Interventions sur "mort"

48 interventions trouvées.

Photo de Gérard DériotGérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce n'est pas un débat tout à fait comme les autres que nous ouvrons aujourd'hui. Au-delà du dispositif législatif, technique dirais-je, qu'il nous faudra définir ensemble, nous allons entreprendre une réflexion infiniment plus large, qui touche au mystère de la vie et de la mort, au sacré, à l'intime, à la souffrance et à la peur, à l'espoir et à la paix. Je dois vous dire ma profonde émotion et ma grande humilité face à cette si lourde charge. M. le ministre a rappelé le parcours très particulier du texte que nous examinons. Il émane d'une initiative parlementaire, ce qui me paraît un symbole fort. A cet égard, je voudrais saluer l'implication remarquable de Jean Leone...

Photo de Sylvie DesmarescauxSylvie Desmarescaux :

...tables, souhaiteriez-vous que l'on vous aide à mourir ? », il est difficile de répondre que l'on veut vivre jusqu'au bout en supportant d'atroces douleurs. En réalité, je pense sincèrement que le problème concerne non pas la dépénalisation de l'euthanasie, mais la prise en charge de la souffrance. Nous assistons à une dérive douce de la société qui cite en exemple les Pays-Bas, où l'on prône la mort plutôt que la vie et où l'on banalise l'euthanasie. C'est pourquoi cette loi est nécessaire pour rappeler la position de la France à ce sujet. Le patient en fin de vie est au centre des préoccupations de ce texte, sa volonté est respectée, et les médecins sont protégés par une décision prise collégialement. Mais quelle est réellement la volonté des personnes en fin de vie ? C'est non pas tant de...

Photo de Alain MilonAlain Milon :

...gner un malade en fin de vie, vers une issue que l'on sait fatale, pose-t-il tant de problèmes à nos consciences ? D'ailleurs, s'agit-il vraiment d'une question de conscience ? Ce malaise ne traduit-il pas davantage la crainte de l'homme moderne de la déchéance générée par la maladie, la peur de mourir ou, pire, la peur du déclin ? Dans notre société actuelle, où l'apparence règne en maître, la mort est passée sous silence. Sujet tabou, la fin de vie n'est que très peu abordée dans le cadre intime ou familial. Alors, plutôt que de l'affronter, on se réfugie dans l'occultation, on laisse le malade, sa famille, le corps médical faire face, seuls, à des situations douloureuses. La liberté de disposer de son corps serait-elle réservée aux seuls bien portants ? Libre à eux de se suicider, libre ...

Photo de François AutainFrançois Autain :

Accaparés par la recherche d'un consensus à tout prix, nos collègues de l'Assemblée nationale sont restés sourds aux aspirations de nos concitoyens à un droit à la mort volontaire. Devant ce véritable mouvement de fond, perceptible depuis une vingtaine d'années, non seulement en France, mais aussi dans tous les autres pays industrialisés, des pays proches de nous géographiquement ont déjà répondu, et reconnaissent ce droit pour toute personne d'exercer sa liberté de décider du moment et des moyens de sa propre fin. Un tel consensus, qui repose sur l'adhésion un...

Photo de François AutainFrançois Autain :

... quand son application est poussée à l'extrême, je dirais même à l'absurde, ses thuriféraires n'hésitant pas à recourir à des méthodes infiniment plus cruelles et inhumaines que celles qu'ils rejettent. Je plains sincèrement ceux qui auront un jour à appliquer cette disposition. Il leur faudra au moins autant de courage pour la mettre en oeuvre qu'il aura fallu de perversion pour l'imaginer. La mort est un problème humain avant d'être un problème médical. On aurait aimé trouver dans ce texte la reconnaissance pour chacun d'un droit ultime et nécessaire, celui de choisir sa fin, de l'imposer à ses proches et à la société, soit directement quand on est en mesure d'exprimer sa volonté, soit par des directives anticipées dans le cas contraire. Ce n'est malheureusement pas le cas, il faut bien le...

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

...Je crois que cette mission a finalement montré sans ambiguïté que la demande d'un droit à mourir s'enracine d'abord dans les peurs qui habitent le corps social, en particulier ceux qui ont été témoins d'agonies douloureuses et tourmentées, mal accompagnées. La figure du vieillard qui s'éteint doucement et paisiblement, « rassasié de jours », reste dans l'inconscient collectif comme la seule belle mort. Angoisse de la mort qui vient, peur de souffrir, souci de ne pas peser trop longtemps sur ses proches, fantasme de l'acharnement, peur de se dégrader, c'est souvent l'absence d'information et le sentiment d'être passif à l'hôpital qui accentuent chez le malade le désir de maîtriser sa fin de vie. La demande semble être avant tout une provocation au dialogue et une ultime tentative de communicat...

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

...proposition de loi, c'est grâce à Vincent Humbert et à sa mère, dont le parcours exemplaire a ému la France entière. Pourtant, disons-le d'emblée, ce texte n'aurait été d'aucune utilité à Vincent et il n'apporte aucune solution aux autres personnes - et il en existe ! -, qui souhaiteraient prendre la même décision. Il est en effet essentiellement limité aux personnes en fin de vie, celles dont la mort doit intervenir à brève échéance. C'est une légère avancée, mais qui est déjà très largement reconnue par la loi Kouchner du 4 mars 2002. En outre, cette proposition de loi est insuffisante, car elle élude la question fondamentale qui en est à l'origine : le choix de sa mort. Selon l'anthropologue Louis-Vincent Thomas, « chaque société a la mort qu'elle mérite ». Dans notre civilisation occiden...

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Il ne faut donc pas hésiter à parler d'euthanasie. Mais comme le dit si bien Jacques Pohier dans son excellent ouvrage La Mort opportune, il peut arriver aux mots comme aux êtres humains des accidents qui les abîment ou qui les tuent. C'est ce qui est arrivé au mot euthanasie lorsqu'on l'a utilisé pour désigner, notamment, les programmes d'élimination par l'Allemagne nazie de certains êtres humains considérés comme indignes de vivre. Dans certains pays, notamment en France, le mot euthanasie a ainsi été détourné de s...

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

...'action sur la façon de développer la qualité de vie des malades et de répondre à la multiplicité des besoins des patients, souvent dépossédés d'eux-mêmes. Les soins palliatifs sont un modèle qui a permis de reprendre conscience du sens humaniste du soin. Historiquement, le développement des soins palliatifs concerne l'accompagnement des malades en fin de vie, la reconnaissance de la place de la mort, des mourants et des personnes en deuil dans la société. Mais, aujourd'hui, lorsqu'on parle de soins palliatifs, cela ne signifie pas obligatoirement que l'on s'adresse à des mourants ou que l'on ferme la porte à l'espoir : les soins palliatifs s'étendent aussi à des malades en phase curative. Le droit à l'euthanasie n'exclut pas les soins palliatifs. Le droit à l'euthanasie n'est pas un choix e...

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Autoriser une aide active à mourir à certains types de patients ne consiste, en aucun cas, à banaliser un acte qui engagera toujours l'éthique et la responsabilité de ses acteurs. Il s'agit de remédier aux inégalités devant la mort et de fournir à toutes les personnes qui le désirent et qui le demandent une solution appropriée. L'aide active à mourir sera un jour incontestablement consacrée par le droit ; de grandes démocraties - les Pays-Bas, la Belgique - ont déjà reconnu cette liberté fondamentale sous des formules différentes. Lors des auditions, nous avons bien constaté que, en Belgique, cela se passait très bien !

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

... développement de la technologie médicale ainsi que l'évolution des produits pharmaceutiques ont contribué et contribuent encore à prolonger la vie. Une telle conquête et un tel progrès sont indéniables et heureux, mais ils appellent d'autres réponses que celles auxquelles nous pouvons avoir accès aujourd'hui. La mise en oeuvre de ces moyens permet souvent de retarder quelque peu le moment de la mort, mais au prix de grandes souffrances et en transformant la fin de vie en un véritable calvaire. Au nom de ce qu'ils considèrent comme leur propre dignité et leur propre libre arbitre, certaines personnes sont ainsi conduites à exprimer, lucidement et sérieusement, le désir de mourir. Nous devons entendre ce souhait ! Faut-il continuer à ignorer ce choix ? Faut-il continuer à considérer comme des...

Photo de André LardeuxAndré Lardeux :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce texte nous met face à la question centrale de la vie : la mort, qui nous concerne immédiatement, car nous sommes tous en fin de vie sans le savoir. Nous sommes particulièrement immatures sur ce sujet, car nous ne voulons pas nous prendre en charge et nous cultivons les paradoxes. Nous prétendons, bien à tort, nous affranchir des interdits ; mais, en même temps, nous développons des tabous, notamment à propos de la mort. « Couvrez ce mot que je ne saurais v...

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, aucune situation de fin de vie, aucun état de détresse n'est comparable à un autre. La douleur ne se mesure pas. Le rapport avec la mort, avec la souffrance est toujours unique. En la matière, le recours à la norme restera donc toujours un exercice d'une très grande complexité. Pourtant, au-delà de toute singularité, la question de la fin de vie, qui a longtemps été taboue, fait l'objet de débats de société dans de nombreux pays En effet, dans tous les pays développés, les avancées de la médecine permettent de maintenir artificie...

Photo de Bernard SeillierBernard Seillier :

...sion au travail législatif de l'Assemblée nationale. Loin de moi l'idée de ne pas reconnaître la mesure de ce texte ! Nos collègues députés ont su trouver une position raisonnable, apparemment équilibrée entre les menaces d'excès. Mais sommes-nous pour autant à l'abri de toute dérive ? Je voudrais formuler quelques observations liminaires. La première portera sur le sujet qui est en jeu : notre mort ; personne ne peut prétendre définir par un texte la bonne manière de la préparer et de la vivre, spécialement au terme d'une maladie. L'essentiel est au-delà du droit positif, même si celui-ci est incontournable. Il faut d'ailleurs reconnaître que les médecins n'ont pas attendu 2005 pour se préoccuper de déontologie et d'éthique de la santé, et que la codification en ces matières a atteint un d...

Photo de Michel Dreyfus-SchmidtMichel Dreyfus-Schmidt :

...ul en revanche n'a fait observer que la loi Veil a été rien moins que consensuelle et qu'elle avait alors à droite tant d'opposants irréductibles qu'elle n'eût pas été votée sans l'apport massif de la gauche. De même, en octobre 1981, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, certains parlementaires - dont nous retrouvons certains aujourd'hui - s'opposèrent totalement à l'abolition de la peine de mort, tandis que les autres, en forte majorité, la votaient. Lors de la discussion du projet de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie, sur les vingt-quatre parlementaires intervenant - les deux ministres présents n'en ont pas parlé -dix-huit ont évoqué l'affaire Humbert. Tous ou presque ont reconnu expressément que la commission spéciale était issue de l'émotion qu'avait soulevée cet...

Photo de Michel Dreyfus-SchmidtMichel Dreyfus-Schmidt :

...à l'étranger, et les premiers rapports démontrent déjà qu'elles évitent tout dérapage. Le groupe socialiste vous propose donc, mes chers collègues, de compléter par amendements le texte dont le Sénat est saisi. Reste une question de sémantique. L'assistance médicalisée pour mourir est, dans le langage courant, appelée « euthanasie », terme qui en soi signifie tout bonnement, étymologiquement, « mort douce », du grec eu-thanatos. Or, ainsi qu'il est écrit dans l'étude du service des affaires européennes du Sénat de janvier 1999, intitulée « l'euthanasie », « dans les faits, l'euthanasie peut recouvrir plusieurs formes - c'est le Sénat qui parle - :...

Photo de Michel Dreyfus-SchmidtMichel Dreyfus-Schmidt :

...l'euthanasie active, c'est-à-dire l'administration délibérée de substances létales dans l'intention de provoquer la mort, à la demande du malade qui désire mourir, ou sans son consentement, sur décision d'un proche ou du corps médical, l'aide au suicide, [...] l'euthanasie indirecte, c'est-à-dire l'administration d'antalgiques dont la conséquence seconde et non recherchée est la mort » - vous reconnaissez là le « double effet » dont il est question dans le rapport de la commission des affaires sociales - « l'euthan...

Photo de Gérard DelfauGérard Delfau :

...du sujet qui nous occupe : « les droits des malades en fin de vie ». Sinon, comment expliquer que la durée de la discussion ait été sévèrement limitée, obligeant un certain nombre de sénateurs, comme moi, à devoir prendre la parole à la sauvette, à l'occasion d'un titre ou d'un amendement, pour exposer leur point de vue ? Economise-t-on le temps de parole quand il est question de légiférer sur la mort ? Je ne le pense pas.

Photo de Marie-Thérèse HermangeMarie-Thérèse Hermange :

...la responsabilité thérapeutique du médecin. Oui, le devoir de vérité au malade en phase terminale exige du personnel soignant discernement et tact : c'est le principe de proportionnalité. Oui, il existe un droit pour la personne d'être informée. Oui, cette vérité communiquée ne la ferme pas à l'espérance. Oui, la médecine actuelle dispose de moyens susceptibles de retarder artificiellement la mort : à coup d'acharnement thérapeutique, on peut, à tort, la faire reculer. Oui, la compassion suscitée par la douleur, la souffrance d'enfants handicapés, de personnes atteintes de maux incurables n'autorise aucune euthanasie directe, active ou passive. Oui, il convient de procurer au malade en phase terminale les traitements médicaux susceptibles d'alléger le côté pénible de la mort et de la sou...

Photo de Gérard DelfauGérard Delfau :

...ie. Disant cela, j'indique déjà mon orientation sur le vote final et ce qui m'a dissuadé de déposer des amendements. Non pas que ce texte soit parfait, loin de là ! Même s'il est de bonne facture et s'il comporte de nombreuses avancées significatives, il s'arrête en chemin, comme l'ont fort justement fait remarquer de nombreux sénateurs de gauche. De fait, ce texte ne répond pas à la demande de mort volontaire adressée au corps médical par un patient gravement atteint et demeuré lucide, emmuré dans une survie inhumaine, mais dont le pronostic vital n'est pas défavorable à un horizon rapproché. Il n'apporte pas de solutions aux centaines de Vincent Humbert qui peuplent nos hôpitaux. Et pourtant, il est né de cette prise de conscience qu'a suscitée le geste du docteur Chaussoy et de Marie Humb...