Déposé le 9 décembre 2010 par : MM. Milon, Leclerc, Mme Desmarescaux.
Après l'article 147, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les reclassements intervenus, sans perte de rémunération pour les salariés, en application de l'article 7 de l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002 portant rénovation de la Convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, sur la base de la position occupée sur l'échelle ou la grille indiciaire au 30 juin 2003.
La Convention collective nationale du 31 octobre 1951 a fait l'objet d'une rénovation de grande ampleur au cours de l'année 2002. Le travail de négociation menée par la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (FEHAP), d'une part, et par les organisations syndicales représentatives du secteur privé à but non lucratif, d'autre part, a abouti à la signature d'un avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002. Il convient de souligner que ce dernier a reçu la signature des organisations syndicales majoritaires participant à la négociation : la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC.
Ce nouveau texte a modifié les règles de calcul des rémunérations en remplaçant les grilles indiciaires par des coefficients définis par métier. Le nouveau dispositif traduit l'évolution de carrière par l'application d'un pourcentage d'ancienneté fixe de 1 %, dans la limite de 30 %. Ce système a été complété par l'instauration d'une indemnité de carrière qui a pour objet de garantir, le cas échéant, à chaque salarié, une rémunération globale égale à celle qu'il aurait perçue selon l'ancien mécanisme.
En effet, entre les partenaires sociaux, il a été convenu que la rénovation de la Convention collective ne devait engendrer aucune baisse de salaire. L'entrée en vigueur de l'avenant, agréé par arrêté ministériel du 26 avril 2002 (J.O. du 04.05.02), a donc permis de maintenir des rémunérations équivalentes voir supérieures à celles qui auraient été versées sous le régime antérieur.
Toutefois, malgré ces garanties, certains salariés ont saisi la justice aux fins d'obtenir la prise en compte, pour la détermination de l'ancienneté, non pas de leur position sur l'ancienne échelle ou grille indiciaire, mais de l'ancienneté acquise dans l'établissement. Or, cette ancienneté avait été contractée au moment de la rénovation de la Convention collective afin de permettre aux salariés d'accéder, sans perte de rémunération, parfois même avec un niveau de rémunération plus élevé, à un coefficient supérieur.
En outre, le Comité de suivi de l'avenant n° 2002-02 était intervenu pour préciser les modalités d'application de l'article 7 dudit avenant. Dans un avis rendu le 19 mai 2004, le Comité avait pris soin de rappeler que l'ancienneté prise en compte résultait de « l'addition de la durée de tous les échelons, du 1Eréchelon jusqu'à l'échelon occupé par le salarié au 30 juin 2003» (Avis n°6 du Comité de suivi de l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002, rendu le 19 mai 2004).
Le Conseiller doyen honoraire de la Chambre sociale de la Cour de cassation, Maître B. Boubli, a confirmé cette interprétation dans une note du 19 novembre 2007 dans laquelle il souligne qu'il convient de prendre en considération « l'ensemble des mesures adoptées qui visent à garantir à chaque salarié un niveau de rémunération équivalent à celui dont il bénéficiait antérieurement à son reclassement (art. 9) et une progression minimale (art. 8)».
Les mesures de reclassement ont ainsi été fondées sur des critères objectifs et rationnels ne portant pas atteinte à l'égalité entre salariés.
En outre, elles n'ont pas remis en cause la sécurité matérielle des personnels puisqu'elles n'ont pas donné lieu à une perte de rémunération.
Elles n'ont donc pas porté atteinte à des principes de valeur constitutionnelle.
Pourtant, la Cour de cassation a fait droit à la demande de deux salariés, sans cependant se prononcer sur la question du calcul de l'ancienneté à prendre en considération (Cass. soc. 11 juillet 2007, n°06-42.508 ;Cass.soc.10 mars 2010, n°08-44.964).
Enfin, l'application des décisions de la Cour de cassation à l'ensemble des établissements visés par le champ d'application de la Convention collective du 31 octobre 1951 entraînerait des rappels de salaire dont le poids financier pourrait avoir des conséquences extrêmement préjudiciables. Comme le soulignait le Président de la FEHAP, Monsieur Antoine Dubout, dans une lettre à la Ministre de la Santé, Madame Roselyne Bachelot-Narquin, et à l'ancien Ministre du Travail, Monsieur Brice Hortefeux, en date du 25 mai 2009, le poids de ce surcoût a été évalué à environ 200 millions d'euros. Une telle somme viendrait grever les budgets des établissements et alourdir les financements versées par l'Assurance maladie et les collectivités territoriales. De nombreux établissements pourraient ainsi être contraints de mettre en œuvre des plans de sauvegarde de l'emploi afin de faire face à ces charges, voire de se placer sous le régime des procédures collectives prévues par le Livre VI du Code de commerce.
La pérennité des établissements et par là-même de l'accueil de leurs usagers (patients, personnes âgées, handicapées, en situation de réinsertion, ...) se trouveraient ainsi compromis.
L'amendement proposé qui vise à valider les reclassements opérés, sans perte de rémunération, en application de l'article 7 de l'avenant n° 2002-02, poursuit un but d'intérêt général caractérisé qui, outre l'importance des sommes en jeu, est la sauvegarde de l'offre de soins et d'accueil des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux du secteur privé à but non lucratif. Cet amendement poursuit également d'autres objectifs d'intérêt général dans la mesure où il favorise la sécurité et la clarté juridiques entre employeurs et salariés et où il prévient les effets d'aubaine qui ont pu se développer depuis la décision de la Cour de Cassation du 11 juillet 2007.
Cet amendement permet enfin de consolider juridiquement l'intention initiale des parties telle qu'elle s'est exprimée par la signature majoritaire de l'avenant et de l'avis du comité de suivi par trois des cinq organisations syndicales participant à la négociation. L'avenant relatif à la rénovation de la CCN 51 est en tout état de cause le résultat d'une « concertation appropriée entre les employeurs et les salariés ou leurs organisations représentatives» (C.C., n°97-388 DC, 20 mars 1997, Plan Epargne-retraite) et contribue, par conséquent, à l'effectivité du principe à valeur constitutionnelle, issu de l'aliéna 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, aux termes duquel « tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail » (C.C., n°77-79 DC, 5 juillet 1977, Emploi des jeunes).
La validation des reclassements issus de l'avenant de 2002 n'a pas pour effet ni de remettre en cause les décisions de la Cour de cassation des 11 juillet 2007 et 10 mars 2010 (Cass. soc., n°06-42.508;Cass.soc.10 mars 2010, n°08-44.964), ni les décisions définitives rendues par les juridictions subordonnées et respecte donc le principe de la séparation des pouvoirs. La présente validation ne couvre pas les situations éventuelles de mise en application erronée des dispositions validées législativement de l'avenant, ni ne prive les salariés éventuellement concernés de leur accès au juge pour faire valoir leurs droits légitimes, le cas échéant.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
La mention « Tombé » signifie qu'il n'y avait pas lieu de soumettre l'amendement au vote du Sénat dans la mesure où soit l'objectif poursuivi par l'amendement a été atteint par l'adoption d'un autre amendement (ex. : amendement de rédaction globale incluant la modification proposée), soit, au contraire, l'amendement était incompatible avec un amendement précédemment adopté (ex. : l'adoption d'un amendement de suppression fait tomber tous les autres).
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.