M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le ministre, après la manifestation impressionnante de samedi dernier, réunissant des centaines de milliers de salariés du public comme du privé, et interrogé à ce propos il y a trois jours par François Hollande à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a déclaré être attentif aux demandes des syndicats.
Si les mots ont un sens, vous avez l'occasion de le montrer, puisque le débat parlementaire sur la question des 35 heures n'est pas terminé, le Sénat devant examiner prochainement cette question essentielle pour le monde du travail.
D'ores et déjà, la commission des affaires sociales du sénat a procédé aux auditions nécessaires. Celles-ci font apparaître qu'aucune organisation syndicale, y compris patronale, à l'exception notable du MEDEF,...
M. Josselin de Rohan. Ah bon ?
M. Jean-Pierre Bel. ...ne demande une deuxième remise en cause des 35 heures, après la loi Fillon dite « d'assouplissement ».
Par conséquent, monsieur le ministre, après la loi de 2004 relative au dialogue social, texte voté sur l'initiative de ce Gouvernement et qui mentionne qu'aucun nouveau projet de loi ne peut intervenir sans concertation préalable - ce qui, en l'occurrence, vous le savez bien, n'a pas été respecté -, comptez-vous vous donner les moyens de cette concertation...
M. René-Pierre Signé. Mais non !
M. Jean-Pierre Bel. ...ou bien allez-vous vous ranger derrière l'idée selon laquelle « les promesses n'engagent que ceux qui y croient » ?
Que doit-on attendre, monsieur le ministre, des déclarations faites il y a deux jours par M. Gaymard, ici présent, annonçant la création d'un conseil d'orientation sur les pistes de réforme du marché de l'emploi ? Allez-vous en saisir l'opportunité pour les 35 heures,...
M. René-Pierre Signé. Non !
M. Jean-Pierre Bel. ...ou s'agit-il d'un simple miroir aux alouettes ?
Vous êtes devant l'épreuve de vérité ! Le Gouvernement, et tout particulièrement le Premier ministre qui a l'habitude des discours compassionnels, a ici la possibilité de mettre ses actes en conformité avec ses déclarations.
Pouvez-vous nous annoncer, après ce mouvement de grande ampleur, une initiative en direction des organisations syndicales ? Sinon, nous serons bien obligés d'interpréter vos propos, de comprendre que vous avez un sens du dialogue sélectif et que, selon vous, il existe deux types de partenaires sociaux : ceux que vous écoutez sans même avoir besoin de les voir, autrement dit le MEDEF, et ceux que vous voyez sans jamais les entendre, à savoir les organisations syndicales représentatives des salariés de ce pays.
Prenez garde, monsieur le ministre, de rester totalement sourd au mécontentement qui s'exprime et de vous faire le simple porte-parole d'une organisation patronale.
Enfin, dites-nous clairement, en essayant d'éviter la polémique sur l'héritage du passé,...
M. Dominique Braye. Et quel héritage !
M. Jean-Pierre Bel. ...quelle suite vous allez donner aux manifestations de samedi.
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail, et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, il ne vous a pas échappé que le jour même où l'Assemblée nationale, après de longs débats, votait une proposition de loi visant, d'une certaine manière, à moderniser les 35 heures (Applaudissements sur les travées de l'UMP) pour rendre cet acquis social compatible avec la compétitivité économique de notre pays, les syndicats et le patronat d'un pays voisin situé au nord de la France signaient, conventionnellement, quasiment le même accord. Ou alors, vous ne suivez pas l'actualité internationale et ce que font les partis socialistes européens. (Sourires sur les travées de l'UMP.) D'une manière générale, ils essaient de combiner l'aménagement du temps de travail dans les entreprises...
M. René-Pierre Signé. Il ne faut pas regarder ce qui se passe ailleurs !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. On peut regarder ce qui se passe ailleurs ! Vos amis socialistes, qu'ils soient britanniques ou allemands, tendent vers l'adaptation du temps de travail tout en préservant la compétitivité des entreprises.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Dominique Braye. Eh oui, cela vous dérange !
M. Jean-Marc Todeschini. Répondez à la question, monsieur le ministre !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Par conséquent, la question est extrêmement simple. L'Assemblée nationale a voté une proposition de loi. Le Sénat est maintenant saisi de ce texte. Le débat est ouvert. Vos commissions ont la possibilité d'entendre les uns et les autres et un débat en séance publique aura lieu ici même.
Dans le même temps, le dialogue social se poursuit.
M. René-Pierre Signé. C'est une grande nouvelle !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est ainsi que les négociations sur la pénibilité, que vous n'aviez pas entreprises, sont maintenant ouvertes.
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