M. Jean-Patrick Courtois attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée de l'artisanat, du commerce et du tourisme, sur les conditions de l'autorisation d'exploitation commerciale délivrée aux projets commerciaux.
Selon les dispositions du code du commerce, les projets commerciaux (hors exceptions telles que les pharmacies, halles et marchés, commerces de véhicules automobiles ou motocycles) dont la surface dépasse 1000 m² doivent être présentés en commission départementale d'aménagement commercial. Le code du commerce précise aussi que sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier. Pour répondre à ces dispositions, les grandes enseignes déposent donc un seul dossier pour la création d'un hypermarché et d'une galerie marchande sur site.
Or, l'autorisation de la CDAC obtenue, rien n'empêche la fusion des boutiques de la galerie marchande pour ouvrir un ou plusieurs magasins de plus grande surface et de nature différente. Ces aménagements, qui modifient de façon substantielle la configuration du projet accepté par la CDAC, privent cette dernière de la maîtrise du développement commercial du secteur et mettent en péril l'avenir des magasins déjà implantés. En effet, la réflexion qui est conduite par la CDAC pour autoriser les projets commerciaux est fonction d'une adéquation entre le projet et l'analyse du marché. Par le stratagème de la fusion, de gros changements de nature des commerces et de distribution des surfaces sont ainsi réalisés dans les galeries marchandes. À dessein, certaines enseignes n'hésitent d'ailleurs pas à présenter à la CDAC des dossiers conformes aux attentes de cette dernière et à dénaturer ensuite le projet pour l'adapter à la réalité de leur objectif commercial.
Cette situation constituant un véritable détournement de la loi, il conviendrait de faire autoriser par la CDAC des projets clairement détaillés quant à l'objet et à la superficie de chacun des commerces aménagés dans l'ensemble commercial et d'imposer aussi une nouvelle présentation de dossier devant la CDAC pour toute modification d'aménagement. Pour ces raisons, il lui demande quelles mesures elle entend prendre au regard de cette question.
M. Jean-Patrick Courtois. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les conditions de l'autorisation d'exploitation commerciale délivrée aux divers projets commerciaux.
Selon les dispositions du code de commerce, les projets commerciaux, hors exceptions telles que les pharmacies, halles et marchés, commerces de véhicules automobiles ou motocycles, dont la surface dépasse 1 000 mètres carrés doivent être présentés en commission départementale d'aménagement commercial. Le code de commerce précise aussi que sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins réunis sur un même site et conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier.
Pour répondre à ces dispositions, les grandes enseignes déposent donc un seul dossier pour la création d'un hypermarché et d'une galerie marchande sur site. Or, l'autorisation de la CDAC obtenue, rien n'empêche la fusion des boutiques de la galerie marchande pour ouvrir un ou plusieurs magasins de plus grande surface et de natures différentes.
Ces aménagements, qui modifient de façon substantielle la configuration du projet accepté par la CDAC, privent cette dernière de la maîtrise du développement commercial du secteur et mettent en péril l'avenir des magasins déjà implantés. En effet, la réflexion conduite par la CDAC pour autoriser les projets commerciaux est fonction d'une adéquation entre le projet et l'analyse du marché.
Par le stratagème de la fusion, de gros changements de nature des commerces et de distribution des surfaces sont ainsi réalisés dans les galeries marchandes. À dessein, certaines enseignes n'hésitent d'ailleurs pas à présenter à la CDAC des dossiers conformes aux attentes de cette dernière et à dénaturer ensuite le projet pour l'adapter à la réalité de leur objectif commercial.
Cette situation constituant un véritable détournement de la loi, il conviendrait de faire autoriser par la CDAC des projets clairement détaillés quant à l'objet et à la superficie de chacun des commerces aménagés dans l'ensemble commercial et d'imposer une nouvelle présentation de dossier devant la CDAC pour toute modification d'aménagement.
Je vous serais reconnaissant, madame la ministre, de bien vouloir me dire les mesures que vous entendez prendre au regard de cette question.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme. Monsieur le sénateur, votre question est inspirée par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. Les nombreux élus, professionnels et représentants des commerçants que je rencontre sont très attachés à la stabilité du dispositif législatif, qui a permis une simplification des démarches administratives. Je ne souhaite donc pas réviser cette loi en profondeur. Cela ne veut pas dire pour autant que des ajustements ne sont pas nécessaires afin de prendre en compte certaines limites que nous observons, tout comme vous visiblement.
Sur le fond de votre question, sachez que les CDAC et la Commission nationale d'aménagement commercial vérifient la conformité de chaque projet avec les objectifs fixés par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. Elles statuent en dressant un bilan des effets positifs et des effets négatifs de chaque projet.
« L'analyse du marché » que vous évoquez ne relève plus aujourd'hui des objectifs pris en compte. En effet, depuis 2008, et en conformité avec la directive Services, tout ce qui aurait subordonné l'autorisation à une évaluation des effets économiques de l'activité a été exclu de l'instruction des dossiers. La réglementation est désormais fondée sur la planification urbanistique, avec des critères d'aménagement du territoire, de prise en compte du développement durable et de protection des consommateurs.
Contrairement à ce que vous affirmez, la marge de manœuvre du porteur du projet est limitée : il ne peut, en cours de réalisation du projet, modifier ni le secteur d'activité, ni la surface de vente globale, ni les enseignes éventuellement annoncées, sauf à redéposer une demande d'autorisation d'exploitation commerciale. Dans ces conditions, il n'est pas possible de « dénaturer », comme vous le pensez, un projet autorisé par la CDAC.
Vous appelez particulièrement mon attention sur la fusion de magasins. Sur ce point, j'irai même jusqu'à être d'accord avec vous, et je n'exclus pas de modifier la loi si des dérives sont observées en la matière. Mais, encore une fois, cette limite relève de la loi, car c'est elle qui autorise de tels regroupements de surfaces de vente lorsque les commerces sont voisins en posant des conditions cumulatives de surface : il ne doit pas y avoir création de surface supplémentaire et chaque regroupement ne doit pas excéder 2 500 mètres carrés ou 1 000 mètres carrés si l'activité nouvelle est à prédominance alimentaire. C'est cette même loi qui ne permet pas d'exiger des demandeurs qu'ils déposent un nouveau dossier en CDAC à la moindre modification, sans impact de surface.
Je pense que la vraie limite de la loi du 4 août 2008 est l'absence d'obligation de conformité pour le même projet entre l'autorisation accordée par la CDAC et le permis de construire. Il s'agit là d'un sujet de réflexion d'autant plus fort que la révision générale des politiques publiques a eu pour conséquence de réduire, voire de supprimer les contrôles qui permettaient de vérifier sur le terrain la cohérence entre le projet autorisé et la réalité de l'aménagement commercial.
M. Jean-Michel Baylet. C'est vrai !
Mme Sylvia Pinel, ministre. Nous devons également nous attacher à introduire une obligation d'examen de tout projet de fusion ou de modification importante des répartitions initiales de surface, tout en respectant les prescriptions du droit communautaire. À cet égard, monsieur le sénateur, un cadre ambitieux et clair aurait permis de mieux articuler aujourd'hui le droit de l'urbanisme commercial et l'urbanisme économique.
Devant de telles incohérences, mesdames, messieurs les sénateurs, il nous faut aujourd'hui combler les lacunes de la politique menée par la majorité précédente ! Nous le ferons dans une approche équilibrée entre les différents enjeux de simplification, de développement du commerce, de respect de l'environnement et de protection des consommateurs, mais également, et surtout, dans une démarche intégrant la concertation et l'écoute des parties prenantes.
M. Jean-Michel Baylet. Très bien !
M. Jean-Jacques Mirassou. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois. Madame la ministre, si je partage votre sentiment sur le fait qu'il ne faut pas changer la loi sur le fond - nous en sommes tous d'accord -, je vous engage à vérifier ce qui se passe dans les cités commerciales situées aux entrées de nos villes. Vous verrez qu'entre l'autorisation donnée par une CDAC et la réalisation du projet, disons six mois après - je ne vous parle même pas dans dix ans ! -, les choses ne se passent plus du tout de la même manière. Pourquoi ? Parce que deux magasins auront fusionné, parce qu'on aura fait sauter une cloison, parce que des modifications considérables seront intervenues et parce que, aujourd'hui, il n'y a aucun contrôle, ce dont, d'ailleurs, les CDAC se plaignent !
Si je ne siège pas personnellement à la CDAC, j'entends souvent mon adjointe, qui, elle, y va, me dire que, sur les halles commerciales, il ne sert à rien - strictement à rien ! - de faire partie de cette commission parce que chacun fait ce qu'il veut. Ainsi, les investisseurs présentent à la CDAC un dossier qui lui paraît éminemment sympathique et qu'elle accepte. Les porteurs du projet savent, dès l'origine, qu'ils ne feront pas les magasins tels qu'ils sont prévus dans le dossier. Ils feront autre chose ! Et je crois que la morale nous engage à défendre que la réalisation d'un projet déposé devant une CDAC doit être, sur le fond, conforme au dossier examiné.
Je le répète, je partage votre sentiment sur le fait qu'il ne s'agit pas de remettre en cause fondamentalement la loi. Mais il convient quand même de préciser un certain nombre de choses pour ne pas fausser complètement le jeu de la concurrence dans les magasins situés à l'entrée de nos villes.
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