Mission commune d'information sur le Mediator

Réunion du 3 février 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • laboratoire
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  • pharmacologie
  • servier
  • thérapeutique

La réunion

Source

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Nous vous remercions d'avoir répondu à notre invitation. Vous avez accepté que cette réunion soit publique : le confirmez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Vous êtes bien, monsieur Schiavi, directeur de la division scientifique « Gériatrie » des laboratoires Servier et trésorier de la société française de pharmacovigilance et de thérapeutique.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je le confirme. Plus précisément, je suis directeur de la division scientifique « Pharmacologie et gériatrie » des laboratoires Servier, et trésorier de la société française de pharmacologie et de thérapeutique. La pharmacovigilance n'est que l'une des composantes de la pharmacologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Pouvez-vous nous rappeler les grandes étapes de votre carrière au sein des laboratoires Servier, et nous dire si vous ne vous êtes jamais trouvé en situation de conflit d'intérêts ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Ingénieur biochimiste de formation, je suis sorti en décembre 1979 de l'Institut national des sciences appliquées (Insa) de Lyon. Après avoir fait mon service militaire à l'hôpital Sainte-Anne de Toulon, j'ai été recruté en 1979 par les laboratoires Servier, dans un laboratoire de pharmacologie cardio-vasculaire, pour y faire des recherches sur les inhibiteurs d'enzymes de conversion, utilisés dans le traitement de l'hypertension artérielle. Après deux ou trois ans, mon patron m'a conseillé de poursuivre ma formation jusqu'à un doctorat es-sciences. Je me suis donc inscrit en diplôme d'études appliquées (DEA) de pharmacologie générale à Paris V en 1982-1983 et, à la suggestion d'une de mes enseignantes, pharmacologue réputée, j'ai rejoint en 1984 l'association des anciens élèves du certificat de pharmacologie et de pharmacodynamie, société savante devenue un peu plus tard la société de pharmacologie expérimentale (je l'ai présidée de 1989 à 1992). Le 1er janvier 1997, les trois principales sociétés savantes françaises dans ce domaine se sont réunies en une seule société française de pharmacologie et de thérapeutique ; administrateur de l'une des trois anciennes, j'ai rejoint le conseil d'administration de la nouvelle société, où j'ai toujours été réélu. Ce regroupement a offert l'avantage d'améliorer la représentativité de la pharmacologie française dans les instances internationales, où celle-ci ne dispose généralement que d'un siège. Le président d'une des sociétés fondatrices m'a demandé d'être le trésorier de la nouvelle société, et j'ai accepté.

Les comptes, que je présente chaque année à l'assemblée générale, ont toujours été approuvés à l'unanimité.

J'ai mené en parallèle une carrière au sein des laboratoires Servier, que je n'ai jamais quittés. Au centre de recherche de Suresnes, j'ai contribué au développement d'un inhibiteur d'enzymes de conversion dont le nom de marque est Coversyl, mais aussi d'autres antihypertenseurs. En 1991, je suis passé de « la paillasse » au développement clinique et à la recherche thérapeutique, dans une division consacrée au développement d'antihypertenseurs : nous avons mis au point une version à libération prolongée du Fludex - les antihypertenseurs sont ma zone de compétence. Puis, au début des années 2000, j'ai rejoint Servier International, une structure de marketing, où je me suis occupé de Natrilix SR, nom de marque international du Fludex LP, dont la dénomination commune internationale est l'indapamide. Enfin, en 2006, j'ai quitté cette structure pour la direction scientifique France, dont le rôle est d'informer les médecins et pharmaciens hospitalo-universitaires ; on m'a chargé de la direction scientifique d'une division où ont été mis au point des inhibiteurs d'enzymes de conversion, comme le Protélos, le Coveram ou le Procoralan qui est un bradycardisant pur, doués de propriétés pharmacologiques particulières - ce sont les premiers de leur classe, avec une position particulière dans l'arsenal thérapeutique. Ces nouveaux médicaments qui sont issus de la recherche des laboratoires Servier sont de réelles innovations pharmacologiques. Mais je n'insiste pas, je crois que vous êtes médecin.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je n'ai jamais été visiteur médical, mais ma fonction est d'informer les médecins et les pharmaciens. J'ajoute que j'ai appartenu entre 1988 et 2002 à une société américaine d'hypertension artérielle.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Nous avons bien compris que vous étiez spécialiste de l'hypertension, mais nous souhaitons que vous nous parliez de benfluorex. Dans le livre d'Irène Frachon, vous êtes cité à propos d'une lettre indiquant que : « le Mediator se distingue radicalement des fenfluramines tant en termes de structure chimique et de voies métaboliques que de profil d'efficacité et de tolérance ». Cela n'a rien à voir avec les documents parus depuis 1976. Pouvez-vous nous expliquer le contenu de cette lettre dans laquelle vous n'êtes pas nuancé du tout mais catégorique et maintenez-vous ce propos ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je suis content de pouvoir m'expliquer. Je vais vous dire comment cela s'est passé. Je vous laisserai juge de mon implication. Ma fonction consiste à rencontrer les médecins, pharmaciens et pharmacologues hospitalo-universitaires. Vers la fin mars 2008, je visitais le service de pharmacologie du CHU de Brest ; après une longue conversation avec le chef de service concernant les nouveaux médicaments des laboratoires Servier, je suis passé voir une de ses collègues, membre du centre régional de pharmacovigilance et membre de la société savante, à qui j'ai présenté le Procoralan dans le détail. A l'issue de cet entretien, ce membre de la société de pharmacologie m'a posé une question très précise : « y-a-t-il des similitudes chimiques entre le Mediator et les fenfluramines, Isoméride et Pondéral ». N'étant pas spécialiste du métabolisme ni de l'endocrinologie, j'ai fait part de cette question à notre service d'information médicale au siège des laboratoires Servier, qui m'a transmis une note, sous forme de fichier, que j'ai transmise à mon interlocutrice, et que je n'ai pas signée moi-même. La réponse portait sur la similitude chimique puisque c'était la question initiale. Ma contribution a été de transmettre une information qui avait été, je suppose, donnée en interne par les chimistes compétents.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Vous n'assumez donc pas la responsabilité de cette lettre ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je n'assume pas la teneur de celle-ci dans la mesure où je ne l'ai pas rédigée.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Qui est responsable ? Qui faut-il interroger ? Il nous faudrait savoir sur quel fondement cette personne propageait une telle thèse.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Quand l'Isoméride et le Ponderal ont été retirés du marché, la société savante dont vous êtes membre s'est-elle interrogée sur les similitudes éventuelles entre ces médicaments et le Mediator ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je rappelle qu'il ne s'agit pas d'une société de pharmacovigilance, mais de pharmacologie. Son rôle n'est pas de porter un jugement sur des décisions administratives.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Quel est le processus décisionnel au sein du groupe Servier sur la conduite, la validation et l'exploitation des travaux de recherche ? Quelles ont en particulier été les grandes étapes entre les recherches menées sur le Mediator et son autorisation de mise sur le marché en 1976 ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Entré chez Servier en 1979, j'ignore comment les recherches s'étaient déroulées auparavant. Par ailleurs, je ne me suis jamais occupé de métabolisme ou d'endocrinologie, domaines dont relève le Mediator. Je n'avais aucune compétence réglementaire, et je n'ai jamais monté aucun dossier, excepté celui de la pharmacologie du Coversyl en 1981 - j'en suis fier, ainsi que d'avoir signé en 1984 le premier papier sur ce médicament.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Vos équipes scientifiques n'ont-elles jamais douté de l'efficacité ou de la sécurité du Mediator ? Avaient-elles connaissance des études internationales mettant en cause la consommation d'anorexigènes, et des deux lettres des médecins de la sécurité sociale soulignant les inconvénients de l'Isoméride ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je manque de compétences sur la question.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Vous n'êtes, en somme, qu'un « transmetteur ». Mais qui, chez Servier, était chargé du suivi pharmacologique du benfluorex et donc responsable de cette note ? Vous n'ignorez pas que son segment-clé, d'après la liste établie par l'organisation mondiale de la santé (OMS) en 1950, désigne cette molécule comme un anorexigène, c'est indéniable.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je n'ai pas à porter de jugement sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Cela s'impose à tous. C'est un dérivé amphétaminique. Comment a-t-on pu dire que cette molécule n'avait rien à voir avec d'autres de la même famille ? Nous attacherions beaucoup de prix à l'original de la lettre, et souhaiterions connaître son auteur.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Vous en avez lu un extrait, j'en ai vu d'autres dans la presse. Les laboratoires Servier vous la feront parvenir. La directrice de l'information médicale était alors le docteur Antoinette Chanu, qui a dû se renseigner auprès des gens compétents parmi nos 22 000 collaborateurs.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Elle est médecin. Aujourd'hui à la retraite, elle travaillait chez Servier depuis une trentaine d'années.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Elle a écrit cette lettre sans le recours d'un pharmacologue ? Nous devrions l'auditionner et vous nous laisserez ses coordonnées. Mais avançons, comme me le suggère Mme le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

La propriété anorexigène du Mediator, à laquelle vous avez fait référence, monsieur le président, n'a jamais été donnée à ma connaissance comme indication thérapeutique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Les médecins prescripteurs lui ont prêté beaucoup sur ce point, à tort ou à raison. Ils l'ont prescrit souvent en lieu et place de l'Isoméride. Vos visiteurs médicaux ne les ont-ils jamais avertis des dangers de cet usage ? Avez-vous informé les médecins en les mettant en garde ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Ils l'ont prescrit dans l'« intimité du cabinet », mais il n'y a pas d'indication légale.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Si vous avez des documents de ce type, ils nous intéressent.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

L'industrie pharmaceutique, vous le savez, est très réglementée. Je suis certain que les laboratoires Servier faisaient la promotion du Mediator dans son indication, en tant qu'adjuvant du traitement du diabète.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Ce n'était pas le cas dans les années 1980, il était recommandé comme adjuvant du régime dans les hypertriglycémies, le « diabète » ne figurait pas.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je ne suis pas compétent pour vous répondre sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Tout médicament a des indications dans le Vidal qui est consulté par les médecins et les pharmaciens. Comment cela était présenté ? Avez-vous modifié les informations figurant dans le Vidal ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Encore une fois, je n'ai pas de compétence réglementaire. On trouve dans le Vidal la monographie acceptée par les autorités de tutelle. Les médecins avaient accès à une information validée par les autorités règlementaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Les laboratoires Servier n'ont pas présenté le Mediator comme anorexigène, mais des médecins l'auraient prescrit comme tel ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Mais nous sommes bien forcés de constater, comme le disait avant-hier le professeur Allemand, qui est une autorité incontestée, que 50 % des prescriptions s'effectuaient hors autorisation de mise sur le marché (AMM). Pourquoi ? Quelle est la part de responsabilité des laboratoires Servier ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je ne suis pas compétent pour en juger.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Vous le serez un peu plus en sortant de cette salle ! Il nous faudra bien comprendre pourquoi les médecins ont prescrit le Mediator comme un anorexigène et quelle est la responsabilité des laboratoires Servier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Un récent rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) met en cause une stratégie de positionnement du Mediator, menée dès l'origine par les laboratoires Servier, en décalage avec sa réalité pharmacologique ? Répondez-vous que le Mediator a été prescrit en dehors de son indication thérapeutique ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Jamais, de la première AMM jusqu'à la dernière, le Mediator n'a été indiqué comme anorexigène par les laboratoires Servier.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Jamais non plus l'hypertension artérielle pulmonaire ni les valvulopathies cardiaques graves n'ont été désignées comme d'éventuels effets indésirables de 1979 à 2009 ! C'est extraordinaire ! Alors que c'est la raison pour laquelle il a été finalement retiré.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Encore une fois, la notice du Vidal n'est que la copie de la monographie acceptée par les autorités de tutelle.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Je ne vous mets pas en cause. Je fais juste état d'une « étrangeté ». La réglementation est, en effet, du ressort de la commission d'AMM et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), mais le laboratoire peut ne pas inclure un médicament dans le Vidal.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

A combien les laboratoires Servier estiment-ils le nombre de victimes du Mediator ? Les estimations actuelles oscillent entre cinq cents et deux mille victimes.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Un médicament n'est pas là pour faire des victimes, ces dernières étant de toute manière toujours trop nombreuses. En tant que citoyen et pharmacologue, je suis choqué qu'un médicament fasse des victimes, et impatient de connaître les responsabilités de chacun. Je souhaite ardemment que le groupe Servier assume celles qui lui seront imputées, et je ne doute pas qu'il le fera comme d'autres laboratoires français ou internationaux l'ont fait en des cas semblables.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Quelles dispositions prenez-vous pour les patients qui ont consommé du Mediator dans le passé ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je ne suis pas impliqué dans le suivi thérapeutique. Les autorités sanitaires, l'Afssaps, la société française de cardiologie, les ordres des médecins et des pharmaciens ont formulé des recommandations et les autorités sanitaires ont pris des décisions. J'espère que le suivi sera efficace, car même ceux qui n'ont subi que des effets collatéraux doivent avec leur famille être au coeur de notre attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Par précaution, comptez-vous retirer du marché d'autres médicaments, y compris des génériques ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Dans le domaine de l'hypertension et des maladies cardio-vasculaires, pas à ma connaissance. Les autorités sanitaires françaises, européennes et internationales sont là pour effectuer cette surveillance. N'oublions pas les bienfaits des médicaments, qui permettent aujourd'hui de soigner certaines maladies cardio-vasculaires dont on pouvait décéder il y a vingt ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

Y a-t-il sur le marché des génériques composés de la même molécule que le Mediator ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Il n'y en a pas à ma connaissance !

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Non, en effet. Mais rappelons que l'autorisation de mise sur le marché des génériques est intervenue un mois avant le retrait du benfluorex, ce qui témoigne de la cohérence de la gestion de l'Afssaps !

Que pensez-vous du Vastarel ? Certes, c'est un vasodilatateur et non un antihypertenseur. Le journal Prescrire, il y a un an, estimait que sa balance bénéfice-risque était défavorable, et qu'il devait être retiré du marché. Je ne sais s'il figure sur la fameuse liste des soixante-dix-sept médicaments sous surveillance, où l'on trouve tout et n'importe quoi... Et je prends la responsabilité de ce que je dis.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Le Vastarel n'entre pas dans mon champ de compétence.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Encore. Mais la prochaine fois, nous saurons à qui nous adresser en cas de problème avec le Coversyl...

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Pour celui-là, en effet, j'en suis le découvreur et maintenant l'utilisateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

En tant que directeur d'une division scientifique chez Servier, vous êtes chargé d'informer les pharmacologues hospitalo-universitaires, gens doués d'une grande curiosité. Lorsqu'une collaboratrice du CHU de Brest vous a interrogé sur les similitudes entre l'Isoméride et le Mediator, ne vous êtes-vous pas demandé sur quoi elle fondait ses doutes ? N'avez-vous fait que transmettre cette question à vos services, simple « petit télégraphiste » ? Quant à la note produite par ceux-ci, n'avez-vous pas voulu connaître les raisons d'une position aussi radicale, contraire à l'avis des plus hautes sommités médicales ? Vous deviez sans doute vous attendre à ce que l'on vous interroge de nouveau à ce sujet.

Je ne puis croire que la société française de pharmacologie et de thérapeutique, dont vous êtes depuis longtemps trésorier, soit restée indifférente lorsque l'Isoméride a été interdit. La curiosité des chercheurs n'a-t-elle pas été piquée ? Je crains que votre patriotisme d'entreprise n'ait occulté à vos yeux des problèmes qui auraient dû vous interpeller en tant que citoyen.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je ne me souviens d'aucun commentaire au sein de la société savante lors du retrait du marché de l'Isoméride. La pharmacologie est une discipline transversale, chacun ayant son domaine de compétence ; je ne suis spécialiste que du domaine cardio-vasculaire, non de métabolisme ou d'endocrinologie.

Lors de ma visite à l'hôpital de la Cavale blanche de Brest, je l'ai dit, j'ai présenté dans le détail le Procoralan avec la responsable du centre régional de pharmacovigilance, et ce n'est qu'à l'issue de cet entretien qu'elle m'a interrogé sur les similitudes chimiques du Mediator et des fenfluramines. Je vous ferai parvenir la lettre que je lui ai adressée le 7 avril 2008 : les informations fournies étaient scientifiques et fondées sur des références bibliographiques.

Quant à mon patriotisme d'entreprise, je travaille chez Servier depuis trente-deux ans, et je suis fier des travaux auxquels j'ai contribué sur le traitement de l'hypertension. Il m'est insupportable que des médicaments puissent faire des victimes, et je suis sûr que lorsque les responsabilités de chacun seront élucidées, le groupe Servier saura assumer les siennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Pharmacien d'officine, j'ai eu fréquemment à délivrer du Mediator sur l'indication du Vidal, d'abord comme adjuvant du régime du diabétique, puis comme antidiabétique de premier rang. Je voudrais donc savoir si les études des laboratoires Servier ont été confirmées par d'autres travaux dans le monde, et si d'autres laboratoires internationaux se sont penchés sur cette indication thérapeutique. Comment les études ont été menées sur cette indication thérapeutique ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Ma spécialité est l'hypertension. Cela étant, en général, quand un laboratoire est propriétaire d'une molécule en termes d'utilisation commerciale, tous les scientifiques du monde peuvent obtenir des comprimés « en poudre » ou du principe actif afin de procéder à toutes les expériences qu'ils souhaitent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Il serait intéressant d'obtenir le résultat des études.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Ces études existent, comme l'étude Régulate. Ce sont elles qui ont conduit à la suspension de l'autorisation de mise sur le marché en raison des effets secondaires. L'étude du professeur Garattini notamment a montré que les effets du Mediator n'étaient pas différents de ceux des médicaments de référence comme l'Isoméride ou le Ponderal. Tout cela était connu depuis 1999. L'Afssaps a pourtant hésité pendant dix ans...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Je ne parlais pas de l'étude finale sur les effets secondaires mais de l'étude qui a initialement caractérisé le Mediator en tant qu'adjuvant à un régime antidiabétique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Ces informations figurent dans le rapport de l'Igas. La commission d'autorisation de mise sur le marché de 1987 a été très claire : elle ne reconnaît pas l'action du Mediator sur le diabète. Reportez-vous au rapport.

Autre point : quelles sont les modalités de financement de votre association et à quel niveau les subventions se situent-elles ? Le ministre a en effet critiqué le financement des sociétés savantes par l'industrie pharmaceutique.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Les comptes de la société sont présentés à l'assemblée générale qui les vote ; ils sont publics et déposés auprès des services fiscaux - je puis vous les transmettre.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Je ne dispose pas encore des comptes 2010, mais je ne doute pas qu'ils seront proches de ceux de 2009. Notre première recette est constituée des cotisations, soit 110 euros pour chacun de nos six cents à sept cents membres. Viennent ensuite les abonnements des deux journaux que nous publions, l'un en anglais, l'autre en français ; nous en assurons gratuitement le service à nos adhérents et ils sont distribués aux scientifiques et industriels. Cela représente entre 20 % et 25 % de nos ressources.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Nous n'avons pas de publicité - la pharmacologie n'est pas un bon vecteur. Nous avons des lecteurs dans le monde entier. Nos recettes proviennent de notre éditeur anglo-néerlandais et des abonnements, notamment des bibliothèques.

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Le congrès annuel constitue une autre source de recettes. Nous l'organisons avec la société de physiologie, avec qui nous en partageons les pertes et profits dans la proportion de deux tiers pour nous et un tiers pour elle. Viennent enfin les subventions qui représentent 6 % de notre budget. Parmi nos partenaires, l'on trouve des gens qui font du diagnostic et des fournisseurs de matériel expérimental.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Hermange

La mission d'information sur le Vioxx avait noté l'omniprésence des laboratoires dans la formation médicale. Faut-il réformer ce système et comment restaurer la confiance ?

Debut de section - Permalien
Pierre Schiavi

Il faut la restaurer. C'est même urgent quand des personnes ne se font plus vacciner ou que des malades se détournent de médicaments qui sauvent des vies. Je ne puis qu'aller dans votre sens. Les analyses de votre mission peuvent y contribuer : l'on doit identifier les responsabilités et en tirer les conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Je vous remercie d'avoir répondu avec précision à nos questions, même si vous n'étiez pas le bon interlocuteur pour toutes.