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...orteur, j'ai trouvé particulièrement intéressant le tableau des peines effectivement prononcées qui figure à la page 33 de votre rapport écrit. En effet, la question posée aujourd'hui est celle de savoir si les magistrats qui doivent juger les récidivistes ont aujourd'hui les moyens légaux de prononcer ces peines que souhaite introduire le Gouvernement et qu'il est convenu d'appeler les « peines planchers ». Or la réponse est évidemment positive, et cela vaut pour tous les magistrats, comme l'ensemble des données disponibles le montrent. Pourquoi, dès lors, présenter ce texte ? Le tableau dressé par M. le rapporteur permet d'apprécier la pratique des juridictions au regard des peines d'ores et déjà inscrites dans le code pénal. On y constate une distinction tout à fait saisissante entre les crim...
Et ils jugent comme ils doivent le faire, en toute liberté de conscience, au regard des éléments de l'affaire. C'est pourquoi, à ma connaissance, il ne s'est pas trouvé une seule association de magistrats pour réclamer ces peines planchers. Je laisse de côté les avocats - ils voient poindre un système de peines automatiques et se déclarent eux aussi opposés au projet de loi - car, ce qui importe ici, c'est la réaction de la magistrature tout entière. À ma connaissance, donc, et les auditions de la commission des lois l'ont confirmé, toutes les associations de magistrats, y compris celles dont les membres ont à s'occuper de mineur...
Quand le candidat, devenu depuis lors Président de la République, évoquait à la télévision les peines planchers, chacun de nos concitoyens pensait à des peines fermes s'appliquant automatiquement aux cas les plus graves. Mais une telle réforme n'était pas possible, et c'est pourquoi le projet de loi se présente sous des allures aussi contournées. C'est qu'elle se heurte au principe constitutionnel de l'individualisation des peines, c'est-à-dire à la faculté pour les juges d'adapter leurs décisions aux ca...
...00 personnes, à quoi pouvons-nous nous attendre alors que, nous le savons, certaines maisons d'arrêt - cela ne vaut pas dans les centrales ni dans les centres de détention - connaissent déjà des taux d'occupation de 120 %, 130 % ou 140 %, voire - j'ai pu le constater en les visitant - de 180 % ou 200 % ? Il s'agit là d'un constat biséculaire, et non d'hypothèses sur l'éventuel bienfait des peines planchers. La commission d'analyse et de suivi de la récidive, présidée par le professeur Jacques-Henri Robert, si elle avait rendu son rapport, aurait souligné de façon saisissante que les sociétés anglo-saxonnes, qu'elles soient américaine, canadienne ou britannique, qui ont eu fortement recours à la peine plancher constatent aujourd'hui que ses effets ne sont pas ceux qu'elles attendaient, puisqu'elle...
... se borne en effet à indiquer que l'on prononcera des peines dont le minimum est fixé par la loi. Grâce aux travaux conduits par la commission des lois et aux renseignements que nous avons obtenus de la direction des affaires criminelles, il ressort d'une façon irréfutable que les cours d'assises en France prononcent des verdicts de culpabilité et, ensuite, des peines très supérieures aux peines planchers figurant dans le texte. Par conséquent, la disposition prévue ne servira à rien.
... américains et le poids budgétaire des incarcérations expliquent en partie l'inversion de tendance dans le sens d'une moindre automaticité de la réponse carcérale. » Enfin, « La commission ne dispose pas d'informations équivalentes sur l'évaluation de la pertinence de ces systèmes dans les pays européens qui ont adapté les mêmes principes. » Quelle éclatante illustration ! On a voulu des peines planchers aux États-Unis et au Canada, où elles ont été largement pratiquées depuis onze ans, et le constat est celui d'un échec : une augmentation de la population carcérale avec la conséquence qu'elle emporte nécessairement, les prisons étant ce qu'elles sont, à savoir les foyers de la récidive et du crime : une récidive accrue, particulièrement des mineurs. On ne saurait dire plus objectivement que l'...
...res du Conseil de l'Europe souligne que les mineurs sont des « êtres en devenir » - c'est bien là le coeur du problème dont nous sommes saisis aujourd'hui - « et que, par conséquent, toutes les mesures prises à leur égard devraient avoir un caractère éducatif ». Le projet de loi qui nous est soumis ne modifie pas les articles que je viens de citer. J'en déduis que ses dispositions sur les peines planchers, lorsqu'elles sont appliquées aux mineurs, doivent être lues à la lumière des dispositions de l'ordonnance de 1945. Ce n'est qu'un rappel de principe, mais il est important : cette ordonnance constituant la loi spéciale applicable aux mineurs - chacun connaît l'axiome juridique sur la valeur des dispositions spéciales par rapport à celle des dispositions générales -, toutes ses dispositions spéc...
Je profiterai de cette intervention pour revenir sur l'amendement n° 30 que je n'ai en définitive pas exposé. La question qui est ici posée est importante, puisqu'elle concerne le cas du récidiviste qui réitère ou qui récidive - il ne s'agit en effet pas toujours d'un multirécidiviste. Or, dans ce cas, selon le principe de la loi, la peine plancher est applicable et il n'est prévu qu'une dérogation, à savoir « les garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion » ; je souligne que nous sommes ici en matière criminelle. Je tiens à rappeler que le principe de l'individualisation des peines est un principe fondamental, constitutionnel : on doit juger en considération des circonstances de l'affaire, de la gravité de celle-ci, de la per...
...ction spécialisée, la primauté des mesures éducatives et, dans le cas de recours à l'emprisonnement, une atténuation qui est de l'ordre de la moitié. Tels sont les fondements constitutionnels de la justice pour mineurs. Les conventions internationales et l'évolution internationale vont dans le même sens. Or, avec cet article 3, nous tournons d'un seul coup le dos à tout cela en créant des peines planchers qui comportent, certes, un niveau d'atténuation de peine, mais dont le ressort premier est l'emprisonnement, et c'est pourquoi j'ai utilisé l'expression « tourner le dos ». Voilà précisément ce que l'on ne doit pas faire ! Je tiens à dire que je suis de cette génération - triste privilège ! - que visait l'ordonnance de 1945. Datée du 2 février, elle n'a pas été prise après la victoire. La Franc...