M. François Bonhomme attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les inquiétudes de la profession agricole suite à la présentation par le Gouvernement, le 22 septembre 2016, du projet de redéfinition des zones défavorisées.
Le règlement de l'Union européenne n° 1305/2013 relatif au développement rural rend obligatoire la révision, dans tous les États membres, du classement des zones défavorisées.
Ainsi, la nouvelle carte des zones soumises à contraintes spécifiques présentée par le ministère exclut du dispositif un grand nombre de communes sur le territoire national. Dans le département de Tarn-et-Garonne, ce sont 141 communes sur 195 que compte le département qui sont concernées.
Or, cette révision a une incidence sur l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) versée aux exploitations actuellement situées en zone défavorisée simple. Alors qu'en 2014 et 2015, le montant de l'ICHN qui leur a été versé a été considérablement revalorisé, le déclassement de ces territoires entraînerait de facto la non-éligibilité des communes à l'ICHN.
Selon les hypothèses actuelles, pour Midi-Pyrénées, la révision des zones défavorisées concernerait environ 4 800 bénéficiaires de l'ICHN, représentant près de 44 millions d'euros, soit 40 % du montant total perçu en 2014 au titre de l'ICHN et 26 % du montant perçu en 2019 sans aucune révision.
Si la nouvelle carte doit être établie sur la base des critères européens, la France dispose d'une certaine marge de négociation avec la Commission européenne, l'objectif étant, selon le Gouvernement, de trouver des critères nationaux « robustes » permettant de conserver dans le zonage les communes dont les spécificités justifient leur maintien.
En Tarn-et-Garonne, des critères géophysiques et agro-climatiques particuliers tels le pourcentage de prairies naturelles à faible potentiel, des coteaux à faible pente non reconvertibles en cultures ainsi qu'un déficit hydrique estival sévère pourraient être retenus et justifier le maintien d'une grande partie du territoire en zone défavorisée.
Aussi, il lui demande si le Gouvernement, dans le cadre des négociations avec les représentants de la filière agricole, envisage de reprendre ce premier projet afin de tenir compte de la situation particulière du département.
Les zones défavorisées simples avaient été définies à la fin des années 70 en utilisant notamment des critères socio-économiques et parfois d'opportunité. Un rapport de la Cour des comptes européenne de 2003 a pointé l'utilisation de critères non harmonisés, conduisant à des situations très disparates au sein de l'Union européenne et à un classement contestable dans un certain nombre de cas. Une révision était donc nécessaire pour pérenniser les soutiens prévus aux agriculteurs de ces zones à travers l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN). Le règlement (UE) n° 1305/2013 relatif au développement rural rend cette révision obligatoire. Tous les États membres sont concernés par cette réforme à échéance 2018. Un nouveau zonage doit donc être établi. Il est actuellement en cours de préparation et de discussion avec les professionnels agricoles. Il est très important de noter que ce futur zonage se composera de deux parties : une première partie, les « zones soumises à contraintes naturelles » (ZSCN), qui découle de l'application de critères européens biophysiques et climatiques, sur laquelle il n'y a pas de marge de discussion ; une deuxième partie, les « zones soumises à contraintes spécifiques » (ZSCS), sur laquelle les travaux sont en cours et où des marges sont possibles. S'agissant de la première partie du zonage, deux conditions doivent être remplies pour que les communes soient incluses dans le futur zonage. D'une part, il faut qu'au moins 60 % de la surface agricole soient concernés par une contrainte liée aux critères biophysiques européens. D'autre part, il doit être vérifié, au regard de données économiques, que l'activité agricole présente dans ces communes n'a pas surmonté le handicap naturel. Une carte faisant apparaître la première partie du zonage a été présentée le 22 septembre 2016 à l'ensemble des partenaires. Il en ressortait que, sur 10 477 communes actuellement classées en zone défavorisée simple, 4 957 communes (47 %) ne sont pas maintenues dans la première partie du zonage, soit 23 600 agriculteurs (45 %) parmi les actuels bénéficiaires de l'ICHN dans ces zones (hors montagne). Comme annoncé en septembre, il n'est pas question d'en rester là. L'objectif poursuivi par le ministre chargé de l'agriculture, et qui est partagé par tous, est de retrouver dans la deuxième partie du zonage (au titre des « zones soumises à des contraintes spécifiques »), les communes dont les spécificités justifient leur maintien, en particulier dans les territoires où l'élevage est une activité significative. Pour cela, un travail important est engagé, avec l'appui des services déconcentrés et en lien avec les organisations professionnelles agricoles, pour identifier les enjeux pertinents à mettre en avant et pour définir, pour chaque enjeu, des critères nationaux robustes permettant d'inclure dans le futur zonage les communes concernées. Sur la première partie du zonage, qui a soulevé de nombreuses questions de méthode, les éléments suivants peuvent être apportés. Concernant les critères biophysiques, les textes européens sont très précis et ne laissent aucune marge de manœuvre au niveau national. Les données relatives aux sols utilisées pour appliquer ces critères ont fait l'objet d'un travail colossal coordonné depuis 2011 par l'Unité « InfoSols » de l'institut nationale de la recherche agronomique. Il existe, suite à ce travail, des situations d'incompréhension, en particulier là où des communes voisines ayant des caractéristiques similaires au regard des critères biophysiques ne sont pas traitées de la même manière. Une expertise au cas par cas a été conduite. Il en ressort que les communes concernées sont effectivement dans des situations proches, mais que certaines sont au-dessus du seuil de classement et les autres juste en dessous. Cela explique que le ressenti de terrain soit similaire, mais que le classement au regard des critères biophysiques soit pourtant différent. Pour faciliter la compréhension de cet aspect du zonage, un tableau par commune indiquant le niveau de contrainte pour chaque critère biophysique a été établi et diffusé aux services déconcentrés. En complément, toute explication nécessaire sera apportée, au cas par cas, pour que chacun puisse comprendre les singularités résultant de l'application des critères biophysiques. S'agissant de la première partie du zonage, deux conditions doivent être remplies pour que les communes soient incluses dans le futur zonage. D'une part, il faut qu'au moins 60 % de la surface agricole soient concernés par une contrainte liée aux critères biophysiques européens. D'autre part, il doit être vérifié, au regard de données économiques, que l'activité agricole présente dans ces communes n'a pas surmonté le handicap naturel. S'agissant des critères économiques qui doivent être mis en place pour établir la première partie du zonage, les textes européens sont également clairs. L'indicateur principal à utiliser est celui de la production brute standard (PBS). Il est établi et utilisé selon des règles statistiques et des lignes directrices européennes qui ne laissent pas de marge de manœuvre. Le seuil maximum de PBS en-dessous duquel l'activité économique agricole est considérée comme ne permettant pas de surmonter le handicap naturel est fixé à 80 % de la moyenne nationale. La seule question qui se posait était de savoir si ce critère devait être appliqué au niveau de la commune, du canton ou de la petite région agricole (PRA). Les travaux conduits montrent très clairement que c'est une approche au niveau de la PRA qui donne le meilleur résultat : le zonage en résultant est celui qui permet de maintenir dans le futur zonage le plus de communes actuellement classées. De plus, le choix de cet échelon permet d'éviter le mitage important qui résulterait d'une application à la commune. Au titre des critères reflétant l'activité économique agricole, un autre indicateur est également utilisé : le taux de chargement (quantité d'animaux présents sur un hectare). Dans la carte présentée le 22 septembre 2016, le taux maximum avait été fixé à 1,3 UGB/ha. Au vu des remontées de terrain sur ce point, et après vérification que cela sera acceptable pour la Commission européenne, il a été acté de porter le taux maximum à 1,4. Cela permet de classer dans la première partie du zonage plus de 300 communes supplémentaires qui sont en ZDS actuellement. Aller au-delà de 1,4 ne serait en revanche pas opportun car cela conduirait à faire entrer dans le zonage plusieurs centaines de communes qui n'y figurent pas aujourd'hui tout en ne permettant pas de récupérer un nombre significatif de communes « sortantes ». Au demeurant, la Commission n'acceptera pas une valeur supérieure à 1,4. Sur la deuxième partie du zonage, une souplesse plus grande est possible et les marges importantes ainsi disponibles seront mobilisées au mieux. Les ZSCS peuvent représenter jusqu'à 10 % du territoire national (soit 6,7 millions d'hectares), alors que les communes actuellement classées et qui ne figurent pas dans la première partie du zonage représentent environ la moitié de cette surface (3,6 millions d'hectares). Comme annoncé en septembre, une première piste a été travaillée, qui s'appuie sur la notion d'élevage extensif à l'herbe. Une nouvelle carte a ainsi pu être présentée le 23 novembre 2016, où figurent conjointement la première partie du zonage, améliorée comme indiqué précédemment, et une première étape dans la constitution de la deuxième partie du zonage. Sont désormais classées dans la deuxième partie du zonage les communes avec une forte proportion d'élevage à l'herbe extensif. Sur cet aspect, il ressort que la meilleure approche consiste à classer les petites régions agricoles remplissant les critères suivants : la part d'herbe est importante (la surface toujours en herbe représente au moins 30 % de la surface agricole utile (SAU), ou bien la surface toujours en herbe et les prairies temporaires représentent au moins 40 % de la SAU), le chargement est inférieur à 1,4 UGB/ha, et la PBS est inférieure à 90 % de la moyenne nationale. Cela constitue une avancée significative, première étape très concrète dans la constitution de la deuxième partie du zonage. Elle permet de récupérer 1 500 communes « sortantes ». Ainsi, 7 328 communes (70 %) et 39 300 agriculteurs (74 %) sont désormais maintenus dans le zonage. Le zonage va maintenant être complété en utilisant d'autres critères, pour lesquels les travaux sont engagés conjointement entre les services de l'État et la profession agricole. Suites aux consultations conduites depuis septembre 2016, plusieurs pistes sont à l'étude. En premier lieu, il sera possible d'utiliser un paramètre mesurant le niveau économique de la production agricole moyenne différent de celui appliqué pour la première partie du zonage, en excluant certaines productions présentant un fort niveau de résultat économique qui « fausse » la moyenne. Concrètement, plusieurs scénarios sont à l'étude en retirant de la PBS les productions suivantes : viticulture, arboriculture, maraîchage, horticulture, cultures permanentes, volailles, élevage porcin, tabac, semences. La Commission a indiqué qu'elle pouvait accepter qu'une telle PBS « restreinte » soit utilisée. C'est donc une possibilité à laquelle il sera fait appel pour la deuxième partie du zonage. Ensuite, des travaux sont engagés autour de l'enjeu de défense des forêts contre les incendies (DFCI) : dans les communes concernées par un risque d'incendie fort, le maintien de l'activité d'élevage est un aspect important pour entretenir les espaces, et donc pour limiter le risque. Des travaux sont aussi en cours pour identifier les zones humides où l'activité d'élevage est présente et joue un rôle important. Une étude est également en cours sur la pertinence de tenir compte de taille moyenne des exploitations et du parcellaire des exploitations. Il pourrait par ailleurs être envisagé de classer les zones où l'activité agricole est support d'une activité touristique significative, par exemple dans les PRA où la proportion d'agriculteurs ayant une activité de tourisme hors vente directe est significativement plus forte que la moyenne. Une autre piste à l'étude pourrait conduire à classer les zones où l'élevage en sous-bois pâturés représente la part la plus significative de l'activité agricole. Une nouvelle réunion nationale d'échanges avec les organisations professionnelles agricoles est prévue le 19 décembre 2016. Elle permettra de faire le point sur ces différents sujets et, si possible, d'acter de nouvelles avancées dans la constitution de la deuxième partie du zonage. D'autres pistes pourront encore émerger et être examinées dans les prochaines semaines. À ce stade des travaux, le calendrier prévu est le suivant, sachant que le zonage doit être adopté au plus tard le 1er avril 2018 pour qu'il soit connu au moment où les agriculteurs feront leurs demandes d'aide au titre de la campagne de la politique agricole commune 2018, première année d'application du nouveau zonage : au début de l'année 2017, probablement en janvier, une carte sera transmise à la Commission européenne comprenant conjointement les ZSCN (première partie du zonage) ainsi qu'une première étape sur les ZSCS (deuxième partie du zonage) incluant les critères qui auront pu être actés d'ici là ; les ZSCS seront ensuite complétées au fur et à mesure de l'avancée des travaux ; le zonage ZSCS complet devra être établi et transmis à la Commission au plus tard à l'automne 2017.
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