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Il s’agit non seulement de protéger et d’accompagner les personnes prostituées, mais également d’instituer un véritable parcours de sortie de la prostitution, en collaboration étroite avec les associations. Ce dispositif est essentiel pour offrir aux personnes prostituées une alternative crédible à l’activité prostitutionnelle, tout en leur apportant un soutien global sur le plan social, notamment en matière d’accès au logement et aux soins. C’est pourquoi nous souhaitons...
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cela fait désormais un peu plus d’un an que la commission spéciale chargée d’examiner la présente proposition de loi a entamé ses travaux. Nous avons mené de nombreuses auditions qui nous ont permis d’entendre les points de vue des uns et des autres : institutions, associations, médecins et, évidemment, personnes prostituées, à l’exception, toutefois, des clients ! Au cours de ce processus qui a conduit la commission spéciale à élaborer un texte le 8 juillet dernier, j’ai travaillé étroitement avec le président de celle-ci, qui était alors Jean-Pierre Godefroy ; je le remercie de nos relations constructives et cordiales. Je salue également M. Vial, qui assure actuellement la présidence de la commission spéciale. Je ...
...efroy a conduit les travaux de cette commission et la qualité des débats qui s’y sont déroulés. J’adresse également mes remerciements à Mme la rapporteur, Michelle Meunier, dont l’investissement et les convictions sont toujours aussi forts. La commission spéciale a rencontré, durant cinq mois, près de quatre-vingts personnes, représentants du monde associatif, des milieux judiciaire et policier, personnes prostituées, chercheurs et personnalités qualifiées. J’ai été frappé, à cet égard, d’entendre un certain nombre de personnes nous dire qu’elles étaient invitées pour la première fois à s’exprimer sur cette proposition de loi, qui avait pourtant déjà fait l’objet d’un examen par l’Assemblée nationale. Ainsi, sur ce texte comme sur d’autres, le Sénat aura travaillé de manière approfondie, en faisant preuve d’é...
L’article 14 ter s’inscrit pleinement dans la philosophie de cette proposition de loi, qui vise à offrir un accompagnement à la fois social et sanitaire aux personnes prostituées. À cet égard, je voudrais souligner qu’il est incohérent d’avoir rétabli le délit de racolage : les personnes prostituées sont ainsi considérées comme des criminelles, tandis que cet article vise, légitimement, à mieux prendre en compte leur santé. L’article 14 ter a en effet pour objet de définir le cadre dans lequel doit s’inscrire la politique de réduction des risques sanitaires pour ...
En ce sens, je souscris aux modifications apportées au texte par la commission spéciale et tendant à préciser que, si le rôle de l’État doit être réaffirmé, celui des autres acteurs est tout aussi essentiel. En outre, l’emploi du terme « dommages » ne me semble pas approprié. Il est préférable de parler de réduction des risques pour les personnes prostituées, via une politique d’information et de dépistage régulier. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe CRC votera l’article 14 ter.
...u préalable, je souhaite vous restituer les faits tels que je les connais. Mon information est bien évidemment limitée par la faiblesse criante des études sur le sujet, notamment pour ce qui concerne la prostitution étudiante ou sur internet. Je m’appuierai donc uniquement sur les rapports officiels et les travaux que j’ai menés avec Jean-Pierre Godefroy sur la situation sanitaire et sociale des personnes prostituées. Ce travail et les excellents rapports de Guy Geoffroy, Danielle Bousquet, Maud Olivier, Brigitte Gonthier-Maurin et Michelle Meunier nous donnent une base sérieuse pour débattre aujourd'hui. Tous ces travaux convergent vers une idée partagée : il convient d’inverser le regard sur la prostitution, d’inverser la charge de la preuve, en considérant les personnes prostituées comme des victimes. D’a...
...isme et donne à la puissance publique un seul but : arracher des griffes de leurs proxénètes de « pauvres femmes étrangères ». En Europe, la traite dont nous parlons rapporterait environ 3 milliards de dollars par an. Cela représente un marché criminel colossal. Reste que, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime et l’Organisation internationale du travail, sur un million de personnes prostituées en Europe, de 140 000 à 270 000, soit entre 14 % et 27 %, seraient effectivement soumises à la traite pour exploitation sexuelle. Les personnes prostituées étrangères – femmes, hommes et « trans » – ne relèvent pas toutes de ce « système ». Certes, parties de divers continents, nombre d’entre elles ont eu recours à des réseaux pour atteindre l’Europe dans l’espoir d’améliorer leur condition écon...
.... Au Danemark, une commission du code pénal est chargée de conclure à l’opportunité d’adopter ou de modifier une législation. Ce pays a renoncé à s’engager dans la voie de la pénalisation du client, estimant que les mesures adoptées en Suède et en Norvège étaient inopportunes et que, dans la pratique, la mise en œuvre d’un tel dispositif législatif avait une incidence défavorable sur le sort des personnes prostituées. Le rapport de cette commission souligne en outre que, au regard des expériences suédoise et norvégienne, les effets positifs d’une pénalisation du sexe marchand seraient limités. Seules des actions intensives de la police – le rapport parle de raids, de razzias – pourraient avoir une efficacité, encore ne serait-elle que momentanée. Il ajoute que l’effet secondaire probable d’une interdiction s...
...n droit d’exploiter la précarité et la vulnérabilité d’une personne pour lui imposer un acte sexuel contre rémunération, ni de disposer du corps d’autrui. Qui peut accepter cette domination du corps de l’autre par l’argent ? Qui peut accepter cette aliénation du corps humain ? En proposant de rétablir l’article 16, nous entendons enfin inverser les responsabilités. Nous estimons en effet que les personnes prostituées sont, pour la plupart, des victimes. Les responsables sont, bien sûr, les proxénètes, mais aussi les clients, que nous voulons dès lors sanctionner. Oserai-je les qualifier de « clients prostitueurs » ? Oui, sans hésitation, car ils participent à l’exploitation du corps humain, ce qu’il faut leur faire comprendre par la pénalisation. Nous ne voulons plus continuer à accepter que, sous prétexte q...
...ment prétendre instaurer une société de pleine égalité entre les femmes et les hommes quand on accepte que des hommes achètent le corps des femmes ? Où est le choix de ces dernières ? Même si je considère que le débat premier ne se limite pas à une question de chiffres, il me semble à mon tour nécessaire d’illustrer la réalité de la prostitution par quelques données statistiques. En France, les personnes prostituées seraient au nombre de 30 000, et 85 % sont des femmes. À l’inverse, 99 % des clients sont des hommes. La prostitution est donc bien un phénomène sexué. De surcroît, comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État, plus de 90 % des personnes prostituées exerçant sur le territoire français sont de nationalité étrangère. Les pays d’origine sont bien connus : il s’agit principalement de la Rouman...
... pays d’origine et surtout les difficultés qu’elle rencontre et les menaces auxquelles elle est exposée en arrivant dans un nouveau pays : elle constitue une proie idéale. Nous savons les chantages qui sont exercés sur elle lorsqu’elle veut obtenir ou récupérer ses papiers, son passeport, etc. À cette précarité, à cette subordination économique, s’ajoutent les risques sanitaires qu’encourent les personnes prostituées. C’est une catégorie majoritairement bien plus exposée que le reste de la population aux maladies sexuellement transmissibles ou aux infections sexuellement transmissibles, sans parler des maladies chroniques et autres problèmes de santé souvent liés à des conditions de vie dégradées et à la perte de l’estime de soi. Or on ne le sait que trop bien, le cumul des difficultés est un obstacle à l’acc...
...n cause pour racolage par la police nationale n’a cessé de baisser depuis 2003 – preuve s’il en fallait que la solution juridique n’était pas la bonne – et, dans le même temps, la prostitution n’a ni disparu ni diminué. En qualifiant la prostituée de délinquante, le délit de racolage passif a eu des effets pervers particulièrement dommageables, se traduisant par l’aggravation de la précarité des personnes prostituées et le renforcement des réseaux mafieux. Douze années après son instauration, son bilan est peu flatteur, à rebours des objectifs initiaux de répression et d’annihilation de la prostitution. Les personnes prostituées ont quitté les centres-villes pour les zones périurbaines. De ce fait, les risques d’agression ont augmenté, sans baisse corrélée des activités. L’incrimination du racolage passif a ...
..., de « faire prendre conscience que la prostitution est […] une violence à l’égard de personnes démunies et une exploitation des plus faibles par des proxénètes, qu’ils agissent de manière individuelle ou dans des réseaux réalisant des profits très élevés, la traite se cumulant souvent avec d’autres trafics. » Ce texte apporte un certain nombre d’avancées sensibles en améliorant la situation des personnes prostituées et en sensibilisant le public aux réalités de la prostitution. Il comporte des dispositions protectrices à l’égard des « victimes » de la prostitution. Nous nous félicitons à cet égard de l’introduction d’un parcours de sortie de la prostitution. Ces « victimes », ainsi qualifiées par le texte, sont en effet avant tout victimes du chômage et de la misère sociale en France ou ailleurs. Sortir de ...
...tre sans merci. Cette proposition de loi assure des avancées notables en matière de lutte contre le système prostitutionnel, notamment en créant un parcours de sortie de la prostitution ou en instituant des mesures protectrices à l’égard de ces victimes et des dispositifs tendant à sensibiliser le jeune public aux réalités de la prostitution. Toute initiative visant à améliorer la situation des personnes prostituées et la lutte contre le système prostitutionnel doit être soutenue. La mesure que je viens d’évoquer se veut avant tout symbolique et dissuasive, je le comprends, mais je crains qu’elle ne soit inefficace. En conséquence, j’ai tendance à soutenir la suppression de l’article 16 et de son pendant, l’article 17, par la commission spéciale. Cela étant, je le rappelle, je suis viscéralement hostile à ...
...e Meunier, qui ont su conduire les débats en nous incitant à toujours approfondir notre réflexion sans jamais chercher à nous influencer. Bien que des positions divergentes s’expriment, tous les membres de la commission spéciale sont animés par la même exigence : lutter contre les réseaux et contre la prostitution, qui est un mal social dramatique, une forme d’esclavage moderne. On le sait, les personnes prostituées sont à 97 % des femmes étrangères, « importées » dans différents pays pour satisfaire les besoins d’une traite des corps qui représente sans doute ce qu’il y a de moins honorable dans notre société. Cela étant, nous avons auditionné des représentants de la minorité constituée de celles et ceux qui se revendiquent comme des travailleurs du sexe. Il faut les respecter, car ils sont respectables. P...
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la force de la présente proposition de loi réside dans sa cohérence globale, qui inclut les réseaux de proxénètes, les personnes prostituées et les clients. En effet, priver le système d’un de ces acteurs, c’est le faire s’effondrer dans son ensemble. On ne peut prétendre lutter efficacement contre la traite des êtres humains sans mettre en œuvre des mesures visant à décourager la demande d’achats sexuels. Comment feindre plus longtemps d’ignorer que c’est l’argent des clients qui alimente les réseaux criminels, que ces derniers se l...
...réaffirme clairement la position abolitionniste de la France et permet d’établir concrètement que nul n'est en droit d'exploiter la précarité et la vulnérabilité d’autrui ni de disposer de son corps pour lui imposer un acte sexuel contre rémunération. La prostitution est un phénomène sexué qui contrevient au principe d’égalité entre les hommes et les femmes. En effet, si 85 % des 20 000 à 40 000 personnes prostituées en France sont des femmes, 99 % des clients sont des hommes. Dans les années 2000, les personnes prostituées étaient à 90 % de nationalité étrangère, alors que cette proportion n’était que de 20 % en 1990. Principalement originaires de Roumanie, de Bulgarie, du Nigeria, du Brésil et de Chine, ces personnes sont le plus souvent maintenues sous la coupe de réseaux de traite et de proxénétisme organ...
...u que la réglementation était le moyen le plus efficace de lutter contre la traite et les réseaux criminels. Or c’est précisément le contraire qui a lieu : ces pays deviennent les destinations privilégiées des réseaux mafieux. En bonne logique commerciale, les trafiquants conduisent leurs victimes là où la demande est forte et surtout légale ! Selon la police néerlandaise, entre 50 % et 90 % des personnes prostituées agissent sous la contrainte d’un réseau de proxénétisme. Par ailleurs, nous nous en souvenons tous, lors de la Coupe du monde de football de 2006, les femmes originaires des pays de l’Est arrivaient en Allemagne par bus entiers !
... fort que nous adresserons aux réseaux de proxénétisme. Nous faisons le pari qu’en s’attaquant à la demande, la proposition de loi dissuadera efficacement les réseaux proxénètes d'investir sur un territoire dont la législation est moins favorable à la réalisation de profits criminels. Enfin, cet article responsabilisera le client et renversera la charge de la preuve, qui pèse aujourd'hui sur les personnes prostituées par le biais du délit de racolage, que nous venons de rétablir.
...elle, en faisant peser la présomption de culpabilité sur la personne prostituée, a été efficace contre la prostitution dite « traditionnelle », qui est en train de disparaître. Toutefois, son application a eu pour effet pervers de favoriser le développement des réseaux, et donc de la prostitution sous contrainte, ce qui rend nécessaire une évolution de notre législation. Nous l’avons affirmé, les personnes prostituées sont d'abord des victimes. Il serait donc logique et cohérent que notre droit le reconnaisse et cesse de faire peser la présomption de culpabilité sur ces personnes. Par ailleurs, quand on connaît les conditions d’exercice de la prostitution dans le bois de Vincennes, par exemple, on ne saurait imaginer une seule seconde que le client d’une prostituée puisse croire en toute sincérité que celle-c...