Déposé le 19 mai 2021 par : MM. Dantec, Fernique, Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dossus, Gontard, Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme Taillé-Polian.
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le II de l’article L. 122-1 du code de l’environnement, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« .... – Lorsqu’un projet, en deçà des seuils fixés, est toutefois susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine, l’autorité compétente transmet les informations relatives au projet dont elle dispose à l’autorité environnementale qui examine sans délai la nécessité d’une évaluation des incidences sur l’environnement.
« La saisine de l’autorité environnementale est également ouverte au maître d’ouvrage qui peut transmettre à l’autorité environnementale une demande d’examen au cas par cas.
« Lorsque le maître d’ouvrage n’est pas à l’origine de la demande, l’autorité compétente l’informe sans délai.
« L’absence de réponse de l’autorité environnementale au terme du délai fixé par voie réglementaire vaut dispense de réaliser une étude d’impact.
« Les modalités d’application du présent paragraphe sont fixées par voie réglementaire. »
Le présent amendement vise à garantir la sécurité juridique des projets devant être soumis à évaluation environnementale.
Cet amendement reprend la proposition du rapport du Groupe de travail présidé par Jacques Vernier, intitulé « Moderniser l’évaluation environnementale » qui recommande d’instaurer une « clause de rattrapage » permettant de soumettre à évaluation environnementale, tout projet susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement qui serait en deçà des seuils et/ou critères retenus pour l’application de cette obligation.
Le droit communautaire semble reconnaître l'existence d'une « clause de rattrapage » : La directive 2011/92/CE prévoit bien, en son article 2, paragraphe 1, que, outre la méthode des seuils et du cas par cas, les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que les « projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences »
Il s’agit de se conformer à la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE, 24 mars 2011, Commission contre Belgique, C-435/09) qui estime qu’un projet « de dimension même réduite » peut avoir des incidences notables sur l’environnement et doit, par conséquent, être soumis à évaluation environnementale.
Il s’agit également de répondre à la mise en demeure de la France par la Commission européenne en date du 7 mars 2019 qui considère que la législation nationale « semble exclure certains types de projets de procédures d’évaluation des incidences sur l’environnement et fixer des seuils d’exemption inadaptés pour les projets » et que « les moyens sont insuffisants pour l’examen des autres évaluations pertinentes ».
L’absence de « clause de rattrapage » constitue une régression de l’application du principe de prévention des atteintes à l’environnement et un recul en matière d’acceptabilité des projets. Elle représente donc un risque d’insécurité juridique pour les porteurs de projets.
Or, le Conseil d’État, dans une décision du 8 décembre 2017 (n°404391) a confirmé qu’ « une réglementation exemptant de toute évaluation environnementale un type de projets antérieurement soumis à l’obligation d’évaluation environnementale après un examen au cas par cas, n’est conforme au principe de non-régression de la protection de l’environnement que si ce type de projets, eu égard à sa nature, ses dimensions et à sa localisation et compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, n’est pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine ».
De plus, le Conseil d’Etat, dans une décision du 15 avril 2021 (N° 425424) a annulé le décret du 4 juin 2018 qui modifie les catégories de projets, plans et programmes relevant de l'évaluation environnementale, « en tant qu'il ne prévoit pas de dispositions permettant qu'un projet susceptible d'avoir une incidence notable sur l'environnement pour d'autres caractéristiques que sa dimension puisse être soumis à une évaluation environnementale » et « en ne prévoyant pas de soumettre à une évaluation environnementale, lorsque cela apparaît nécessaire, des projets qui, bien que se trouvant en-deçà des seuils qu’il fixe, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine en raison notamment de leur localisation, le décret attaqué méconnaît les objectifs de la directive du 13 décembre 2011 ».
La Haute juridiction y considère également qu’il résulte des termes de la directive « tels qu’interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne, que l’instauration, par les dispositions nationales, d’un seuil en-deçà duquel une catégorie de projets est exemptée d’évaluation environnementale n’est compatible avec les objectifs de cette directive que si les projets en cause, compte tenu, d’une part, de leurs caractéristiques, en particulier leur nature et leurs dimensions, d’autre part, de leur localisation, notamment la sensibilité environnementale des zones géographiques qu’ils sont susceptibles d’affecter, et, enfin, de leurs impacts potentiels ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine. »
Dans cette décision le Conseil d’Etat enjoint le Gouvernement de prendre des mesures réglementaires pour se mettre en conformité avec la directive. Toutefois, le sujet de l’introduction d’une « clause de rattrapage » peut être de niveau législatif et dans la mesure où il s’agit d’une question de transposition du droit européen, ce point à un lien avec le présent projet de loi. Tel est l’objet de cet amendement.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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