M. Jean-Claude Carle appelle l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi sur la fiscalité applicable aux groupements d'employeurs mixtes.
En zones de montagne, où l'économie repose sur l'activité touristique, de nombreux emplois sont de nature saisonnière. Le statut de pluriactif des saisonniers, alternant souvent employeurs publics et privés, peut être source de difficultés, liées à la précarité de l'emploi. Une solution à cette situation réside dans la création de groupements d'employeurs, véritables outils de stabilisation des saisonniers. Ils permettent également aux employeurs d'embaucher des salariés qu'ils n'auraient pas les moyens de recruter seuls et de fidéliser une main d'œuvre sur des postes périodiquement récurrents. Associations de type loi 1901, leur souplesse est un avantage indéniable en période de crise.
La participation des collectivités et établissements publics à des groupements d'employeurs mixtes est devenue une nécessité, facteur de progrès social et de compétitivité des territoires. Toutefois, les services fiscaux considèrent que les groupements exercent une activité à but lucratif et doivent être soumis au régime des entreprises commerciales, dont la TVA. Cette fiscalisation est un obstacle à la participation des acteurs publics. Or, étant d'importants employeurs saisonniers, les écarter des groupements d'employeurs revient à les empêcher de contribuer à la sécurisation des parcours. Soulignons qu'un contrat de saisonnier, précaire, n'est pas assujetti à la TVA.
Pourtant, la décision ministérielle du 23 novembre 1981 étend l'exonération de TVA prévue à l'article 261-B du code général des impôts à certaines opérations, notamment aux mises à disposition de personnel ou de biens facturés à un prix n'excédant pas le montant des charges et qui sont effectuées au profit des personnes morales de droit public ou d'organismes sans but lucratif.
Par ailleurs, les groupements d'employeurs satisfont, à son sens, aux critères fixés par l'instruction fiscale du 15 septembre 1988 sur les impôts commerciaux. Leur gestion est désintéressée. Ils ne concurrencent pas des entreprises, les agences de travail temporaire, car ils satisfont des besoins de personnel planifiés, permanents et prévisibles. Le travail temporaire, répond à des besoins urgents, ponctuels et imprévisibles. Le contrat de mission ne peut avoir pour objet ou effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'employeur, au contraire des emplois des groupements, ceux-ci privilégiant les CDI.
Enfin, les GE n'exercent pas leur activité dans des conditions similaires à celles d'une entreprise : le prix correspond au coût de fonctionnement ; le service rendu, si l'on retient la fonction stabilisation des salariés et fidélisation de main d'œuvre, n'est pas assumée par le marché ; aucune action de publicité n'est engagée.
Or, certains adhérents étant soumis à la TVA, les groupemetns d'employeurs dans leur ensemble s'y voient assujettis. Serait-il possible de trouver un aménagement, tel qu'une sectorisation, qui ne reposerait pas sur les activités des uns et des autres mais sur leur statut ?
Il lui demande donc quelles mesures il serait disposé à mettre en œuvre pour exonérer de la TVA les collectivités territoriales et des établissements publics adhérant à un groupement d'employeurs mixte.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 590, transmise à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, dans les zones de montagne, dont l'économie repose sur l'activité touristique, de très nombreux emplois sont de nature saisonnière.
Nombre des travailleurs saisonniers concluent un contrat avec une commune ou un établissement public pour la saison d'hiver ou d'été et exercent, le reste de l'année, une autre activité. Leur statut de pluriactif peut être source de difficultés, liées à la précarité de leur emploi. Les employeurs, pour leur part, ne sont pas toujours sûrs de trouver un personnel adapté.
Une solution à cette situation réside dans la création de groupements d'employeurs, véritables outils de stabilisation des travailleurs saisonniers, dans la droite ligne des politiques de l'État et des régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Rhône-Alpes. Ce statut permet également aux employeurs d'embaucher des salariés qu'ils n'auraient pas les moyens matériels de recruter seuls et de fidéliser une main-d'œuvre sur des postes périodiquement récurrents.
En outre, constitués sous forme d'association de type loi 1901, les groupements d'employeurs sont des structures souples, ce qui constitue un avantage indéniable en période de crise.
La participation des collectivités et des établissements publics à des groupements d'employeurs mixtes est devenue une nécessité. Elle sera un facteur de progrès social et de compétitivité des territoires.
Toutefois, les services fiscaux considèrent que les groupements d'employeurs exercent une activité à but lucratif et doivent être soumis au régime de droit commun des entreprises commerciales, notamment à la TVA.
Cette fiscalisation est un obstacle à la participation des acteurs publics. Or priver les collectivités territoriales, qui sont d'importants pourvoyeurs d'emplois saisonniers, de la possibilité d'adhérer à un groupement d'employeurs revient à les empêcher de contribuer à la sécurisation des parcours.
Pourtant, la décision ministérielle du 23 novembre 1981 étend l'exonération de la TVA prévue à l'article 261 B du code général des impôts à certaines opérations, notamment aux mises à disposition de personnel ou de biens facturés à un prix n'excédant pas le montant des charges et effectuées au profit de personnes morales de droit public ou d'organismes sans but lucratif.
Par ailleurs, à mon sens, les groupements d'employeurs satisfont aux critères fixés par l'instruction fiscale du 15 septembre 1988 sur l'assujettissement aux impôts commerciaux.
Tout d'abord, la gestion de ces structures est désintéressée. De plus, contrairement aux services fiscaux, je considère que les groupements d'employeurs ne concurrencent pas les agences de travail temporaire, dans la mesure où ils ont pour but de faire face à des besoins de main-d'œuvre planifiés, permanents et prévisibles.
À l'inverse, le travail temporaire apporte une réponse à des besoins urgents, ponctuels et imprévisibles. Le contrat de mission ne peut donc avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'employeur. C'est strictement le contraire pour les emplois chez les adhérents des groupements d'employeurs, qui privilégient les contrats à durée indéterminée.
Enfin, les groupements d'employeurs n'exercent pas leur activité dans des conditions similaires à celles d'une entreprise. Le prix correspond au coût de fonctionnement ; le service rendu, si l'on retient la fonction de stabilisation de la situation des salariés et de fidélisation d'une main-d'œuvre sur des postes récurrents, n'est pas pris en compte par le marché ; aucune action de publicité n'est engagée.
Certains de leurs adhérents étant soumis à la TVA, les groupements d'employeurs dans leur ensemble s'y voient assujettis. Ne serait-il pas imaginable de trouver un aménagement, par exemple une sectorisation, qui reposerait non sur les activités des uns et des autres, mais sur leur statut ?
Je rappelle qu'une collectivité n'aura aucun intérêt à adhérer à un groupement d'employeurs, si le salaire et les cotisations sociales sont majorés d'une TVA non récupérable, alors qu'elle peut employer la même personne en contrat saisonnier précaire, sans TVA.
Monsieur le ministre, quelles sont les mesures qui pourraient être prises pour exonérer de la TVA les mises à disposition de personnel en faveur des collectivités territoriales et des établissements publics adhérant à un groupement d'employeurs mixte ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, qui est en déplacement à l'étranger pour signer un accord d'échange de renseignements en matière fiscale.
Vous avez raison de souligner le rôle important que jouent les groupements d'employeurs dans le développement de l'emploi dans des régions comme la vôtre, oserai-je dire comme les nôtres.
Vous relevez également que les collectivités locales et les établissements publics sont d'importants employeurs saisonniers et qu'ils créent un effet de levier, quand ils participent à des groupements d'employeurs avec des opérateurs privés. Encore faut-il que les mises à disposition de personnel qui sont opérées dans ces conditions ne soient pas soumises à la TVA.
Dès lors qu'ils agissent notamment au profit d'entreprises, les groupements d'employeurs sont considérés comme lucratifs et entrent dans le champ d'application de la TVA, indépendamment du caractère désintéressé ou non de leur gestion et de leur situation au regard des entreprises du secteur concurrentiel.
Des mesures existent pour exonérer de la TVA les mises à disposition de personnel. Ainsi, l'article 261 B du code général des impôts le prévoit pour les membres d'un groupement d'employeurs exerçant une activité qui n'est pas soumise à la TVA, quand ces mises à disposition sont à prix coûtant.
Cette dernière condition est bien sûr difficile à satisfaire lorsque participent aux groupements d'employeurs des opérateurs privés exerçant des activités saisonnières de tourisme. Toutefois, l'administration fiscale fait preuve de souplesse dans l'analyse du régime fiscal de ces organismes.
Ainsi, l'exonération de la TVA reste admise quand, parmi les adhérents au groupement d'employeurs, figurent des opérateurs redevables de la TVA, dès lors que leurs recettes soumises à cette taxe n'excèdent pas 20 %.
Par ailleurs, il est admis que les groupements d'employeurs peuvent réaliser des mises à disposition de personnel au profit d'opérateurs qui ne sont pas membres de la structure et qui sont assujettis à la TVA, avec cette limite néanmoins : les mises à disposition à des non-membres ne doivent pas dépasser 50 % du montant total des mises à disposition du groupement.
Pour les membres, les mises à disposition de personnel restent exonérées. Pour les non-membres assujettis à la TVA, les mises à disposition sont soumises à la TVA, mais celle-ci est déductible. Cette taxe est donc neutre. Ces assouplissements s'appliquent à tous les opérateurs.
Au-delà, l'exonération a encore été étendue pour les mises à disposition de personnel décidées au profit de personnes publiques ou d'organismes sans but lucratif qui ne sont pas soumis à la TVA.
Je vous le confirme. Depuis 1982, l'exonération de la TVA s'applique pour ces opérateurs, sous réserve que les mises à disposition soient facturées à prix coûtant et qu'elles aient lieu pour des motifs d'intérêt public ou social.
Les collectivités territoriales et les établissements publics qui participent à un groupement d'employeurs peuvent ainsi être exonérés de la TVA pour les personnels qui sont mis à leur disposition, même si les autres membres, les opérateurs privés notamment, ont plus de 20 % de leurs recettes soumis à la TVA.
Les aménagements déjà apportés au régime des groupements d'employeurs sont donc une solution efficace pour la mise en œuvre de groupements d'employeurs mixtes publics-privés. Il ne serait d'ailleurs pas possible d'aller plus loin sans risquer d'enfreindre les règles communautaires régissant la TVA.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous venez de m'apporter. Vous avez notamment souligné la souplesse dont fait preuve l'administration fiscale afin de favoriser l'emploi de salariés par des groupements d'employeurs mixtes. Toutefois, vous avez fait remarquer que certaines règles communautaires empêchaient d'aller plus loin, ce que nous pouvons regretter. Sans doute faudra-t-il faire évoluer la situation.
L'examen du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, que nous avons commencé hier, sera l'occasion de débattre de mesures sur les groupements d'employeurs mixtes que je proposerai, au nom de la commission spéciale, pour assurer le remplacement de salariés en formation. Ce pourrait être l'amorce, non d'une réforme du statut de ces organisations, mais d'une extension des facilités fiscales dont vous avez rappelé les modalités et les limites. Les groupements d'employeurs mixtes constituent une structure très intéressante tant pour le secteur privé que pour le secteur public.
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