Interventions sur "juridiction"

26 interventions trouvées.

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...it constitutionnel fut naturellement suivie de la réforme constitutionnelle du 29 octobre 1974. En étendant la saisine du Conseil constitutionnel à soixante députés ou soixante sénateurs, l’opposition fut enfin habilitée à contester en droit la toute-puissance politique de la majorité. Mais aussi décisive que fut cette réforme, elle laissait toujours le simple citoyen à l’écart de la contestation juridictionnelle de la loi. Contrairement à nos voisins européens, le droit français a longtemps persisté à refuser aux justiciables le droit de demander la remise en cause de la loi au nom des droits et libertés. L’approfondissement permanent de l’État de droit commande pourtant cette évolution. L’exemple de la pénétration de plus en plus importante de la Convention européenne des droits de l’homme en est...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...se déroulèrent dans les deux assemblées autour du nouvel article 61-1 ont montré que le fruit était mûr, puisque tout le monde était d’accord sur le principe. Le dispositif finalement retenu est assez classique, au regard tant de notre tradition juridique que des solutions adoptées par nos voisins. La nouvelle « question prioritaire de constitutionnalité » fait intervenir un double filtrage – des juridictions au fond et des juridictions suprêmes – pour s’assurer à la fois de l’application de la disposition législative en cause à l’instance, que la question de sa constitutionnalité n’a pas déjà été tranchée et de son caractère sérieux. Il appartiendra finalement au Conseil constitutionnel de trancher dans les trois mois suivant le renvoi devant lui de la mesure contestée. Nous convenons de la pertine...

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je m’étonne que personne n’ait cité entièrement l’article 61-1 de la Constitution, qui explique parfaitement le contenu de la loi organique dont nous discutons aujourd’hui : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. « Une loi organique détermine les conditions d’application du présent article. » Voilà un article court, pertinent et, pour ...

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard :

...nces ». J’en arrive à ma conclusion. Il sera nécessaire de dresser, d’ici à deux ans, un premier bilan de l’application de la loi de façon à examiner la manière dont le Conseil constitutionnel a fait face à ses nouvelles fonctions. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec les propos qui ont été tenus sur la composition du Conseil constitutionnel. Il y aurait beaucoup à dire sur celle des autres juridictions suprêmes ; il n’y a pas de système absolu et parfait pour désigner les membres de ces instances. Le système à la française n’est peut-être pas le meilleur, mais il n’est pas le pire non plus.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Comme le dit Wanda Mastor, professeur de droit public, le droit public français n’a jamais consacré la publicité des divergences en matière juridictionnelle. Bien au contraire, il énonce de manière ferme un principe élevé au rang de dogme, celui du secret des délibérés. Ce dernier est ancré dans notre droit depuis si longtemps et de manière si constante que l’on parle de tradition française du secret. Lors de l’instauration du Conseil constitutionnel, les règles de procédure s’inspirèrent naturellement de celles des juridictions ordinaires. Au ...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

La commission est défavorable à ces trois amendements pour deux raisons. D’abord, ils n’ont aucun lien avec la loi organique. Ensuite, la question de savoir si une juridiction doit faire connaître les opinions dissidentes ou individuelles de ses membres regarde la seule juridiction ; le législateur n’a pas à s’immiscer dans la composition d’une décision de justice.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...ité du statut de membre du Conseil constitutionnel avec certaines activités professionnelles. Pour simplifier les choses, nous proposons que les membres du Conseil constitutionnel n’exercent aucune activité professionnelle. Il est clair que la profession d’avocat pose problème. Un membre du Conseil qui l’exercerait pourrait ainsi être impliqué dans une procédure aboutissant à la saisine de cette juridiction, et se trouver dans une situation ambiguë où il serait à la fois juge et partie. De même, il paraît évident que l’on ne saurait être à la fois membre du Conseil constitutionnel et membre du Gouvernement ou du Parlement. Plus généralement, c’est la question du respect des principes du procès équitable qui se pose, mes chers collègues. En effet, au sens de l’article 6 de la Convention européenne d...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...onviendrait, en l’occurrence, de faire un effort pour sortir de cette routine, car ce projet de loi organique contient une disposition dont je voudrais vous convaincre, mes chers collègues, ainsi que vous, monsieur le secrétaire d'État, de l’inopportunité : avant de transmettre la question de constitutionnalité au Conseil d’État ou à la Cour de cassation, le projet de loi organique prévoit que la juridiction saisie devra s’assurer que la disposition « n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ». Réfléchissons bien à la signification du mot « circonstances ». S’il s’agit ici des circonstances de droit, alors aucun problème ne se pose. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapport...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

Cet amendement procède d’un contresens sur le texte, qui traite non du Conseil constitutionnel, mais de la juridiction saisie. Un justiciable peut saisir une juridiction, administrative ou ordinaire, sur deux moyens : les droits et libertés garantis par la Constitution, d’une part, les droits et libertés garantis par les conventions, d’autre part. Dans le cas où un justiciable soulève ces deux moyens, le juge doit d’abord, « en tout état de cause », se prononcer sur la transmission de la question de constitution...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Il serait difficile d'accepter que le Conseil d'État ou la Cour de cassation puissent s'enfermer dans un silence prolongé, constituant un déni de justice et une violation des droits définis par l'article 61-1 de la Constitution. Si l'on peut admettre qu’il n’est pas souhaitable d’imposer aux juridictions suprêmes des délais trop stricts, l'action engagée par les parties concernées doit néanmoins absolument aboutir à une décision. Notre éminent collègue Michel Charasse a eu l’idée lumineuse de se référer à la loi des 16 et 24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, dont l'article 12, toujours en vigueur, confère au Parlement un pouvoir d'interprétation de la loi. Nous proposons ainsi que le Par...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

L’insertion de cet amendement après l’alinéa qui traite des juridictions inférieures pose problème : comment pourrait-on demander au Parlement d’interpréter un texte qui fait l’objet d’une procédure juridictionnelle ? C’est une première hérésie du point de vue du principe de la séparation des pouvoirs. De plus, il est proposé que le Parlement puisse intervenir alors que la procédure se déroule dans les juridictions inférieures, avant transmission de la question de c...

Photo de Bernard FrimatBernard Frimat :

...armi les présidents de chambre de la Cour de cassation. Les présidents des chambres peuvent être suppléés par des délégués, qu’ils désignent parmi les conseillers de la chambre. » Pensez-vous vraiment nécessaire d’inscrire dans la loi organique les différents niveaux de délégation au sein de la Cour de cassation ? Laissons-la s’organiser : les tendances spontanéistes et révolutionnaires de cette juridiction ne sont guère à redouter…

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...a été nécessairement adoptée par le Parlement. Monsieur le secrétaire d'État, je connais les objections qui ont été opposées à cette proposition par Mme le garde des sceaux à l’Assemblée nationale. Il a été affirmé aux députés qu’une telle mesure était inutile, parce qu’ils pouvaient s’adresser par lettre au Conseil constitutionnel. En effet, tout le monde a la possibilité d’écrire à cette haute juridiction ; on peut même lui envoyer des cartes postales : cela fera travailler La Poste !

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...on de leur intérêt. Afin de combler ce vide juridique, la procédure applicable au réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme devrait pouvoir s’appliquer également, nous semble-t-il, quand le juge a saisi le Conseil constitutionnel sans qu’il y ait sursis à statuer et rendu une décision sur le fondement du texte abrogé par la haute juridiction. Dans un tel cas de figure, si cet amendement était adopté, le dispositif prévu aux articles 626-1 à 626-7 du code de procédure pénale s’appliquerait de la même manière.

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

Monsieur Sueur, la question que vous soulevez est intéressante et importante. Malheureusement, le dispositif que vous proposez est inapplicable en l’occurrence. En effet, l’article du code de procédure pénale auquel vous faites référence concerne les conséquences d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. Or les décisions de cette juridiction ont pour caractéristique principale de s’appliquer à un litige en particulier et de ne produire des effets que pour ce dernier, même si, bien entendu, la Cour de cassation peut être conduite à s’inspirer, dans sa jurisprudence, des principes dégagés par la Cour européenne de Strasbourg, pour les appliquer à d’autres affaires. Les articles du code de procédure pénale que vous citez, mon cher coll...

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Dès lors, nous pourrions peut-être nous préoccuper du sort des gens qui auront été jugés en fonction d’une loi déclarée inconstitutionnelle ! Tout à l'heure, nous avons longuement discuté des délais dans lesquels les juridictions devraient se prononcer, du rôle du Premier président de la Cour de cassation ou de ses délégués, en entrant dans les détails de dispositions totalement anodines, et maintenant on se contente de renvoyer à la Constitution le traitement d’un problème d’une réelle importance ! Que faisons-nous ici ce soir, dans ces conditions ? Mes chers collègues, il s'agit tout de même d’un point important, puis...

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, avant la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, les citoyens ne pouvaient pas contester la constitutionnalité d’un texte lors d’une instance en cours devant une juridiction. La loi, expression de la souveraineté du peuple, ne pouvait pas être remise en cause dès lors qu’elle avait été promulguée. Grâce à l’introduction de l’article 61-1 dans la Constitution, cela est désormais possible. Ce projet de loi organique constitue une avancée historique ; il marque un réel progrès dans l’approfondissement de l’État de droit et dans la pratique démocratique au quotidien. En...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

...blées et, depuis 1974, soixante députés ou soixante sénateurs. À l’occasion de la révision du 23 juillet 2008, le constituant a complété ce dispositif par un contrôle concret, a posteriori et ouvert aux justiciables après l’entrée en vigueur de la loi. Ainsi, aux termes du nouvel article 61-1, premier alinéa, de la Constitution : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. » Le second alinéa de cet article réserve à une loi organique le soin de préciser les conditions d’application de ces disposi...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

...tion est abrogée immédiatement et erga omnes. Voilà donc, mes chers collègues, le contexte dans lequel ce projet de loi organique nous est soumis. Dans sa première version, c’est-à-dire le texte proposé par le Gouvernement, la question de constitutionnalité s’y organise selon deux principes simples. D’une part, elle peut être soulevée par toute partie à l’instance, devant l’ensemble des juridictions relevant du Conseil d’État ou de la Cour de cassation, à toute étape de la procédure – première instance, appel ou cassation. D’autre part, si les juridictions concernées sont habilitées à apprécier la recevabilité de la question, le Conseil constitutionnel demeure seul compétent pour statuer au fond sur la conformité à la Constitution. Sur cette base, la procédure s’organise, selon les cas, e...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

Le second sujet porteur d’incertitudes concerne les perspectives de développement du nouveau contentieux. Il paraît aujourd’hui impossible de prédire avec certitude l’ampleur que prendra le contentieux du contrôle de constitutionnalité a posteriori. La situation se présentera peut-être de manière très différente selon les juridictions. Depuis 1974, il convient de le rappeler, la quasi-totalité des lois concernant les droits et libertés a été soumise au Conseil constitutionnel, de sorte que le nombre de dispositions législatives contraires à la Constitution, même antérieures à 1958, ne devrait pas être infini. La jurisprudence des cours suprêmes et du Conseil constitutionnel devraient donc réguler les flux et concentrer les ...