Intervention de Aline Archimbaud

Réunion du 12 juillet 2012 à 15h00
Débat sur la politique commune de la pêche suite

Photo de Aline ArchimbaudAline Archimbaud :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, Joël Labbé a déjà développé ce matin le point de vue des écologistes sur la politique commune de la pêche. Je ne reviendrai pas sur ses propos, auxquels je souscris tout à fait. Néanmoins, en tant que membre de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, c’est sur la situation spécifique des territoires ultramarins que je souhaite m’exprimer.

Nous le savons, la pêche constitue un enjeu économique et social vital pour ces territoires. La Martinique est le premier département de France en matière de pêche artisanale, qui constitue 100 % du secteur et représente environ 3 000 emplois. En Guyane, la pêche est le troisième secteur productif. En Guadeloupe, le chiffre d’affaires de la filière est proche de celui de la canne à sucre ou de la banane. Et ce ne sont là que quelques illustrations de cette réalité.

Étant donné le nombre de personnes qui dépendent directement de la pêche, pour en tirer leur nourriture ou des revenus, je comprends et même partage les souhaits de mes collègues ultra-marins de voir leurs territoires exonérés de certaines contraintes que la politique commune de la pêche fait peser sur leurs économies et qui sont parfois si mal adaptées aux réalités de ces mêmes territoires.

Cependant, il ne faut pas oublier combien sont totalement imbriquées, outre-mer comme ailleurs, les questions environnementales, économiques et sociales. En effet, si la ressource halieutique n’est pas garantie, l’économie et l’emploi dans ce secteur ne le seront pas non plus.

On le sait, si les régions et collectivités d’outre-mer représentent 80 % de la biodiversité française, ces territoires, pour l’essentiel insulaires, sont également plus fragiles que les autres et davantage exposés aux conséquences du changement climatique, aux risques naturels majeurs et aux effets des activités humaines.

La politique commune de la pêche peut nous paraître contraignante, et elle l’est d'ailleurs en partie. Toutefois, il faut en avoir conscience, elle l’est beaucoup moins que les menaces que fait peser à long terme l’épuisement des ressources halieutiques. Au moment où certains prétendent que ces dernières seraient en bien meilleur état outre-mer qu’en métropole, il nous semble important d’appeler à la vigilance, car les connaissances scientifiques actuelles, limitées, n’offrent malheureusement pas à ce jour une vision complète de l’état de la ressource. L’IFREMER, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, est le premier à le déplorer : certains stocks outre-mer ne sont pas du tout suivis scientifiquement ; il faudrait sans doute mobiliser à cet égard un certain nombre d’énergies.

Nous, écologistes, ne partageons donc pas l’optimisme « mécanique » de certains en ce qui concerne la ressource halieutique ultra-marine. Nous considérons donc qu’il faut viser un double objectif : d'une part, s’assurer de la durabilité de la ressource halieutique ; d'autre part, faire en sorte que ces activités de pêche profitent en priorité aux territoires et aux populations de l’outre-mer, dans le respect d’un développement local endogène bien compris.

L’Union européenne pourrait en fait subordonner le paiement de ses aides publiques au respect de normes environnementales et sociales.

Par exemple, il s'agirait, outre-mer, de rétablir les subventions à la construction de navires pour les artisans pêcheurs ou de mettre un terme aux restrictions décidées en la matière – d’autres l’ont souligné avant moi –, pourvu que les nouvelles flottilles ainsi créées permettent une réduction de la dépendance énergétique des unités de pêche et la généralisation d’engins et de techniques plus « soutenables » pour l’écosystème, c'est-à-dire qui respectent les fonds marins, les habitats et les espèces.

Il s’agirait également de favoriser l’apprentissage et l’usage des bonnes pratiques, d’encourager les professionnels qui pêchent de manière plus écologique et socialement responsable.

Il nous paraît aussi important de nous battre pour les aires marines protégées, car il est nécessaire de se doter de tels outils pour favoriser le rétablissement des ressources halieutiques.

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