Mme Patricia Schillinger attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les inquiétudes des salariés de Peugeot scooters de Dannemarie qui ont récemment appris que leur usine allait faire l'objet d'un plan de restructuration.
Alors que la direction préfère parler de « réorganisation », les salariés dénoncent, eux, une fermeture qui n'ose dire son nom. Celle-ci devrait intervenir dès le second semestre 2012. En plus de représenter une menace sur la situation financière et familiale des 141 salariés que compte le site, cette cessation d'activité est aussi un coup dur pour la commune de Dannemarie et l'ensemble des communes avoisinantes.
En effet, située en zone rurale, cette usine contribue au dynamisme et au maintien du lien social dans le secteur, d'où la crainte des élus locaux d'assister avec cette fermeture au début d'une désertification.
Au regard de ce qu'a investi la collectivité pour favoriser l'implantation de l'usine Peugeot à Dannemarie, ainsi qu'en considération des efforts consentis par les salariés pour que prospère leur entreprise, cette fermeture apparaît comme inacceptable.
En conséquence, elle souhaiterait savoir ce que le Gouvernement envisage de mettre en œuvre dans le but de pérenniser l'activité de Peugeot scooters à Dannemarie et, ainsi, préserver cette activité dont dépend en grande partie le dynamisme économique de la zone.
Mme Patricia Schillinger. Je souhaitais attirer l'attention de M. François Baroin sur les intentions du groupe Peugeot scooters de fermer son site de Dannemarie, dans le Haut-Rhin, et, plus particulièrement, sur les inquiétudes que cette annonce suscite auprès des salariés de l'usine, mais également auprès des élus et des habitants du Sundgau, qui craignent pour le dynamisme et l'avenir économique de leur territoire.
Au début du mois de décembre, la direction préférait parler de réorganisation, alors qu'elle avait confirmé son intention de fermer le site de Dannemarie lors de la présentation d'un plan de restructuration durant un comité central d'entreprise qui s'est tenu dans le Doubs, le 25 novembre 2011.
Depuis, la direction s'est voulue rassurante en promettant qu'aucun salarié ne serait laissé de côté. Elle a ainsi annoncé le reclassement de 100 salariés vers le site de Peugeot Mulhouse - en fait uniquement une vingtaine - et Sochaux, ainsi que le reclassement de 40 salariés vers le siège de l'entreprise à Mandeure, dans le Doubs.
Cette proposition traduit l'incompréhension des dirigeants de l'entreprise quant à l'impact d'une telle fermeture, sur les salariés eux-mêmes, sur leurs familles et, au-delà, sur l'ensemble de la zone située autour de Dannemarie.
En effet, Peugeot scooters est le poumon économique de la ville et la solution proposée par le P-DG de Peugeot ne répond pas aux conséquences que provoquera cette fermeture dans un bassin économique que l'entreprise contribue largement à irriguer.
Par ailleurs, les solutions de reclassement avancées par la direction ne satisfont en aucune façon les salariés qui ne souhaitent pas travailler sur un site géographiquement éloigné de leur lieu d'habitation, ou encore être contraints de déménager.
De plus, les salariés ne sont nullement rassurés quant à la pérennité de leurs emplois lorsqu'ils observent la situation du site de Mandeure, également en proie à des difficultés, avec la délocalisation annoncée d'une grande partie des moyens de recherche et de développement en Chine.
Ce nouveau coup dur porté à l'industrie alsacienne suscite indignation et incompréhension auprès des habitants du département et auprès des élus, surtout lorsqu'on sait ce que la collectivité a investi pour favoriser le développement de Peugeot scooters à Dannemarie.
En effet, alors que l'industrie haut-rhinoise comptait près de 72 300 salariés au troisième trimestre de 2001, on n'en dénombre plus que 53 900 au deuxième trimestre 2011, avec un taux de chômage qui a lui doublé sur la même période, passant de 4,8 % en 2001 à 8,7 % aujourd'hui.
L'incompréhension est d'autant plus grande au regard de certains choix stratégiques opérés, voir de l'absence observée de stratégie, notamment lorsque l'on considère l'acquisition récente par La Poste de 3 000 scooters d'origine asiatique.
Enfin, le manque de coopération des dirigeants de l'entreprise dans le cadre de l'expertise comptable commandée par les syndicats laisse penser que, si la branche « scooter » peut être déficitaire, le site de Dannemarie n'en demeure pas moins rentable du fait de la croissance de son activité de sous-traitance de la branche automobile.
Monsieur le ministre, quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ? Entendez-vous rappeler à Peugeot sa responsabilité d'employeur et l'encourager à maintenir une activité industrielle pérenne sur le site de Dannemarie et, dans l'affirmative, quels moyens êtes-vous prêt à mettre en œuvre ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Maurice Leroy, ministre de la ville. Madame la sénatrice, je vous demande tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de mon collègue Éric Besson, actuellement retenu.
Comme vous, le Gouvernement est très attentif à la situation de chacune et de chacun des 141 salariés du site Peugeot Scooters de Dannemarie.
Il est aussi très attentif à l'avenir industriel de ce territoire. Comme vous le savez - vous l'avez d'ailleurs rappelé -, l'activité scooters du groupe PSA est déficitaire depuis maintenant onze ans et les ventes ont baissé de 30 % ces quatre dernières années.
Cette évolution est imputable non pas tant à une concurrence acharnée qu'à des changements d'habitude et de préférence des consommateurs.
En réaction à ces évolutions, PSA a mis en œuvre un plan pour renforcer sa gamme de produits, son réseau de distribution et son modèle de production.
C'est dans ce contexte que, en décembre dernier, Peugeot Scooters a annoncé à ses salariés de Dannemarie un plan de réorganisation de la production de scooters vers les sites de Mandeure et de Mulhouse. Cette activité restera donc bien en France.
Par ailleurs, il faut le rappeler, la démarche initiée par Peugeot Scooters reste très clairement fondée sur le principe du volontariat.
Tous les salariés de Dannemarie se verront proposer une solution de mobilité en Franche-Comté. Bien entendu, les salariés qui préféreraient une mobilité externe bénéficieront d'un accompagnement spécifique, notamment en matière de formation. Il faudra voir combien de salariés souhaitent volontairement bénéficier de ces mesures de mobilité, mais il semble que nombre d'entre eux aient déjà fait part informellement de leur souhait de se saisir de ces opportunités de mobilité.
C'est pourquoi le Gouvernement a demandé expressément à PSA de veiller au maintien d'activités industrielles durables à Dannemarie. Vous le savez, deux réunions sur la revitalisation du site ont déjà eu lieu en décembre avec l'ensemble des parties prenantes, notamment les élus concernés et l'État.
Une nouvelle réunion a été programmée hier même à la sous-préfecture d'Altkirch. Nous serons extrêmement attentifs aux moyens mobilisés par PSA dans ce processus. Nous attendons de Peugeot Scooters un comportement exemplaire en la matière et une responsabilité citoyenne.
Madame la sénatrice, sachez enfin que l'État mobilisera si nécessaire les aides à la réindustrialisation des territoires pour accueillir de nouvelles activités industrielles sur le site de Dannemarie.
La Franche-Comté, qui, rappelons-le, est la première région industrielle de France, conservera ainsi toute son attractivité.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J'espère toutefois ne pas devoir l'interpréter comme un aveu d'impuissance de l'État.
M. Maurice Leroy, ministre. Je n'ai rien avoué de tel !
Mme Patricia Schillinger. Cette impuissance est d'autant moins acceptable que le Président de la République déclare ne pas être « l'homme d'un nouveau Vilvoorde ».
Pourtant, dans mon département du Haut-Rhin, vous le savez bien, la liste des faillites industrielles est longue. Aussi est-il urgent d'agir et de repenser notre politique économique.
Par respect pour les collectivités territoriales, qui ont investi des milliers d'euros, il est urgent de réagir face au désengagement des grands groupes. Les élus ne veulent pas d'une nouvelle friche industrielle. Or, d'après ce que j'ai entendu hier, les grands groupes ne souhaitent pas investir dans le site, lequel restera donc vide dans les années à venir, puisque l'on sait très bien par ailleurs qu'il n'y aura pas de repreneur.
Pour la ville de Dannemarie, c'est un véritable échec ; pour les foyers concernés et pour la zone industrielle, c'est une nouvelle terrible, surtout au regard des formations qui étaient liées à l'entreprise Peugeot Scooters.
J'attends donc vraiment que l'État s'engage pour que ce site ne devienne pas une friche industrielle.
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