Déposé le 9 juin 2020 par : Mme Marie Mercier, au nom de la commission des lois.
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Lorsqu’il constate qu’une personne dont l'activité est d'éditer un service de communication au public en ligne permet à des mineurs d’avoir accès à des contenus pornographiques en violation de l’article 227-24 du code pénal, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel adresse à cette personne, par tout moyen propre à en établir la date de réception, une mise en demeure lui enjoignant de prendre toute mesure de nature à empêcher l'accès des mineurs au contenu incriminé. La personne destinataire de l’injonction dispose d’un délai de quinze jours pour présenter ses observations.
À l'expiration de ce délai, en cas d'inexécution de l’injonction prévue au premier alinéa du présent article et si le contenu reste accessible aux mineurs, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins d’ordonner, en la forme des référés, que les personnes mentionnées au 1 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique mettent fin à l'accès à ce service. Le procureur de la République est avisé de la décision du président du tribunal.
Le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris aux mêmes fins lorsque le service de communication au public en ligne est rendu accessible à partir d'une autres adresse.
Le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel peut également demander au président du tribunal de judiciaire de Paris d’ordonner, en la forme des référés, toute mesure destinée à faire cesser le référencement du service de communication en ligne par un moteur de recherche ou un annuaire.
Le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel peut agir d’office ou sur saisine du ministère public ou de toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir.
Les conditions d’application du présent article sont précisées par décret.
Que ce soit sur un ordinateur ou sur leur smartphone, les mineurs peuvent de nos jours très facilement visionner des contenus pornographiques disponibles gratuitement en ligne.
En violation de loi, de nombreux sites internet ont renoncé à mettre en place un véritable contrôle de l’âge des personnes qui visionnent ces images. Il suffit d’un clic, par lequel le mineur certifie avoir plus de dix-huit ans, pour que des milliers de vidéos pornographiques lui soient accessibles. Pourtant des solutions d’identifications de l’âge existent, par exemple en passant par France Connect ou en utilisant une carte de paiement.
Beaucoup de mineurs visionnent ces images dès leur entrée au collège ce qui conduit à s’interroger sur l’impact que la consommation d’images pornographiques pourrait avoir, à moyen terme, sur leur développement affectif, psychologique et sexuel.
En principe, l’article 227-24 du code pénal permet de sanctionner les sites qui diffusent des images pornographies susceptibles d’être vues par un mineur. La peine encourue est de trois ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Mais en pratique, cet article n’est pas appliqué dans l’univers numérique, la justice ne parvenant pas à atteindre les éditeurs de ces sites, souvent basés dans des paradis fiscaux qui ne coopèrent pas avec la France.
Cet amendement propose donc d’instituer une nouvelle procédure destinée à obliger les éditeurs de ces sites pornographiques à mettre en place un contrôle de l’âge de leurs clients : d’abord, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) leur adresserait une injonction de se mettre en conformité avec la loi, puis il pourrait saisir le président du tribunal judiciaire de Paris afin qu’il ordonne aux opérateurs de rendre impossible l’accès à ces sites, qui ne pourraient donc plus être consultés depuis la France.
Ce dispositif s’inspire de celui mis en place pour lutter contre les cercles de jeu en ligne illégaux, qui repose sur le contrôle exercé par l’Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel).
L’adoption de cet amendement permettrait de mettre en œuvre l’engagement que le président de la République avait pris, le 20 novembre 2019, lors d’un discours prononcé à l’Unesco. Il avait donné six mois aux acteurs de l'internet pour mettre en place un contrôle parental par défaut, sans quoi il serait nécessaire de légiférer. Cette question devait être traitée dans le cadre de l’examen du projet de loi de réforme de l’audiovisuel, dont l’avenir est désormais très incertain, ce qui incite à l’aborder à l’occasion de cette proposition de loi qui contient des dispositions visant à protéger les mineurs.
NB:La rectification consiste en un changement de place (de l'article 11 vers un article additionnel après l'article 11).
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