M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
L'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) vient de publier un rapport sur les étrangers qui réclament un titre de séjour en France pour raisons médicales.
Ce rapport, dense et documenté, fait un état des lieux précis de la situation actuelle. Pour 2020, 26 000 personnes étrangères ont déposé une telle demande.
Selon ce même rapport, des ressortissants issus de pas moins de 127 pays différents ont demandé à bénéficier du dispositif.
Ainsi, tour à tour, on trouve des ressortissants algériens, ivoiriens, congolais, guinéens, géorgiens, maliens, comoriens, marocains, tunisiens, mais aussi émiratis, canadiens, américains, des pays où la médecine ne laisse pas vraiment à désirer.
Il ressort clairement de ce travail qu'une partie des demandeurs font un usage systématique de cette procédure pour obtenir un titre de séjour, notamment lorsqu'ils ont été déboutés du droit d'asile.
Plus largement, ce rapport pointe du doigt une utilisation dévoyée, et même détournée, de l'accès à notre système de soins offert par la France aux étrangers.
Monsieur le ministre, que répondez-vous à l'OFII, qui s'inquiète tant du coût que de la façon dont la procédure d'admission au séjour est dévoyée par une partie des demandeurs ?
Surtout, quelles mesures comptez-vous prendre pour lutter véritablement contre ce détournement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je n'ai pas grand-chose à répondre à l'OFII, qui travaille auprès du ministère de l'intérieur. C'est notamment sous mon autorité que s'est faite la publication de ce rapport.
Il s'agit, en l'occurrence, d'une grande avancée. Comme vous le savez, la création de ce titre de séjour pour étrangers malades date de 1996, mais ce n'est qu'en 2017, à l'arrivée du Président de la République Emmanuel Macron, que nous avons transféré sa gestion des ARS (agences régionales de santé) à l'OFII, afin de passer d'un sujet de santé à un sujet d'immigration.
Ce sont des médecins de l'OFII qui, sous la responsabilité du ministère de l'intérieur, effectuent désormais les contrôles. Nous pouvons constater ensemble que nous avons mis fin à un certain nombre d'abus.
De 2017 à 2021, le rapport que vous citez précise ainsi que le nombre de personnes qui ont vu leur demande acceptée a baissé de 40 %. Il y a encore aujourd'hui de 26 000 à 30 000 personnes qui demandent à pouvoir se faire soigner dans notre pays lorsqu'elles n'ont pas chez elles la médecine pour le faire.
Cette procédure avait notamment été imaginée en 1996 pour le VIH, et je pense qu'il s'agissait d'une belle action du gouvernement d'Alain Juppé. Il peut s'agir aussi d'un cancer ou d'une autre maladie.
Les médecins de l'OFII exercent aujourd'hui ce contrôle, mais, naturellement, cela n'exclut pas certaines difficultés ou fraudes.
Nous avons toutefois pris un certain nombre de dispositions qui devraient vous rassurer.
D'abord, un contrôle biologique est désormais systématiquement effectué pour authentifier la maladie avant d'engager les soins. La personne pourra déposer parallèlement une demande d'asile, mais elle devra réellement souffrir de cette maladie.
Ensuite, trois médecins rendront un avis collégial, et non plus un seul comme précédemment.
Enfin, la convocation par un médecin de l'OFII sera systématique, avant même le dépôt de la demande. Il y a sans doute encore quelques cas frauduleux, mais ils sont assez différents, me semble-t-il, de ceux que nous avons trouvés quand nous sommes arrivés aux responsabilités.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Je vous ai écouté avec beaucoup d'intérêt, monsieur le ministre. Vous avez effectivement reçu un rapport de vos services, qui vous a mis en garde, mais je ne retrouve pas les éléments de ce rapport dans votre réponse.
Il est en effet question d'un collège de médecins qui convoque les demandeurs. Mais lorsque ces derniers ne se présentent pas une fois, deux fois, trois fois, les médecins sont obligés de statuer. Il est donc faux de dire qu'ils effectuent des contrôles, puisqu'ils n'ont pas les moyens de les faire. Le rapport le rappelle pour la quatrième fois.
J'entends bien votre volonté de faire, monsieur le ministre. Mais comme l'écrit un grand philosophe, il n'y a rien de plus grave et de plus dangereux que le simulacre d'action. Malheureusement, rien n'a bougé dans ce domaine… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
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