Interventions sur "renseignement"

145 interventions trouvées.

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Détourné de son but initial, le texte qui nous est soumis peut conduire tout droit à un Panoptique moderne, à savoir à la visibilité de tous et de chacun « organisée entièrement autour d’un regard dominateur et surveillant », disait Michel Foucault. L’article 1er du projet de loi relatif au renseignement dont nous débattons, qui énumère les intérêts publics susceptibles de justifier le recours aux techniques de renseignement envisagées par le texte, est capital. Il définit le champ d’application de l’ensemble du texte. Or, parce que l’exercice du renseignement implique de potentielles atteintes à des libertés individuelles à valeur constitutionnelle, la définition de ce champ d’application doit ...

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

L’article 1er définit également la procédure d’autorisation de recours à ces techniques, procédure au centre de laquelle se trouve la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, ou CNCTR, qui aurait vocation à être saisie de demandes portant sur l’ensemble des techniques de renseignement reconnues par la présente loi. C’est à l’article 2 que l’on trouve la liste des techniques de renseignement soumises à autorisation. Recueil des données de connexion – informatiques ou téléphoniques –, interceptions de sécurité – écoutes téléphoniques administratives –, dispositifs mob...

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des sceaux, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi dont nous commençons à discuter aujourd’hui vise à définir un cadre juridique clair et unifié pour les activités de renseignement. S’il tend à réformer l’ensemble des services du renseignement, avec un large champ d’application, il va sans dire que son examen a été accéléré, et ses dispositifs renforcés, à la suite des attentats de janvier 2015. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen affirment que les actions terroristes auxquelles le monde doit faire face aujourd’hui doivent être fermement combattues. E...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, un texte sur le renseignement, oui, c’est indispensable. Cependant, quelle que soit la majorité, quel que soit le rassemblement républicain, n’y a-t-il pas un risque de dérive dans tout texte sur ce sujet ? Personne ne peut sérieusement le nier. Ce débat doit éviter la polémique ; nous ne devons faire de procès d’intention à qui que ce soit. Un tel dossier doit impérativement nous éviter tout procès d’intention. Il impose la...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Ce vide juridique s’est longtemps traduit par une réticence forte à toute intrusion du pouvoir législatif dans le champ des services de renseignement : comment encadrer des prérogatives étatiques qui relèvent du secret d’État ? Comment légaliser des pratiques dont les fins, par essence, sont censées justifier les moyens ? La difficulté était inhérente à la mission dérogatoire de renseignement. Il est aussi probable qu’entrait en ligne de compte la crainte compréhensible que l’encadrement par le droit ne nuise à l’efficacité des renseignements...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...ersiste et je signe. Certes, j’entends les messages contradictoires. Pourtant, bien que cet ordre abonde en figures compétentes, emblématiques et profondément respectables, tel le vice-président du Conseil d’État, il y aura toujours une porosité inévitable entre l’État et le juge administratif. À ce titre, nous insistons sur l’importance de prévoir des contre-pouvoirs à l’emprise des services de renseignement sur la vie de nos concitoyens. S’il faut des moyens pour les services de renseignement, comme nous en sommes convaincus, il faut aussi que ceux-ci puissent faire l’objet de vrais contrôles. Il n’est pas question d’entraver ces services dans leur action, mais bien de s’assurer que cette dernière se fait dans le respect d’une légalité spécifique. À quoi sert-il ainsi d’instaurer une commission nat...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...orcement des moyens des services de police. Ce n’est qu’en modernisant notre arsenal juridique que nous pourrons engager une synergie positive pour aller de l’avant. Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, les amendements déposés par le RDSE s’inscrivent dans notre tradition républicaine ; ils rappellent la nécessité d’encadrer légalement l’activité des services de renseignement, activité nécessaire, activité légitime pour protéger nos concitoyens mais aussi pour garantir le respect des valeurs de la République, à laquelle nous sommes tous, je n’en doute pas, profondément attachés.

Photo de David RachlineDavid Rachline :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, en préambule, je tiens à rendre hommage à tous ces hommes et femmes de la communauté du renseignement qui œuvrent chaque jour, parfois au péril de leur vie, tels nos deux agents tués en Somalie en 2013, à notre sécurité et à la défense de nos intérêts. J’associe à cet hommage leur famille, car je sais combien celle-ci constitue un soutien pour ces hommes et ces femmes de l’ombre et qu’il est parfois difficile de vivre aux côtés de ces derniers. Ne disposant que de très peu de temps, je me focali...

Photo de David RachlineDavid Rachline :

... avec, comme l’ont souligné d’autres collègues avant moi, les « boîtes noires » installées chez les opérateurs, les IMSI catchers ou les algorithmes. Tout citoyen devient suspect, alors que – ne nous voilons pas la face ! – les foyers de radicalisation sont connus. Ce texte marque clairement un basculement vers une surveillance généralisée, et ce sans aucune garantie d’efficacité. Trop de renseignement tue le renseignement ! L’absence des juges dans le processus devrait conduire les compatriotes de Montaigne à s’interroger sur l’absence totale de séparation des pouvoirs.

Photo de David RachlineDavid Rachline :

Faute de temps, je reviendrai lors de la discussion des articles sur les critères que vous avez retenus, qui sont dignes des « heures les plus sombres de notre histoire », selon votre formule favorite, pour engager des actions de renseignement et sur les pouvoirs hallucinants attribués au Premier ministre. Pour conclure, je souhaite vous faire part des mesures très concrètes, elles, et très faciles à mettre en œuvre que nous préconisons pour lutter contre le terrorisme islamiste, la criminalité organisée, le trafic en tout genre, notamment de drogue, bref, contre tous les risques qui menacent nos concitoyens, nos entreprises et notre ...

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de par sa nature secrète, le monde du renseignement suscite bien des fantasmes, des interrogations et des craintes, parfois à juste titre. Un projet de loi relatif au renseignement entraîne donc naturellement les mêmes effets, et c’est notre rôle de parlementaire que de nous assurer que les libertés individuelles ne sont pas menacées. Le texte que la Haute Assemblée examine aujourd’hui a soulevé des polémiques et des interrogations aussi bien dan...

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

Vous vous en souvenez, monsieur Sueur, nous avions tenu bon, en expliquant que cette disposition visait à apporter des garanties et n’était en rien la catastrophe annoncée. Selon certains, le contrôle des services de renseignement devrait relever de l’autorité judiciaire. Je l’ai lu ! J’ai même entendu certains juges l’affirmer. Comme si la police administrative – préventive – devait être confondue avec la police judiciaire – répressive –, comme l’a fort bien souligné M. le rapporteur Philippe Bas. Même s’il faut s’assurer qu’aucune de ces polices n’empiète sur l’autre – il est vrai que, pour certains services, le passage ...

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

... Il est également indispensable de veiller à la définition des catégories relatives à la défense et à la promotion des intérêts fondamentaux de la nation, au premier rang desquelles figure bien entendu le terrorisme. Une définition précise est indispensable : je vous renvoie, à ce titre, au texte du nouvel article L. 811-3 du code de la sécurité intérieure. Si le projet de loi traite d’abord du renseignement, on n’aurait garde d’oublier qu’il comporte un volet sur le terrorisme, en complément de la loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme de novembre 2014, que nous avions largement approuvée, et sur le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes. En outre, le texte donne de nouvelles attributions à la délégation parlementaire au rensei...

Photo de Pierre CharonPierre Charon :

...ntré que la France et l’Europe étaient la cible de terroristes qui, à l’instar de notre société, sont hyper-connectés. Lors d’un précédent débat consacré à internet et à la liberté de la presse, j’avais appelé l’attention sur les enjeux d’un terrorisme utilisant le web et les réseaux sociaux comme outils de radicalisation et de recrutement. Les événements récents ont placé les services de renseignement au cœur des débats. Je veux rappeler ici la mission essentielle de service public qu’accomplit le renseignement. Au nom de la représentation nationale et de mon groupe, je tiens à saluer le travail de ces services. Aussi le projet de loi peut-il être l’occasion de sortir des fantasmes inhérents à leurs activités. Dans la défense de nos institutions, de notre démocratie et de nos concitoyens, le ...

Photo de Pierre CharonPierre Charon :

Pour finir, mes chers collègues, je voudrais vous faire partager un point de vue plus personnel. J’estime que le projet de loi ne constitue pas la refonte de la politique de renseignement dont la France a besoin. En effet, cette refonte devrait s’accompagner de dotations et de moyens budgétaires accordés aux besoins en ressources humaines et technologiques. Sous ce rapport, il ne s’agit pas de recruter massivement des analystes : les données et les analyses ne sont rien si elles ne peuvent être utilisées et justifiées dans la légalité. Ainsi donc, même si le projet de loi permet ...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...ous engager et de nous mobiliser. On a fait observer que tous les dispositifs qui existent n’ont pas permis d’empêcher les attentats du mois de janvier dernier. Cela est vrai, mais quelles conséquences faut-il en tirer ? Qu’il ne faudrait rien faire, qu’il faudrait se résigner, que rien ne serait utile ? Je ne suis pas du tout d’accord. Nous savons bien, pourtant, que c’est grâce aux services de renseignement français que des attentats ont été déjoués ! De même que nous devons affirmer que la sécurité est une liberté, et que pour cette raison nous devons faire preuve de la plus grande vigilance, de même nous devons affirmer, comme nombre d’orateurs viennent de le faire, qu’un juste équilibre doit être trouvé entre la sécurité nécessaire et les indispensables libertés. Car la plus grande victoire des ...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...le respect. Au reste, un certain nombre de leurs propositions ont été entendues, par la commission des lois ou par le groupe socialiste qui les défendra sous la forme d’amendements. Je suis persuadé que, en définitive, le travail du Sénat permettra des avancées. Nous avons également présenté des propositions en ce qui concerne les pouvoirs de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. En particulier, nous proposons que deux membres de cette commission puissent demander une nouvelle délibération. La commission des lois a déjà souhaité que trois de ses membres puissent saisir le Conseil d’État, ce qui est très important.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Nous avons aussi présenté un amendement tendant à assurer à la commission un accès aux renseignements « direct, complet et permanent ». La commission des lois a longuement débattu de la centralisation des données, à laquelle certains sont attachés. M. Cazeneuve, en particulier, a fait valoir qu’une centralisation de l’ensemble des données était impossible, pour des raisons liées aux techniques mises en œuvre, qui sont multiples et complexes. En réponse à un certain nombre d’interrogations, nous...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

M. Jean-Pierre Sueur. … je dirai que nous avons encore beaucoup de travail à faire, mais je pense que nous sommes sur une voie qui est utile à ce pays. En tout cas, une chose est sûre : jusqu’à présent, il n’existait pas de dispositif législatif en France pour encadrer les services de renseignement. La délégation parlementaire au renseignement a d’ailleurs souligné dans de nombreux rapports à quel point cela était anormal. Cette anormalité doit prendre fin. En tant que Républicains – le mot a un certain succès ces jours-ci –, nous devons œuvrer pour que le renseignement ne soit pas absent de la loi et qu’il trouve toute sa place au sein de nos institutions républicaines.

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine :

...onsieur le ministre, mes chers collèges, l’un des principaux reproches formulé par notre groupe à l’encontre du projet de loi est qu’il reste encore profondément déséquilibré entre les nécessités opérationnelles des services et les exigences de protection des libertés, notamment celles qui ont trait à la vie privée. En outre, nous estimons que la légalisation de nouvelles techniques de recueil de renseignements, avec un champ de collecte qui n’a cessé de s’élargir, porte en elle le risque de dérives vers une collecte massive. À cet égard, le régime de renouvellement des autorisations mériterait d’être plus strictement encadré. Une collecte massive et indifférenciée débouche inéluctablement sur une surveillance généralisée de la société. Cela est d’autant plus dangereux que le monde du renseignement es...