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...tés territoriales de la République, le Sénat s’est toujours particulièrement investi dans la défense des libertés. Il n’est donc pas étonnant qu’il ait marqué une attention constante à la situation des établissements pénitentiaires et aux conditions de détention dans notre pays. Comment ne pas rappeler une fois encore le rapport issu de la commission d’enquête présidée par Jean-Jacques Hyest, Prisons : une humiliation pour la République, qui, tout en reconnaissant les mutations profondes de notre administration pénitentiaire ces dernières décennies, n’en appelait pas moins à des réformes fondamentales ? Le projet de loi pénitentiaire a naturellement rejoint bon nombre de nos préoccupations et nous nous sommes efforcés, dans un travail largement consensuel, d’en améliorer le contenu. Le ...
... je vous avais confié, lors du premier examen de ce texte, qu’un échec sur la question pénitentiaire serait la principale déception de ma vie de parlementaire. Je sais bien que tous les problèmes ne sont pas réglés et que le quotidien restera encore longtemps très difficile dans l’univers carcéral. Mais je suis convaincu que nous avons posé ensemble les conditions d’une véritable rupture entre la prison d’hier et celle de demain. Il nous appartiendra désormais de veiller à ce que les moyens de notre ambition collective ne nous soient pas refusés, afin de faire de l’incarcération un temps utile, et non plus un temps mort, et de se donner les meilleures chances de réussir, grâce aux alternatives à l’incarcération et aux aménagements de peine. Lorsque, loin des écoles de la récidive, nos prisons ...
...on pénitentiaire doit avoir un moyen de pression vis-à-vis des détenus, et je constate que M. d’Harcourt s’est félicité de la légalisation par le Parlement du régime différencié, dont il vante les mérites. D’autre part, la logique pénale du Gouvernement et les choix budgétaires qui y correspondent ne vont pas dans le sens de la mise en œuvre de ce principe. En effet, la construction de places de prison est budgétée – le projet de loi de finances pour 2010 ne me démentira pas – pour faire face à un accroissement prévisible du nombre de personnes détenues, je dirai même un accroissement organisé puisque le Gouvernement s’apprête à déposer un nouveau projet de loi sur la récidive et un autre sur les bandes organisées. De ce point de vue, les propos tenus par l’aiguillon du parti du Président, M. ...
… dans un esprit non seulement sanitaire, qui relève de sa compétence propre, mais plus largement humanitaire, qui restera comme le trait dominant de cette démarche. Le mérite en revient à tous ceux qui, depuis longtemps déjà au Sénat, et spécialement à la commission des lois – en particulier sous l’impulsion de son président actuel –, se sont préoccupés du problème des prisons et ont fait ce qu’il fallait pour que nous n’ayons pas, en somme, la conscience tranquille à cet égard. Notre rapporteur et ceux qui l’ont aidé ont été exemplaires, je n’hésite pas à l’affirmer : exemplaires par leur souci d’une connaissance concrète, précise, des situations de fait, qui est essentielle ; exemplaires par la qualité de leurs réflexions ; exemplaires par des propositions qui ont s...
...ci même le 3 mars dernier. En dépit d’une procédure d’urgence que nous pouvons qualifier d’ « absurde », encore plus aujourd’hui qu’hier, en une petite semaine, le Sénat, toutes sensibilités confondues – je tiens à saluer ici le travail de notre rapporteur –, a bouleversé le texte de Mme Dati, un texte qui n’osait pas aborder la question essentielle : quel est le sens de la peine, à quoi sert la prison ? J’avais moi-même espéré, comme beaucoup d’autres, en particulier Robert Badinter, que la peine ne se limiterait pas à surveiller et punir, mais qu’elle aurait également l’ambition d’humaniser et de réinsérer. Sept mois plus tard, l’obstination du Sénat a permis de progresser dans cette voie, en refusant notamment d’empiler les détenus dans les cellules et en leur reconnaissant le droit à l’en...
... le dernier que le Parlement aura à voter. Sinon, la déception qui pourra être éprouvée face à l’action publique n’aura d’égale que l’humiliation qui sera infligée au Parlement, dont le travail n’aura pas été respecté. Bien entendu, on m’objectera la surpopulation pénale. Mais ne traitons pas la surpopulation pénale comme s’il s’agissait d’une question immobilière ! Même si l’on bâtit encore des prisons dans les années qui viennent, nous ne résoudrons pas la question de la surpopulation. Il existe, à mon avis, une solution plus constructive et sans doute moins onéreuse. Elle consiste à ne pas faire entrer en prison ceux qui n’ont pas grand-chose à y expier : les malades mentaux qui y séjournent faute d’unités hospitalières prêtes à les accueillir, les sans-papiers qui subissent là une double p...
La réinsertion devrait constituer une obsession du service public pénitentiaire, non pas dans les deux ou trois mois qui précèdent la sortie du détenu, mais à tous les moments du parcours du détenu, dès son entrée en prison. Aussi bien manque-t-il, selon moi, à ce texte un titre supplémentaire, qui aurait pu s’intituler : « De la sortie de prison et de la réinsertion du condamné », et qui ne viserait d’ailleurs pas uniquement à prévenir la récidive. Ainsi que me l’a soufflé tout à l'heure dans le creux de l’oreille notre collègue Robert Badinter, si l’ancien détenu devient un SDF, c’est que quelque chose ne fonctio...
...aluer le travail réalisé depuis de nombreuses années, au sein du Sénat, par nombre de nos collègues, notamment le président de la commission des lois. Cette loi, dont les objectifs fondamentaux sont largement partagés, n’aura de sens que si son application est effectivement assurée, dans l’intérêt des détenus, des personnels et des victimes. La situation que nous connaissons aujourd'hui dans nos prisons est inacceptable ; elle résulte non point de la responsabilité d’un seul gouvernement, mais de tous ceux qui se sont succédé depuis de nombreuses années, qu’ils soient de droite ou de gauche. En effet, ce problème fut souvent éludé, car il ne constituait pas, convenons-en, une priorité vis-à-vis de l’opinion publique. Il faut avoir le courage de le dire, parce que c’est la réalité : la prison f...
Ce texte apporte des améliorations tant sur le plan des principes que sur celui des droits reconnus au détenu, droits inhérents à la personne humaine : dispositif de l’article 2 bis ; garantie donnée à tout détenu par l’administration pénitentiaire du respect de ses droits ; affirmation du caractère subsidiaire de l’emprisonnement ferme ; nécessité de prévoir son aménagement, mise en exergue dans le texte lui-même. L’inscription dans la loi des principes du régime disciplinaire relève aussi du retour à la voie de droit, mais ne nous hisse pas au niveau européen. Aujourd’hui, nous avons tous dans la tête les images de la réalité. Nous sommes en effet un certain nombre à savoir ce qu’est une prison, pour y être allés...
...s que l’inégalité qui existe à cet égard pose un problème considérable par rapport aux droits fondamentaux, madame le ministre d’État. L’utilisation du populisme médiatique sur la récidive et les aménagements de peine est tout de même l’illustration d’un débat qui, malheureusement, n’est pas vraiment allé dans le bon sens. Tant que l’on n’affirmera pas, avec une traduction dans les faits, que la prison ne doit être qu’une sanction de privation de liberté et non une dégradation de l’être humain, tant que l’on considérera que l’entassement et la promiscuité peuvent cohabiter avec la réinsertion, au lieu de reconnaître qu’ils nourrissent la récidive, tant que l’on acceptera que la prison soit un lieu où la violence a libre cours, ce qui est aujourd’hui le cas, il nous restera, mes chers collègues,...
...orte donc de réelles améliorations aux conditions d’incarcération des détenus et à leur réinsertion. Toutefois, il restera encore beaucoup à faire pour permettre aux personnes recouvrant leur liberté de se réinsérer totalement dans la société. Pour que ce texte devienne effectif, encore faut-il que les moyens matériels et humains soient à la hauteur de ses ambitions. La construction de nouvelles prisons et de centres adaptés aux jeunes délinquants va dans ce sens. Mais cela ne suffit pas. Le recrutement de travailleurs sociaux pour les services pénitentiaires d’insertion et de probation, la formation et le recrutement de médecins psychiatres pour traiter les psychopathologies qui ne relèvent pas d’une incarcération, la création d’emplois plus nombreux destinés aux détenus, la possibilité pour ...
...lité profondément hostiles à ce projet de loi, notamment aux dispositions relatives aux aménagements de peine. L’une de ces associations dénonçait au mois d’août dernier la mise en conformité de la France avec les règles pénitentiaires européennes, qu’elle a qualifiées – tenez-vous bien, mes chers collègues ! – d’« absurdes », les considérant comme autant de « menaces » pour la « sécurité de nos prisons ». Cette même association, qui tenait voilà quelques mois une conférence au Local, haut lieu de la jeunesse d’extrême droite à Paris, a organisé un colloque à l’Assemblée nationale, à la veille de la séance publique consacrée à l’examen du projet de loi pénitentiaire, colloque pour lequel elle a même obtenu le parrainage de plusieurs personnalités de la majorité. Si le volet relatif aux aménage...
...gle pas totalement. Telle est, après beaucoup d’autres projets de loi, la constatation un peu désespérée que nous sommes plusieurs à formuler dans cet hémicycle, ayant relevé que les conséquences des législations successives ne reflètent pas toujours les bonnes intentions affichées au départ. Car là réside bien le paradoxe actuel ! Plus on légifère et plus la situation semble s’aggraver dans les prisons. Plus on tente d’améliorer le sort des prisonniers et plus celui-ci semble se détériorer, pour toutes sortes de raisons, structurelles et conjoncturelles, certes, qui aboutissent cependant aux mêmes résultats : surpopulation, promiscuité, maladies psychiatriques, vieillissement et répression, faisant de l’univers carcéral, d’une part, un lieu non conforme au respect de la dignité humaine et, d’a...
...jectifs de toute loi pénitentiaire – protéger la société, sanctionner les coupables, réinsérer les détenus – me donne à penser que vous vouliez hiérarchiser ces objectifs, en sous-entendant que seuls des irresponsables pourraient préférer les coupables aux victimes et privilégier le troisième objectif par rapport au deuxième ou, pis encore, au premier. Or, sauf à admettre que ceux qui entrent en prison n’en sortiront jamais – dans ce cas, les 63 000 places ne suffiront pas ! –, le seul but de la peine n’est-il pas que le détenu retourne à la vie normale, dans un meilleur état que celui qui était le sien avant son incarcération ? La sanction n’a de sens qu’administrée dans ce but. La meilleure façon d’éviter la récidive et de protéger la société consiste à appliquer des sanctions qui sont compr...
...ion permette de répondre positivement à trois questions qui restent pour nous essentielles. La première est celle des moyens. Il est évident que la meilleure loi pénitentiaire n’aura aucun effet si le budget ne suit pas, avec les moyens humains et matériels nécessaires. La deuxième est celle de la réinsertion. Nombre de collègues de tous bords l’ont déjà souligné : si nous ne voulons pas que la prison soit l’école de la récidive, il faut attribuer des moyens très importants à la réinsertion et éviter les sorties sèches ; la sortie de prison doit s’accompagner d’un environnement matériel, social et professionnel qui crée toutes les conditions d’une absence de récidive. Enfin, la question de la relation entre la politique pénale et la politique pénitentiaire se pose évidemment. Pour que ce text...
...défendre, on avait trouvé, sans doute avec de grandes difficultés, un argument qui frisait le ridicule : pour faire accepter l’idée que l’encellulement collectif et l’encellulement individuel seraient mis au même niveau, on développait la notion majeure de « libre choix du détenu », ce dernier pouvant choisir entre les deux modes d’incarcération ! On voit bien le ridicule de cet amendement : une prison n’est pas un hôtel, qui aurait plus ou moins d’étoiles. Le détenu, à son arrivée, ne visite pas les lieux avec un surveillant avant de choisir entre une cellule individuelle et une cellule collective ! Bien plutôt, on le « colle » dans une cellule sans lui demander son avis ! Quel est d'ailleurs le libre arbitre d’un homme qui vient de vivre le traumatisme de l’arrestation et de la détention ? L...
... le champ de la détention provisoire en étendant celui du placement sous surveillance électronique. Il n’est rien de plus naturel ni de très original ; toutes les avancées en ce domaine sont positives. Mais le plus intéressant, ce sont les possibilités qui sont ouvertes à tous les niveaux aux magistrats pour leur permettre de substituer des aménagements de peine ou des mesures alternatives à l’emprisonnement. À y regarder de près, ce qui exige du temps et de la patience, on constate que le plafond des peines visé par l’aménagement des peines est porté de un an à deux ans. Or 60 % des condamnés le sont à des courtes peines. Dorénavant, les magistrats auront la possibilité de prononcer dès le départ des aménagements de peine. C’est dire l’importance d’une telle ouverture. J’irai au-delà. Il rés...
... même si j’ignore s’il s’agit d’un changement de cap ou peut-être d’une conséquence de la pression des réalités. Quoi qu’il en soit, si tout le monde s’y met, ce texte nous permettra sans doute d’avancer et de nous attaquer aux causes de l’actuelle surpopulation carcérale. Cela suppose de faire preuve de cohérence et de traiter l’ensemble des questions. Je pense notamment au nombre d’entrées en prison, aux courtes peines, à la durée de l’incarcération, aux sorties et aux aménagements de peines, qui viennent d’être excellemment évoqués par M. Robert Badinter. Il faut également parler des malades. Comme il s’agit d’un champ immense, je m’en tiendrai aux seules pathologies mentales. Je sais que nous avons déjà abordé ce sujet, mais c’est seulement, me semble-t-il, à force d’en discuter que nous ...
Je pense qu’il s'agit là d’une question importante qui mérite quelques explications, notamment en ce qui concerne l’attitude de la commission et sa volonté de préserver le principe de l’encellulement individuel. Certaines des raisons de la commission tiennent à la vie quotidienne dans les prisons, telle que j’ai pu l’observer, au moins partiellement, en multipliant les visites dans ces établissements. En effet, certains directeurs de prison – de plus en plus nombreux, serais-je tenté de dire, au fur et à mesure que l’inflation carcérale s’est développée –, au cours des visites que j’ai effectuées dans leur établissement avec nos collègues de la commission des lois, m’ont confié qu’ils é...
Nous sommes frappés, chaque fois que nous visitons des prisons, de rencontrer des infirmières circulant avec une corbeille de médicaments. Aujourd’hui, pour les malades mentaux, la camisole chimique a remplacé la camisole de force. C’est dire l’état de déshérence de cette catégorie de personnes emprisonnées. À un moment où le Président de la République évoque l’idée qu’il puisse demeurer une responsabilité pénale et des poursuites judiciaires classiques po...