Interventions sur "pénalisation"

53 interventions trouvées.

Photo de Michelle MeunierMichelle Meunier, rapporteur de la commission spéciale sur la lutte contre le système prostitutionnel :

...e sont pas parvenues à s’accorder sur un texte susceptible de faire ensuite consensus. Alors que des convergences étaient apparues sur la plupart des volets de la proposition de loi, tels que la lutte contre les réseaux, l’accompagnement sanitaire, social et professionnel ou la prévention et l’éducation à la sexualité, ses dispositions les plus symboliques et les plus médiatisées, relatives à la pénalisation de l’achat d’acte sexuel notamment, continuent de diviser nos deux assemblées. Ainsi, chargée d’établir un texte de nouvelle lecture au cours de sa réunion du 16 février dernier, notre commission spéciale a, de nouveau, supprimé les articles 16 et 17, qui pénalisent les clients de personnes prostituées et créent une peine complémentaire de stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’act...

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

...es humiliations et des dizaines de rapports sexuels ? Il faut arrêter de fermer les yeux et de ne pas voir que le système prostitutionnel est le produit d’une double domination, une domination sexiste – de l’homme sur la femme – et une domination par l’argent, dans un monde où tout est marchandise, même le corps d’une femme ! Les opposants à cette responsabilité du client nous rétorquent que la pénalisation va se révéler inefficace et contre-productive. Personnellement, je n’en suis absolument pas convaincue, et j’ai envie de vous dire que pour n’importe quelle loi, finalement, on n’est jamais totalement certain que nos intentions atteignent nos objectifs.

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

En quoi cette mesure devrait-elle échapper à cette règle ? Osons franchir ce cap et impliquer le troisième acteur du système prostitutionnel ! Je sais que quelques associations et même le Défenseur des droits affirment que la pénalisation des clients va accroître la précarité et l’isolement des prostituées. Mais les personnes prostituées sont déjà précarisées et isolées. Il faut agir de façon globale et cohérente ! Un autre argument, que je veux combattre ici, serait qu’en pénalisant l’acte tarifé la prostituée se retrouve complice de ce délit. J’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que c’est refuser, au fond...

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Cette pénalisation revient, dans tous les cas, à punir les personnes prostituées. Je veux aujourd’hui, une fois encore, porter leur voix : « Cette mesure va renforcer le statut d’inadaptée sociale des prostituées, statut stigmatisant qui doit être supprimé. Considérer que les prostituées doivent être traitées comme des mineures sans capacité d’exprimer leur consentement les place dans une catégorie de citoyennes à...

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Malheureusement, il semble que, si le Sénat s’oppose une nouvelle fois à cette disposition, elle sera réintroduite à l’Assemblée nationale et cette voix, celle des premières concernées, n’aura pas été entendue. Et ce, au nom d’une certaine idée de la morale, de ce qui est bien ou mal, en oubliant la réalité. Et la réalité, mes chers collègues, c’est que la pénalisation des clients, qui n’est pas encore en vigueur, a déjà eu des effets délétères sur le terrain ! Ce sont les prostituées qui le disent et les équipes des associations qui le rapportent, tous ressentent « une tension liée à la concurrence plus marquée du fait de clients devenus plus discrets. Les rendez-vous sont donnés dans des lieux plus isolés, très loin des centres-villes, ce qui génère un dange...

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

...rostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Si tous, députés comme sénateurs, nous sommes unanimes pour vouloir lutter contre le système prostitutionnel et accompagner les personnes prostituées, nous divergeons sur le meilleur moyen d’y parvenir. Notre position sur le sujet n’a pas évolué à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire. Elle demeure constante et claire : ni pénalisation des clients ni répression des personnes prostituées, mais de la prévention, de l’assistance et de la répression contre les réseaux mafieux et les trafics d’êtres humains. Cette fois encore, nous nous félicitons de la suppression du délit de racolage passif, qui, depuis son instauration en 2003, a montré toutes ses limites. Non seulement il a contribué à fragiliser la situation des personnes qu’i...

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

...bre qui n’est jamais simple à trouver –, tout comme il concilie la nécessité de lutter contre la prostitution et le principe de réalité que l’on pourrait exprimer ainsi : tant qu’il y aura une demande, il y aura une offre. Aussi, s’agissant de l’interdiction de l’achat d’un acte sexuel – mesure emblématique et la plus controversée –, nous réitérons notre satisfaction de voir cette disposition de pénalisation du client de nouveau supprimée par la commission spéciale. Nous ne répéterons jamais assez qu’une telle pénalisation, mise en place en Suède dès 1999, a abouti à des résultats plus que mitigés. La prostitution y est devenue moins visible sur la voie publique, …

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Elle n’a donc pas disparu, contrairement à ce que l’on affirme. La pénalisation semble aussi avoir engendré une hausse du « tourisme sexuel » en Europe et dans le monde.

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Enfin, comme l’a récemment souligné le Défenseur des droits dans un récent avis public particulièrement intéressant, la clandestinité, qu’elle résulte de la pénalisation des prostituées ou de leurs clients, accroît les risques sanitaires et la diffusion de maladies sexuellement transmissibles. L’ordre public ne peut être réduit à la moralité publique : en matière de prostitution, des considérations importantes de santé publique doivent également être prises en compte. En dépit de la noblesse de l’intention affichée, la pénalisation des clients de la prostitution...

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle :

...également voté l’extension de la liste des publics prioritaires pour l’attribution de logements sociaux aux victimes de la traite des êtres humains et du proxénétisme ainsi qu’aux personnes engagées dans le parcours de sortie de la prostitution. Cependant, depuis le début de son processus législatif, entamé à l’automne 2013, ce texte, plus précisément sa mesure la plus médiatique, qui prévoit la pénalisation des clients de prostituées, divise profondément le Sénat et l’Assemblée nationale. Depuis sa création au mois de janvier 2014, la commission spéciale chargée d’examiner la proposition de loi, dont je suis membre, a rencontré des dizaines de personnes – représentants du monde associatif et des milieux judiciaire et policier, personnes prostituées, chercheurs et personnalités qualifiées – et, sur c...

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

...aniser l’action en faveur des victimes de la prostitution est une avancée concrète, qui instaure un véritable relais territorial. Avec le temps, ces instances partageront leur expérience, se communiqueront leurs succès et leurs échecs afin d’être plus efficaces dans l’action menée pour la sortie de la prostitution. Malgré les avancées du texte, quelques tensions demeurent. Je citerai d’abord la pénalisation des clients, qui figurait à l’article 16 du texte. Les députés y tiennent. Notre commission, en revanche, a supprimé cet article, comme le souhaitaient Amnesty International et plus d’une centaine d’organisations et d’institutions. En effet, cette pénalisation surchargerait et compliquerait l’action de la police. De plus, les prostituées seraient obligées de se cacher. Elles se mettraient davant...

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

...dent, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, le retour devant notre assemblée de cette proposition de loi en nouvelle lecture ne m’étonne point. Le sujet est grave et complexe, les interrogations sont nombreuses, les divergences sont profondes. La commission mixte paritaire qui s’est tenue le 18 novembre dernier a échoué, aucun accord n’ayant été trouvé. Le principe de la pénalisation du client demeure l’élément de blocage. Comme je l’ai fait lors du précédent examen de cette proposition de loi ici même, je souhaite participer au débat dans un esprit ouvert, dans le respect des positions de chacun. Tout d’abord, le constat reste malheureusement le même : la France compte à l’heure actuelle environ 20 000 personnes prostituées, dont 90 % sont étrangères, la plupart exploitées...

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Cet amendement tend à rétablir le quatrième pilier de la proposition de loi, lequel prévoit la création d’une infraction de recours à la prostitution d’une personne majeure, punie de la peine d’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe. Il prévoit également la récidive contraventionnelle de ces faits, alors punie d’une amende de 3 750 euros. Il s’agit, à travers la pénalisation du client, d’accompagner un véritable changement sociétal. Certes, les coupables sont évidemment les proxénètes et les réseaux, mais les clients doivent être aussi conscients de leur responsabilité. Cette sanction posera un interdit et permettra d’indiquer clairement que l’achat d’un acte sexuel n’est pas une pratique normale ou banale et que tout cela doit cesser. On ne peut dédouaner le client...

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

Nous traitons d’un sujet extrêmement complexe. Vous avez parlé de transgression, madame la ministre, et je crains que la loi ne crée la transgression. Tous, nous voulons lutter contre la plus abominable des choses qui est d’abuser d’une autre personne et finalement d’exploiter un être humain ; c’est louable. Quelles sont les bonnes solutions ? Si la pénalisation est une bonne solution, il faut effectivement la soutenir, mais si elle conduit à une transgression soumettant à des dangers supplémentaires les personnes en situation de prostitution, je pense que c’est une mauvaise chose. Dans un premier temps, j’étais pour la pénalisation, considérant que c’était le moyen de lutter contre une situation dont on ne peut qu’être honteux. Lorsque vous croisez sur...

Photo de Jean-Claude BoulardJean-Claude Boulard :

Madame la ministre, depuis le début de ce débat, je me borne à soulever un certain nombre de problèmes juridiques sur lesquels je n’ai pas obtenu de réponse quant à la pénalisation du client par la voie contraventionnelle. La première question porte sur l’article 34 de la Constitution, qui réserve à la loi la définition des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables et renvoie au pouvoir réglementaire la création de contraventions. Nous ne pouvons pas, par la voie législative, intervenir dans le domaine réglementaire. Je n’ai jamais obtenu de réponse s...

Photo de Jean-Claude BoulardJean-Claude Boulard :

Personne n’a apporté de réponse à cette question, qui soulève un risque de contrôle constitutionnel et d’inconstitutionnalité de la pénalisation du client. Troisième question, j’observe que la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour européenne des droits de l’homme, par des arrêts très nombreux, ont rappelé – on peut être pour ou contre – que le principe de libre disposition de son corps - non pas de vente - fait partie du droit européen. Ces trois questions méritent d’être examinées, y compris après le vote qui va intervenir. ...

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

... à cette conviction tout seul : c’est en tant que président, pendant un long temps, de la commission spéciale et après des centaines d’heures d’auditions des personnes concernées – personnes prostituées, services de police, magistrats, associations sur le terrain – que je me suis fait cette opinion. Tous ces acteurs directement concernés n’ont pas été suffisamment entendus, et je le regrette. La pénalisation des clients des prostituées constituera sans aucun doute un gros risque pour celles-ci, cela a été dit, en provoquant leur isolement. Elles n’auront plus de contacts avec les associations, encore moins avec les services de police. Le contact avec les services de police était très important dans le délit de racolage, je tiens à le rappeler. Aussi, l’idée selon laquelle nous pourrions tarir la dem...

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Nous retrouvons les débats passionnés que nous avons eus pendant de longs mois de débat. Il est important que nous puissions confronter nos points de vue. Personnellement, j’apporte un soutien sans faille à ces amendements visant à rétablir l’article 16 et la pénalisation du client. C’est un axe fondamental des quatre piliers portés pour la première fois par la loi. C’est à partir de cette logique des quatre piliers que nous pourrons avancer dans le respect de la position abolitionniste de la France, qui n’est pas une prohibition

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

...e son corps. La commission spéciale, dont je suis membre, et, auparavant, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ont travaillé sur ce sujet. Même lorsque la personne prostituée se dit consentante, les derniers travaux scientifiques montrent que la perte de l’estime de soi est toujours, à des degrés différents, le prix à payer. À travers la pénalisation, on veut montrer que le client ne peut pas s’exonérer de la situation de violence faite à ces femmes. En adoptant le rétablissement de cet article, mes chers collègues, nous permettrions à la société d’identifier cette violence et de la combattre.

Photo de Gérard RocheGérard Roche :

...sociaux, juridiques et la lecture politique que l’on pourra faire de ce texte. Sur le plan moral, on ne peut que se féliciter de la position de tous ceux qui ont porté l’idée de lutter contre la prostitution en pénalisant la clientèle. La méthode était peut-être discutable, mais ils ont défendu ce projet avec cœur, et c’est émouvant. Toutefois, il faut aussi prendre en compte le côté social. La pénalisation va confiner la prostitution dans le milieu du luxe, où elle ne sera pas atteinte, et dans les lieux cachés, où la misère sera encore plus grande. L’aspect juridique a été fort bien abordé par M. Boulard, et je n’ai rien à ajouter à ses propos. La sagesse pour moi consistera sans doute à m’abstenir sur ce texte. Ce n’est pas par manque de courage, mais je sais aussi que l’on fera une lecture pol...