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Il est incontestable que la logique des soins palliatifs et celle de l’assistance médicalisée pour mourir sont distinctes. Les soins palliatifs visent à apaiser la douleur, même si leur délivrance implique éventuellement d’accélérer le moment du décès. L’assistance médicalisée pour mourir tend pour sa part à mettre fin à la souffrance résultant de la perception que la personne a de sa propre situation et à lui ouvrir la possibilité de choisir, le moment venu, les conditions de sa fin de vie. Il existe donc non pas des contradictions, mais des réponses différentes à des demandes qui sont différentes. D’ailleurs, la présente proposition de loi confie la mission de mettre en œuvre l’aide médicalisée pour mourir non pas aux équip...
...tel choix puisse être effectué en conscience. La proposition de loi adoptée par la commission des affaires sociales comporte sept articles. L’article 1er ouvre aux personnes majeures capables la possibilité d’une aide médicalisée pour mourir, dans le cadre que j’ai précédemment indiqué. Il peut s’agir du stade avancé ou terminal d’une pathologie grave et incurable, quel que soit l’âge, ou d’une souffrance physique ou psychique ne pouvant pas être apaisée ou jugée insupportable par la personne. L’article 2 offre la faculté aux malades conscients de demander cette aide et définit la procédure applicable : saisine par la personne de son médecin, qui s’adjoint deux de ses confrères pour examiner le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande et la situation médicale du malade. La première mis...
...e l’ouvrir. Cette question n’a pas surgi par hasard : elle s’est développée avec les progrès indéniables de la médecine. Une vision parfois très technicienne de celle-ci s’est avérée de plus en plus inadaptée au moment de la fin de vie, où la possibilité de soigner pour guérir n’existe plus. La médecine a dû s’adapter : la mort survient désormais, le plus souvent, au terme d’un long processus de souffrance et de déchéance physique, parfois dans une détresse psychique et morale qui atteint le malade comme ses proches. Qui ne connaît l’état d’épuisement des accompagnants, au point que nous avons choisi, à juste de titre, d’instaurer un congé spécifique et, depuis la loi du 2 mars 2010, de le rémunérer, grâce une allocation d’accompagnement de la personne en fin de vie ? Faisant suite à plusieurs tex...
...l n’est pas rare de constater qu’une personne qui demande à mourir change d’avis quelques jours plus tard. Comme beaucoup d’entre vous le savent, mes chers collègues, je l’ai vécu avec ma fille. Mes propos ne sont donc pas des paroles rapportées. Notre fille est morte dans la dignité parce qu’elle a fini sa vie entourée de personnes convaincues de sa dignité, malgré sa maladie et en dépit de ses souffrances. Pour les raisons que je vous ai exposées, il ne me semble pas que le débat sur la fin de vie doive se résumer à la question de la légalisation, ou non, de l’euthanasie. En revanche, il doit être appréhendé dans son ensemble, avec toute l’humanité que nous devons au sujet. De plus, nous ne disposons pas en l’état actuel de connaissances suffisantes pour investir de façon optimale ce débat. Des...
… mais chacun ici sait que le résultat est souvent affaire de formulation. Quand on propose la mort sans souffrance, je suis personnellement surpris que 57 personnes sur les 956 interrogées se prononcent contre. A également été évoqué le sondage d’OpinionWay dans lequel 60 % des Français déclarent préférer le développement des soins palliatifs à la légalisation de l’euthanasie, 52 % estimant même qu’une loi légalisant cette démarche comporterait des risques de dérives. Mes chers collègues, je ne pense pas qu...
...ortant pour chacun d’entre nous, quelle que soit notre position. Mes chers collègues, c’est en républicain, en laïc et en citoyen que je m’exprime devant vous pour défendre cette proposition visant à inscrire dans la loi la possibilité pour celles et ceux de nos concitoyens qui, « en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, [leur] infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou [qu’ils jugeraient] insupportable » voudraient, en pleine connaissance de cause, bénéficier dans des conditions très particulières, précises et encadrées d’une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort sans douleur et plus rapide que celle qui peut survenir naturellement. Je veux m’en expliquer, d’abord en républicain. Co...
...question, c’est en citoyen ou plutôt, devrais-je dire, en homme libre que je veux répondre. Cette proposition de loi ne tend pas à faire de l’assistance médicalisée à mourir la seule mort possible. Elle ne tend pas à la généraliser ou à l’imposer à toutes et à tous. Elle n’a pour objectif que de permettre à celles et ceux qui le souhaitent de partir dignement. C’est-à-dire de partir avant que la souffrance physique ou psychique ne soit trop forte, avant que la maladie et les dégradations qui l’accompagnent l’emportent sur l’humanité. Il s’agit, comme le précise le journaliste et écrivain François de Closets, « d’offrir et non pas d’imposer un recours contre cette mauvaise mort. Non pas en prenant en charge les destins individuels, mais en permettant aux volontés de chacun de s’exprimer et d’être r...
...sujet voilà plus de deux ans de contribuer à ce débat. Ce n’est pas sans déchirement que le chrétien que je suis est parvenu, après une longue et mûre réflexion, à admettre la nécessité de légiférer sur une matière aussi sensible. Lorsque je pense à cette phrase adressée par Vincent Humbert au Président de la République : « je vous demande le droit de mourir », je ne peux rester indifférent à sa souffrance, à sa volonté et à sa dignité. Ne pas répondre à cette demande revient à mettre à l’écart ces personnes atteintes de maux atroces et à les forcer à agir seules, en catimini, dans l’illégalité. Est-ce là la place que nous voulons pour ces personnes ? Je ne le souhaite pas comme nombre de Français qui sont favorables à la légalisation de l’aide active à mourir dans les cas de pathologies graves et...
...iction. Tout comme les pères de l’Église – saint Augustin, Saint Thomas d’Aquin et d’autres – ont, avec le concept de guerre juste, tenté de limiter les conséquences d’un fléau pourtant ardemment combattu par l’Église – « tu ne tueras point » –, cette proposition de loi ne vise qu’à mettre un terme, dans des conditions très strictes, très limitées et très encadrées par le droit et la morale, aux souffrances indicibles endurées par des personnes qui n’ont plus aucun espoir de guérison. Ne rien faire, mes chers collègues, c’est abandonner le problème à des initiatives personnelles, clandestines, sans débat et sans contrôle.
En France, il est estimé qu’environ 15 000 actes par an ont pour objectif d’abréger les souffrances d’un malade ; …
...er la mort puisqu’un patient en phase terminale peut bénéficier, sur la seule décision de son médecin, de la sédation profonde ou du double effet de la morphine. Le présent texte va plus loin : la personne peut choisir elle-même une assistance médicalisée pour une mort rapide et sans douleur lorsque son état médical révèle un mal grave et incurable dont l’avancement est tel qu’il lui inflige une souffrance physique ou psychique insupportable. Néanmoins, il n’est pas envisageable de permettre cette pratique sans la contrôler. Dès lors, il est prévu que la demande du patient soit soumise à l’expertise d’un collège de médecins, qui inclut le médecin traitant si celui-ci souhaite prendre part à la procédure. Le texte prévoit que tout médecin a la possibilité de demander à un autre confrère de se pron...
...ion soit conduite en étroite liaison avec une politique en faveur d’un accès universel aux soins palliatifs. Arrêtons de mettre en concurrence légalisation de l’aide active à mourir et soins palliatifs ! Un récent rapport montre que la dépénalisation en Belgique n’a pas entraîné de diminution des demandes de soins palliatifs. À l’heure actuelle, on ne peut malheureusement pas apaiser toutes les souffrances, qu’elles soient physiques, psychiques ou psychologiques. Certains patients ne souhaitent pas entamer un parcours de soins palliatifs jusqu’à ce que la maladie ait raison d’eux. Ils n’ont tout simplement pas envie d’assister au spectacle de leur propre déchéance et préfèrent être maître de leur fin de vie.
...e qu’il s’agit avant tout d’une problématique politique au sens noble du terme et qui ne doit pas être caricaturée. L’assistance médicalisée à mourir est une question de société. Et au même titre que la société, elle est un sujet qui évolue, mûrit et doit se concrétiser. Apporter des réponses à la question du choix de sa propre mort – car c’est bien de cela qu’il s’agit – et à la question de la souffrance, c’est dire vers quelle société nous souhaitons aller. Voilà plus d’une trentaine d’années que ces questions trouvent écho dans notre société. Au sein de cet hémicycle, nous croyons tous à l’importance du législateur et en particulier à la fonction du Sénat : voilà bien un sujet sur lequel notre Haute Assemblée doit s’honorer de débattre, et ce dans le plus profond respect des opinions de chacu...
...ers collègues, force est de constater que la loi Leonetti présente des insuffisances et des limites. En effet, les contours de la notion d’acharnement thérapeutique sont flous et complexes à évaluer. Il demeure ainsi des centaines d’hommes et de femmes pour lesquels il n’existe réellement aucune solution, soit parce que leurs douleurs physiques ne peuvent pas être soulagées, soit parce que leur souffrance psychique ne peut pas être levée. Par conséquent, la loi de 2005 ne peut être considérée comme suffisante et satisfaisante : ni par les patients, ni par les familles, ni par le corps médical. La politique du « laisser mourir » est intolérable. Mes chers collègues, ces dernières années, un certain nombre de témoignages particulièrement émouvants et douloureux m’ont conduit à m’interroger sur la...
M. Ronan Kerdraon. Les autres dépendent de la décision prise par les soignants de tel ou tel établissement, décision intervenant souvent en dehors de tout cadre légal, les souffrances étant abrégées sans que le malade lui-même ou sa famille se prononcent. Quelle belle hypocrisie !
Ces témoignages, ces échanges d’expériences poignants mettent en exergue un constat indéniable : la situation actuelle ne peut perdurer. Je partage les propos de Nicolas Sarkozy qui, devant ses comités de soutien, en février 2007, c’est-à-dire postérieurement au vote de la loi Leonetti, déclarait : « on ne peut pas rester les bras ballants face à la souffrance d’un de nos compatriotes qui appelle à ce que ça se termine, tout simplement parce qu’il n’en peut plus ». Alors, que prévoit le texte que nous examinons ce soir ? Tout d’abord, il place – enfin ! – le patient au cœur du processus décisionnel. En effet, la principale disposition est la reconnaissance du droit à demander une assistance médicale à mourir pour les personnes atteintes d’une maladi...
...ongtemps hésité sur la position à prendre dans ce débat. D’un côté, on ne peut pas être indifférent aux « appels au secours » que peuvent émettre des malades souffrant d’un mal qui provoque des douleurs insupportables et ne leur laisse aucun espoir d’amélioration. Leur vie est souvent un calvaire, et on ne peut que comprendre leur désir d’en finir. On se doit donc de répondre efficacement à leur souffrance. D’un autre côté, et quelles que soient les précautions dont on s’entoure pour s’assurer qu’elle est réclamée en toute connaissance de cause et qu’elle procure une mort sans souffrance, la décision d’aider une personne à mourir aboutit à commettre consciemment un acte qui donne la mort, et c’est pourquoi je pense qu’il n’appartient pas au législateur de franchir le pas.
...scient que laisser un malade subir une torture inutile et dégradante n’est pas plus acceptable, surtout s’il a lui-même demandé qu’on y mette fin et qu’il n’y a plus d’espoir. C’est pour cela qu’il faut que nous nous donnions réellement les moyens de rendre applicable partout sur le territoire la loi Leonetti afin que les personnes malheureusement condamnées puissent mourir dans la dignité, sans souffrances inutiles et en bénéficiant vraiment des soins palliatifs indispensables.
... le prolongement d’une suite d’avancées réelles qui ont eu lieu ces dernières années, notamment grâce à la loi de juin 1999 garantissant l’accès de tous aux soins palliatifs, à la loi Kouchner de 2002 sur les droits des malades et, enfin, en 2005, à la loi Leonetti, dont l’objet est d’éviter l’acharnement thérapeutique en autorisant l’arrêt des traitements et de permettre au médecin de traiter la souffrance des malades. Cependant, si la loi Leonetti a prévu un dispositif autorisant à mettre fin à l’alimentation artificielle, elle ne va pas assez loin et ne répond pas au vœu des personnes qui, tout en souhaitant mourir, ne veulent pas pour autant interrompre l’alimentation artificielle. Tel était le cas du jeune Vincent Humbert, qui souhaitait mettre un terme à une vie qui lui était devenue insuppor...
...leur entourage ? Si l’euthanasie était autorisée, ces personnes ne seraient-elles pas en effet amenées à considérer comme une évidence qu’il leur appartient de demander, pour soulager leur entourage, cette mort que vous souhaitez assistée ? Je ne crois pas que nous ayons considéré ce risque. Enfin, sur le plan législatif, autoriser l’euthanasie serait un renoncement. Le choix n’est pas entre la souffrance et la mort assistée, entre l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie : avec la loi Leonetti, la France a opté pour une législation avancée ; elle a choisi la voie de la sagesse et de l’équilibre. Nous n’avons pas à abdiquer devant la souffrance et nous n’avons pas non plus, dans la lutte contre la souffrance, à abdiquer nos valeurs.