M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre de l'intérieur, le bilan de ce qui s'est passé samedi dernier à Sainte-Soline est lourd. Je le sais, j'y étais. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Et je l'assume !
(Exclamations indignées sur les mêmes travées.)
Deux manifestants sont dans le coma, entre la vie et la mort. Nous espérons qu'ils s'en sortiront sans séquelles graves. Il y a eu 47 blessés parmi les forces de l'ordre. Nous leur souhaitons évidemment un prompt rétablissement. On dénombre 200 blessés, dont certains ont été mutilés, parmi les manifestants. Nous leur souhaitons aussi un prompt rétablissement.
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Pemezec. Et les gendarmes ?
M. Thomas Dossus. Des violences inqualifiables se sont déchaînées, et nous les dénonçons toutes sans ambiguïté. Mais c'est votre bilan du week-end, monsieur le ministre.
(Vives protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jacques Grosperrin. C'est une honte !
M. Thomas Dossus. Vous avez décidé d'exposer 3 000 agents des forces de l'ordre à la violence dans un champ pour défendre, quoi qu'il en coûte, un trou vide.
Vous avez décidé d'interdire une manifestation totalement légitime, parce que vous êtes incapable de faire respecter la loi en matière de partage de l'eau.
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Oui, de nombreuses bassines déclarées illégales sont toujours en construction, et vous êtes incapable d'assumer votre responsabilité. Oui, la bassine de Sainte-Soline met en danger la ressource en eau de tout le territoire.
(Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Depuis trois jours, vos mensonges ont éclaté au grand jour : des armes de guerre ont bien été employées samedi ; des brigades motorisées étaient bien équipées de LBD ; des secours ont été empêchés d'intervenir sur ordre de la gendarmerie…
(Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. C'est une honte !
M. Jean-Raymond Hugonet. C'est scandaleux !
M. Thomas Dossus. … et des gaz lacrymogènes ont été envoyés sur des blessés. Vous mentez, comme vous avez menti ici lors du fiasco du Stade de France.
Quel est ce pays où, après avoir mis deux manifestants dans le coma, toute la chaîne de commandement ne s'interroge pas sur la méthode de maintien de l'ordre ? Quel est ce pays où, après un tel fiasco, un ministre peut continuer de mentir à répétition et dissoudre un collectif d'opposants politiques ?
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Dossus, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris la question.
(M. Bruno Sido s'esclaffe.)
Certes, il y avait un peu de bruit, mais il me semble que vous tentiez de faire un distinguo entre la gauche et le gauchisme…
Quoi qu'il en soit, je regrette que des parlementaires revendiquent d'aller dans une manifestation illégale. (Vifs applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.) Ce faisant, ils ne respectent pas eux-mêmes la loi de la République.
Je regrette que des parlementaires puissent être aux côtés de ceux qui jettent des cocktails Molotov sur des gendarmes.
(Mêmes mouvements.)
M. Daniel Breuiller. C'est faux !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette que ces parlementaires n'aient pu constater, comme j'en ai eu l'occasion moi-même, les attaques dont ont été victimes les gendarmes, dont certains ont reçu de l'acide sur les pieds.
Je regrette, monsieur le sénateur, que vous n'ayez pas entendu les deux conférences de presse organisées par Mme la préfète avant la manifestation, qui était interdite depuis le 17 mars, ni même celle du procureur de la République.
Manifestement, vous vous êtes assis sur tout cela : sur les violences contre nos gendarmes, sur l'interdiction de manifester, sur les conférences de presse de la préfète de la République et du procureur de la République.
M. Bruno Sido. On est d'accord !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je regrette par ailleurs que vous relayiez ici, de nouveau, des fake news.
Non, monsieur le sénateur, les secours n'ont pas été empêchés par les forces de l'ordre. (Protestations sur les travées du groupe GEST.) C'est le Samu des Deux-Sèvres qui le dit lui-même. Écoutez-le. Je sais que cela vous ferait plaisir de penser que les gendarmes souhaitent la mort des gens, mais tel n'est pas le cas. C'est le médecin du GIGN, monsieur le sénateur, qui a fendu la foule, alors qu'il était harcelé par ceux qui étaient, manifestement, vos camarades d'un jour…
(M. Thomas Dossus fait un signe de dénégation.)
Vous pouvez hocher la tête, mais c'est tout à fait scandaleux ! Les gendarmes ont même dû faire demi-tour sous une pluie de pavés et de cocktails Molotov, alors qu'ils allaient secourir un manifestant. Voilà la vérité, monsieur le sénateur.
(Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI.)
Moi aussi, je veux avoir une pensée pour toutes les personnes blessées, particulièrement pour celles qui luttent pour la vie. L'enquête judiciaire fera apparaître la vérité, et je suis prêt, avec toute mon administration, à coopérer entièrement avec elle. J'ai dit au président de la commission des lois du Sénat, comme à celui de l'Assemblée nationale, que j'étais à sa disposition pour répondre à vos questions.
M. le président. Il faut conclure !
M. Gérald Darmanin, ministre. En revanche, il y a une chose que je ne ferai jamais : cracher, comme vous, sur la tête des agents des forces de l'ordre.
(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.
M. Thomas Dossus. J'assume évidemment ma présence à Sainte-Soline, comme ma mission de contrôle du Gouvernement.
(Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Baptiste Lemoyne fait un geste d'agacement.)
Vous ne pourrez pas organiser une manifestation à huis clos. Vous ne pourrez pas éborgner à huis clos !
(Huées sur les travées des groupes Les Républicains et UC, où des sénateurs frappent leur pupitre.)
M. Jacques Grosperrin. C'est honteux !
M. Thomas Dossus. Vous êtes le ministre d'un pays dont le président ne peut plus sortir de son palais. Vous êtes le ministre d'un gouvernement qui ne peut plus présenter un seul texte devant le Parlement…
(Les huées redoublent et couvrent la voix de l'orateur.)
M. le président. Il faut conclure !
M. Thomas Dossus. Vous êtes le ministre d'un pays bloqué, fracturé par votre autoritarisme…
M. le président. C'est terminé ! (M. le président coupe le micro de l'orateur.)
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