M. François Bonhomme attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés découlant de l'application de la réglementation européenne en matière d'abattage et de transformation des volailles qui mettrait en péril une filière déjà fragilisée par deux crises sanitaires successives.
Depuis 2008, les établissements d'abattage non agréés (EANA) peuvent commercialiser de la viande transformée dans un rayon géographique limité. Ainsi, les EANA commercialisent uniquement les animaux produits sur l'exploitation en vente directe dans un rayon de 200 kilomètres et n'ont pas accès au marché européen.
Pour autant, les règles d'hygiène et de stabilité requises pour les produits élaborés dans les EANA sont les mêmes que pour un établissement agréé. La sécurité des consommateurs et la traçabilité sont garanties avec la même rigueur.
À la suite d'un audit de la Commission européenne, la direction générale de l'alimentation a reçu l'obligation de se conformer au règlement (CE) n° 853/2004 stipulant que « les établissements d'abattage non agréés (EANA) peuvent uniquement commercialiser de la viande fraîche ».
Cette mesure aurait pour conséquence un impact financier considérable sur une filière déjà très lourdement impactée par les investissements nécessités par l'influenza aviaire et le bien-être animal. Il convient de noter que le coût de mise aux normes d'un établissement agréé est quatre fois supérieur à celui d'un EANA.
Cette démarche va à l'encontre de la pérennité et du développement des marchés de proximité en circuit court pourtant de plus en plus prisés des consommateurs et préconisés pour la protection de l'environnement.
Les rares établissements agréés CE sont aujourd'hui surchargés. Si les EANA étaient conduits à cesser leur activité de transformation, les producteurs seraient obligés de se regrouper et donc de déplacer leurs volailles, ce qui va totalement à l'encontre des mesures de biosécurité instaurées dans le cadre de l'influenza aviaire : limitation des déplacements en évitant tout contact avec des volailles venant d'autres exploitations.
L'État a incité les producteurs à faire des EANA ; une mise en application du règlement européen serait synonyme d'un retour en arrière et mènerait à une incompréhension des producteurs devant cette instabilité réglementaire. Qu'adviendrait-il alors du « manger mieux » et du « consommer local » ?
Il en va du maintien d'un modèle de production ancestral qui participe du patrimoine gastronomique de la France.
Il lui demande donc s'il envisage de demander que l'Europe revoie sa position en autorisant la France à conserver la réglementation dérogatoire actuellement en vigueur, seule à même de préserver une filière courte faite de petits producteurs dont la compétence technique en matière sanitaire a largement fait ses preuves.
Le Gouvernement est attaché au développement des circuits de proximité qui répondent à une demande sociétale croissante. À cet égard, les petits abattoirs, qu'ils soient agréés ou non, permettent d'assurer un maillage territorial afin d'assurer l'approvisionnement direct des consommateurs qui plébiscitent de plus en plus ces productions de proximité et permettent aux éleveurs de valoriser leur production. Le Gouvernement entend donc préserver notre modèle actuel et ne prévoit pas d'imposer l'agrément aux établissements d'abattage non agréés (EANA) souhaitant transformer leurs produits. Aujourd'hui, la possibilité de transformer les produits issus des abattoirs non agréés repose sur une dérogation prévue dans la réglementation européenne qui arrive à échéance en 2020. Afin de défendre une pérennisation de la possibilité de transformation des produits issus des EANA, il convient d'apporter des garanties nécessaires au niveau sanitaire et ce en lien avec d'autres États membres, la France n'étant pas la seule à avoir ce type de structure. Aussi, un travail d'harmonisation et de formalisation des pratiques de ces structures est mené par les services de la direction générale de l'alimentation avec les professionnels afin de les aider à aboutir à la rédaction d'un guide de bonnes pratiques spécifique. Ce travail permettra de mettre à disposition des producteurs toutes les informations nécessaires à la conduite de leur activité conformément aux règles en vigueur. Il permettra aussi d'appuyer la position que les autorités françaises souhaitent défendre au niveau européen, à savoir le maintien de la possibilité de transformation des produits des EANA.
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