Déposé le 10 novembre 2023 par : Mmes Souyris, Poncet Monge, MM. Benarroche, Grégory Blanc, Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon, Mmes Senée, Mélanie Vogel.
Après l'article 10 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 3322-9, il est inséré un article L. 3322-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3322-9-1. – Le prix minimum de vente au détail, toutes taxes comprises, des boissons mentionnées au 3°, 4° et 5° de l’article L. 3321-1 ne peut être inférieur à 0, 60 euro par centilitre d’alcool pur.
« Un décret peut moduler à la hausse ce prix minimum unitaire, notamment selon la classification prévue à l’article L. 3321-1 ou selon les caractéristiques de la consommation de chacune de ces boissons, sans qu’il puisse dépasser 2 euros par centilitre d’alcool pur.
« Les prix minimum unitaires prévus aux alinéas précédents sont révisés chaque année au 1erjanvier en fonction de l’indice des prix à la consommation hors tabac constaté par l’Institut national de la statistique et des études économiques pour la France. Ils sont arrondis au centime d’euro le plus proche. L’indice de référence est le dernier indice mensuel publié au 1erjanvier 2024. »
2° Après l’article L. 3351-1, il est inséré un article L. 3351-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 3351-1-.... – La vente de boisons alcooliques à un prix inférieur à celui qui découle de l’application des dispositions de l’article L. 3322-9-1 est punie de 7 500 € d’amende. La récidive est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
« Les personnes physiques coupables de l’infraction prévue au premier alinéa encourent également la peine complémentaire d’interdiction à titre temporaire d’exercer les droits attachés à une licence de débit de boissons à consommer sur place ou à emporter pour une durée d’un an au plus.
« Les personnes morales coupables de l’infraction prévue au premier alinéa encourent les peines complémentaires prévues aux 2°, 4°, 8° et 9° de l’article 131-39 du code pénal. »
3° À l’article L. 3351-8, après la référence : « L. 3322-2 » ; est ajoutée la référence : « L. 3322-9-1 ».
Cet amendement du groupe Écologiste, Solidarité et Territoires vise à instaurer un prix minimum de vente des boissons alcooliques.
Il s’inspire d’une législation adoptée au Royaume-Uni par le Parlement écossais en 2012 et entrée en vigueur en 2018 : le prix unitaire minimum de l’alcool (MUP). Le prix par unité d’alcool n’est du reste pas une nouveauté en Ecosse où une système de taxe libellée en guinée puis en schilling fut en vigueur au XIXème siècle. Il est d’ailleurs demeuré dans l’appellation commerciale des bières telle que « eighty shilling beer ». Santé Publique Ecosse (PHS) a évalué l’impact de la loi MUP en 2023. Même si une telle évaluation est délicate, selon le PHS, il existe des preuves solides que le MUP a réduit le nombre de décès directement causés par la consommation d'alcool en Écosse.
Les dispositions que cet amendement propose d’introduire dans le code de la santé publique sont d’application immédiate. Le Gouvernement aura toutefois la faculté de moduler, par décret, le prix minimum, notamment s’il souhaite cibler les boissons alcooliques consommées par les plus jeunes (1°). En l’état, une bouteille de spiritueux de 70 cl, comportant 40° d’alcool, ne pourra être vendue en dessous de 17 euros tandis qu’une bouteille de vin : -de 75 cl comportant 12° d’alcool ne pourra être vendue en dessous de 5 euros et quarante centimes.
La méconnaissance des règles de prix minimum unitaire sera sanctionnée d’une peine d’amende (2°). Les agents relevant de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes seront compétents pour rechercher et constater les infractions. (3°)
Ces dispositions n’auront pas d’impact sur les droits d’accises qui sont fixés non en fonction du prix mais en fonction du degré d’alcool. En revanche, elles auront un impact direct sur les recettes de la TVA assises sur les ventes de boissons alcooliques. Ces recettes de TVA (au taux de 20%) s’élèvent à environ 3 milliard d’euros, ce qui est d’ailleurs légèrement inférieur aux produits des droits d’assises qui s’établissent à environ 3, 2 milliard d’euros. On peut estimer que le prix minimum unitaire entrainera une augmentation moyenne de 10% pour environ un tiers des références de boissons représentant le quart du chiffre d’affaires. La hausse de prix de vente au détail se traduira par une hausse des recette de TVA de 75 millions d’euros soit une hausse des recettes pour les régimes obligatoires de sécurité sociale de plus de 20 millions d’euros dès la première année. En effet, en vertu du 9° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, une fraction de 28, 48 % de la taxe sur la valeur ajoutée est affecté à la branche « maladie, maternité, invalidité et décès » et à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
Par ailleurs, il est utile de rappeler que la consommation d’alcool provoque des dommages importants sur la santé. Elle représente un enjeu de santé publique majeur en France où elle est à l’origine de 49 000 décès par an, selon le ministère de la santé et de la prévention.
Malgré les taxes affectant les boissons alcooliques, l’alcool coûte plus cher aux finances publiques que ce qu’il rapporte (« Coût social des drogues en France », note de synthèse de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, Pr. Pierre Kopp, Paris, septembre 2015). A long terme, cet amendement aura un impact réducteur sur les dépenses d’assurance maladie.
NB:La rectification consiste en un changement de place de l'article additionnel après l'article 11 vers l'article additionnel après l'article 10 decies.
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