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Dominique Braye
Question orale sans débat N° 1039 au Ministère de l'éducation


Répartition intercommunale des charges scolaires de l'enseignement privé

Question soumise le 4 mai 2006

M. Dominique Braye attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la répartition intercommunale des charges scolaires dans le cas de l'enseignement privé. L'article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004, modifié par l'article 89 de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005, pose en effet des problèmes d'application. Il lui demande de préciser qu'une commune de résidence d'un élève inscrit dans une école privée sous contrat d'association implantée dans une autre commune ne peut être contrainte de participer au financement des frais de sa scolarité, de même qu'elle ne peut y être contrainte lorsqu'un élève est scolarisé dans une école publique hors de son territoire, hormis les trois cas dérogatoires légaux (obligations professionnelles des parents, inscription d'un frère ou d'une soeur, raisons médicales). En conséquence, il lui demande quelles mesures il entend prendre afin d'assurer une parité de traitement entre l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat d'association pour la scolarisation des élèves hors de leur commune de résidence.

Réponse émise le 31 mai 2006

M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, auteur de la question n° 1039, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Dominique Braye. Monsieur le ministre, ma question traite des frais d'écolage dus par la commune de résidence à la commune d'accueil, qui reçoit dans ses écoles élémentaires des enfants ne demeurant pas sur son territoire.

En posant le principe d'un accord entre commune de résidence et commune d'accueil pour le financement de la scolarité des enfants fréquentant une école privée sous contrat située hors du territoire de leur commune de résidence, comme cela était déjà prévu en cas d'inscription dans une école publique située dans une autre commune, l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales semble avoir fait application d'un principe de parité entre enseignement privé et enseignement public pour la répartition intercommunale des charges scolaires.

Pourtant, monsieur le ministre, ce principe de parité n'est qu'apparent puisque n'ont pas été étendues à l'enseignement privé sous contrat l'ensemble des dispositions visant l'enseignement public. L'enseignement privé se trouve donc dans une position beaucoup plus avantageuse que l'enseignement public.

Ainsi, un maire qui peut refuser le financement des frais de scolarité d'élèves de sa commune inscrits dans l'école publique d'une commune voisine, au motif qu'il a organisé dans ses écoles tous les services nécessaires à l'accueil dans des conditions optimales des enfants de sa commune, se trouve néanmoins actuellement obligé de payer pour les enfants dont les parents ont fait le choix - leur choix ! - de l'école privée.

Cette disparité de traitement, en dehors de son injustice, entre les établissements d'enseignement sous statut public et sous statut privé, pénalise fortement les petites communes, notamment rurales, qui ont consenti des efforts considérables pour conserver une capacité d'accueil suffisante à leur école publique et pour créer des services périscolaires de cantine et de garderie permettant d'accueillir, dans les meilleures conditions, tous les enfants.

Cette disparité met aussi quelquefois en grand danger, vous le savez, monsieur le ministre, l'existence même de l'école publique communale, dont on ne soulignera jamais assez l'importance dans la vie de ces petites communes !

Ainsi, dans le département des Yvelines, sur les 8 900 élèves de l'enseignement primaire privé sous contrat, 3 900 sont inscrits dans une école privée située hors de leur commune de résidence.

Dans mon département, 230 communes sur 262 - soit près de 90 % - sont ainsi concernées, dont une grande majorité de petites communes rurales, pour lesquelles cette obligation de financement des écoles privées hors commune crée une très lourde charge financière supplémentaire et menace la pérennité de leur école publique.

Monsieur le ministre, trouvez-vous normal que l'enseignement privé soit ainsi favorisé par les dispositions en vigueur et que le financement de l'école privée soit porté à la charge du contribuable local lorsque ce dernier finance déjà l'école publique de sa commune, que celle-ci peut accueillir tous les élèves de son territoire, et ce dans d'excellentes conditions puisque tous les services ont été mis en place ?

Le choix de donner à ses enfants une éducation relevant de l'enseignement privé ou de l'enseignement public est une liberté fondamentale pour tous les parents - nous y sommes d'ailleurs très fortement attachés -, mais cela ne devrait en aucun cas impliquer pour les collectivités locales et pour les contribuables locaux une obligation de financer le choix de l'enseignement privé, sauf naturellement si, comme pour l'enseignement public, les communes de résidence n'ont pas mis en place toutes les conditions nécessaires à l'accueil optimal de leurs enfants !

Comment expliquer, monsieur le ministre, que les communes soient amenées à contribuer financièrement au fonctionnement des établissements privés sous contrat situés hors de leur territoire alors qu'elles ne sont pas contraintes de le faire pour les établissements privés situés dans leur périmètre ?

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je vais répondre !

M. Dominique Braye. Quelles mesures entendez-vous donc prendre, monsieur le ministre, pour rétablir une égalité de traitement entre les établissements privés entre eux et, surtout, entre l'enseignement public et l'enseignement privé au moment où de nombreux préfets - dont celui des Yvelines - ne savent pas comment appliquer ces dispositions dans leur département ou les appliquent de façon différente d'un département à l'autre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a pour objet d'assurer une meilleure application de la loi dite « Debré » qui prévoit, comme vous l'avez souligné, la parité du financement entre les écoles publiques et les écoles privées.

Avant même l'adoption de l'amendement déposé au Sénat par M. Charasse, le principe de la contribution des communes pour les élèves scolarisés à l'extérieur de leur commune de résidence s'appliquait déjà aux écoles privées comme aux écoles publiques.

Toutefois, ce principe n'était assorti d'aucun dispositif permettant de résoudre les conflits éventuels surgissant entre les communes.

Désormais, en l'absence d'accord entre les communes, le préfet pourra, sur le fondement de l'article 89, intervenir ainsi qu'il le fait pour l'enseignement public afin de fixer la répartition des contributions entre les deux communes, celle de départ et celle d'accueil.

Cet article vise à mettre en place un règlement des conflits entre communes et, je le souligne, ne modifie pas le périmètre de la compétence de la commune pour la prise en charge des dépenses de fonctionnement des écoles situées hors de son territoire, qu'elles soient publiques ou privées sous contrat, qui scolarisent des élèves résidant dans cette commune.
(M. Dominique Braye prend des notes.)

Voulez-vous que je répète cette phrase-clé, monsieur Braye ?

M. Dominique Braye. Je prenais des notes pour vous répondre, monsieur le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. La modification législative apportée par l'article 89 de loi du 23 avril 2005 vise, quant à elle, à préciser les limites de la contribution qui peut être mise à la charge de la commune de résidence pour un élève scolarisé dans une école privée sous contrat d'association située sur le territoire d'une autre commune.

L'article 89 de la loi du 23 avril 2005 prévoit que le coût par élève ne peut être supérieur à celui qu'aurait représenté pour la commune de résidence ce même élève s'il avait été scolarisé dans une école publique.

Des ambiguïtés sont apparues quant à l'interprétation à donner à cette disposition.

Une table ronde réunissant l'ensemble des parties concernées - l'Association des maires de France, les représentants de l'enseignement privé, le ministère de l'intérieur et le ministère de l'éducation nationale - s'est tenue sur l'initiative du Gouvernement.

Dans l'attente de la décision du Conseil d'État saisi d'un recours - elle sera probablement rendue d'ici à la fin de l'année -, cette réunion a permis de décider que chaque situation particulière serait examinée localement entre l'ensemble des parties concernées.

M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.

M. Dominique Braye. Monsieur le ministre, il s'agit d'un problème très important pour les petites communes.

Pour être scolarisé hors de sa commune dans l'enseignement public, l'élève doit avoir une dérogation du maire de la commune de résidence, sauf dans trois cas que vous connaissez. Si la dérogation n'est pas donnée par le maire de la commune de résidence, la commune ne paie rien.

En revanche, un élève qui va dans l'enseignement privé n'a pas besoin de dérogation, et la commune paie systématiquement !

Il y a donc une disparité entre l'enseignement privé et l'enseignement public.

Par ailleurs, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre, le périmètre est bien changé ! Nous demandions tout simplement une parité entre enseignement public et enseignement privé, afin que les maires qui ont consenti, avec l'argent du contribuable, de très gros efforts pour mettre en place des services de cantine, de garderie matin et soir, et qui ont la capacité d'accepter ces enfants sur leur commune, puissent les scolariser !

Si les parents font le choix de l'enseignement privé, c'est à eux d'en assumer la charge et non aux contribuables, d'autant que, dans les petites communes rurales, cette fuite ruine tous les investissements des mairies et met les écoles publiques communales en danger ! Or on ne rappellera jamais assez, monsieur le ministre, l'importance qu'a, dans ces petites communes rurales, l'existence d'une école publique communale !

Je voudrais donc que l'enseignement privé ne bénéficie pas d'un avantage et qu'il soit traité de la même façon que l'enseignement public, à la condition, naturellement, que les communes aient fait l'effort d'accueillir dans des conditions optimales tous les enfants !

M. Bernard Dussaut. M. Braye a entièrement raison et je l'applaudis !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Je confirme bien que le périmètre n'est pas changé et que les modalités d'application sont très difficiles.

Je rappelle à M. Braye que c'est au Sénat qu'a été voté l'amendement de M. Charasse, qui, dans son application, pose les problèmes que vous avez soulignés.

J'ai d'ailleurs cosigné avec le ministre de l'intérieur une circulaire pour demander aux préfets d'arranger les choses sur le plan local.

Attendons ensemble, monsieur le sénateur, à la fois les résultats du groupe de travail et la décision du Conseil d'État. Nous y verrons, je le pense, plus clair à ce moment-là.

M. Dominique Braye. M. Charasse a été dépassé par son amendement, nous le savons tous !

M. Michel Mercier. Le ministre n'avait pas opposé l'article 40 !

M. le président. Étant, à l'époque, rapporteur de la commission saisie au fond, je me souviens bien de ce débat !

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