Commission des affaires économiques

Réunion du 23 octobre 2007 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • RFF
  • ferroviaire
  • fret
  • péages

La réunion

Source

La commission a procédé à l'audition de M. Hubert du Mesnil, président du conseil d'administration de Réseau ferré de France (RFF), accompagné de MM. Jean-Marc Delion, directeur général délégué, et Alain Sauvant, chef du service économie et activités ferroviaires, dans le cadre des travaux du groupe de travail « Transports terrestres ».

Debut de section - Permalien
Hubert du Mesnil

Rappelant que RFF avait été créé en 1997 pour aménager et développer le réseau ferroviaire national, M. Hubert du Mesnil a précisé que, quel que soit le mode de l'investissement ferroviaire, RFF en assumait le financement en collectant les moyens nécessaires. Il a distingué les projets sous maîtrise d'ouvrage directe de RFF et sous maîtrise d'ouvrage déléguée et les projets inscrits dans le cadre d'un partenariat public privé (PPP). Il a souligné que l'article 4 du décret portant les statuts de RFF lui interdisait de créer de nouvelles dettes en sus de la dette ferroviaire que RFF avait reprise à sa création. Cela signifiait que la rentabilité propre du projet devait couvrir l'investissement nouveau. La différence entre le retour sur investissement du projet et le coût de l'opération devait être couverte par des subventions des collectivités publiques, c'est-à-dire pour l'essentiel de l'Etat ou des collectivités territoriales et, dans une moindre mesure, de l'Union européenne. Il a ensuite cédé la parole à M. Alain Sauvant, chef du service économie et activités ferroviaires de RFF, qui a présenté un diaporama. Celui-ci a permis :

- de distinguer l'évaluation socio-économique des projets, qui mesure leur intérêt pour la collectivité, et l'évaluation financière qui porte sur l'intérêt des projets pour l'entreprise RFF. Il a souligné que l'évaluation socio-économique accorde une importance excessive aux gains de temps de parcours associés aux projets, qui joue par exemple au détriment des projets spécifiques au fret. Il a précisé que tous les projets coûtant plus de 23 millions d'euros faisaient l'objet d'évaluations socio-économiques et financières ;

- d'apporter des précisions sur le retour d'expérience. En effet, d'une part, la loi d'orientation sur les transports intérieurs (LOTI) prévoit des bilans sur les projets de plus de 83 millions d'euros cinq ans après leur mise en service ; d'autre part, une évaluation a posteriori a également été menée pour les cinq lignes à grande vitesse (LGV) et sur quelques projets du réseau classique. Ces retours d'expérience ont permis de mettre en évidence que les prévisions de trafic sont réalistes, avec des marges d'erreur de 10 à 20 %. On constate une exception notable dans le cas du trafic trans-Manche, très inférieur aux prévisions ;

- de rappeler les ordres de grandeur de l'activité de RFF. Ses dépenses d'investissement vont représenter un peu moins de 3 milliards d'euros en 2007, avec la ventilation suivante : 1,1 milliard d'euros pour les grands projets, 1 milliard d'euros pour le renouvellement du réseau, 400 millions d'euros dans le cadre des contrats entre l'Etat et les régions et 200 millions d'euros pour d'autres investissements, notamment l'amélioration de l'accessibilité des personnes à mobilité réduite ou la suppression de passages à niveaux. Par ailleurs, RFF verse 2,6 milliards d'euros à la SNCF dans le cadre d'une convention de gestion pour l'entretien et l'exploitation du réseau. En face de ces dépenses, les recettes de péages ne représentent que 2,6 milliards d'euros, soit 45 % du coût total de l'infrastructure ferroviaire. Les subventions se montaient à 2,2 milliards d'euros. Enfin, il faut souligner que RFF perd environ 400 millions d'euros chaque année, ce qui constitue l'une des failles du dispositif actuel ;

- de mettre en évidence que l'effort de financement de l'infrastructure ferroviaire se répartit nécessairement entre les clients et le contribuable, en fonction des arbitrages politiques des pouvoirs publics ;

- de souligner l'ambition des objectifs fixés à RFF, puisque, d'une part, l'enveloppe des contrats de projet a été multipliée par 2,3, pour atteindre 7 milliards d'euros sur la période : on passe ainsi d'environ 400 millions d'euros par an d'investissements dans ce cadre à près d'un milliard d'euros par an ; d'autre part, les investissements pour les grands projets doivent être portés d'1 à 3 milliards d'euros par an. Enfin, le besoin d'investissement pour la maintenance du réseau existant va passer d'1 à 2 milliards d'euros par an.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Delion, directeur général délégué de RFF

en a conclu qu'il serait sans doute difficile à la collectivité nationale de fournir cet effort, ce qui impose de faire des choix et d'établir des priorités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

après avoir rappelé que le groupe de travail avait notamment vocation à dégager les financements nécessaires à la poursuite de l'action de l'AFITF, a demandé quelles marges de manoeuvre offraient les PPP.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

a jugé nécessaire, dans ce cadre, de définir quels sont les besoins prioritaires de la collectivité nationale, à 10, 20 ou 30 ans. Il a également souhaité savoir quelles étaient les relations de RFF et du ministère de l'économie et des finances et quelle analyse pouvait être faite sur la situation du fret ferroviaire. Enfin, il a souhaité savoir si les prévisions de rentabilité du TGV-Est étaient tenues.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

a déclaré que tous les membres de la commission avaient le souci du rééquilibrage modal. Il a également jugé que la France avait pris du retard sur le tram-train. Il a souhaité savoir quelle évaluation pouvait être faite des besoins d'investissement pour développer le fret ferroviaire et le transport ferré de proximité. Il a également demandé quelle était la part de l'infrastructure dans le prix d'un billet de train, si les procédures actuelles de travaux étaient les plus économiques et si pouvait être envisagée la mise en place de sillons réservés au transport grandes lignes entre Paris et Rouen.

Debut de section - PermalienPhoto de François Gerbaud

a demandé si les critères d'évaluation socio-économiques des projets étaient pertinents. Il s'est également interrogé sur l'ambition des programmes de LGV et a considéré qu'il convenait sans doute, au vu des conclusions de l'audit sur le réseau, de se déprendre du rêve de la grande vitesse au profit de l'entretien du réseau existant. A ce titre, il estimait par exemple qu'une liaison grande vitesse Limoges-Poitiers n'était pas justifiée.

En réponse à ces différents intervenants, M. Jean-Marc Delion a précisé que RFF pourrait réinvestir ses profits dans l'activité ferroviaire si les projets permettaient de dégager de telles marges, ce qui n'était pas le cas ; cela imposait donc un recours aux contribuables. RFF avait à coeur d'améliorer l'exécution des projets et les PPP pouvaient permettre de réaliser des gains de ce point de vue, même s'ils n'étaient pas encore limités.

Debut de section - Permalien
Hubert du Mesnil

a précisé que les PPP, malgré leur intérêt, ne pouvaient rendre rentable un projet qui ne l'était pas. En outre, RFF n'avait pas vocation à pousser par principe à la réalisation de projets ferroviaires, l'utilité pour la collectivité devant être le critère déterminant. En tout état de cause, la décision revenait, in fine, à l'autorité politique, nationale ou territoriale. Il a regretté à son tour que les critères d'évaluation donnent une importance trop grande au gain de temps et émis le souhait que le Grenelle de l'environnement puisse être l'occasion d'améliorer les critères d'évaluation des projets. Il a également estimé que l'échec du fret ferroviaire en France n'était pas imputable à un manque d'investissement, mais à des carences organisationnelles et de qualité de service. En revanche, il était vrai que lorsque le trafic fret croîtrait à nouveau, des investissements seraient nécessaires, en particulier pour contourner les grandes agglomérations. Prenant l'exemple du contournement de Nîmes et Montpellier, il a estimé que les critères actuels d'évaluation ne permettaient pas de rendre compte de l'intérêt réel de cet investissement. Il a également jugé que l'amélioration de la desserte ferroviaire des grands ports était nécessaire et d'un coût supportable. Il a abondé dans le sens de M. Charles Revet quant au retard en matière de fret et de transport ferré de proximité, car des investissements modiques avaient été par trop différés. La France était ainsi le seul grand réseau à ne pas avoir automatisé et regroupé ses postes de commande. RFF avait donc lancé des travaux en ce sens, qui ne seront achevés que dans quinze ans. Il a enfin jugé indispensable que les investissements de création de 1.600 kilomètres de lignes nouvelles ne fassent pas oublier la nécessité de rajeunir et rénover les 27.000 kilomètres de lignes existantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a estimé que RFF ne pouvait continuer à perdre 400 millions d'euros par an. Rappelant que certains considéraient que RFF devrait augmenter ses péages, il a souhaité savoir comment était calculé leur prix, si RFF envisageait effectivement de les alourdir et s'il existait, en ce domaine, une convergence entre pays européens. Il a également déclaré que l'amélioration de la desserte ferroviaire des grands ports était une priorité. Enfin, il a souhaité disposer de la liste des investissements dont les évaluations a posteriori avaient montré que leur intérêt était discutable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

s'est étonné de ce que RFF ne semble pas suivre les recommandations du rapport Rivier d'audit du réseau. Ainsi, sur la ligne Les Aubrais-Vierzon-Toulouse, les travaux de réfection étaient limités au remplacement du ballast, alors même que l'on conservait les rails actuels, qu'il conviendrait de changer dans dix ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

a souhaité savoir comment se calculait le versement de RFF à la SNCF pour l'entretien du réseau, si on pouvait réellement transférer le fret de la route au rail et quels étaient les itinéraires ferroviaires les plus rentables.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

a souhaité savoir comment était pris en compte l'aménagement du territoire dans l'évaluation des projets, au delà de la seule rentabilité. Par ailleurs, l'analyse selon laquelle les années 1990 avaient vu un surinvestissement ferroviaire impliquait-elle que l'on assiste à l'avenir à une réduction du réseau ?

Debut de section - Permalien
Hubert du Mesnil

a répondu par la négative à M. Claude Biwer concernant une éventuelle réduction du réseau. Il a fait valoir, d'une part, qu'il revenait à l'Etat, et non à RFF, de prendre les décisions dans ce domaine et, d'autre part, qu'il était dans l'intérêt de RFF de voir le trafic se développer. Quant à l'aménagement du territoire, il s'agissait là d'une considération de nature politique et non économique, sur laquelle RFF ne pouvait se prononcer. Il a ensuite reconnu que les péages n'étaient pas assez élevés, mais que leur augmentation était toujours délicate, dans la mesure où RFF était en situation de monopole. La prudence s'imposait donc dans ce domaine. Il a précisé que la part de l'infrastructure représentait 25 à 30 % du billet sur les LGV, mais moins de 10 % sur le fret, soit un prix inférieur de moitié à celui pratiqué en Allemagne. Il a estimé qu'il était sans doute possible d'augmenter les péages sur les LGV, alors que cela paraissait difficile en matière de fret au vu de la situation actuelle du secteur. Toutefois, il faudrait envisager à terme de relever le prix des péages également en matière de fret, ce qui correspondait du reste à la conception des chargeurs, qui étaient disposés à payer plus cher un produit de meilleure qualité. Il a également estimé que des modulations des péages pour des raisons d'aménagement du territoire pouvaient être envisagées. Enfin, il a abondé dans le sens de M. Michel Teston quant au fait que les recommandations du rapport Rivier n'étaient pas respectées en matière de régénération du réseau. Il convenait de mener les opérations de rénovation nécessaires, mais cela supposait une contractualisation avec l'Etat pour pouvoir disposer d'une perspective pluriannuelle des investissements de rénovation.