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Gérard Le Cam
Question d'actualité au gouvernement N° 314 au Ministère de l'agriculture


Crise dans l'industrie laitière

Question soumise le 29 mai 2009

M. Gérard Le Cam. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ; elle concerne tout particulièrement la crise laitière qui met en péril des milliers d'exploitations agricoles et l'économie de nos régions rurales.

Aujourd'hui, tout encourage les transformateurs et la grande distribution à aller encore plus loin pour pressurer les producteurs de lait et abuser les consommateurs. La France libérale et l'Europe libérale ont soigneusement préparé ce contexte de crise et légalisé ces comportements inqualifiables.

En effet, l'Europe et l'État français ont décidé d'interdire la régulation des prix par la voie d'un accord interprofessionnel.

Ainsi, la loi de modernisation de l'économie livre les producteurs pieds et poings liés aux appétits des transformateurs et des grandes et moyennes surfaces, les GMS.

La révision de la PAC conduit à toujours plus de dérégulation, à toujours moins d'aides, le tout dans le cadre de l'OMC pour qui la loi de la jungle du commerce doit régner partout.

La suppression programmée des quotas laitiers répond aux attentes des pays européens les plus libéraux et réjouit la commissaire européenne à l'agriculture, Mme Mariann Fischer Boel, qui se contente d'expliquer la crise laitière par la crise de la consommation.

Le journal Ouest France vous citait mardi dernier, monsieur le ministre, et écrivait : « Il tonne aujourd'hui contre le prix insupportable du lait, mais il avalisait il y a un an la fin du système de régulation minimale des prix ».

Avec votre gouvernement, vous avez façonné et cautionné toutes ces orientations européennes et vous êtes pris à contre-pied, la main dans le sac, pourrait-on dire, à quelques jours du scrutin européen, par les contraintes du traité de Lisbonne vis-à-vis de la concurrence « libre et non faussée ».
(M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

Quels que soient l'issue des négociations d'aujourd'hui et les indices de tendance du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière, vous savez comme moi que rien ne sera réglé durablement.

Monsieur le ministre, mes questions sont précises.

Est-il possible, oui ou non, de garantir des prix rémunérateurs aux producteurs laitiers ?

Votre gouvernement envisage-t-il de légiférer pour prendre des mesures fiscales et commerciales coercitives s'agissant des marges des intermédiaires et, surtout, celles de la grande distribution ?

Le gagnant-gagnant producteurs-consommateurs est-il pour demain ou pour jamais ?

Il est temps de parler vrai et d'agir juste, monsieur le ministre : vous êtes attendu !
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Réponse émise le 29 mai 2009

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Le Cam, le Gouvernement est attendu, certes, mais encore faut-il qu'il le soit de manière sincère et sans procès d'intention !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Janine Rozier. Voilà !

M. Michel Barnier, ministre. Je ne peux pas vous laisser dire que la révision de la PAC, si c'est bien le bilan de santé que vous évoquez, aurait conduit à diminuer les aides, à déréguler. Ce n'est pas vrai, monsieur Le Cam.

M. René-Pierre Signé. À qui profite la crise laitière ?

M. Michel Barnier, ministre. Nous avons, durant ce bilan de santé, maintenu la totalité des outils de régulation. La preuve, c'est qu'on les utilise tous en ce moment, y compris d'ailleurs, je le dis à vos collègues du groupe socialiste sans vouloir polémiquer, des outils qu'ils voudraient supprimer – c'est ce que j'entends actuellement dans le débat européen – comme les restitutions, qui constituent des soutiens aux exportations, ainsi que le stockage et l'intervention.

Par ailleurs, s'agissant des décisions que j'ai annoncées, même s'il existe des difficultés dans tel ou tel secteur, on a bien voulu sur toutes les travées ici me donner acte d'une plus grande justice dans la répartition des aides agricoles.

Monsieur Le Cam, les aides pour les productions animales à l'herbe seront multipliées par quatre.

M. Yvon Collin. C'est vrai !

M. Michel Barnier, ministre. Cela intéresse en partie le secteur de l'élevage laitier.

M. Alain Vasselle. Et les céréaliers ?

M. Michel Barnier, ministre. J'ai proposé également 45 millions d'euros supplémentaires pour soutenir la production laitière dans les zones de piémont et de montagne.

M. René-Pierre Signé. C'est bien !

M. Michel Barnier, ministre. Je répondrai maintenant rapidement à vos questions, monsieur Le Cam.

Premièrement, si pour vous garantir les prix signifie que le Gouvernement fixe le prix, n'ayez pas trop de nostalgie, car nous ne sommes plus dans une économie administrée, monsieur Le Cam !
(Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP)

M. François Trucy. Bravo !

M. Michel Barnier, ministre. Luc Chatel et moi-même avons pris la décision de nommer des médiateurs et de proposer ce nouveau cadre de régulation.

Si vous entendez par garantir les prix le fait que l'État doit définir un cadre donnant aux agriculteurs qui livrent aujourd'hui leur lait sans en connaître le prix, les moyens de parvenir à plus de visibilité, à plus de dignité, aussi, les moyens d'être respectés et de négocier, alors, oui, je vous approuve, et c'est exactement ce que nous avons voulu faire ce matin.

Deuxièmement, sur la transparence, Luc Chatel mobilise en ce moment même ses moyens et ses services pour que nous disposions des données utiles, car ni le ministre de l'agriculture, ni Luc Chatel, ni les paysans n'ont peur de la transparence sur les prix et sur les marges.
(Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Nous allons accélérer les travaux de l'observatoire. Il a travaillé sur le porc, il travaille maintenant sur les produits laitiers, il travaillera également sur les fruits et légumes. Nous verrons ensuite comment évaluer les conséquences de la loi de modernisation de l'économie.

M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur le ministre.

M. Michel Barnier, ministre. Enfin, troisièmement, le Président de la République a mis en chantier un projet de loi de modernisation de l'agriculture sur lequel vous serez invité à travailler à la fin de l'année. Cela sera peut-être aussi l'occasion de créer de nouveaux outils, en tout cas pour la transparence.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)

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