Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède, conjointement avec la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire, à l'audition de Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique, sur l'aménagement numérique du territoire et la feuille de route « Très haut débit ».
Madame la ministre, soyez la bienvenue. Nous travaillons depuis 48 heures sur les questions numériques et plus particulièrement sur la fibre.
ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique. - Je suis très heureuse de vous présenter aujourd'hui « France-Très haut débit », la stratégie du gouvernement pour la couverture du territoire à dix ans. Comme le projet du Grand Paris, il s'agit d'un enjeu essentiel pour la France, son attractivité et son développement économique.
Je voudrais rendre hommage à l'implication de l'ensemble des parties prenantes qui l'ont rendue possible. Au cours de ces derniers mois, toutes les pistes de financement ont été regardées, tous les modèles économiques débattus. Nous avons pu nous nourrir notamment des travaux des sénateurs Leroy et Maurey, dont l'Assemblée nationale a examiné la proposition de loi le 22 novembre dernier, et nous nous sommes appuyés sur les porteurs de projets, dont certains sont parmi vous.
Le Président de la République et le Premier ministre ont déjà présenté les grandes lignes de notre stratégie et le Gouvernement a toujours été très clair : l'objectif de long terme - au-delà de dix ans - est la fibre optique, enjeu industriel tout autant qu'assurance d'un investissement pérenne.
Notre stratégie donne donc la priorité à l'accompagnement du déploiement de la fibre. Elle vise également à apporter rapidement des solutions concrètes à nos concitoyens car la fracture numérique est insupportable. Nous agirons donc sans dogmatisme, en mobilisant l'ensemble des financements et toutes les technologies envisageables : fibre, montée en débit sur cuivre et sur câble coaxial, technologies hertziennes et satellitaires si nécessaire.
Dans de nombreux territoires - certains territoires ruraux ou périurbains - la montée en débit peut assez rapidement constituer un gain pour les utilisateurs. L'État accompagnera les projets en privilégiant l'accompagnement pour les déploiements de la fibre optique et en se concentrant donc sur la partie réutilisable.
Le réseau câblé sera également pris en compte, l'un de nos objectifs étant qu'en 2017, près de la moitié des foyers français soit éligible au très haut débit et tous à un haut débit de qualité.
Le schéma de déploiement repose sur la complémentarité entre les déploiements menés par les opérateurs privés et par les collectivités territoriales. Ce schéma est celui qui permettra la mise en oeuvre la plus rapide de la stratégie gouvernementale. Le déploiement par un opérateur unique national ou par des utilities régionales s'appuyant sur des fonds d'investissement à long terme a été étudié mais il manque de crédibilité industrielle et pourrait occasionner des retards préjudiciables en matière de croissance.
Dans la mesure où nous nous appuierons en partie sur les opérateurs privés - qui sont les plus à même de développer les usages - il est essentiel que leurs intentions de déploiement soient transparentes. C'est la condition d'une bonne articulation de leur action avec celle des acteurs publics au bénéfice de tous.
Au niveau local, les intentions d'investissement des opérateurs privés se concrétiseront par des conventions tripartites que nous souhaitons équilibrées. Une convention type sera publiée par la mission très haut débit (THD) avant fin juin. Les négociations seront l'occasion de discuter des calendriers de déploiement zone par zone, y compris en discutant sur une évolution des priorités, de façon à tenir compte des besoins urgents. Je souhaite que l'ensemble des opérateurs ait, sous l'égide de l'État, ce dialogue avec les collectivités et avec les porteurs de projets départementaux, interdépartementaux ou régionaux.
Pour les collectivités couvertes par les opérateurs privés, il s'agit de s'engager à faciliter les déploiements, par exemple en assouplissant les autorisations de voierie ou en faisant de la pédagogie auprès des bailleurs et des syndics pour accélérer l'équipement des immeubles.
Il ne pourra y avoir de réseaux d'initiative publique (RIP) pérennes s'ils sont concurrencés par d'autres réseaux en fibre. Les projets intégrés de manière inconditionnelle ne bénéficieront donc pas d'un accompagnement public. En revanche, les projets intégrés conditionnels seront étudiés attentivement car ils peuvent constituer un palliatif, lorsque les intentions de déploiement des opérateurs privés ne se concrétisent pas.
La mission THD actuelle préfigure une structure de pilotage nationale qui aura pour objectif d'agir dans la durée et d'apporter son appui à l'action locale. Elle sera aussi le guichet recevant toutes les questions des collectivités et sera en charge de l'harmonisation des déploiements.
Nous allons mobiliser les services déconcentrés de l'État, les préfets, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), les interlocuteurs privilégiés des collectivités locales qui seront, sur le terrain, des relais de la mission THD.
L'étude des projets doit reprendre au plus vite. Nous révisons actuellement le cahier des charges des projets RIP éligibles aux aides de l'État dans la mesure où notre accompagnement financier sera plus favorable que dans l'ancien cadre : les projets des collectivités pourront bénéficier d'une aide de 50 %, contre 35 % aujourd'hui en moyenne. Il n'y aura pas d'enveloppe réservée pour la montée en débit, ou la fibre jusqu'à l'abonné. Ce qui importe pour le gouvernement, c'est d'accompagner le déploiement d'infrastructures pérennes.
Notre cahier des charges sera prêt dans quelques jours et publié dès le début du mois d'avril. Il sera présenté au comité des réseaux d'initiatives publiques (CRIP) que nous réunirons de nouveau dans quelques jours. Sa présidence sera confiée au préfet Pierre Mirabaud, qui dirigeait jusque récemment le pôle territorial du Commissariat général à l'investissement (CGI). Nous souhaitons que le CRIP devienne une instance de concertation sur le sujet du très haut débit, y compris en évoquant des sujets non directement liés aux projets déposés par les collectivités.
La couverture du territoire en très haut débit d'ici dix ans représente un investissement de 20 milliards d'euros. Les opérateurs en apporteront les deux tiers : 6 milliards d'euros d'investissements directs dans les zones les plus denses et, progressivement, 6 autres milliards d'euros dans les zones les moins denses, rurales et périurbaines, par le biais des redevances versées aux collectivités locales pour l'utilisation de leurs réseaux.
Les pouvoirs publics apporteront le dernier tiers sous la forme de subventions. 3 milliards d'euros d'aides sur 10 ans seront mobilisés par l'État au profit du déploiement des réseaux dans les zones peu denses et d'une péréquation entre les territoires. 3 autres milliards seront apportés par les collectivités territoriales porteuses de projets de déploiement dans ces zones. L'État accordera aussi des prêts à long terme et à taux faible afin d'étaler dans le temps la charge financière.
Nous financerons l'accompagnement de l'État grâce aux 200 millions d'euros annuels de surplus de redevance sur les fréquences 1 800 Mhz, qui s'ajouteront au reliquat des sommes allouées au très haut débit par le Grand emprunt. Pour le complément, qui représente quelques dizaines de millions d'euros, le gouvernement ne retient pas l'option d'un prélèvement sur les abonnements mais une contribution du secteur, destinée à assurer la péréquation, est en revanche à l'étude. Une taxe sur les infrastructures cuivre, d'une à deux dizaines de centimes par mois et par paire de cuivre, pourrait être retenue dans le cadre du prochain projet de loi de finances. Ce montant étant proche des variations du coût de la paire de cuivre observées chaque année, ce sera sans effet sur la facture du consommateur.
Les prêts aux collectivités seront financés par les fonds issus du doublement du plafond du Livret A. Leur maturité est longue, entre 20 et 40 ans, et leurs taux faibles, adaptés à l'importance des chantiers.
Dans le contexte budgétaire actuel, la réponse du gouvernement n'est pas l'austérité mais la définition de priorités, pour continuer à investir dans l'avenir. Au total, 15 000 à 20 000 emplois directs devraient être créés, notamment dans le génie civil et l'équipement des logements.
Enfin, le gouvernement s'est clairement positionné pour agir sur la question de l'extinction du réseau cuivre. La question est regardée de près chez Orange.
Comme l'exemple de l'Australie le montre, le dossier de l'extinction du cuivre est extrêmement complexe, présentant de nombreux aspects juridiques, économiques et concurrentiels.
Une mission sera lancée dans les prochaines semaines sur ce sujet ; autour d'une personnalité reconnue du secteur des télécoms, je souhaiterais que puissent être associés des parlementaires, deux sénateurs et deux députés. Cette mission prendra nécessairement du temps et son objectif est clair : préciser les conditions et le calendrier de l'extinction du cuivre. Je souhaite qu'elle puisse intégrer les retours de l'expérimentation menée à Palaiseau, en particulier quant à ses effets sur les services à la population.
L'aménagement du territoire ne peut se concevoir sans cette espérance du haut débit. Si l'égalité entre territoires demeure un horizon à atteindre, celle entre les citoyens est peut-être possible grâce au très haut débit. Pour nous, élus de la ruralité, elle fait figure de dernier espoir. Je laisse la parole, en les remerciant de nouveau pour la qualité de leurs travaux, à nos collègues spécialistes du sujet et, en premier lieu, à Yves Rome et Pierre Hérisson.
Cette feuille de route débouche, enfin, sur des propositions concrètes et cohérentes, qui impulseront de la croissance et redonneront de la compétitivité dans un contexte particulièrement difficile. Belle ambition, qui mériterait d'être consolidée par une loi, car cette opération doit durer une décennie, et servir pour cinquante ans : donnons-lui pour support le marbre de la loi. J'espère que le Premier ministre y sera favorable.
Vous annoncez la création d'un établissement public pour accompagner les collectivités territoriales. Celles-ci sont indispensables au dispositif : n'oublions pas que les moyens d'investigation de l'État ont été appauvris sous les gouvernements précédents, quand les capacités d'expertise des collectivités territoriales se sont étoffées. Il convient donc de constituer, en associant aussi les opérateurs, pour reprendre la formule que mon collègue Pierre Hérisson et moi-même avons mise en tête de notre rapport, le « triple play » de la réussite.
Le pilotage national que nous attendons ne doit pas être uniquement technique ; il doit associer les collectivités territoriales dans le choix des projets éligibles, comme cela s'est fait dans le passé.
Utiliser un mix technologique pour combler les déficits des territoires, pourquoi pas ? Veillons toutefois à subordonner la montée en débit à la condition qu'une partie puisse être réutilisée pour le très haut débit, et qu'elle ne s'opère pas là où les territoires ont décidé de créer leur propre réseau en fibre optique.
Il est nécessaire en effet de laisser la porte ouverte sur le haut débit pendant quelque temps. Vous avez mentionné l'objectif de 2017, qui est à la fois très proche et très important. Avoir du très haut débit va nécessiter de passer par un certain nombre de procédures administratives.
Il ne faut pas gêner le déploiement du très haut débit par la fibre optique, ni limiter la montée en débit des secteurs qui seront les derniers desservis par celle-ci : équilibre subtil. Il est nécessaire de préciser l'encadrement législatif et réglementaire. Par exemple, l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales est-il encore suffisamment précis ? Ne faut-il pas le compléter ?
L'extinction du cuivre pose certains problèmes : il faut tenir compte du fait que le service universel est une des obligations de l'opérateur historique, et qu'il est propriétaire de l'ensemble du réseau en cuivre, ou câblé. Il y aura donc une problématique de transfert de propriété, ou de dédommagement, en tous cas un aspect financier qui se chiffre en dizaines de milliards d'euros. Je rappelle que l'État français est un actionnaire important de l'opérateur historique.
La parole est à Bruno Retailleau, qui est membre du conseil national du numérique.
Madame la ministre, je pense que le schéma que vous nous avez présenté va dans le bon sens. Vous avez évité la tentation de la tabula rasa, ce qui est sage et témoigne de votre compréhension du sujet, qui réclame un cadre stable pour tous les acteurs. Vous êtes à juste titre prudente sur le basculement du cuivre. Vous avez rejeté l'idée irréaliste des sanctions, mais un suivi longitudinal est nécessaire : des systèmes d'alerte doivent permettre de suivre chaque année le déploiement des réseaux par les opérateurs et d'anticiper les défaillances éventuelles sur les zones d'appel à manifestation d'intention d'investissement (AMII). Ce sera une des missions de l'observatoire qui sera, j'imagine, logé dans l'établissement public, que vous avez eu raison de préférer au groupement d'intérêt public (GIP), affirmant ainsi le rôle de l'État stratège. L'État ne doit pas se confondre en effet avec les intérêts privés des opérateurs, non plus qu'avec les intérêts publics des collectivités territoriales, mais il doit avoir sa propre expertise indépendante.
Comment s'articulera le financement ? Le prêt de long terme à taux bonifié sur de l'épargne réglementée couvrira-t-il la partie de l'investissement public sur lequel les collectivités territoriales attendront un retour ? La subvention rehaussée à 50 % est importante : comment l'articulation avec le CGI se fera-t-elle ? Quel sera le guichet pour les collectivités ? Ma collectivité avait été l'une des premières à avoir une subvention, à un taux moindre, mais vous aviez indiqué qu'il y aurait un rattrapage. Un mécanisme de péréquation me paraît indispensable.
La loi de modernisation de l'économie date de cinq ans, le cadre réglementaire de deux ans, il y a des obstacles concrets très particuliers, qui seront du ressort de l'établissement public. L'animation et le soutien territorial ont fait le succès du passage de la télévision hertzienne au numérique, nous devons nous en inspirer.
Je salue l'approche réaliste qui a présidé à l'élaboration de cette feuille de route : certains aspects du plan précédent ont été retenus, d'autres remis en cause. En matière de gouvernance en particulier, je citerai la reconnaissance des collectivités locales, avec un soutien fort de l'État pour la réalisation du réseau dans les zones les moins denses. Comment traiter le non-respect par les opérateurs d'engagements pris, en particulier dans les zones AMII ? La généralisation de conventions entre opérateurs privés et collectivités permettra à celles-ci de prendre le relais. L'observatoire des déploiements veillera à la bonne exécution de ces conventions. Le choix d'une extinction progressive du cuivre me paraît raisonnable, et le basculement des abonnés vers la fibre optique en découle.
Quelle structure portera les crédits de 300 millions d'euros par an qui seront mobilisés pour accompagner les collectivités locales ? S'en tiendra-t-on au fonds d'aménagement numérique du territoire (FANT), créé par la « loi Pintat » de 2009, qui n'a jamais été alimenté ? Ou faut-il créer une autre structure ?
Cette feuille de route marque le retour de l'État stratège, qui reprendra des missions effectuées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). S'agit-il d'une nouvelle organisation de la régulation ?
Représentant le monde rural, j'adhère à votre discours, qui est rassurant. Mais nous sommes habitués depuis longtemps à observer un décalage entre les projets et la réalité. Vous prévoyez qu'en 2017 la moitié de la population française sera éligible au très haut débit, et à terme 92 % ou 93 % ; je représente les 5 % de Français qui ne seront pas couverts mais qui attendent, et sont impatients. On parle à Paris de la 4G ; pour eux c'est une véritable provocation. Le développement économique nécessite aujourd'hui le haut débit. Nous avons besoin de crédibilité, et les territoires ruraux ne doivent pas être les derniers servis. Pour la téléphonie mobile, certains endroits sont restés des zones blanches : les opérateurs ont privilégié les opérations rentables et isolé certains territoires en alléguant des coûts trop importants, sans que les collectivités puissent compenser.
Le Fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACE) a été créé un peu avant la guerre, et a aidé à l'électrification du monde rural après celle-ci. La solidarité s'exprimait par cette péréquation. La contribution au service public de l'électricité (CSPE) a pris le relais. Si on ne crée pas un tel mécanisme dans le haut débit, des parties entières du monde rural seront oubliées, ce qui serait contraire au principe d'égalité des citoyens.
Je vous prie d'excuser l'absence d'Hervé Maurey, retenu en séance, qui suit cette question de très près. Je représente donc le groupe UDI. Les opérateurs me paraissent comparables à des cyclistes sur une piste de vélodrome : ils font du surplace ! Comment allez-vous leur injecter un peu d'adrénaline pour les inciter à pédaler ?
Il serait simple d'instaurer une taxe sur la consommation et l'abonnement alimentant le fonds d'aménagement numérique, ce qui aiderait à une mutualisation et à un rapprochement entre l'urbain et le rural. Pourquoi avez-vous renoncé à cette solution ?
Vous demandez, en somme, pourquoi on ne créerait pas un FACE numérique.
Je suis bien convaincue qu'un véhicule législatif est nécessaire, ne serait-ce que pour procéder à la création de l'établissement public. Nous réfléchissons à un projet de loi qui concernerait les infrastructures de communication.
Les collectivités territoriales seront associées au pilotage de l'établissement public, d'autant plus qu'elles disposent d'une expertise technique de qualité. Ce pilotage sera technique et financier, puisque cet établissement public a vocation à être le guichet unique, pour les subventions comme pour les prêts - quitte à réorienter, pour le paiement, vers d'autres établissements.
La montée en débit doit être encadrée pour qu'elle se fasse en cohérence avec les projets départementaux et régionaux ; j'y insiste tout particulièrement dans mes discussions avec Orange.
L'article du code général des collectivités territoriales que vous avez cité pourrait être évoqué dans le cadre de la discussion sur le projet de loi sur la décentralisation, dont le premier titre aborde l'aménagement numérique du territoire.
Je viens de lancer l'appel à candidature pour le service universel, qui intègre la fibre optique et plus seulement le cuivre : nous sommes donc bien dans le cadre du plan France-Très haut débit.
Je comprends votre crainte que la montée en débit privilégie certains territoires et que la situation s'éternise pour les derniers servis. Il paraît difficile d'expliquer à certains de nos concitoyens qu'ils vont devoir attendre dix ans pour avoir accès à un débit de 100 Mbit/s. Les investissements réutilisables pour la montée en débit pourront donc être aidés par l'État. Mais il ne sera pas possible d'équiper la totalité du territoire avec la fibre dans les dix prochaines années. Nous nous engageons sur le très haut débit pour tous à cette échéance, avec pour objectif final que tous les habitants soient reliés à la fibre optique.
L'extinction du cuivre est un enjeu véritable en termes de bilan pour Orange. L'exemple australien est intéressant : le choix retenu a été d'indemniser l'opérateur dans des proportions importantes afin que, dès qu'il déploie un réseau de fibre dans une zone, il mette le réseau de cuivre en extinction. Nous demanderons aux Australiens des précisions sur le modèle financier qu'ils ont utilisé. Les Allemands ont fait le choix du vectoring, qui est certes moins coûteux, mais moins adapté aux futurs usages : notre choix est le plus pérenne car nous ne souhaitons pas nous engager dans un chantier qui réclamera dans cinq ans de nouveaux investissements.
Le suivi des investissements est une véritable préoccupation. La mission THD travaille à la mise en place d'un observatoire semestriel des déploiements en très haut débit tant publics que privés, sous l'angle national, départemental et communal, afin de suivre l'état d'avancement du plan. Cet observatoire devrait publier de premiers résultats avant la fin de l'année.
L'établissement public a pour vocation de pérenniser la mission THD, en lui donnant les moyens nécessaires.
Les caractéristiques des prêts sont en cours de finalisation. Le Président de la République a annoncé que les taux seraient faibles. La Banque européenne d'investissement (BEI) est disposée à offrir des prêts complémentaires à de bonnes conditions.
La mission THD sera l'opérateur unique pour les collectivités territoriales : elle instruira toutes les demandes de prêt et de subvention, puis un contrôle de qualité sera effectué par le CGI.
Le passage à la télévision numérique terrestre est en effet un bon modèle pour l'extinction du cuivre : nous nous en inspirons.
Madame la ministre, vous n'avez pas répondu à la question la plus pertinente de Bruno Retailleau : qui sera servi le premier ? Comment se fera concrètement cet apport de l'État ?
Les premiers servis seront les premiers à déposer leur dossier. Seize dossiers ont déjà été présentés au Fonds national pour la société numérique (FSN).
Oui, mais tous les besoins seront couverts. Rien ne sert de courir !
Jusqu'à présent, en l'absence de lieu d'expertise de l'État, le CGI était à la fois instance d'instruction et instance de décision. La création de l'établissement public va faire revenir le CGI à un fonctionnement classique.
Ce fonctionnement avait été positif : onze dossiers avaient été validés.
Ces dossiers peuvent être soumis de nouveau, puisqu'ils peuvent prétendre à davantage à présent.
Oui, mais en instruisant le dossier avec soin. Nous souhaitons que les choses s'engagent rapidement.
La transparence sera le maître mot dans les déploiements. La posture d'attente qui a prévalu jusqu'à présent devrait céder la place à une dynamique plus prononcée. Ce que vous appelez le triple play de la réussite va pousser les opérateurs à respecter leurs engagements : l'obligation, y compris dans les zones denses, de formaliser un contrat-type, dont les engagements seront contrôlés par un observatoire, est de nature à les inciter à agir.
La structure qui portera les crédits qui seront votés dans le projet de loi de finances sera le FSN. Les crédits résiduels seront mobilisés par la mission THD. L'essentiel est que l'État se soit engagé à fournir les crédits.
Notre démarche envers le monde rural est pragmatique. Nous souhaitons rendre prioritaires les zones les moins denses, particulièrement mal servies, ce qui devient insoutenable. Nous avons besoin pour cela que les schémas présentés par les collectivités territoriales aillent dans ce sens. Le conseil régional de Bretagne a choisi de poser une nouvelle prise en zone rurale pour chaque nouvelle prise urbaine. L'Auvergne est aussi en pointe, grâce à la priorité aux zones rurales décidée par les conseils généraux. Les départements ruraux ont vocation à être beaucoup plus subventionnés que les autres, puisque les subventions sont destinées aux zones les moins rentables.
Du surplus de redevance résultant du déploiement de la 4G : les opérateurs ont besoin d'utiliser des fréquences supplémentaires.
Vous affirmez donc que chaque année l'État consacrera 300 millions d'euros aux zones rurales. Dont acte.
Oui, aux zones non denses, qui peuvent aussi être des zones périurbaines.
Vers la mi-avril.
Nous avons écarté l'idée d'une taxe sur le consommateur : c'est un choix politique. Actuellement, une taxe même minime ne serait pas bienvenue, même si les abonnements sont plutôt moins chers qu'ailleurs en Europe. L'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), en revanche, me paraît vertueuse : c'est une taxe dont le produit est utilisé dans le secteur sur lequel elle est prélevée.
Quand le basculement du cuivre s'opérera, il ne faudra pas oublier l'IFER !
Le Président de la République s'est engagé vis-à-vis des opérateurs à une stabilité fiscale. Certes, ils ont connu des marges importantes pendant des années, mais ce n'est plus le cas. Il n'y aura plus de prélèvement dont le produit ne soit pas affecté au secteur. Ce message clair était attendu, et me semble de nature à les inciter à accroître leurs investissements.