M. Robert Laufoaulu rappelle à M. le garde des sceaux, ministre de la justice les termes de sa question N° 20782 posée le 24/03/2016 sous le titre : « Droits de l'homme », qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour.
L'article R. 611-8 du code de justice administrative permet au président d'un tribunal administratif ou au président de la formation de jugement ou, à la cour administrative d'appel, au président de la chambre ou, au Conseil d'État, au président de la chambre, de dispenser d'instruction l'examen d'une requête lorsque la solution de l'affaire est d'ores et déjà certaine. Or le droit à une procédure contradictoire au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, implique en principe le droit pour les parties à un procès de prendre connaissance de toute pièce ou observation soumise au juge en vue d'influencer sa décision, et de la discuter (CEDH, 20 février 1996, Lobo Machado c/ Portugal, n° 15764/89 – 27 mars 1998, K.D.B. c/ Pays-Bas, n° 80/1997/864/1075 – 18 février 1997, Nideröst-Huber c/ Suisse du, n° 18990/91). Il est toutefois à noter que le règlement de la Cour prévoit lui-même qu'une requête puisse être déclarée irrecevable ou rayée du rôle de la Cour sans qu'une communication au défendeur soit préalablement intervenue (cf. articles 52A, 53 et 54 du règlement). La dispense de communication de la requête au défendeur n'est donc pas inconnue du droit européen. Le Conseil d'État a interprété l'article R. 611-8 du code de justice administrative et encadré son usage conformément au principe du contradictoire, protégé notamment par l'article 6 § 1, précité. Il a rappelé que cette disposition n'a pas pour objet et ne saurait avoir légalement pour effet de porter atteinte au principe général du caractère contradictoire de la procédure, qu'elle permet uniquement de dispenser de communiquer la requête aux défendeurs lorsque la décision à intervenir n'est pas susceptible de leur porter préjudice et qu'il en va ainsi notamment en cas de rejet de la requête (CE, Sec., 5 avril 1996, Syndicat des avocats de France, n° 116594). À ce jour, la Cour européenne des droits de l'homme n'a pas été saisie de la conventionalité de l'édiction d'une ordonnance de dispense d'instruction rendue par les juridictions administratives en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, au regard des exigences de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. Compte tenu de ce qui précède, il paraît cependant peu vraisemblable que cette juridiction en prononce l'incompatibilité avec l'article 6 § 1.
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