence, dont je peux vous assurer qu'il peut apporter sa pierre à la refondation de l'école que vous appelez de vos voeux ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

C'est effectivement un sujet qui nous préoccupe dans le cadre de la préparation de la loi de finances, notamment parce que, si je n'ai pas la responsabilité budgétaire du secteur, je suis toutefois directement en charge du dossier des 60 000 postes. J'ai d'ailleurs demandé que vous soyez conviée à participer aux travaux de la concertation.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Je vous prie de m'en excuser. J'avais pourtant demandé à ce que vous y soyez personnellement associée.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

L'enseignement agricole, qui compte 13 000 postes et en a vu 1 000 être supprimés entre 2007 et 2012, formule des demandes légitimes qui seront prises en compte dans le budget 2013 et dans notre programmation sur trois ans, de façon très transparente et en bonne intelligence avec le ministère de l'agriculture.

Les méthodes pédagogiques de l'enseignement agricole doivent être regardées de près, car elles sont susceptibles d'en inspirer d'autres, ces remarques valant pour les établissements publics comme privés, entre lesquels je ne ferai jamais de distinction.

Enfin, le Président de la République nous ayant confié une mission à propos des territoires ruraux, nous avons veillé à ce que le maillage territorial soit un critère de répartition des 1 000 professeurs des écoles que j'ai été chargé de recruter sur liste complémentaire. Dans le cadre d'une procédure de répartition des postes, comme il se doit absolument transparente, je puis vous dire que le travail des DASEN (directeurs des services départementaux de l'éducation nationale française), en concertation avec les élus locaux, a abouti à ce que les zones rurales soient bien dotées. Sur les 700 fermetures de classes prévues à la rentrée prochaine, moins de la moitié auront lieu, ce qui est une très grande satisfaction pour le Président de la République et pour tous ceux qui considèrent que la cohésion sociale passe aussi par une cohésion territoriale.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

La parole est à Mme Françoise Cartron, rapporteure pour l'enseignement scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Monsieur le ministre, je voudrais, au nom de mon groupe, vous dire que vos propos nous ont fait beaucoup de bien. Certes, l'on constate un certain pessimisme, car des interrogations traversent le monde de l'éducation. Mais il y a aussi un très fort désir d'école de la part des parents, qui en attendent beaucoup pour l'avenir de leurs enfants, ainsi que de la part des enseignants qui, malgré ces années difficiles, ont conservé intact leur désir d'innover, de s'investir, ce qui doit s'accompagner de la reconnaissance de leur métier.

Nous étions habitués à une vision budgétaire et financière, et en vous écoutant, nous avons retrouvé une vision réellement éducative, c'est à dire centrée sur la mission essentielle de l'école, qui est la formation des jeunes, de leurs savoirs et de leur personnalité.

Nous nous retrouvons dans vos trois priorités. L'importance donnée à l'école primaire et maternelle avec la scolarisation avant trois ans va de soi, car c'est là que tout se construit, alors que l'on a eu par le passé l'impression que l'école maternelle servait de variable d'ajustement.

Vous avez rappelé qu'enseigner est un métier, ce qui est une évidence. A ce propos, il pourrait être utile de réintroduire, dans le cadre des écoles supérieures des professeurs, des éléments relatifs à l'enseignement en maternelle, qui est quelque chose de spécifique. Les pré-recrutements nous renvoient non sans nostalgie aux écoles normales, qui avaient permis à des milliers de jeunes issus de milieux défavorisés de faire des études et de s'engager dans un métier valorisé dans la société.

Sans revenir aux écoles normales, il serait très positif de revenir à la mixité sociale.

Vous avez lancé le chantier des rythmes scolaires ; la grande concertation en cours pose la question de la place de l'école dans la cité. Comment aborder l'après-école ? Pour les enfants des quartiers défavorisés, l'école est le seul lieu d'apprentissage. Des efforts très importants restent à accomplir, avec les collectivités locales, afin que l'école ouvre sur les mondes de l'art, du sport et sur tous ces champs qui permettent aux enfants de se construire.

Au Sénat, nous sommes très attentifs à la place des collectivités. S'il y a un chantier auquel il faut les associer, c'est bien celui de la semaine de quatre jours. Plutôt qu'une réponse unique, je me demande s'il ne faut pas la moduler selon les spécificités des territoires, ruraux, urbains ou relevant de la politique de la ville, par exemple.

Madame Pau-Langevin, la réussite est un objectif majeur. Quid des expériences innovantes menées dans certaines écoles ces dernières années ? Tout couler dans un moule unique, c'est ne pas leur faire de place. Certaines d'entre elles mériteraient d'être étendues. Des collèges, dans certains départements, ont réinventé le métier d'enseignant, le contenu des enseignements, la notion même de réussite. Cela nous renvoie au décrochage scolaire. Les résultats du bac illustrent la chute des bacs pros, qui m'interpelle. Ce n'est sans doute pas tant la conséquence de la réforme des trois ans que d'une orientation par défaut.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Notre rapporteure pour avis pour l'enseignement professionnel a justement la parole...

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Je compte aller au-delà, pour souligner combien je suis satisfaite de la priorité accordée par le Gouvernement Ayrault à la jeunesse, à l'école et à l'accès à la connaissance. J'aurais mille questions à vous poser ! Je vous en ai adressé directement quelques unes. Je retiens tout d'abord votre priorité : faire du primaire le grand moment de l'étude et de la reconstruction. Avant de parler de décrochage, il faut procéder aux réparations qui s'imposent. Je milite pour aborder très en amont la question de la construction du service public pour les enfants qui n'ont que l'école pour apprendre. Tous et toutes sont capables, à condition de construire, dès l'entrée à l'école, les processus d'apprentissage.

Vous avez annoncé, dans le cadre de la concertation, votre souci de remédier à la question fondamentale de la formation des enseignants. C'est au sein du collectif budgétaire que vous avez ouvert 89,5 millions d'euros de crédits supplémentaires au profit des missions de l'État, d'autant plus urgents que les difficultés s'accumulent sur le terrain. Suffiront-ils, dès la rentrée 2012, au regard des suppressions massives d'emplois prévues ? Vous proposez de créer 1 000 postes de professeurs des écoles. Les emplois créés dans le secondaire le seront sur les postes non pourvus. Ceux-ci sont plus de 940, pourquoi s'arrêter à 280 ? Quelle sera l'ampleur du braquet du projet de loi de finances pour 2013 ? J'aurais souhaité que le collectif dise un mot des RASED (réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté). Le précédent gouvernement a consacré 1,3 milliard d'euros aux heures supplémentaires. Cette manne peut-elle être tout de suite utilisée comme pompe d'amorçage pour les pré-recrutements, sachant que vous ne pourrez mettre en place les formations nécessaires si facilement ? Nous aurions besoin d'un état des lieux extrêmement précis. Je n'ai pas très bien compris comment vous souhaitez procéder avec les emplois d'avenir.

Comme Mme Cartron, j'ai constaté, au long de la mise en route de la réforme de l'enseignement professionnel, que tous les clignotants sont au rouge. J'en veux pour preuve les très mauvais résultats au baccalauréat. Même les professionnels s'interrogent sur la nature de la professionnalisation ! Le bac pro en trois ans, nous ne sommes pas contre, a priori. Les meilleurs peuvent en bénéficier. Mais cela déstabilise l'offre de formation, démonte l'articulation avec les CAP. Quid de la poursuite des études ? Les bacheliers professionnels pourront-ils suivre un BTS ? Cette réforme ne peut rester en l'état. Je milite pour que nous disposions d'un bilan précis, y compris sur le recul de six points.

Quelles leçons tirez-vous des expériences en cours, en particulier des écoles du socle - il y en a cinq dans mon académie ? Je suis très inquiète de la mise en place des masters en alternance. Dans le cadre de notre mission, nous avons recueilli des témoignages épouvantables de stagiaires. Et que va devenir le dispositif Éclair (Écoles, collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite) ? J'aurais bien d'autres questions...

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Vous allez épuiser le sujet ! Nous aurons d'autres séances de travail.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Madame Cartron, il ne faut pas opposer vision éducative et vision budgétaire. J'ai connu des réformes qui ont consommé de l'argent et donné peu de résultats. Le Président de la République offre une chance à l'école, ce qui confère au ministère de l'éducation nationale une responsabilité certaine. La France est très endettée. Des décisions difficiles devront être prises, y compris pour d'autres catégories de fonctionnaires, tout aussi dévoués à leurs missions que ceux de l'éducation nationale. Nous sommes le seul budget à bénéficier d'autant d'ouvertures de crédits au collectif. C'est une responsabilité, en termes de résultats et d'action, par rapport au reste de la nation. Au-delà des choix de Bercy, nous replaçons la pédagogie au coeur de nos pratiques. En vertu d'une tradition pédagogique française, nous avons un devoir d'exemplarité. Il serait inconvenant et incompréhensible pour nos concitoyens de gaspiller l'argent public, au moment où ils doivent se serrer la ceinture. Chaque dépense dans l'éducation nationale, qu'elle soit nouvelle ou ancienne, sera précisément évaluée et nous en rendrons compte à l'ensemble de la nation. Telle est ma responsabilité et je ne m'interdis pas de proposer des baisses de dépenses dans certains secteurs.

Sur les pré-recrutements, il n'y pas de raison, Madame la Présidente, de vous inquiéter de ce que nous ferons. Nous allons donner les moyens à ceux qui ne les ont pas aujourd'hui, de réaliser leur vocation enseignante, en leur permettant, dès la L3, de faire des études, ce qui coûte de 800 à 900 euros par mois pour un étudiant. Tel est l'objectif que nous nous sommes fixé. J'espère, dans les conditions budgétaires actuelles, pouvoir garantir à 30 000 étudiants d'accéder à ces emplois d'avenir, pour préparer les concours de l'éducation nationale. Le Président de la République a demandé en contrepartie qu'ils fournissent un travail, justifiant une rémunération. Nous réfléchissons à huit heures hebdomadaires environ.

La formation en maternelle sera rétablie. Il existe un module de 70 heures. Nous publions un rapport de très grande qualité de l'inspection générale, pour avancer sur ce sujet. Nous ferons très attention au cycle pré-élémentaire, qui peut créer beaucoup de troubles chez l'enfant. En voulant faire écrire des enfants de moyenne section, on invoque des problèmes de motricité pour les envoyer consulter des médecins... C'est un enseignement très particulier. Nous avions, par tradition, une école maternelle excellente, dont beaucoup a été conservé. Essayons de la retrouver ! Quant à l'accueil des moins de trois ans, nous sommes tombés bien bas. N'allons pas trop vite ! Sans céder aux excès de langage de M. Darcos, procédons progressivement, avec prudence.

L'une des difficultés auxquelles est confronté l'enseignement professionnel tient à la réforme en cours. Les enseignants et les parents sont las de ce bougisme. Nous poursuivons de grands objectifs. Je ne suis pas pour tout rouvrir en même temps, alors que nous ne disposons même pas d'évaluations justes de certaines réformes. Nous avons déjeuné hier avec le Président de la République, lors de la réception à l'Élysée des titulaires de mentions Très Bien, dont de nombreux bacheliers de l'enseignement professionnel. Il est très sensible à la baisse de six points que vous avez évoquée. Faisons la part des choses, mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain !

L'une de nos premières préoccupations est l'évaluation des élèves et des professeurs. Nous allons mener une réflexion globale. Le dispositif actuel n'est pas convenable. Ces derniers temps, la DGESCO (direction générale de l'enseignement scolaire) prescriptrice pédagogique, était aussi évaluatrice, se substituant à la DEP (direction de l'évaluation et de la prospective), ce qui fut source d'incompréhensions et de difficultés. Nous sommes revenus à des pratiques plus normales. Il faudra refonder l'évaluation, en la rendant indépendante du ministre, en permettant l'engagement des parlementaires ; il ne s'agit pas de manipuler les chiffres mais de faire prévaloir l'intérêt des élèves.

Sur le lycée et le lycée professionnel, je ne proposerai pas de réforme importante dans les mois qui viennent, nous n'avons pas de recul suffisant pour analyser ce qui est fait sur le terrain.

Sur les GRETA (groupements d'établissements), je vous demande de lire les propos du Président de la République et les miens, plutôt que tel texte qui circule. Nous avons réuni la semaine dernière les directeurs académiques. Nous suspendons la réforme des GRETA en GIP (groupements d'intérêt public). Nous nous donnons le temps de l'analyse. La loi Warsmann prévoit une traduction législative. Avant le printemps 2013, au terme des consultations avec l'ensemble des partenaires, que nous avons commencées, nous arrêterons les bonnes mesures.

L'innovation est un sujet majeur. Je me suis rendu immédiatement auprès des enseignants qui la pratiquent à Orléans. Nous devons reconnaître la qualité du travail accompli et ne pas décourager ceux qui se sont engagés dans cette voie, en peignant un tableau trop noir du système éducatif. Il est vrai qu'elle porte certains résultats. Les collectivités nous ont demandé de réfléchir aux expérimentations que nous mènerons dans le cadre de la loi, mais aussi du conseil de l'innovation, que nous remettrons en place, avec ma collègue George Pau-Langevin.

Sur « l'après-école », je trouve les élus locaux beaucoup plus allants aujourd'hui qu'ils n'ont pu l'être, réserve faite de leurs inquiétudes sur les finances de leurs collectivités...

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

La transparence doit nous guider. J'ai rencontré les présidents de conseils généraux, il y en a ici, je sais qu'avec eux, comme avec les grandes villes, un accord sera possible, dans la clarté, dès lors que nous obtiendrons certains résultats. Ma seule préoccupation est liée à l'observation suivante : chaque fois que l'on a décentralisé ou innové sans faire attention, les inégalités se sont accrues. Le Sénateur-maire d'Hallencourt ne me contredira pas : organiser une activité culturelle après 16 heures est plus complexe au fin fond de la Somme ou dans une zone urbaine difficile qu'en centre ville. J'en ai parlé avec le Président de la République : notre responsabilité est d'assurer la péréquation et la solidarité entre les territoires. Cette réforme ne se fera pas si elle n'est pas accompagnée de cette nécessaire solidarité. C'est grâce aux élus locaux, et non à l'État, que la dépense d'éducation a augmenté dans notre pays. Ils doivent être profondément associés à cette réforme. Le travail a été facilité au sein de ma formation politique. Je me porte garant de la péréquation

Dans une période de grande difficulté pour la France, Madame Gonthier-Maurin, le budget de l'éducation nationale augmente. C'est, je le répète, une chance et une responsabilité. Il est toujours facile de vouloir davantage, mais ce n'est pas toujours possible. Nous avons suffisamment pour ce que nous devons faire : les trois heures de décharge avant la création des écoles supérieures. L'endettement de la France fait peser sur nos successeurs notre propre gabegie. Aucun Président de la République n'a accordé une telle priorité à l'éducation nationale, difficile à vivre pour d'autres fonctionnaires. Le nombre de postes non pourvus s'élève à 545, après les 280 créations que nous avons décidées. Nous respectons l'autonomie des jurys. Ce n'est pas le Président de la République qui fait les listes d'admis aux concours, mais il peut inciter à ce qu'il y en ait davantage. Nos utilisons une disposition légale permettant aux admissibles à l'agrégation d'être reçus directement au CAPES, sauf pour les professeurs d'éducation physique. Je le dis devant les élus d'outre-mer : peut-être pouvons-nous ici ou là rajouter quelques postes. Mais nous avons le devoir de mettre devant les élèves, en attendant la remise en route des formations, des professeurs capables d'enseigner. C'est pourquoi nous nous en tenons aux mille postes sur les listes d'aptitude de professeurs des écoles et dans le secondaire, aux 280 postes, plus 100 conseillers principaux d'éducation. C'est le maximum que nous pouvions faire. Cela a un coût budgétaire. Il n'était pas question de remettre en cause l'efficacité pédagogique.

Pourrions-nous utiliser les 1,3 milliard d'euros des heures supplémentaires pour les pré-recrutements ? Ma mission est de réussir les réformes en cours, donc d'éviter de grandes manifestations de professeurs à la rentrée ! Ces heures supplémentaires servent à rémunérer les professeurs. Elles ne seront pas supprimées. C'est l'exonération de charges sociales qui est aujourd'hui en question et demain leur exonération fiscale, liée à la loi TEPA. Ces mesures ne sont pas encore prises, mais je les soutiens, au nom de l'emploi, ces heures supplémentaires représentant quelque 15 000 emplois et de leur répartition, qui est inégale. Les professeurs des écoles en ont très peu bénéficié, et dans le secondaire, elles sont allées davantage aux professeurs des grands lycées de centre ville qu'aux jeunes capétiens des collèges difficiles. La meilleure mesure de mon prédécesseur fut la revalorisation du métier. C'est dans cette voie que nous devons avancer si nous avons de l'argent à distribuer.

Quant au programme Eclair, je vous renvoie à la lettre que nous avons adressée à tous les enseignants. Nous y sommes défavorables. Nous l'avons dit durant la campagne. Des enseignants se sont engagés dans ces dispositifs. Nous avons été élus en mai-juin. Nous n'allons pas tout détruire pour prendre une revanche politique ! Nous allons remettre à plat l'enseignement prioritaire. Nous en constatons les effets pervers sur le terrain. J'ai demandé une mission d'inspection générale rapide, afin que la concertation soit saisie de son rapport. Nos engagements seront tenus.

Nous n'avons pas voulu interrompre les expérimentations en cours. Il faudra les évaluer. Ce qui va en direction de « l'école-socle » doit être favorisé

Une des clés de la réussite de l'école et de la Nation est le dépassement de certaines querelles, telle l'opposition entre pédagogues et Républicains : pour enseigner il faut un savoir, des compétences disciplinaires, mais aussi l'art de transmettre. L'école de Jules Ferry ne fut pas celle des blouses grises et du seul triptyque « lire-écrire-compter ». L'auteur des lois de 1881 et 1882 parle d'éducation « libérale », au sens des « arts libéraux ». Dépassons ces affrontements stériles ! Nous garderons de la loi de 2005 l'idée du socle, à revisiter, à harmoniser avec le brevet, le livret de compétences et les programmes. Nous regarderons les réussites des écoles du socle expérimentales. Au sein de cette grande maison, nous pouvons garder les expériences de terrain positives.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Après la qualité et l'exhaustivité de ces propos, je demande à mes collègues de maîtriser le ministre de l'éducation et de la réussite qui sommeille en eux pour poser des questions précises auxquelles vous puissiez répondre dans le temps qui nous est imparti.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je suis d'accord avec votre priorité à l'évaluation. En travaillant sur les rythmes scolaires, avec Serge Lagauche, du groupe socialiste et Pierre Martin, du groupe UMP, et au sein de la conférence nationale, nous avons acquis la conviction que cette question doit être abordée de manière globale. Les élus locaux se sont inquiétés de vos annonces du retour à la semaine de cinq jours et de l'allongement des vacances de Toussaint. La réforme des rythmes scolaires est un ensemble, qui doit être envisagée sur la journée, la semaine et l'année. La concertation a montré la complémentarité des temps scolaire, périscolaire et postscolaire.

Je m'étonne que vous n'ayez pas abordé l'éducation artistique et culturelle, alors que Mme Filipetti a annoncé avoir ouvert un grand chantier avec vous-même et Mme Fourneyron. Il est essentiel que les ministères travaillent ensemble sur ce sujet qui est aussi structurel et qui implique également l'enseignement artistique.

Le numérique est prioritaire. Il ne s'agit pas seulement d'infrastructures. L'éducation à Internet doit faire partie des programmes. Comment sera-t-elle mise en oeuvre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Merci, Monsieur le Ministre, de nous avoir fait partager votre grande ambition. La réaffirmation du métier d'enseignant s'appuie sur son évolution et la reconnaissance de la diversité des tâches. Quid du nécessaire travail en équipe ? Il faudrait l'inclure dans la formation des maîtres.

Sur les rythmes scolaires, je n'ai pas compris si nous revenons à 26 heures hebdomadaires, pour les enfants, ou si nous restons à 24 heures ?

Vous avez parlé de la place des collectivités locales, mais peu de celle des parents. Il faut les réconcilier avec l'école pour éviter les ruptures préjudiciables à la réussite des enfants.

La dynamique de la réussite éducative doit être partagée. A l'instar de la politique de la ville, elle est un facteur de cohésion sociale. L'accueil des élèves handicapés en milieu ordinaire est inscrit dans la loi. C'est un droit quasiment opposable des parents. Mais donne-t-il toujours la meilleure chance aux enfants soumis à un véritable parcours du combattant ? L'accompagnement humain des élèves est insuffisant. Le constat que nous dressons de la situation des AVS (assistants de vie scolaire) est consternant : ils rencontrent des problèmes de recrutement, de formation, de précarité. Je partage enfin les mêmes interrogations que ma collègue sur l'enseignement artistique et sur l'éducation artistique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Martin

Comme beaucoup dans cette salle, nous accordons une priorité à l'éducation nationale et particulièrement au primaire.

Depuis 1958, vous êtes le trentième ministre de l'éducation nationale et votre portrait trouvera sa place dans l'escalier du ministère. Une loi portera votre nom comme beaucoup de lois portent ceux de vos prédécesseurs. Siégeant au CDEN (conseil départemental de l'éducation nationale) depuis 1981, j'ai entendu beaucoup de réflexions, d'espoirs, d'ambitions et la vôtre est grande, mais à l'entrée en 6e, il y a toujours autant d'enfants qui ne s'en sortent pas...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Martin

Soyons attentifs à placer l'enfant au coeur de notre réflexion !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Quelles passerelles peuvent relier l'école et la vie associative, dans les villes comme dans les campagnes ? Les structures d'éducation populaire et les mouvements associatifs assurent un maillage des territoires, autour de l'école, car elles ont une vocation éducative et non seulement récréative. Leur rattachement au ministère des sports exigera la création de nouvelles passerelles dans les mois qui viennent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

J'ai apprécié l'épaisseur intellectuelle de votre intervention et les perspectives que vous avez tracées, sous-tendues, en filigrane, par l'inscription de votre action dans la durée. Il est temps de dresser un bilan d'ensemble, pour éviter les travers dénoncés par notre collègue Martin.

Le groupe RDSE se reconnait dans les principes que vous avez énoncés : « primarisation », création d'une école supérieure, rythmes scolaires. Vous avez employé les mots de reconquête, de refondation, de réussite : nous ne pouvons que partager ces objectifs. Vous avez indiqué le sens, la direction.

Une question me titille : pouvez-vous préciser ce que vous entendez par « l'échec de l'élitisme républicain » ? Ce fondement du lien social doit être repensé.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Nous aurons beaucoup d'éléments à vous communiquer pendant la concertation. Ainsi, en Haute-Garonne, j'ai mené une enquête auprès des 589 communes ; 220 m'ont déjà répondu. Des communes du département sont toujours à quatre journées et demi. Elles sont considérées comme des villages gaulois. Certaines d'entre elles ont reçu une lettre du directeur de l'académie de Toulouse, leur enjoignant de rentrer dans le rang en septembre 2012. Cela me paraît énorme. Je vous pose la question ici afin que votre réponse soit publiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Merci, Madame la Ministre, de nous avoir fait part de vos préoccupations sur le décrochage, révélateur d'un échec de notre éducation, le plus souvent lié à l'orientation. Je n'aime pas le mot « décrocheur » qui devrait désigner le responsable du décrochage.

J'avais évoqué avec votre prédécesseur un sujet tabou, qui ne cesse de m'inquiéter : la violence en milieu scolaire. L'école devrait être sanctuarisée, même si elle est le reflet de notre société. Quelques faits divers récents nous révèlent le degré historiquement préoccupant atteint par ce phénomène, heureusement peu fréquent.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Antiste

Mes questions procèdent de mes origines professionnelles et géographiques - j'ai été près de quarante ans professeur en Martinique. J'ai vu maintes et maintes réformes, qui ont malmené maints et maints enseignants et perturbé maints et maints élèves. Je souhaite que ce Gouvernement que je soutiens nous en amène une nouvelle, qui change très peu de choses. J'apprécie votre usage du mot refonder au lieu de réformer. J'ai participé ce matin, aux côtés d'autres collègues, à la concertation sur la refondation de l'école de la République.

L'égalité n'est pas l'uniformité. Je souhaite que la refondation soit polymorphe, le pays étant un brassage humain et culturel. La réussite éducative passe par une pluralité d'outils et de méthodes adaptés à la diversité de notre territoire. Refondons la conception qu'un couple ministériel peut en avoir : chez nous, il y a beaucoup de « décrocheurs », n'en déplaise à M. Domeizel. Il y a aussi des jeunes qui abandonnent l'école, faute d'accès à l'alternance, dès la fin de la scolarité obligatoire, parce que les entreprises ne répondent pas. J'espère que vous en tiendrez compte. Rassurez-nous ! Madame la Présidente, j'ai encore beaucoup à dire, puissiez-vous nous offrir une autre occasion d'entrer dans les détails avec M. et Mme les ministres !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

Nous vous invitons outre-mer ! Je viens de Guyane, où les chiffres sont malheureusement têtus. Au bac, nous subissons un écart de plus de 15 points avec les derniers résultats nationaux. Outre ceux qui décrochent, nous avons 5 000 enfants non scolarisés, parce que les collectivités locales n'ont pas les moyens de construire des établissements ou parce que nous manquons d'enseignants. Nous déplorons un taux d'échec de 80 % à l'évaluation en CM2.

Je m'associe aux félicitations adressées aux ministres. Il y a longtemps que nous n'avions entendu un tel discours fondateur. Compte tenu des réalités des outre-mer, une méthode spécifique sera-telle retenue pour la concertation ?

Les terminales générales et technologiques sont en pleine mutation. Quel sera le sort des redoublants qui devront repasser leurs examens l'an prochain ? Le feront-ils sur la base de leur cursus antérieur ou des nouveaux programmes ? Enfin, le dispositif des intervenants de langue maternelle autre que le français, important dans certaines zones, sera-t-il évalué et reconduit ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Mme la ministre a évoqué les inégalités sociales, qui ont un impact sur les inégalités scolaires, mais aussi sur la santé. Quelle sera la place de la médecine scolaire dans cette organisation redéfinie ? Ce secteur s'est beaucoup délabré récemment. Beaucoup de familles renoncent à se soigner ou à consulter des spécialistes.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Il serait contradictoire de lancer une concertation, en respectant les différents acteurs et de vous présenter une réforme toute ficelée. Le piège est évident, d'autant que vous me savez passionné ! Je m'en garderai donc. La réforme ne pourra être écrite qu'à l'issue de la concertation.

J'ai distingué trois priorités absolues, mais le nombre des sujets ouverts est considérable.

Madame Morin-Desailly, je suis en faute : Aurélie Filipetti aurait raison de m'en vouloir de n'avoir pas évoqué le grand plan en faveur de l'éducation artistique annoncé par le Président de la République. 22 ministères sont impliqués dans la concertation. L'éducation nationale est prioritaire et le ministère occupe un rang protocolaire important. Mes collègues qui éprouvent des difficultés budgétaires ont bien compris que s'ils veulent agir, en matière d'éducation populaire, de sports, de culture, d'Internet, mieux vaut se rapprocher très vite du ministère de l'éducation nationale. Je n'ai pu être exhaustif, mais j'accorde une grande importance à l'éducation artistique et culturelle. Cette question, qui doit être traitée en même temps que celle de la réforme des temps scolaires, ne relève pas du domaine législatif. Nous convoquerons une première réunion avec les DRAC (directeurs régionaux des affaires culturelles) dès la rentrée. Nous devons rapprocher les deux institutions.

Bien entendu, nous sommes pour la reconnaissance du travail d'équipe. C'est au pied du mur que l'on voit le maçon. Cela supposerait de poser la question du métier, des obligations de service, mais les demandes syndicales se situent plutôt en-deçà des 18 ou des 15 heures hebdomadaires qu'au-delà. Cette question sera ouverte. Il n'y a pas d'uniformité, certaines décharges peuvent être nécessaires dans certains endroits mais pas ailleurs. C'est une des pistes les plus fructueuses pour l'éducation prioritaire. La concertation va avoir lieu. Nous avons fixé des priorités. Nous ne sommes pas dans une période de richesse budgétaire, qui permettrait d'améliorer les traitements, de faciliter le passage à la hors-classe et d'enseigner moins ou différemment. Le Président de la République sortant a proposé dans la campagne d'augmenter les obligations de service de six heures, avec le succès que l'on sait.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Une expérience intéressante a été menée dans un collège de Seine-Saint-Denis, où les enseignants, avec l'accord du directeur d'académie, ont écrêté chaque heure de cours de cinq minutes, globalisées pour le travail en équipe et la concertation, sans modifier leur volume horaire.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

C'est une piste intéressante, en effet, mais vous connaissez la sensibilité des associations de professeurs aux volumes horaires des enseignements ! Je n'ai pas encore été saisi des problèmes spécifiques de chaque discipline, mais nous devons veiller à la cohérence de l'ensemble. Je crois profondément au travail en équipe, à l'évolution du métier d'enseignant, mais vouloir atteindre tous les objectifs en même temps sans fixer de priorités, nous ferait trébucher.

Toutes les études montrent un effritement de nos élites, une absence de promotion républicaine, cela fait partie des sujets de discussion avec les associations de professeurs de classe préparatoires. La diversité sociale n'a jamais été aussi faible aux concours d'entrée à Polytechnique et aux grandes écoles. Notre système est bloqué. Il faut le remettre en route. Les parents inactifs, employés et ouvriers en paient l'addition, alors qu'il n'est pas fait pour eux, mais pour assurer un tri social désobligeant...

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Je veux rebâtir du commun entre tous les enfants de France. C'est utile et seule l'école peut le faire.

Je suis préoccupé comme vous par la violence. Dans le plan de rentrée, nous avons créé, à la demande du Président de la République, 500 emplois de prévention et de sécurité. Il faut y faire face, chaque jour, avec intelligence, en sachant que l'école est un lieu particulier qui accueille de nombreux intervenants.

Nous pouvons débattre du terme « décrocheur », comme de celui de « discrimination positive ». L'éducation nationale doit apprendre à parler autrement de certains sujets. Les défaites se jouent souvent dans la langue. Nous ne sommes pas des « managers », nous n'avons pas besoin de « patrons », nous ne sommes pas là en permanence pour évaluer. Nous devons employer un vocabulaire différent. Il y a des situations particulières qui doivent être reconnues comme telles. Je souhaite que la concertation porte tous ses fruits. Mon approche vaut pour la Martinique comme pour la Guadeloupe et beaucoup d'autres territoires de France : nous ne ferons pas que du quantitatif. Nous avons besoin d'une discussion qualitative, y compris sur les professionnels de l'éducation, les carrières, les mutations. Je souhaite que les visites ministérielles ne soient pas seulement l'occasion d'annonces magnanimes de grands projets, d'ouvertures de postes ou d'établissements.

Nous allons regarder la question soulevée en Haute-Garonne. Ce peut être un quiproquo, ou l'application de la loi et des consignes précédentes tant qu'elles n'ont pas été changées. Madame Morin-Desailly, nous avons suivi votre conseil : notre approche est globale. Qui trop embrasse mal étreint ! Je veux bien tout traiter en même temps. Des consensus ont pourtant eu lieu sur des points particuliers. La réforme des rythmes est globale, mais nous assumons tout de même ces points, n'en déplaise à ceux qui se livrent au terrorisme intellectuel à l'encontre de nos élèves. Fût-ce en appliquant des procédures démocratiques inusitées depuis longtemps, nous sommes capables de bouger dans l'intérêt des élèves. La méthode est utile. Je sais pourquoi les choses n'ont pas été faites plus tôt, j'en ai parlé avec mon prédécesseur. Ce n'était pas une raison pour ne rien faire.

Les questions de santé et de médecine sont importantes. Nous allons créer 1 500 assistants de vie scolaire individuelle à la rentrée. Cela répond à la demande des associations. Il faut traiter ce problème avec précaution. Il y a beaucoup de souffrance des familles et une très forte demande sociale adressée à l'école : 10 000 postes budgétaires en cinq ans ! Les familles veulent un accompagnement individuel. La ministre déléguée y travaille avec la ministre chargée des personnes handicapées. Si nous pensons que des enfants autistes ou avec des troubles psychomoteurs peuvent être insérés à l'école, il faut que les personnes qui les accueillent y soient préparées. Ce n'est pas le cas ! Elles sont sans formation et lorsqu'elles ont réussi à faire leur travail, elles sont remerciées ! Mmes Carlotti et Pau-Langevin doivent travailler dans les mois qui viennent pour améliorer la qualification, le recrutement et la certification. Si l'école doit accueillir massivement, elle doit le faire bien. Cela supposera des engagements budgétaires.

En matière de santé scolaire, nous avons aussi une pente très forte à rattraper. Les infirmières sont un peu moins mécontentes, les médecins le sont encore. Ils doivent apprendre à travailler ensemble. Nous devons faire en sorte, là aussi, que les lois non respectées le soient à terme.

Je comprends votre frustration. Oui, le Président de la République a souhaité cette priorité. Oui, le temps long est indispensable. Nous ne sommes pas dans la nervosité, le temps court, l'émotion. Nous devons prendre le temps de travailler ensemble, de nous parler, d'échanger nos expériences. La Nation ne doit pas se diviser autour de son école, mais se réunir dans toutes ses composantes. C'est une grande responsabilité pour nous tous. Le travail sénatorial sera déterminant dans ce moment politique important pour notre République (Applaudissements).

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Merci d'avoir compris l'intérêt de cette commission pour l'école de la République. Vos propos ont été si consistants qu'il serait injuste de dire que les parlementaires restent sur leur faim, mais vous les avez mis en appétit pour renouveler l'expérience ! Vous serez toujours bienvenus.