Déposé le 19 janvier 2015 par : M. V. Dubois, Mme Iriti, MM. Kern, Guerriau, D. Dubois, Canevet, Vanlerenberghe, Marseille, Mme Morin-Desailly, M. Bockel, les membres du Groupe Union des Démocrates, Indépendants - Uc.
Après l’article 23
I. – Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2573-27 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 2573-27. - Les communes doivent assurer le service de la distribution d’eau potable et le service de l’assainissement au plus tard le 31 décembre 2024. Les communes présentent un plan prévisionnel d'équipement et de mise à niveau relatif aux services de distribution d'eau potable et d'assainissement au plus tard le 31 décembre 2019.»
II. – En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre III
Exercice des compétences communales et intercommunales en Polynésie française
La production d’eau potable et l’assainissement sont pour de nombreuses communes de Polynésie française une problématique réelle et récurrente. Principalement pour les communes dont la ressource en eau n’est pas suffisante comme les atolls des Tuamotu notamment. L’absence de foncier suffisant et les difficultés de maîtrise rencontrées en la matière dans un contexte d’indivision familiale représentent un obstacle important à la mise en œuvre des projets d’aménagement aussi bien en matière d’obtention des financements que pour la construction des infrastructures. Cet état des lieux fait également ressortir l’inégalité dans l’évolution et la mise en place des services d’eau potable dans les différents archipels, réalité qui n’a pas été prise en considération lors de la fixation des échéances. Parvenir à répondre aux prescriptions en matière d’accès à l’eau potable et d’assainissement est déjà difficile pour les communes pouvant être qualifiées d’« urbaines » (en nombre très limité : Papeete, Punaauia, Faa’a, Pirae, Bora Bora, …), mais devient quasi impossible pour les communes des Tuamotu, regroupant souvent quelques centaines d’habitants répartis sur plusieurs atolls isolés. Dans les îles sans ressources abondantes en eau, créer un service de distribution d’eau potable obligerait la commune à investir dans une unité de dessalement de l’eau de mer, puis dans un réseau hydraulique afin de desservir l’ensemble des administrés, pour un coût totalement disproportionné au regard du nombre d’habitants, lesquels seraient en outre dans l’impossibilité financière de payer le service rendu. Les rapports 2007 et 2013 du Centre d'hygiène et de salubrité publique (CHSP) sur la qualité des eaux destinées à la consommation humaine à Tahiti et dans les îles, relèvent que la qualité de l'eau distribuée est très variable selon les communes.
En 2007, les résultats du bilan conduit par le CHSP montrent une très mauvaise qualité générale des eaux distribuées : 80 % des communes desservent une eau de qualité mauvaise à moyenne, et 5 communes seulement distribuent une eau de qualité « relativement satisfaisante » (taux de conformité compris entre 81% et 100%) (Papeete, Arue, Papara, Pirae, Faa'a et Bora-Bora).
Toujours en 2007, seules deux communes, Papeete et Arue, ont atteint près de 100 % de résultats conformes. Par conséquent, seuls 10 % des habitants de la collectivité ont accès à une eau potable à 100 %.
Cependant, une évolution positive a pu être constatée depuis 2007 puisque le rapport de 2013 relève désormais que 15 communes distribuent une eau avec un taux de conformité compris entre 81% et 100%.
Ces 15 communes se répartissent de la façon suivante :
- 7 communes distribuent de l’eau potable à 100% (Arue, Bora Bora, Huahine, Mahina, Papeete, Punaauia, Tumaraa) soit 36% de la population,
- 3 communes ont un taux de conformité supérieur à 91% (Faaa, Tubuai, Gambier),
- et 5 autres communes ont un taux de conformité compris entre 81% et 90%.
Cette amélioration montre qu’un effort important a été fait, mais démontrent aussi une difficulté réelle à fournir de l’eau potable pour les communes éloignées de Tahiti ou pour celles ne disposant pas d’une ressource abondante.
A titre d’exemple, on note qu’aucune des 16 communes de l’archipel des Tuamotu et des 6 communes des îles Marquises ne distribue d’eau potable.
Les atolls souffrent donc de la faiblesse des ressources en eau, en raison d’un manque de pluie et de l’insuffisance des réceptacles naturels.
L’approvisionnement en eau constitue pour la population, qui ne dispose pour certains que de quelques dizaines de litres d’eau par jour et par habitant, un souci constant et les manques sont fréquents.
En effet, la principale technique à laquelle recourent ces communes disposant de peu de ressources consiste à mettre en place des citernes individuelles et publiques de collecte d'eaux de pluie. Les habitants des atolls consomment en moyenne de 6 à 10 fois moins d’eau que dans les îles hautes.
Une étude récente du syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française a montré que l’objectif eau potable aux Tuamotu ne serait envisageable qu’à l’échéance de 10 ans, sous réserve de la mise en œuvre de solutions visant à la distribution d’un volume d’eau potable limité, à consacrer aux besoins vitaux des habitants.
Il est donc essentiel de reporter les délais pour permettre aux communes de Polynésie, et notamment aux petites communes isolées de la Polynésie française, de disposer du temps nécessaire à la mise en place d’un système de distribution d’eau potable efficace pouvant s’adapter notamment aux contraintes géographiques et insulaires, mais aussi aux faibles ressources financières de la population.
En fonction des priorités, un système d’assainissement collectif public a été mis en place dans les communes d’abord concernées par l’industrie touristique (Bora Bora, Moorea et Punaauia) et dans les communes les plus fortement urbanisées (Paea, Faa’a, Papeete, Arue et Pirae).
Ces programmes d’assainissement collectif public nécessitent des investissements financiers très lourds.
Pour exemple, le programme qui concerne l’île de Bora Bora a couté 2, 9 milliards de francs CFP (soit plus de 24 millions d’euros), et le programme global de travaux pour l’ensemble de la Polynésie française a été estimé à plusieurs dizaines de milliards de francs CFP, soit plusieurs centaines de millions d’euros, par l’agence française de développement.
La conception et la réalisation de ce type de programme est complexe et demande de nombreuses années. Pour ces raisons, ils ne peuvent être mis en œuvre, de manière simultanée, au niveau de toutes les zones du Territoire.
A l’heure actuelle, seulement 4 programmes d’assainissement collectif public sont en cours, mais ils ne concernent que 8 communes sur les 48 que compte la Polynésie française, étant rappelé que certaines de ces 48 communes sont composées de communes associées qui ne se trouvent pas toujours sur la même île (exemple : les atolls des Tuamotu).
Par ailleurs, le statut spécifique de la Polynésie française mis en place par la loi organique de 2004 prévoit une répartition de compétences particulière, différente du droit commun. Si les communes ont la responsabilité de la mise en place et de l’exploitation des projets sur le terrain en matière d’eau et d’assainissement, c’est la Polynésie française qui est compétente pour définir la politique sectorielle en la matière, mais également pour définir les normes applicables, normes impactant très fortement l’étude des projets et l’exploitation ultérieure.
Or, à ce jour, l’audit préalable à l’élaboration de la politique sectorielle de l’eau potable et de l’assainissement est en cours de finalisation et les normes existantes ont été élaborées pour une application dans des îles hautes avec une ressource naturelle abondante permettant la mise en œuvre de solutions reconnues par ailleurs. La particularité de certaines îles hautes, sans ressource abondante et celle encore plus spécifique des atolls des Tuamotu avec un environnement très sensible pour l’assainissement (proximité des lagons, absence de reliefs, sol calcaire difficile à creuser) et l’absence totale de ressource naturelle pérenne ne sont pas réellement prises en compte.
L’objet de l’amendement est donc de repousser les délais aussi bien pour l’accès à l’eau potable que pour le traitement des eaux usés (assainissement). Ce délai supplémentaire permettra en particulier à la Polynésie française et aux communes de définir ensemble les solutions les plus adaptées aux situations très différentes que l’immensité du territoire polynésien engendre.
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