Déposé le 13 novembre 2018 par : Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales.
Après l’article 42
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5121-12-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5121-12-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-12-1-1. – I. – En dehors des situations mentionnées aux articles L. 5121-8, L. 5121-9-1 et L. 5121-12 du présent code, un médicament peut, à titre exceptionnel et de manière temporaire et nominative, être mis à disposition à un stade précoce de développement pour des patients incurables demandeurs, dès l’issue de la phase I des essais cliniques, dans le cadre d’une utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament, non investigatoire et ne se substituant pas aux essais cliniques, et au terme d’une procédure déclarative, dès lors que les conditions suivantes sont réunies :
« 1° Différer le traitement exposerait le patient à des conséquences graves, dégradantes ou invalidantes ;
« 2° Il n’existe pas, pour la pathologie dont souffre le patient, d’alternative thérapeutique appropriée et le patient n’est pas susceptible d’être inclus dans un essai clinique, notamment pour des raisons géographiques, de calendrier de l’essai ou de non-satisfaction des critères d’inclusion.
« II. – Les sociétés estimant pouvoir mettre à disposition une molécule dans le cadre d’une utilisation testimoniale éclairée et surveillée s’identifient préalablement, ainsi que leur produit, dans un registre public tenu par l’agence mentionnée à l’article L. 5311-1 du présent code. Cette inscription ne vaut pas engagement de la société concernée à fournir son produit dans le cadre de cette utilisation mais seulement à accepter de recevoir et d’examiner des demandes en ce sens. La société concernée peut se désinscrire à tout moment.
« L’identification, à travers ce registre, des molécules susceptibles de faire l’objet d’une utilisation testimoniale éclairée et surveillée permet d’assurer également une information de tous sur les traitements potentiellement disponibles.
« Les conditions d’élaboration de ce registre et les données renseignées sont précisées par décret.
« III. – L’utilisation du médicament dans le cadre d’une utilisation testimoniale éclairée et surveillée est placée sous le contrôle d’une personne responsable, résidant en France et rattachée à l’opérateur titulaire des droits sur le médicament, réunissant les compétences médicales et pharmaceutiques appropriées.
« IV. – Le patient demandeur, assisté de son médecin prescripteur, soumet au titulaire des droits sur le médicament une demande de communication d’information des données portant sur le médicament. Le titulaire des droits peut, sans motif, s’y opposer. Dans le cas contraire, il sollicite expressément un comité indépendant, institué dans des conditions déterminées par décret. Le comité fournit au patient volontaire et à son médecin la preuve de l’existence d’éléments scientifiques, pré-cliniques ou cliniques, démontrant le potentiel intérêt thérapeutique chez l’homme et permettant de présumer sa sécurité.
« Le patient demandeur ou, en cas d’incapacité, son représentant légal, est assisté par son médecin pour prendre la pleine mesure de ces informations, le cas échéant à l’aide de la personne de confiance mentionnée à l’article L. 1111-6 du présent code. Le patient demandeur ou, en cas d’incapacité, son représentant légal, prend une pleine connaissance du risque thérapeutique potentiellement associé à l’utilisation du médicament.
« Le patient demandeur, assisté de son médecin traitant, après avoir reçu les éléments sollicités mentionnés au premier alinéa du présent IV, dans les conditions prévues au paragraphe précédent, soumet une demande pour une utilisation testimoniale éclairée et surveillée auprès du titulaire des droits sur le médicament. Il exprime de manière expresse assumer entièrement le risque dont il a pris connaissance et décharger tous les tiers de toute responsabilité liée à cette décision.
« Le titulaire des droits transmet sans délai cette demande à la personne responsable mentionnée au III.
« La personne responsable mentionnée au III ou la société titulaire des droits peut, au regard de sa connaissance intime de la molécule, s’opposer, sans avoir à motiver sa décision, à la demande d’utilisation testimoniale. En l’absence de réponse de la société titulaire des droits dans le mois à compter de la réception de la demande, celle-ci est réputée refusée.
« V. – En cas d’acceptation par la société titulaire des droits, l’utilisation du médicament fait l’objet, dans des conditions précisées par décret, d’une déclaration préalable auprès de l’agence mentionnée à l’article L. 5311-1 du présent code, adressée par le patient et visée par son médecin prescripteur.
« L’utilisation du médicament fait l’objet d’une surveillance médicale étroite dans des conditions définies par l’opérateur titulaire des droits sur le médicament et validées par le comité indépendant mentionné au premier alinéa du IV.
« VI. – L’utilisation du médicament est possible pour une durée limitée, éventuellement renouvelable sur demande du patient, assisté de son médecin prescripteur, dans les mêmes conditions que la demande initiale.
« La durée d’utilisation du traitement ne peut excéder celle autorisée par les essais pré-cliniques de toxicité de long terme déjà effectués sur le produit. Elle peut être, le cas échéant, réévaluée à l’aune des données collectées sur la molécule.
« Le patient, assisté de son médecin, peut à tout moment et sous sa seule responsabilité interrompre l’utilisation testimoniale éclairée et surveillée.
« La personne responsable mentionnée au III ou la société titulaire des droits peut également, dans des conditions définies par décret, interrompre l’utilisation testimoniale éclairée et surveillée.
« VII. – L’opérateur titulaire des droits sur le médicament dépose chaque année auprès de l’agence mentionnée à l’article L. 5311-1 du présent code et du comité indépendant mentionné au premier alinéa du IV un bilan de l’état d’avancement du développement de son médicament et des données collectées à partir des patients ayant reçu le produit de manière testimoniale, dans des conditions définies par décret.
« L’ensemble des données attachées à la molécule sous utilisation testimoniale éclairée et surveillée, données existantes en amont de cette utilisation ou issues de cette utilisation, restent la propriété pleine, entière et exclusive du titulaire des droits sur le médicament.
« Dans des conditions définies par décret, l’agence mentionnée à l’article L. 5311-1 du présent code peut interdire l’utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament si les conditions prévues pour une telle utilisation ne sont pas remplies ou pour des motifs de santé publique.
« VIII. – L’utilisation testimoniale éclairée et surveillée du médicament cesse de produire ses effets dès lors que le médicament obtient, dans l’indication concernée, soit une autorisation de mise sur le marché, soit une autorisation temporaire d’utilisation mentionnée à l’article L. 5121-12 du présent code. Il peut également y être mis fin à tout moment, soit par l’agence mentionnée à l’article L. 5311-1 du présent code, soit par la société titulaire des droits, notamment en cas d’impossibilité matérielle de fourniture ou de remise en cause du bénéfice prévisible du médicament au regard des informations disponibles.
« IX. – Un décret précise les conditions dans lesquelles est assurée la protection des données personnelles dont le traitement est rendu nécessaire dans le cadre de l’application du présent article. »
• Le passage d’une molécule innovante des premiers essais cliniques à la commercialisation nécessite couramment un délai de dix ans, pouvant dépasser quinze ans notamment dans le traitement des troubles neurodégénératifs dont l’évolution est très lente.
Ces lenteurs induisent des pertes de chance pour les patients et mettent également en danger des sociétés de biotechnologies innovantes qui se retrouvent à cours de financement, cela même après l’obtention de résultats prometteurs.
La mise à disposition de médicaments contenant certaines molécules ayant démontré leur potentiel thérapeutique se retrouve freinée par un cadre juridique contraignant applicable aux demandes d'autorisations de mise sur le marché visées à l'article L. 5121-8 du code de la santé publique mais également aux demandes d’autorisations temporaires d’utilisation des médicaments mentionnées à l’article à l’article L.5121-12 du même code, au-delà des incontournables difficultés associées à la prise en charge par l’assurance maladie de ces modes d’accès au médicament.
Si certaines autorisations temporaires d’utilisation peuvent être octroyées à un stade assez précoce de développement, elles sont par définition subordonnées à une autorisation délivrée par l’autorité compétente sur la base de la démonstration, tant de la sécurité que de l’efficacité d’emploi du médicament concerné.
• Or, certains patients faisant face à une maladie incurable souhaitent pouvoir bénéficier de ces médicaments innovants en prenant, de manière éclairée et donc en toute connaissance de cause, le risque thérapeutique associé à leur utilisation. Ce droit à la recherche de leur survie doit leurs être reconnu et garanti
L’UTES, qui serait donc un nouveau mode légal d’accès au médicament, à côté de l’AMM et de l’ATU, permettrait ainsi de réduire dans des proportions considérables les délais imposés aujourd’hui de fait par ces procédures existantes de mise à disposition des médicaments.
L’UTES semble particulièrement adaptée et nécessaire dans le domaine neurodégénératif, non seulement en ce que les essais cliniques y sont les plus longs, à cause de l’évolution très lente des neurodégénérescences, mais également parce que les médications neuroprotectrices présentent par nature un profil de sécurité encourageant.
Le financement de cette voie d’accès nouvelle serait en partie assuré par un fonds de solidarité constitué par une participation des laboratoires ayant recours au dispositif de l’Utes.
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