M. Dominique Braye attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation sur la multiplication des demandes d'implantation de magasins de type « Drive » par les enseignes de la grande distribution, où les clients ayant passé commande par Internet viennent retirer les marchandises achetées dans un point de retrait « Express Drive », qui consiste en un bâtiment de stockage des marchandises. Or de telles installations ne sont pas soumises, pour leur implantation, à une autorisation de la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC). Les enseignes de la grande ditribution ont ainsi trouvé un moyen détourné d'augmenter leurs capacités de vente sans passage de leurs dossiers en CDAC. Ceci pose un grave problème quant à l'équilibre commercial au sein des villes et agglomérations, en fragilisant encore un peu plus un commerce de centre-ville en bien mauvaise santé.
Il lui demande donc quelles mesures il entend prendre rapidement pour contrôler et réglementer de telles implantations, dont le nombre est en pleine expansion.
M. Dominique Braye. Si vous me le permettez, monsieur le président, je voudrais au préalable féliciter Mme la ministre, qui répond à une série de questions dont aucune n'a trait aux responsabilités qu'elle exerce au sein du Gouvernement ! Je vous félicite donc, madame la ministre, pour votre omnicompétence… Mais je regrette parallèlement cet état de fait qui n'est pas particulièrement positif pour la Haute Assemblée et ne nous permet pas d'obtenir des réponses de la qualité que nombre d'entre nous sont en droit d'attendre.
Peut-être ne participerai-je plus à ces séances du mardi matin... En effet, monsieur le président, je n'ai pas pour habitude de poser des questions pour les faire simplement figurer dans mes bulletins à l'attention des grands électeurs ! J'essaie de poser des questions pour être constructif ! Mais je vois que cela a bien peu de chance d'aboutir.
Je souhaitais donc attirer l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation sur la prolifération anarchique d'un nouveau genre de magasins : les commerces de type « drive ».
Les principales enseignes de la grande distribution, ainsi qu'une chaîne spécialisée, ont trouvé avec ce concept un nouvel espace de développement commercial et de concurrence économique. Ce dynamisme commercial est certes louable et correspond, de toute évidence, à de nouvelles habitudes de consommation des clients, notamment avec le développement des commandes par Internet. Internet permet de se connecter au site marchand d'une enseigne de la distribution et de passer commande à distance, depuis chez soi, ce qui est indéniablement un progrès.
Jusqu'à récemment, les commandes étaient livrées à domicile ; or, l'idée du « drive », qui a déjà connu un certain succès avec les enseignes de restauration rapide, a fait son chemin auprès des enseignes de la grande distribution. Celles-ci sont en train de tresser sur la totalité du territoire national un maillage très serré de ces installations dans lesquelles le client vient chercher en voiture ses commandes.
Dans l'absolu, ce concept ne pose pas de problème ; mais en pratique, ces points de retrait sont des entrepôts de stockage de marchandises d'une certaine taille, presque toujours très inesthétiques, qui engendrent toujours une circulation très importante.
Or, c'est bien là que le bât blesse, puisque ces bâtiments, qui sont des annexes des enseignes de la grande distribution, échappent comme par magie, pour leur implantation, à toute autorisation, notamment à celle des commissions départementales d'aménagement commercial.
Les enseignes concernées, vous l'imaginez bien, se sont immédiatement engouffrées dans cette faille législative. Leur implantation se multiplie à grande vitesse, sans aucun contrôle sur le plan tant de l'équilibre commercial des villes que de l'augmentation de la circulation induite, sans parler des atteintes portées à l'environnement.
Je m'interroge d'ailleurs sur ce dernier point, madame la ministre : allons-nous laisser nos villes se dégrader dans les années 2010 et 2020, comme nous l'avons fait pour nos entrées de villes dans les années 1970 et 1980 ?
Il me paraît important et urgent de nous doter de moyens pour contrôler le développement de ce nouveau concept de distribution, au même titre que toute implantation d'une surface commerciale supérieure à un certain seuil est contrôlée par la commission départementale ad hoc. Je souhaiterais savoir, madame la ministre omnicompétente, quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour préserver l'équilibre commercial, toujours fragile, de nos agglomérations et territoires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord de vous remercier de vos félicitations et, surtout, de vous demander de bien vouloir excuser mon collègue Hervé Novelli, qui m'a chargée de vous répondre.
La notion de « drive » recouvre des réalités commerciales distinctes. Selon les cas, cette forme de distribution est soumise ou non aux dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce qui visent les projets soumis au régime des autorisations d'exploitation commerciale.
En effet, seules les activités commerciales donnant lieu à la création d'une surface de vente sont soumises à l'obtention d'une autorisation d'exploitation commerciale délivrée par les commissions d'aménagement commercial. Au regard des prescriptions de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972, une surface de vente est composée des espaces couverts et non couverts affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, à l'exposition de marchandises proposées à la vente, au paiement des marchandises, à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente.
Avec la généralisation de l'accès à Internet, les enseignes de la grande distribution assurent aujourd'hui la promotion d'une nouvelle forme de commerce au moyen du concept de « drive ». Il s'agit dans ce cas, pour le consommateur, d'effectuer ses achats sur Internet avant de procéder au retrait, dans un entrepôt aménagé à cet effet, des biens de consommation dont il s'est déjà porté acquéreur. Ce mode de consommation, à l'instar du « e-commerce », est assimilable, pour le secteur non alimentaire, à la vente par correspondance où la transaction s'effectue au domicile du client.
Ainsi, compte tenu de ses caractéristiques, ce concept commercial ne donne pas lieu à la création d'une surface de vente : ces espaces ne sont pas affectés à la circulation de la clientèle en vue d'effectuer des achats dans la mesure où l'acte d'achat a déjà été effectué, les clients venant uniquement retirer les produits dont ils se sont déjà porté acquéreurs. En outre, les marchandises présentes en ces lieux ne sont pas exposées ou proposées à la vente, mais déjà vendues et entreposées en vue de leur retrait.
En revanche, dans le secteur du bricolage, plusieurs enseignes procèdent actuellement au développement de « bâti-drive », le consommateur accédant au moyen de son véhicule à un espace, couvert ou non, en vue de procéder à l'achat de matériaux et à leur chargement. Dans ce cas, ces activités commerciales sont soumises au régime des autorisations d'exploitation commerciale dans la mesure où ces espaces répondent aux caractéristiques de la définition d'une surface de vente.
Enfin, sont également qualifiés de « drive » les espaces implantés dans les magasins où les commandes sont effectuées à partir de bornes, installées à cet effet, préalablement au retrait de la marchandise qui est payée sur place, aux abords d'un entrepôt. Ces surfaces sont soumises à l'examen des commissions d'aménagement commercial dès lors qu'elles prennent place dans un ensemble commercial d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, ou devant dépasser ce seuil par la réalisation du projet.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.
M. Dominique Braye. Manifestement, ce que je craignais est arrivé : Mme la ministre m'a expliqué ce qu'est un « drive », explication que j'avais préalablement donnée moi-même dans ma question, mais – et je le regrette profondément – elle n'a pas répondu au fond de la question !
Je crois, monsieur le président, que c'est devenu la règle de cet exercice : le représentant du Gouvernement ne répond jamais à la question ! Il fait certes un petit laïus de présentation, reprenant en général ce qu'a dit l'auteur de la question, mais il n'apporte pas la moindre réponse à de véritables problèmes de société !
Je ne sais pas si les choses peuvent continuer ainsi. Ce que je peux simplement dire, c'est que, pour ma part, je ne poserai plus de questions dans ces conditions-là. Je ne sais ce qu'il faut faire, et comment faire respecter la capacité de la Haute Assemblée à contrôler le Gouvernement ou à attirer son attention sur un point particulier. En tout cas, ce n'est pas par ce simulacre qui a lieu le mardi matin et auquel nous venons d'assister aujourd'hui que les choses avanceront !
Je remercie donc Mme la ministre de m'avoir lu les réponses que lui avaient préparées les services du ministère concerné, en regrettant qu'une fois de plus on ne réponde absolument pas à une question de société. Ce n'est sûrement pas ainsi, madame la ministre, que les choses vont avancer dans notre pays et que le Gouvernement acquerra de la crédibilité !
Voilà ce que voulait vous dire un sénateur qui appartient à la majorité et qui souhaite attirer l'attention sur ces dysfonctionnements majeurs portant atteinte à l'image du Sénat. Répondre ainsi – ou plutôt, ne pas répondre ! – à des questions que les sénateurs estiment pertinentes et auxquelles ils sont confrontés sur le terrain porte un grand discrédit à l'action du Gouvernement en général.
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