La commission examine le rapport de MM. Jacques Berthou et Jean-Marie Bockel et le texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 458 (2012-2013), présentée par MM. Jacques Berthou et Jean-Marie Bockel au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et de l'information dans l'Union (E8076) et sur la stratégie européenne de cybersécurité : un cyberespace ouvert, sûr et sécurisé (JOIN(2013) 1 final).
Le premier point à l'ordre du jour porte sur l'examen du rapport de nos collègues MM. Jacques Berthou et Jean-Marie Bockel et l'adoption d'une proposition de résolution européenne portant sur la stratégie européenne de cybersécurité et la proposition de directive de la Commission européenne sur la sécurité des réseaux et de l'information.
Nos deux collègues ayant déjà présenté cette proposition de résolution européenne lors de notre réunion du 27 mars, et aucun amendement n'ayant été déposé sur ce texte, je vous proposerai de passer directement au vote sur l'adoption de cette proposition de résolution européenne, après un bref rappel de la procédure relative à l'adoption des résolutions européennes, qui se caractérise par des délais très courts.
Je rappelle, en effet, que la stratégie européenne et la proposition de directive ont été publiées le 7 février dernier.
Notre commission s'est saisie de ces deux textes le 20 février et a désigné nos deux collègues comme co-rapporteurs.
Nos collègues nous ont ensuite présenté une communication et une proposition de résolution européenne le 27 mars.
Je rappelle que les résolutions européennes, prévues à l'article 88-4 de la Constitution, permettent au Parlement de faire connaître au Gouvernement sa position sur un projet de texte européen, avant son adoption par les institutions européennes. Elles ne sont pas contraignantes juridiquement pour le Gouvernement mais elles ont une forte portée politique. Elles figurent ainsi dans les dossiers des ministres lorsque ceux-ci négocient les textes européens à Bruxelles.
Aujourd'hui nous sommes appelés à nous prononcer définitivement sur l'adoption de cette proposition de résolution européenne, en l'absence d'amendements déposés.
Cette résolution européenne deviendra une résolution du Sénat au terme d'un délai de trois jours francs, sauf si le Président du Sénat, le président d'un groupe, le président d'une commission permanente, le président de la commission des affaires européennes ou le Gouvernement demande, dans ce délai, qu'elle soit examinée par le Sénat.
Si, dans les sept jours francs qui suivent cette demande, la Conférence des présidents ne propose pas ou le Sénat ne décide pas son inscription à l'ordre du jour, la proposition de résolution de la commission devient alors la résolution du Sénat.
Je tenais donc à remercier nos deux collègues pour leur travail réalisé dans des délais aussi brefs.
Après le rapport d'information sur la cyberdéfense de notre ancien collègue Roger Romani en 2008, puis celui de notre collègue Jean-Marie Bockel en juillet dernier, notre commission confirme ainsi son rôle d'éclaireur sur un dossier majeur pour notre politique de défense et de sécurité, mais aussi son intérêt pour le suivi de ses recommandations et les questions européennes.
Le texte de la résolution européenne et le projet de rapport vous ont été distribués.
Êtes-vous favorable à l'adoption de cette résolution européenne ?
Nos deux rapporteurs veulent-ils dire un mot ?
Je ne reviendrai pas ici sur le contenu de la communication que nous vous avions présentée, avec notre collègue M. Jean-Marie Bockel, lors de notre réunion du 27 mars dernier. Je voudrais simplement rappeler brièvement les principales recommandations qui figurent dans le texte de la proposition de résolution européenne.
Cette proposition de résolution européenne vise tout d'abord à approuver les grandes orientations de la stratégie européenne de cybersécurité, qui a été proposée dans la communication conjointe de la Commission européenne et de la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, le 7 février dernier, et à appeler les institutions européennes et les Etats membres à une mise en oeuvre rapide de ses différentes priorités.
Elle souligne, en particulier, l'importance de la mise en place et du développement par l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne de capacités nationales de cybersécurité, la nécessité de disposer d'une base industrielle européenne pérenne en matière de cybersécurité et d'équipements de confiance, ainsi que l'importance des actions de sensibilisation et de formation.
Elle vise ensuite à approuver les principales dispositions de la proposition de directive de la Commission européenne sur la sécurité des réseaux et de l'information, qui a été présentée également le 7 février dernier.
En particulier, nous nous félicitons du fait que cette proposition de directive rend obligatoire, pour chaque Etat membre, la mise en place d'un organisme responsable en matière de cybersécurité, doté de ressources humaines et financières suffisantes, la définition d'une stratégie nationale et la création d'une structure opérationnelle d'assistance au traitement d'incidents informatiques.
Nous approuvons également l'obligation, pour les administrations publiques et les opérateurs d'importance vitale, de notifier, sous peine de sanctions, les incidents graves de sécurité informatique à l'autorité nationale compétente, ainsi que la reconnaissance par les Etats membres du pouvoir donné aux autorités compétentes de donner des instructions contraignantes aux administrations publiques et aux opérateurs d'importance vitale, afin qu'ils renforcent la sécurité de leurs réseaux et systèmes.
Nous recommandons même d'inclure dans cette proposition de directive l'obligation pour les opérateurs d'importance vitale de mettre en place des outils de détection d'incidents ou d'attaques informatiques et de disposer d'une cartographie à jour de leur système d'information.
Nous estimons toutefois que la définition des modalités d'application des mesures prévues par la directive devrait être confiée aux Etats membres et non à la Commission européenne, notamment en ce qui concerne la définition des circonstances dans lesquelles s'appliquerait l'obligation de notifier les incidents ou la liste des opérateurs d'importance vitale, et nous jugeons qu'il ne serait pas pertinent de prévoir la notification systématique des incidents par les autorités nationales compétentes à l'ensemble des autres Etats membres et à la Commission européenne.
Sous ces deux réserves, la proposition de résolution européenne vise à demander au Gouvernement de soutenir ces deux initiatives et d'oeuvrer au sein du Conseil afin que ces recommandations soient prises en compte lors des négociations.
Le travail que nous avons réalisé avec notre collègue Jacques Berthou se situe dans le prolongement du rapport d'information sur la cyberdéfense que je vous avais présenté en juillet dernier et dont les recommandations avaient été adoptées à l'unanimité par la commission.
Parmi les dix priorités et les cinquante recommandations de notre rapport, une partie d'entre-elles était consacrée au rôle de l'Union européenne.
En effet, même si la cyberdéfense doit demeurer avant tout une compétence des Etats membres, car elle touche directement à la souveraineté nationale, et que, dans ce domaine, la coopération est surtout bilatérale, notamment avec le Royaume-Uni et l'Allemagne, je considère que, s'agissant d'une menace qui s'affranchit des frontières, l'Union européenne a un rôle essentiel à jouer, notamment parce qu'une grande partie des normes applicables aux opérateurs de télécommunications relève de ses compétences.
Dans ce rapport, je m'étais montré toutefois assez critique sur l'action de l'Union européenne en matière de cybersécurité, en regrettant notamment l'absence de réelle stratégie européenne, la dispersion des acteurs et le manque d'efficacité de l'Union européenne.
Parmi nos recommandations figurait ainsi la définition d'une véritable stratégie européenne de cybersécurité et, de ce point de vue, la communication de la Commission européenne et de la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité répond directement à notre souhait.
Je me félicite également de l'accent mis sur les aspects industriels, notamment en ce qui concerne les équipements de confiance, à l'image des « routeurs de coeur de réseaux » ou l'offre de « cloud » de confiance en Europe. Je pense notamment qu'il serait utile de soutenir les efforts de normalisation au niveau européen, de prévoir un système de certification, des financements européens afin de soutenir les efforts de recherche et de développement, mais aussi la prise en compte de la sécurité informatique dans les marchés publics ou encore dans les primes d'assurance, comme l'envisage la Commission européenne.
Il faut aller vers une véritable politique industrielle, à l'échelle nationale et européenne, pour les produits et services de cybersécurité, et, plus largement, pour le secteur des technologies de l'information et de la communication, afin que l'Europe retrouve sa souveraineté numérique. De même qu'il existe une Europe spatiale ou une Europe de l'aéronautique, il faut aller vers une Europe du cyber ou du numérique.
J'approuve également les principales dispositions de la proposition de directive de la Commission européenne, en particulier l'obligation qui s'appliquerait aux administrations publiques et aux opérateurs d'importance vitale de notifier à l'autorité nationale compétente les incidents informatiques significatifs, qui répond aussi à l'une des recommandations qui figurent dans notre rapport d'information.
Actuellement, la plupart des incidents informatiques ne sont pas signalés. Or, l'Etat doit être informé dans les délais les plus brefs de telles attaques, surtout si elles touchent les secteurs d'importance vitale, comme l'énergie, les transports ou la santé. L'obligation de notification, sous peine de sanctions, mais avec une garantie de confidentialité, représentera donc un progrès.
À l'issue de ce débat, la commission adopte à l'unanimité le rapport de MM. Jacques Berthou et Jean-Marie Bockel et la proposition de résolution européenne.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam présente un compte rendu du séminaire, organisé par l'Assemblée parlementaire de l'OTAN et le Parlement du Royaume du Maroc, sur « les changements politiques et sécuritaires en Afrique du Nord », qui s'est tenu à Marrakech, du 3 au 5 avril 2013.
Du 3 au 5 avril derniers, j'ai participé à un séminaire à Marrakech, organisé par l'Assemblée parlementaire de l'OTAN en partenariat avec le Parlement du Royaume du Maroc et avec le soutien de la Suisse, dont le thème principal était « les changements politiques et sécuritaires en Afrique du Nord : conséquences pour la paix et la coopération dans les régions euro-méditerranéenne et transatlantique ».
Ce séminaire de trois jours, placé sous le Haut patronage de Sa Majesté le Roi du Maroc Mohammed VI et remarquablement bien organisé par la partie marocaine, a réuni une centaine de parlementaires représentants les Parlements des pays membres de l'OTAN et des pays associés ou partenaires, dont l'Algérie et la Jordanie.
Plusieurs Parlements, notamment du Mali, du Tchad et de la Mauritanie, avaient également été invités, de même que des observateurs d'autres organisations régionales, d'ONG ou des experts.
La délégation française était composée de cinq députés, Mme Nicole Ameline, M. Gilbert Le Bris, M. Pierre Lellouche, M. Francis Hillmeyer, M. Jean-Luc Reitzer, et d'un seul représentant du Sénat.
Comme l'avait souhaité le président Jean-Louis Carrère et compte tenu de l'intérêt de notre commission pour les conséquences du « printemps arabe », sujet qui fait l'objet d'un groupe de travail, j'ai pensé utile de vous présenter brièvement un compte rendu de ce séminaire. Étant donné que ce séminaire a coïncidé avec la visite d'Etat du Président de la République au Maroc, j'ai également pensé utile de vous présenter brièvement l'état des relations entre nos deux pays.
Tout d'abord, quels enseignements peut-on tirer du séminaire sur « les conséquences du printemps arabe » ?
Dans le cadre de ses activités avec les pays partenaires, l'Assemblée parlementaire de l'OTAN a fondé, en 1995, un « Groupe spécial Méditerranée » dans le but d'entamer un dialogue politique avec les législateurs des pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord.
Le programme de ce Groupe s'est élargi au fil du temps. Aujourd'hui, l'Assemblée entretient des relations régulières à différents niveaux avec les parlements de neuf pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée : l'Algérie, Chypre, l'Égypte, Israël, la Jordanie, Malte, le Maroc, la Tunisie, la Mauritanie, ainsi qu'avec le Conseil législatif palestinien. Récemment, des contacts préliminaires ont été pris avec certains pays du Golfe et la Libye.
Parmi les activités annuelles du Groupe figurent une visite dans l'un des pays partenaires régionaux et membres associés méditerranéens, ainsi que deux séminaires méditerranéens, dont un est organisé à Naples en collaboration avec le parlement italien.
Ces réunions ont pour but de sensibiliser davantage les parlementaires aux problèmes de la région, de promouvoir un dialogue politique interparlementaire et de partager expérience et savoir-faire avec des législateurs des pays du Maghreb et du Moyen-Orient.
Le séminaire qui s'est tenu à Marrakech, du 3 au 5 avril, a été -je pense utile de le souligner- le premier séminaire de l'Assemblée parlementaire organisé en Afrique du Nord.
Lors de ce séminaire 8 sessions de travail avaient été organisées. Nous avons ainsi discuté de la situation en Syrie, de la situation au Sahel, des réformes politiques, économiques et sociales dans les pays du Maghreb et du Moyen-Orient, des conséquences du « printemps arabe » sur la sécurité dans la zone euro-méditerranéenne et transatlantique et du rôle que pourraient jouer les pays occidentaux et les différentes organisations internationales ou régionales, comme l'Union européenne ou l'OTAN, pour aider et soutenir ces pays dans leurs réformes.
Enfin, nous avons discuté sur un projet de rapport, présenté par une parlementaire canadienne, Mme Raynell Andreychuk, au titre de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, portant sur le programme nucléaire militaire de l'Iran.
Je n'évoquerai pas ici l'ensemble des sujets particulièrement denses qui ont été évoqués lors de ce séminaire. Je voudrais simplement dire ici que l'action de la France au Mali a été saluée par l'ensemble des participants, qu'un large consensus s'est exprimé au sein de la conférence en faveur d'une reprise du processus de paix israélo-palestinien et que, s'agissant de la Syrie, un consensus s'est dégagé à la fois pour condamner la répression brutale du régime de Damas mais aussi pour exprimer de fortes réserves sur l'idée de livrer des armes à la rébellion en raison des risques que ces armes ne parviennent aux mains de groupes terroristes islamistes.
Ainsi, concernant le Mali, les parlementaires maliens invités à Marrakech, dont le vice-président de l'Assemblée nationale du Mali, M. Assarid Ag Imbarcaouane, ont tous remercié la France et les pays africains, en particulier le Tchad, pour leur aide et rendu hommage à l'action de nos soldats. Ils ont aussi insisté sur la nécessité de sécuriser les villes reconquises du Nord du Mali. Ils ont également souligné toute l'importance de la refondation de la démocratie et notamment de la tenue des élections en juillet prochain. Enfin, à la lumière du précédent de la Libye, ils ont fait valoir la nécessité d'une approche régionale et d'une plus grande implication de l'ensemble des pays de la région sahélienne pour lutter contre les trafics, notamment d'armes, et assurer une véritable surveillance des frontières.
S'agissant de la Syrie, un large consensus s'est dégagé au sein de la conférence, à la fois pour condamner la répression brutale du régime de Damas mais aussi pour exprimer de fortes réserves sur l'idée de livrer des armes à la rébellion en raison des risques que ces armes ne parviennent aux mains de groupes terroristes islamistes. Ayant moi-même exprimé les mêmes réserves, lors de l'audition devant notre commission, des responsables de l'opposition syrienne, j'ai été heureuse de constater que cette position était maintenant largement partagée parmi les représentants des Parlements au sein de l'assemblée.
Je voudrais vous faire part de mes réflexions sur les deux principaux sujets évoqués lors de la conférence : les conséquences du « printemps arabe » et le programme nucléaire militaire de l'Iran.
Deux ans après le déclenchement de ce qu'il est convenu d'appeler le « printemps arabe », et malgré les espoirs suscités par les révoltes populaires et la fin des dictatures, l'arrivée de partis islamistes au pouvoir, en Tunisie, en Égypte, en Libye et même au Maroc, a provoqué des tensions au point de s'interroger sur le sens même de ces révolutions. Le « printemps arabe » s'est-il transformé en « hiver islamiste », pour reprendre une expression journalistique utilisée également par une députée algérienne ?
Confrontés à l'exercice du pouvoir, mais aussi aux défis immenses de ces sociétés en matière de démographie, de développement économique ou d'éducation, les partis islamistes sont contestés à la fois par les « laïques », mais aussi par une frange plus radicale, « salafiste », et doivent faire face à des tensions sociales qui peuvent prendre un caractère violent, comme en Égypte.
En réalité, le processus de transition dans ces pays -qui sortent de cinquante ans de dictature- demeure encore largement inachevé et il faudra du temps avant que ne se mettent en place des systèmes pérennes.
Dans ce contexte, quelle attitude doivent adopter les pays occidentaux à l'égard des pays arabes en transition ?
Il est clair qu'il est dans notre intérêt que ces transitions réussissent. Notre devoir, nos intérêts nous commandent d'accompagner les sociétés arabes dans la voie de la modernité politique, sans arrogance, ni ingérence, mais en les assurant de notre disponibilité et de notre soutien. Plus que jamais, une approche globale s'impose, avec une dimension économique, de développement, politique et militaire. Et l'Europe a un rôle essentiel à jouer, compte tenu de sa proximité géographique, mais aussi de la nouvelle stratégie américaine de « pivot » vers la zone Asie-Pacifique.
D'après le FMI, compte tenu de la croissance démographique dans la région, ces pays doivent créer d'ici 2020, 50 millions d'emplois nouveaux, ne serait-ce que pour absorber les nouveaux entrants sur le marché du travail. La question de la transition économique constitue donc un défi majeur.
Au-delà des aspects économiques, il nous faudra trouver un instrument diplomatique qui puisse, autant que faire se peut, favoriser l'instauration de régimes réellement pluralistes, respectueux des droits de l'Homme et notamment de l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous n'avons rien à dicter à des pays qui ont pris leur destin en main, tracé leur histoire et fait leur révolution. Mais nous avons le devoir moral de répondre à leurs attentes et de leur apporter notre appui pour la réussite de leur transition démocratique.
Quels sont les mécanismes et les enceintes diplomatiques qui peuvent renforcer les liens régionaux et favoriser une évolution continue vers des régimes pluralistes ? Peut-on imaginer l'équivalent de ce que le Conseil de l'Europe a été pour les pays issus du bloc soviétique ? Est-ce que l'Union pour la Méditerranée, le processus de Barcelone, le dialogue 5+5 ou encore le dialogue méditerranéen dans le cadre de l'OTAN sont les instruments pertinents ? Il me semble qu'il y a une opportunité pour une organisation intergouvernementale régionale avec une valorisation d'un volet parlementaire qui puisse accompagner l'enracinement de la démocratie, l'unité du Maghreb et le dialogue euro-méditerranéen.
Je crois aussi que l'OTAN a un rôle à jouer pour accompagner la transition démocratique des pays de la région qui le demandent, notamment en apportant sa vision stratégique et son expertise dans le domaine de la réforme de défense et du contrôle démocratique des forces armées, du maintien de la sécurité, de la coopération de la formation dans une aide à la mise en place de structures institutionnelles solides.
Dans cette perspective, il me semble que la proposition du Maroc consistant à refonder le dialogue méditerranéen de l'OTAN, en s'inspirant du Partenariat pour la Paix, lancé en direction des pays d'Europe orientale, mériterait d'être soutenue.
Le deuxième principal sujet évoqué lors de ce séminaire a porté sur l'attitude à adopter à l'égard de l'Iran et de son programme nucléaire militaire.
Nous avons discuté d'un projet de rapport, présenté par une parlementaire canadienne, Mme Raynell Andreychuk, au titre de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, portant sur le programme nucléaire militaire de l'Iran. Si ce rapport met en lumière les menaces que ce programme représente pour la sécurité et la stabilité de la région, sur fond de tensions croissantes entre sunnites et chiites, et les limites des sanctions, il mentionne néanmoins les risques que comporterait une intervention militaire préventive, notamment en ce qui concerne le risque de déstabilisation de l'ensemble de la région.
Les discussions entre les représentants réunis lors de la conférence ont mis en évidence le rôle de médiateur que pourrait jouer la Turquie dans ce dossier ainsi que l'importance de suivre avec attention cette question au sein de l'assemblée parlementaire de l'OTAN. A été évoquée notamment l'idée d'organiser un séminaire spécialement consacré à l'Iran dans le cadre de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN.
Le deuxième sujet que je voulais évoquer porte sur les relations franco-marocaines.
Étant donné que le séminaire de l'OTAN a coïncidé avec la visite d'Etat du Président de la République au Maroc, j'ai pensé utile de vous présenter brièvement l'état des relations franco-marocaines et la situation de nos compatriotes dans ce pays, à la lumière des échanges que j'ai pu avoir sur place avec différents responsables marocains et français, dont la Consule de France à Marrakech, Mme Chantal Chauvin, qui a eu l'obligeance de m'accompagner à Casablanca pour une réception donnée par François Hollande pour la communauté française et que je tiens à remercier pour sa disponibilité et son aide précieuse.
Comme le souligne l'article du journal Le Monde consacré à la visite du Président de la République à Rabat et à Casablanca, les relations entre la France et le Maroc sont « au beau fixe ».
Malgré l'alternance politique en France, nos deux pays entretiennent des relations politiques très étroites.
Le Roi du Maroc Mohammed VI avait choisi la France pour effectuer sa première visite d'Etat à l'étranger en mars 2000. Il a également été le premier chef d'Etat à être reçu par le Président François Hollande, une semaine après la passation de pouvoir.
Lors de sa visite d'Etat de deux jours au Maroc, à Rabat et à Casablanca, trois mois après son déplacement en Algérie, le Président de la République s'est entretenu avec le Roi du Maroc et le chef du gouvernement, dirigé par les islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD), M. Abdelilah Benkirane.
Le Président a également prononcé un discours devant le Parlement marocain et échangé avec des étudiants marocains de l'Université de Rabat.
Il a aussi rencontré des représentants de la société civile, pour évoquer la situation des droits de l'homme et la liberté de la presse, ainsi que la communauté française, avec un discours au Lycée français Lyautey de Casablanca.
Le Président de la République était accompagné par une importante délégation comprenant une dizaine de ministres, soixante chefs d'entreprise et plusieurs personnalités, dont le président du Conseil français du culte musulman et le directeur général de l'Agence française de développement. Parmi les parlementaires figuraient de nombreux députés et un seul sénateur, notre collègue M. Christian Cambon, qui préside le groupe d'amitié France-Maroc du Sénat. Pour ma part, j'ai assisté à l'intervention du Président de la République devant la communauté française à Casablanca.
Lors de son discours devant le Parlement marocain, le Président de la République a salué les « pas décisifs » accomplis par le Maroc vers la démocratie. Il a notamment évoqué l'adoption, à l'été 2011, d'une nouvelle Constitution, qui garantit la tolérance.
Le Président a également réaffirmé le soutien de la France au plan proposé par le Maroc pour le règlement de la question du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole contrôlée par le Maroc, mais revendiquée par les indépendantistes du front Polisario, soutenus par l'Algérie. Ce plan, présenté en 2007, prévoit un statut de large autonomie pour cette région.
De son côté, le Maroc a apporté son soutien à la France dès le début de l'intervention au Mali et nos deux pays partagent la même préoccupation au sujet de la Syrie.
Une large place dans ce déplacement a également été consacrée aux relations économiques. Si la France reste le premier partenaire commercial du Maroc, la France a cédé sa traditionnelle place de premier fournisseur à l'Espagne en 2012.
Le Maroc demeure toutefois la première destination des investissements français sur le continent africain, avec plus de 750 filiales d'entreprises françaises, dont une usine Renault à Tanger.
La France est également le premier donneur net d'aide publique au développement au Maroc. Les engagements de l'AFD s'élèvent à 1,7 milliard d'euros, principalement dans les secteurs de l'eau et de l'environnement.
Lors de la visite du Président de la République, une trentaine d'accords commerciaux ont été signés, pour un montant d'environ 300 millions d'euros.
Dans le domaine de l'éducation, la langue française jouit du statut d'une véritable seconde langue au Maroc (on estime que 40 % de la population peut s'exprimer en français). Il existe trente établissements d'enseignement français, qui accueillent près de 31 000 élèves, dont la moitié de Marocains.
Dans le domaine culturel, l'Institut français du Maroc compte onze implantations et il existe trois alliances franco-marocaines, qui organisent 1 500 manifestations culturelles par an et accueillent 65 000 élèves apprenant le français.
Enfin, la communauté française au Maroc est l'une des communautés françaises les plus importantes au monde. 45 000 français sont immatriculés dans les dix consulats mais, selon les estimations, les Français résidents seraient près de 80 000, sans compter naturellement les millions de touristes français qui visitent le pays.
Je rappelle aussi que plus d'un million de Marocains résident en France, sans compter les nombreux Français d'origine marocaine.
Nos compatriotes, dont de nombreux binationaux, contribuent ainsi au rayonnement de notre pays et de notre langue, aux échanges économiques et culturels et au développement du Maroc. Même s'ils bénéficient généralement d'un cadre de vie agréable, ils se heurtent à de nombreuses difficultés, tenant par exemple à la question de la scolarité ou aux problèmes soulevés en matière de garde d'enfants (avec le cas des enlèvements d'enfants de couples mixtes séparés ou divorcés), etc.
La question de la sécurité de nos ressortissants, notamment au regard de la situation au Sahel, est également une préoccupation constante, comme me l'ont confirmé les représentants de la communauté française ainsi que les agents de notre réseau diplomatique et consulaire que j'ai pu rencontrer sur place.
Voilà les quelques enseignements que je retire de ce séminaire et de mon déplacement au Maroc, mais je suis naturellement disposée à répondre à vos questions.
Vous avez évoqué la question du Sahara occidental. Où en sommes-nous du règlement de cette question, qui dure depuis déjà plusieurs dizaines d'années et qui empoisonne les relations entre le Maroc et l'Algérie ?
Lors de son discours devant le Parlement marocain, le Président de la République a indiqué que la crise au Sahel rendait encore plus urgente la nécessité de mettre fin à cette situation. La France soutient la démarche du secrétaire général des Nations unies pour parvenir à un règlement politique acceptable, sur la base des résolutions de l'ONU. Il a aussi réaffirmé le soutien de la France au plan d'autonomie proposé par le Maroc en 2007, qui prévoit un statut de large autonomie pour la population et qui constitue une base sérieuse et crédible en vue d'une solution négociée. « Tout doit être fait pour améliorer les conditions de vie de la population dans cette région » a-t-il ajouté.