M. René Danesi. Ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, la difficulté d'accès aux soins devient une source d'inquiétude pour une partie grandissante de la population, surtout rurale et périurbaine. Dans certaines spécialités, il est courant d'attendre six mois pour avoir un rendez-vous.
Certes, la médecine est quasiment gratuite, car prise en charge par la sécurité sociale et par les complémentaires santé. Mais la question de la santé dans les territoires se pose maintenant en termes d'équité. Il y a désormais une profonde injustice dans l'accès aux soins : cela est vrai pour la médecine de ville comme pour l'hôpital.
Les pouvoirs publics, et vous n'avez pas fait exception à la règle, ont accumulé les plans contre les déserts médicaux. Mais ces plans sont sans efficacité, car ils ne traitent pas les causes du mal. On y retrouve des incitations financières, d'ailleurs souvent à la charge des communes, mais on y trouve surtout la bureaucratisation et la fonctionnarisation rampante de la médecine.
À ceux qui s'alarmaient d'une situation devenue intenable, vous avez répondu par la suppression du numerus clausus, c'est-à-dire la suppression de la limitation du nombre des médecins formés.
Cette suppression était présentée comme la solution au problème. Mais, dans les faits, les facultés de médecine, soucieuses de la qualité des formations, ont d'ores et déjà annoncé qu'elles n'avaient pas les moyens d'augmenter le nombre d'étudiants en médecine.
Madame la ministre, l'avenir de la médecine nécessite une vision stratégique. Les déserts médicaux ne sont que le symptôme du déclin de notre médecine de santé.
Mes questions sont donc très simples. Êtes-vous prête à abandonner les fausses solutions qui n'ont cessé de dégrader la situation ? Êtes-vous prête à réformer vraiment, en repensant l'actuelle gouvernance asphyxiante de la santé en France, en démontrant votre confiance dans l'exercice libéral de la médecine par sa revalorisation ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Votre question, monsieur le sénateur Danesi, évoque des défis nombreux. Le mal, en effet, est ancien. Comme vous le savez, nous héritons d'une situation et subissons les conséquences de l'absence de réflexion, voilà vingt ans, sur la démographie médicale.
Les réformes que j'ai présentées et la loi qui a été votée dans cet hémicycle en juillet dernier visent à apporter des solutions. La fin du numerus claususne représente qu'une petite partie de ces solutions. Elle a pour objet principal, non pas tant d'accroître le nombre d'étudiants en médecine, même s'il est possible de le faire un peu, mais surtout de diversifier le profil des étudiants et des territoires dont ils sont issus.
Il s'agit notamment de permettre l'accès aux études de médecine de jeunes ayant obtenu une licence dans des sites qui ne disposent pas d'une faculté de médecine, mais offrent des cursus en droit, sciences humaines et sociales, philosophie, etc. Cela permettra à des étudiants issus de tous les territoires, notamment des territoires diversifiés, d'accéder aux études de médecine en deuxième, troisième ou quatrième année.
Par ailleurs, j'ai présenté un plan cherchant à valoriser l'exercice libéral, en permettant aux médecins libéraux, conformément à leurs demandes actuelles, de pratiquer dans le cadre d'un exercice coordonné avec d'autres professions de santé.
Ainsi, nous doublons le nombre de maisons de santé pluriprofessionnelles. Nous permettons également aux professionnels de santé de s'organiser, à l'échelon d'un territoire, en communauté professionnelle territoriale de santé, avec un accompagnement de l'assurance maladie et des agences régionales de santé.
Tout leur est offert pour répondre à leurs besoins d'un exercice pluriprofessionnel, car la solution viendra de la délégation d'un certain nombre de tâches à d'autres professionnels, qui peuvent être extrêmement compétents, notamment pour suivre les maladies chroniques.
C'est, aujourd'hui, la meilleure solution pour parer à la désertification médicale, en attendant – il faut tenir compte de la durée de la formation – que le nombre de médecins augmente sur notre territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.