Photo de François Bonhomme

François Bonhomme
Question d'actualité au gouvernement N° 802 au Ministère de l'intérieur


Clip du rappeur Nick Conrad

Question soumise le 22 mai 2019

M. François Bonhomme. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, en mars dernier, le rappeur Nick Conrad était condamné pour provocation au crime à cause de son clip intitulé « Pendez les blancs ». Manifestement, ni la honte d'une condamnation pénale ni la peine prononcée ne l'auront amené à réfléchir.

En effet, le rappeur, homme libre, comme il aime à se présenter lui-même, vient de réitérer son propos dans son nouveau clip aux paroles sans ambiguïté : « Je baise la France ; je brûle la France jusqu'à l'agonie ». Tel est le refrain lancinant de ce qu'il présente comme une œuvre de l'esprit.

Au-delà des propos tenus, les images laissent peu de place à l'interprétation. Dans ce clip, à large diffusion, on voit l'auteur, après sa déambulation en berline, clamer sa haine de la France, et procéder avec méthode à la strangulation d'une jeune femme à terre, le tout suivi d'un ralenti complaisant laissant apparaître son rictus de satisfaction devant son crime.

Amené à s'expliquer sur ces propos et ces images, l'auteur invoque tour à tour la faute des médias et de la mentalité française, qui, selon lui, refuserait « d'ouvrir le sujet épineux de l'esclavagisme de la France ».

Monsieur le secrétaire d'État, on ne saurait en pareil cas s'abriter derrière la liberté de création ou la liberté d'expression pour tout justifier. Les limites ont, me semble-t-il, été largement été outrepassées. Vous avez indiqué dimanche avoir procédé à un signalement sur la plateforme Pharos et saisi le procureur de la République. C'est bien. Nous vous soutenons, mais nous ne pouvons pas nous contenter de nous défausser sur la justice. Nous attendons une réponse politique ferme, une affirmation claire de nos principes.

Au-delà de la condamnation de principe, comment comptez-vous faire pour que ce type de propos n'ait plus droit de cité dans notre pays ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Réponse émise le 22 mai 2019

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Bonhomme, vous rappelez le contenu du vidéoclip de ce rappeur, Nick Conrad, qui tient, une nouvelle fois, des propos particulièrement injurieux, haineux et s'en prend directement à la France. Si je dis « une nouvelle fois », c'est parce que, vous avez raison de le souligner, il avait déjà appelé à « pendre des blancs » dans un précédent clip.

Le Gouvernement partage bien évidemment votre émotion et votre indignation devant ces propos injurieux qui sont inacceptables et qui ne doivent effectivement pas être acceptés.

Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, Nick Conrad doit comprendre que de tels propos ne peuvent s'abriter derrière la liberté d'expression ou derrière une quelconque liberté artistique.

L'insulte et la haine ne sont pas de l'art. L'insulte et la haine ne vont pas dans le sens du « vivre ensemble » auquel nous appelons tous dans notre démocratie française. Mais surtout, l'insulte et la haine tombent sous le coup de la loi pénale. C'est en ce sens que Christophe Castaner a, dès dimanche, dans le cadre de l'article 40 du code de procédure pénale, saisi le procureur de la République de Paris, qui a immédiatement ouvert une enquête préliminaire au titre d'une infraction extrêmement grave, l'apologie de crime d'atteinte volontaire à la vie aggravée. Les enquêteurs de la brigade de répression de la délinquance contre les personnes de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris sont à l'œuvre. Des auditions auront lieu très prochainement, mais là, je ne peux en dire plus, car elles se déroulent bien évidemment sous l'autorité du parquet.

Dans le même temps, Christophe Castaner a souhaité saisir la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements, dite Pharos, qui travaille à obtenir le retrait de ce contenu manifestement illicite.

Cette affaire doit nous inciter à persévérer et à poursuivre dans la voie qui est la nôtre : l'adoption d'un texte de loi. Une proposition de loi sera bientôt présentée à l'Assemblée nationale. Ce sujet, il nous faut aussi le porter auprès du Parlement européen et des institutions de l'Union pour obtenir, à l'instar de ce qui se pratique déjà pour les contenus terroristes, le retrait, dans les plus brefs délais, des contenus haineux. La nécessité s'en est malheureusement fait sentir une nouvelle fois avec ce clip de Nick Conrad.
(Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.

M. François Bonhomme. Monsieur le secrétaire d'État, j'observe quand même que la diffusion du clip persiste, malgré le signalement sur Pharos.

De plus, j'aurais voulu une condamnation générale. En effet, j'ai observé le silence gêné et assourdissant de Mme Schiappa, qui est en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Elle est pourtant toujours prompte à fanfaronner et à théâtraliser ses sorties, toujours prompte…
(Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Didier Guillaume, ministre. Misogyne !

M. le président. Il faut conclure !

M. François Bonhomme. … à manier Twitter, notamment le hashtag #NeRienLaisserPasser. Cela aurait surtout donné beaucoup plus de force à vos propos ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

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