Déposé le 9 juin 2023 par : MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard, Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mmes Poncet Monge, Mélanie Vogel.
Supprimer cet article.
L’article 7 de la Charte de l’environnement de 2004, intégrée en 2005 dans le bloc de constitutionnalité, dispose que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. ».
Ce droit à la participation du public est également consacré dans les normes internationales, notamment à travers la directive n° 2011/92/UE, modifiée par la directive n°2014/52/UE, et la Convention d’Aarhus, qui fixent une exigence d’information et de participation du public en amont.
Les procédures de consultation du public sur les projets industriels impactant l’environnement doivent donc garantir une participation effective du public à la prise de décision publique.
Pourtant, l’ordonnance de 2016 relative aux procédures d’information et de participation du public, puis les lois « pour un Etat au service d’une société de confiance », (ESSOC) de 2018, et d’ « accélération et de simplification de l’action publique » (ASAP) de 2020, ont successivement fortement modifié et allégé les procédures de participation du public et de l’enquête publique, présentant des impacts majeurs pour l’environnement, sans retour d’expériences et évaluation de leur mise en œuvre. Celles-ci ont encore évolué récemment avec la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération des énergies renouvelables.
Ces lois successives ont contribué à une instabilité, voire une régression du code de l’environnement, ainsi qu’à un accroissement des régimes d’exception et dérogatoires rendant assez illisible la réglementation pour les acteurs concernés, sans pour autant la simplifier et améliorer son effectivité.
Dans son avis sur ce projet de loi, le Conseil d’Etat : « regrette que cette modification législative s’ajoute à toutes celles intervenues ces dernières années en matière de délivrance des autorisations administratives des projets ayant une incidence sur l’environnement, sans aucune analyse des effets de ces réformes successives. Il ne peut que relever que le séquençage actuel des phases d’examen, de consultation puis de décision pour l’instruction des demandes d’autorisation environnementale n’est que partiellement et indirectement à l’origine des délais excessifs de traitement de ces demandes ».
L’association FNE a, en outre, relevé que le nombre des enquêtes publiques connaissait « une réduction drastique » en raison de la diminution des projets soumis à évaluation environnementale.
L’article 2 du présent projet de loi poursuit cette lancée, puisqu’il propose de remplacer l’enquête publique par un dispositif de participation spécifique pour toutes les autorisations environnementales. Il prévoit que soient réalisées de manière simultanée et dès le début de la procédure, la consultation du public et les diverses consultations administratives. Ainsi, tout en raccourcissant la durée totale de la procédure d’autorisation environnementale de 9 mois à 6 mois, tout en allongeant la durée de consultation du public de 1 à 3 mois, cette mesure, sous couvert d’allégement et de raccourcissement des délais de procédures, complexifie le droit, et met à mal l’effectivité de la participation du public pour évaluer les impacts du projet. Il semble en effet impératif de prévoir au moins un mois de consultation du public après production des avis administratifs, notamment de l’autorité environnementale
Encore une fois, ce sont l’évaluation environnementale et la participation du public qui sont sacrifiées au nom de l’accélération et de la simplification du droit et des projets industriels. Il est important de rappeler que la participation du public ne retarde pourtant pas le déploiement des projets et ne doit pas constituer une variable d’ajustement.
Par ailleurs, le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires est soucieux des conséquences qu’une telle disposition impliquerait à plusieurs égards. D’abord, le périmètre de ce dispositif excède la portée de ce projet de loi, puisqu’il concerne non seulement les projets industriels, qu’ils soient verts ou non, mais aussi tous les projets soumis à autorisation environnementale. Ensuite, cette mesure donne au garant le rôle de commissaire enquêteur, alors même que ces fonctions répondent à des impératifs différents. Le rôle de commissaire enquêteur est en effet crucial, car contrairement au garant, ce dernier rend un avis éclairé sur le projet, et son avis défavorable facilite le droit des recours des associations et riverains. Le dispositif ne permet pas de créer une commission d’enquête comme l’enquête publique le prévoit pour les projets les plus complexes. Il supprime l’avis clair du commissaire enquêteur, ainsi que la possibilité pour le maître d’ouvrage d’y répondre, contrairement à ce que prévoit l’enquête publique. Enfin, la disposition supprime la possibilité de demander au juge des référés de suspendre une autorisation environnementale si le commissaire enquêteur rend un avis défavorable. Par ailleurs, l’alinéa 49 supprime la possibilité pour le juge de suspendre une décision prise sans l'enquête publique ou la participation du public prévue.
Cette disposition constituerait donc une importante régression pour l’ensemble des projets concernés par l’enquête publique. Pour garantir l’effectivité des mécanismes de démocratie participative en matière environnementale, il convient d’éviter la mise en place de régimes dérogatoires, qui plus est concernant l’autorisation environnementale qui vise les projets industriels les plus impactants pour l’environnement, la santé et la sécurité. C’est le sens du présent amendement de suppression. Cet amendement a été travaillé avec FNE et sur la base de l’avis du CNPN.
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