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Mes chers collègues, n’est-il pas dangereux d’instrumentaliser ainsi l’Histoire et la Mémoire ?
...’adoption de la proposition de loi et de la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir, il s’agit de saluer un moment important de la construction de l’union de la France. D’une manière ou d’une autre, la plupart d’entre nous ont milité en faveur d’un cessez-le-feu en Algérie, en faveur de la fin d’un drame qui avait endeuillé ce pays comme le nôtre. Il faut garder ce point en mémoire. Néanmoins, le débat qui vient d’avoir lieu a démontré notre incapacité à évoquer l’histoire de la décolonisation. Pourtant, le général de Gaulle lui-même avait affirmé la volonté de mettre fin dans la dignité à une histoire coloniale. De toute évidence, notre participation indirecte à ce désir d’indépendance, notamment de l’Algérie, s’imposait. Mes chers collègues de l’opposition, quand on vou...
Les questions de mémoire sont toujours délicates pour les parlementaires que nous sommes. En effet, les sujets mémoriels sont souvent abordés par le biais de considérations personnelles ou sous la pression de tel ou tel organisme. Certains sont partisans d’une date, d’autres défendent les revendications d’une association, d’autres encore s’activent pour faire reconnaître tel ou tel préjudice commis à l’époque. Cependant...
...communautarismes et de revendications qui tendent à favoriser les extrêmes. Au risque de déplaire à certains de nos collègues, je citerai une nouvelle fois le Président Mitterrand : « […] s’il s’agit de décider qu’une date doit être officialisée pour célébrer le souvenir des victimes de la guerre d’Algérie, [….], cela, à mes yeux, ne peut pas être le 19 mars, parce qu’il y aura confusion dans la mémoire de notre peuple. [….] il convient de ne froisser […] la conscience de personne. »
Les journées mémorielles du 8 mai et du 11 novembre marquent la fin effective de deux terribles conflits. Elles sont ancrées dans notre mémoire collective comme un véritable moment de soulagement et comme des dates fondatrices pour la paix et la reconstruction. Par contraste, le 19 mars correspond à un arrêt unilatéral des combats du côté français et à l’intensification des exactions du FLN contre la population civile et les militaires français. Déplacer au 19 mars la commémoration des victimes de la guerre d’Algérie revient à considére...
...onseil fera ce qu’il a à faire. Mes chers collègues, franchement, comment aborder cette proposition de loi sans ressentir le poids de l’Histoire ? Je crois d'ailleurs que, les uns et les autres, vous vous êtes tous exprimés avec la même honnêteté quelle que soit votre opinion. Sur un sujet comme celui-là, il peut y avoir des visions totalement différentes. Mais la guerre d’Algérie a marqué notre mémoire collective : nous avons tous vécu cette guerre, de près ou de loin.
C’est une injure faite à la mémoire des dizaines de milliers de victimes qui ont péri après cette date et pour lesquelles les accords d’Évian sont synonymes du début d’un massacre. Entre 1962 et 1964, plus de 500 soldats français ont été tués ; 80 % des victimes civiles de la guerre d’Algérie, tant harkis que pieds-noirs, ont péri après le 19 mars 1962. Déplacer au 19 mars la commémoration des victimes de la guerre d’Algérie ouvre...
...du les mêmes convictions depuis de nombreuses années, d'abord à l’Assemblée nationale puis au Sénat. Il n’y a d'ailleurs rien d’anormal à devenir sénateur après avoir été député ; plusieurs d’entre nous sont dans ce cas. Où est le problème ? C’est la démocratie : ce sont les électeurs qui décident. Il est indispensable de faire du 19 mars la journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. Comprenons-nous bien : cette reconnaissance ne vise pas à imposer le 19 mars 1962 comme date de la fin de la guerre d’Algérie. Le 19 mars 1962, c’est d'abord et avant tout le lendemain du 18 mars et de la signature des accords d’Évian ; le 19 mars, c’est l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Cependant...
… « C’est précisément parce que [cette date] n’a pas de fondement historique précis que nous l’avons retenue car elle ne choquera pas les mémoires des familles si lourdement endeuillées et parfois encore si amères. C’est précisément parce qu’elle n’exalte pas ce qui fut une victoire pour les uns, un abandon pour les autres, qu’elle a pour vocation d’établir un lien entre les sensibilités. » Mes chers collègues, pourquoi donc raviver aujourd’hui les clivages au sein de notre société, alors même qu’elle a, plus que jamais, besoin d’être ras...
Dans quelques années, il ne restera que les anciens combattants de la guerre d’Algérie pour transmettre la flamme, transmettre la mémoire, transmettre notre histoire. Ce devoir de mémoire est indispensable ! Dans de nombreuses villes de France, on voit des drapeaux le 19 mars. Dans mon département, 304 communes sur 369 ont un monument, une place ou une rue du 19 mars 1962. Au total, dans notre pays, ce sont plus de 4 000 artères, plus de 800 sites personnalisés et plus de 1 500 lieux qui sont consacrés à la mémoire du 19 mars 1962...
Le monde des anciens combattants est particulièrement bouleversé depuis que la conférence des présidents du Sénat a inscrit à l’ordre du jour la proposition de loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. Je tiens à vous rassurer, monsieur Néri : non, nous n’avons pas oublié les appelés du contingent ! Mon mari a passé trente-six mois trente-six jours en Algérie. Il y est parti en 1958, pour revenir en 1961. Dans notre village, il n’a d’ailleurs pas été le seul à être appelé. Je pense notamment à l’un...
… serait certes légale, mais elle ne serait pas légitime, faute de consensus national. Seule une mémoire partagée peut renforcer la cohésion sociale. Pour toutes ces raisons, vous le comprendrez, je ne voterai pas la proposition de loi.
...pieds-noirs tués et 875 disparus, ce qui, en proportion, fut bien moindre. C’est dire le déchaînement de violence qui a suivi cette date du 19 mars 1962. Nombreux sont les harkis – entre 60 000 et 65 000, selon les chiffres officiels, mais certains vont jusqu’à parler de 150 000 –, désarmés par l’armée française, comme le cessez-le-feu l’exigeait, qui ont péri de façon atroce. La Direction de la mémoire du patrimoine et des archives du ministère de la défense et des anciens combattants a recensé 386 militaires français qui ont trouvé la mort après le 19 mars 1962. Quelle belle date à commémorer ! Qui peut raisonnablement penser qu’elle correspond à une paix retrouvée pour toutes les familles de ces victimes ? Imaginez le cynisme et l’horreur…
... continuent de porter cette identité avec douleur et un profond sentiment d’injustice envers la France, et ce cinquante ans après les événements ; les pieds-noirs se sentent toujours déracinés et éprouvent encore durement le ressenti des populations déplacées ; nombre de jeunes Français nés de parents immigrés algériens se sentent décalés, sont à la recherche d’une identité forte et perpétuent la mémoire du conflit algérien comme une victoire personnelle. Cela existe aussi ! Mes chers collègues, nous avons voté à l’unanimité la loi du 7 mars 2012, déposée à l’origine par notre collègue Raymond Couderc. Ce texte sanctionne pénalement l’injure envers les supplétifs de l’armée française, tant il est vrai que les harkis continuent d’être fréquemment insultés, et avec quelle brutalité, pour s’être ba...
...é d’apaiser les divisions se manifestait ainsi dans le choix d’une date qui rassemble, qui soit exempte de toute considération politique, philosophique ou religieuse et respectueuse des sensibilités de chacun. Il s’agissait non pas de commémorer un événement, de célébrer une victoire ou de pleurer une défaite, mais tout simplement, ce jour-là, d’honorer, sur l’ensemble du territoire national, la mémoire de tous ceux qui, quelles que soient leurs sensibilités et leurs convictions, ont disparu dans ces combats et ces événements. On peut, certes, contester le choix du 5 décembre, mais on ne peut refuser à cette date l’avantage d’être neutre et de n’avoir d’autre but que de rassembler autour de l’hommage dû aux morts. Pour beaucoup, le 5 décembre ne fait aucune référence à l’histoire et, par conséq...
Depuis 1981, les Présidents de la République successifs, François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, se sont toujours opposés à une telle reconnaissance, afin de ne pas diviser les Français en heurtant leur mémoire. Le rôle et la responsabilité du politique n’est-il pas de rassembler plutôt que de diviser ? Celui des élus que nous sommes n’est-il pas de créer les conditions de l’apaisement, afin que chacun puisse exercer sereinement son devoir de mémoire ? Mes chers collègues, c’est sans malice que je me plais à citer François Mitterrand qui, en 1981, déclarait en substance : « Si une date doit être offici...
Mlle Sophie Joissains. Que l’Algérie commémore la mémoire de ses victimes et célèbre sa victoire à cette date paraît logique. Mais la France n’est pas l’Algérie. À cette date, des Français, musulmans comme non-musulmans, se sont fait massacrer et il n’y a pas de quoi nous réjouir ni honorer les déclarations du 19 mars. Car c’est aussi de cela qu’il s’agit !
… qui n’a ni plus ni moins comme but, au travers d’une transmission apaisée de la mémoire, que d’instaurer une journée nationale du recueillement et du souvenir dédiée à toutes les victimes de ces conflits.
...endu, ces jours-là, un service éminent à la République française et aux principes qui sont les siens. C’est dire que, même si l’on ne peut se payer le luxe de dissocier l’ensemble des victimes de ces conflits quand il est question d’instaurer, au même titre que le 8 mai ou le 11 novembre, une date officielle pour permettre à leurs collègues survivants et à leurs familles de se recueillir en leur mémoire, je crois que le Parlement accomplit, à ce moment-là, véritablement le devoir qui est le sien. Quant à la motion tendant à opposer la question préalable sur ce texte, elle se fonde, comme le montrent les propos tenus à l’instant par notre collègue Lecerf, sur les arguments qui sont répétés sans cesse depuis l’ouverture de ce débat. Je le répète, loin de chercher à attiser ou à raviver les cliva...
...d’autres, le succès que suscite chaque année, au-delà des anciens combattants, auprès de la population tout entière, la célébration du 19 mars. Je vous invite à prendre connaissance de la liste des communes qui affichent sur leurs territoires des sites dédiés au 19 mars. Vous vous rendrez compte que, malgré ce que vous avez pu dire jusqu’à présent, cette date est inscrite dans les faits, dans la mémoire collective de notre pays et dans la volonté exprimée à la fois par les conseils généraux, par les conseils régionaux et par les communes d’aller plus loin et de l’officialiser une fois pour toutes.