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Jean-Pierre Bel
Question d'actualité au gouvernement N° 532 au Premier Ministre


Politique sociale

Question soumise le 7 octobre 2005

M. Jean-Pierre Bel. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, voilà deux jours, à l'appel de l'ensemble des organisations syndicales, plus d'un million de Français ont exprimé leur désarroi et leur colère.

Désarroi face à la baisse vertigineuse de leur pouvoir d'achat, conséquence d'une augmentation sans précédent des loyers, des carburants, des frais de rentrée scolaire et des frais médicaux, alors que, dans le même temps, les salaires ne suivent pas.

Désarroi pour ceux, nombreux, qui sont confrontés à la recrudescence des plans de licenciements. Je pense à Pechiney, Hewlett-Packard, Nestlé,...

M. René-Pierre Signé. La liste est longue !

M. Jean-Pierre Bel. ...Altran Technologies ou Flextronic, sans parler du marasme de l'industrie textile.

Désarroi des travailleurs des entreprises publiques comme EDF-GDF, dont l'outil de travail est livré en pâture à vos privatisations dogmatiques, désarroi des salariés de la SNCM, aujourd'hui dans l'impasse.

Si les Français ont manifesté leur désarroi, ils ont aussi exprimé leur colère.

Colère, monsieur le Premier ministre, de voir que les réponses que vous prétendiez apporter n'ont eu qu'un seul objectif : une culpabilisation de ceux qui subissent, accompagnée d'une complaisance accrue envers les nantis.

Colère, parce que vous ne répondez pas à leur question.

M. René-Pierre Signé. Effectivement !

M. Jean-Pierre Bel. Alors que des millions de nos concitoyens vivent dans la précarité, vous accentuez cette situation avec la création de vos contrats « nouvelles embauches » !

Alors que la hausse de l'énergie touche de plein fouet les salariés et les chômeurs, vous excluez ces derniers des mesures catégorielles - timides, il est vrai - que vous dispensez par ailleurs.

Quelle réponse avez-vous apportée aux problèmes rencontrés par les familles dans leur vie quotidienne ?

M. Alain Gournac. Et vous ?

M. Jean-Pierre Bel. Vous n'avez envisagé aucune revalorisation des prestations sociales, de l'allocation de rentrée scolaire, de l'aide au logement...

Par ailleurs, face aux trois millions de personnes mal logées et aux incendies dramatiques dans des taudis insalubres, pouvez-vous vous contenter d'expulsions brutales et médiatisées, en vous défaussant de vos responsabilités et en attendant de nouvelles catastrophes pour vous pencher sur cette question ?

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. Jean-Pierre Bel. Dans notre pays, de plus en plus de gens vivent dans des conditions précaires,...

M. Alain Gournac. Et la question ?

M. Jean-Pierre Bel. ... et vous, vous continuez à vous focaliser sur les 300 000 malheureux Français qui paient l'impôt de solidarité sur la fortune, en vous demandant comment les exonérer !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Les chiffres, dont toute la presse a fait état en témoignent : les plus riches sont toujours les grands bénéficiaires de vos projets de réforme fiscale et, à l'inverse, les millions de Français qui ont du mal à joindre les deux bouts restent les grands perdants.

Monsieur le Premier ministre, je vous ai écouté à plusieurs reprises avec attention. Vous dites que vous attendez nos propositions. Ce sera, certes, la responsabilité de la gauche de formuler un projet politique offrant un débouché aux luttes et à la mobilisation sociale.

M. Josselin de Rohan. Vous aurez du mal !

M. Alain Gournac. Vous ne proposez rien !

M. Jean-Pierre Bel. Mais, pour l'heure, votre esquive n'est pas une réponse. Dites-nous simplement et directement ce que vous proposez, non pas au MEDEF et à Mme Parisot, mais aux chômeurs, aux salariés et aux territoires aujourd'hui en grande difficulté, qui crient leur inquiétude, leur désarroi et leur colère !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - M. Gérard Delfau applaudit également.)

Réponse émise le 7 octobre 2005

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur Bel, dans notre pays, c'est vrai, nombre de nos compatriotes souffrent et s'interrogent.

Aucun, cependant, ne se sera retrouvé dans la caricature que vous venez de faire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Les contrevérités ne constituent pas une politique, alors que la lucidité en est le début : il faut regarder la vérité en face !

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas votre cas !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Or la vérité, c'est la préoccupation des Français face au problème de l'emploi et leur inquiétude face aux restructurations.

M. Jacques Mahéas. Provocation pure et simple !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Je n'oublie jamais que les Français ont dit « non » le 21 avril 2002 et le 29 mai 2005,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas la même chose !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... et je vous engage à faire le même exercice de mémoire, car cela nous aidera à travailler ensemble au service de la France.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Alain Gournac. Ils n'ont aucune mémoire !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Avec tous les ministres de mon gouvernement, ...

M. Yannick Bodin. Sauf ceux qui ont la migraine !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... parce que c'est un travail d'équipe, je suis à l'écoute de nos compatriotes.

Nous souhaitons défendre en toutes circonstances l'intérêt général...

M. René-Pierre Signé. Ah oui !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ... et non pas l'intérêt particulier ! Vous imaginez sans doute, monsieur Bel, un gouvernement fidèle à l'ambition des « deux cent familles »... Il faut remonter bien loin en arrière pour retrouver une telle vision de la part d'un gouvernement de droite !

Nous voulons apporter des réponses concrètes s'agissant de l'emploi et du pouvoir d'achat, et nous allons le faire vite, monsieur Bel ! Vous n'aurez pas longtemps à attendre ! La priorité, le coeur de l'inquiétude des Français, c'est l'emploi. C'est bien la priorité que nous avons définie pour l'action de ce gouvernement, et nous avons des résultats : 80 000 demandeurs d'emplois en moins au cours des derniers mois.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. René-Pierre Signé. C'est faux ! Ce sont des emplois précaires.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Il faut l'accepter ! Il faut que vous fassiez vos propositions et émettiez vos critiques à partir de cette réalité-là, à savoir celle d'une politique qui commence à obtenir des résultats.

Le cap du Gouvernement, c'est la croissance sociale. Pariez sur le dynamisme de notre économie ! Vous savez que nous disposons d'atouts, avec nos chercheurs - nous avons salué hier le prix Nobel de chimie, un Français (Exclamations sur les travées du groupe socialiste) - ...

M. René-Pierre Signé. Il s'approprie tout !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. ...et avec nos entreprises - parmi les cent premières entreprises mondiales, onze sont françaises.

M. Raymond Courrière. Elles délocalisent !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Nous avons des atouts, nous avons des capacités : il faut les défendre.

Cette croissance, loin de tout esprit de conservatisme- je vous invite à regarder vers l'avenir -, nous voulons la partager.

Oui, nous défendons une croissance sociale.

M. René-Pierre Signé. C'est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n'y est pas, la croissance !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. C'est une invitation faite à l'opposition pour qu'elle fasse elle-même sa propre analyse dns le but de porter un projet pour la France. La croissance que nous proposons est partagée par tous.

Nous travaillons à des propositions concrètes. La prime pour l'emploi sera augmentée de 50 %.

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Nous offrons la possibilité aux entreprises qui le souhaitent d'accorder à leurs salariés, au début de 2006, un bonus de mille euros.

Nous voulons véritablement que la France rassemble l'ensemble de ses forces pour gagner. C'est la clef du véritable combat d'aujourd'hui.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

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