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Stéphane Mazars
Question écrite N° 1463 au Ministère de la justice


Conséquences de la réforme de la carte judiciaire

Question soumise le 9 août 2012

M. Stéphane Mazars attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences désastreuses de la réforme de la carte judiciaire dans certains territoires ruraux.

Cette réforme de 2007, conduite par Mme Rachida Dati et s'insérant dans le courant de la révision générale des politiques publiques, n'a pas fait preuve de sa pertinence puisque selon le Rapport général n° 107 (2011-2012) de M. Edmond Hervé rédigé au nom de la commission des finances du Sénat, elle a coûté au minimum 367 millions d'euros alors qu'elle était censée réduire les dépenses de justice tout en conservant son efficacité.

Pour ce faire, de nombreuses coupes budgétaires ont été réalisées et en particulier dans des territoires ruraux avec comme exemple patent le cas de l'Aveyron. Le tribunal de grande instance (TGI) et le tribunal de commerce de Millau, les tribunaux d'instance de Villefranche-de-Rouergue, Espalion et Saint-Affrique ainsi que le conseil de prud'hommes de Decazeville ont ainsi été démantelés. S'agissant des procédures d'instruction criminelle, elles ont été transférées vers un pôle d'instruction à Montpellier, soit à plus de 180 kilomètres et pas moins de 2 h 30 de route depuis Rodez puisque il n'existe plus de liaison ferrée. Cet état de fait place le TGI de Rodez dans une triste situation puisque il est le TGI de France le plus éloigné de son pôle d'instruction alors que certains TGI ont conservé leur pôle d'instruction malgré une proximité évidente avec un pôle voisin. C'est en particulier le cas du pôle d'instruction de Montauban qui n'est situé qu'à 50 km du pôle d'instruction de Toulouse.

Par ailleurs la mise en œuvre du nouvel article 52 du code de procédure pénale au 1er janvier 2014 entraînera le transfert de tous les dossiers d'instruction pénale au pôle d'instruction de Montpellier, et ce pour tous les dossiers d'instruction et donc pour toutes les victimes de crimes ou délits sans exception.

En conséquence, il lui demande si elle entend pallier cette douloureuse situation pour la justice aveyronnaise et, en particulier, les difficultés matérielles auxquelles sont soumises les justiciables et notamment les victimes qui doivent parcourir de très nombreux kilomètres pour être entendues par un juge.

Réponse émise le 20 décembre 2012

La mise en œuvre de la réforme de la carte judiciaire a eu pour conséquences la fermeture de plusieurs juridictions du ressort de la cour d'appel de Montpellier et plus particulièrement de celles du département aveyronnais. La réforme de la carte judiciaire, toutefois nécessaire, a été faite dans la précipitation et pratiquement sans concertation. Elle a accentué les inégalités entre justiciables et a distendu les liens entretenus avec l'institution judiciaire. La mission d'information de la commission des lois du Sénat qui a rendu un important rapport sur cette réforme confirme ces considérations. Si ré-ouvrir un débat qui a laissé beaucoup d'amertume localement, ne paraît pas opportun, des aménagements au cas par cas en fonction des situations particulières devront être définis. Ainsi, la garde des sceaux a confié le 23 novembre dernier une mission à un conseiller d'État, un président de juridiction et une spécialiste de l'immobilier judiciaire afin d'apprécier la réorganisation de huit tribunaux de grande instance dont la suppression avait donnée lieu à des avis réservés dans un rapport du Conseil d'État lié au contentieux suscité par cette réforme. Par ailleurs, les gouvernements précédents ont cru pallier la disparition de ces juridictions par la mise en place de maisons de justice et du droit (MJD). Alors que les premières MJD étaient implantées dans des quartiers où l'accès au droit était difficile, ces nouvelles MJD, dites de « deuxième génération » l'ont été principalement dans des territoires ruraux. Elles ne disposent généralement pas de greffiers nécessaires pourtant à leur fonctionnement et sont orientées autour d'un contact visio-justice. La garde des sceaux a demandé aux services de la chancellerie de dresser le bilan de ces nouvelles implantations afin d'apprécier au cas par cas, en lien avec les élus locaux, les besoins des territoires afin de définir une politique moderne d'accès au droit. Pour pallier la disparition des juridictions d'instance, la ministre de la justice a demandé à ses services de réfléchir à une nouvelle organisation des juridictions au travers notamment le tribunal de première instance. Un groupe de travail est mis en place sur ce point. La réflexion est menée dans la concertation avec notamment les organisations syndicales. Le développement des guichets uniques de greffe, permettant d'un site judiciaire de faire toutes ses démarches auprès d'une juridiction, est aussi à l'étude. Concernant le département de l'Aveyron, le conseil départemental de l'accès au droit (CDAD) a mis en place en 2010 deux points d'accès au droit (PAD) : un PAD généraliste a été créé le 16 février 2011 à Villefranche-de-Rouergue, offrant des permanences de deux demi-journées par mois (20 permanences pour l'année 2011) et un PAD en établissement pénitentiaire, dans la maison d'arrêt de Rodez, a été créé le 19 septembre 2011 offrant des permanences de deux demi-journées par mois (huit permanences pour l'année 2011). Outre les consultations juridiques gratuites, les actions développées en 2012 se sont orientées vers la création d'un livret sur le casier judiciaire à destination des jeunes majeurs et la création d'un site internet permettant la mise en ligne d'informations telles que la présentation du CDAD de l'Aveyron, de sa constitution, de ses missions, de ses PAD et de ses projets. Par ailleurs, des audiences foraines ont été mises en place pour assurer une proximité et éviter ainsi des trajets longs et fastidieux. Ainsi des audiences foraines du juge aux affaires familiales, pour les divorces par consentement mutuel et les affaires sur requêtes, sont tenues une journée par mois par le tribunal de grande instance de Rodez dans les locaux du Palais de justice de Millau. S'agissant du pôle de l'instruction implanté au siège du tribunal de grande instance de Montpellier, compétent territorialement pour les affaires de l'ancien tribunal de grande instance de Millau et celles de l'actuel tribunal de grande instance de Rodez, sa création a été décidée par le décret n° 2009-313 du 20 mars 2009. Cette localisation s'est effectuée sur la base de critères objectifs liés à l'activité réelle des juges d'instruction, portant notamment sur l'évolution du nombre de nouveaux dossiers d'informations judiciaires ouverts entre 2004 et 2006. Elle permet une mutualisation des moyens, un renforcement des compétences et une plus grande sécurité juridique dans l'intérêt de tous les justiciables.

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