Mission d'information situation psychiatrie mineurs en France

Réunion du 11 janvier 2017 à 18h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

Source

La réunion est ouverte à 18 heures 30.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Madame, messieurs, je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation.

La Haute Autorité de santé (HAS), dont la commission des affaires sociales a entendu ce matin la présidente, a des missions très nombreuses, qui ne cessent d'ailleurs d'augmenter. Parmi celles-ci figurent en premier lieu les recommandations de bonnes pratiques destinées à permettre la meilleure prise en charge possible des patients partout sur le territoire national.

Notre mission d'information sur la prise en charge psychiatrique des mineurs se devait donc de vous entendre pour connaître vos travaux en la matière. C'est aussi pour nous l'occasion de recueillir votre appréciation sur la qualité de cette prise en charge aujourd'hui en France et sur les moyens de l'améliorer.

Cela nous paraît d'autant plus utile que la question même des bonnes pratiques en matière de psychiatrie, des mineurs en particulier, a fait l'objet d'importantes polémiques auxquelles la HAS s'est trouvée partie.

Je vais donc vous laisser la parole pour un bref propos introductif à la suite duquel le rapporteur, Michel Amiel, et les membres de cette mission d'information vous poseront quelques questions. Je rappelle que cette audition est ouverte au public et à la presse.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Le programme de travail de la Haute Autorité de santé dans le champ de la santé mentale est assez fourni. Nous avons même, d'une certaine façon, contractualisé ce que nous pouvons faire sur l'ensemble de ces thématiques, avec nos donneurs d'ordre, essentiellement le ministère de la santé, et en son sein la direction générale de l'offre de soins, dans un programme pluriannuel qui embrasse tout le champ de la santé mentale en établissements, mais aussi par le biais de la pathologie.

S'agissant des recommandations concernant les pathologies de santé mentale, plusieurs de nos travaux concernent, de façon incidente ou centrale, la problématique de la prise en charge des enfants et adolescents. Nombre sont en cours d'élaboration. Ce sont des travaux lourds. Un comité de pilotage a été institué avec l'ensemble des acteurs - institutionnels, professionnels, associations - : il s'agit d'une instance de concertation et d'écho de l'ensemble des travaux que nous menons en santé mentale.

Le champ des recommandations porte sur deux axes : la pathologie - il s'agit alors essentiellement de recommandations de pratique clinique -, le parcours - c'est le champ des nombreux guides que nous élaborons. Ce sont essentiellement les recommandations de pratique clinique qui rejoignent les problématiques de cette mission d'information.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

En termes de recommandations de bonnes pratiques, vous connaissez les travaux sur les interventions et la prise en charge des enfants autistes. Nous avons développé ce champ et allons actualiser la recommandation sur le diagnostic et l'évaluation de ces enfants.

Dans le domaine de la pédopsychiatrie ou de l'enfant en psychiatrie, l'année dernière, nous avons formulé une recommandation sur le trouble déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Nous avons mené un travail sur les troubles bipolaires chez les adolescents, qui demandent une prise en charge importante car le risque de suicide est très élevé. Ce travail était plutôt destiné aux médecins généralistes afin qu'ils puissent dépister les adolescents présentant ce trouble bipolaire car c'est un diagnostic difficile à poser. Il s'agit de favoriser la coordination entre le généraliste et le psychiatre.

Nous avons également mené un travail sur la dépression chez l'adolescent destiné plus spécifiquement aux généralistes, en veillant à créer du lien et à favoriser la coordination entre eux et les psychiatres.

Enfin, en 2010, nous avons aussi mené un travail sur l'anorexie mentale, que nous complétons actuellement avec une réflexion sur la boulimie et l'hyperphagie boulimique.

Tel est le champ que nous couvrons en matière de recommandations pour la pédopsychiatrie.

Debut de section - Permalien
Marie-Hélène Rodde-Dunet, chef du service Évaluation de la pertinence des soins et amélioration des pratiques et des parcours

Vous vous interrogez sur les dispositifs de coordination qui existent entre professionnels de santé. Cette question touche assez vite la notion de parcours de soins. Nous n'avons pas travaillé de façon spécifique sur les parcours de soins chez les enfants atteints de troubles psychiatriques. Cependant, aujourd'hui, nous avons engagé cette démarche en entreprenant un travail sous l'égide du comité de suivi en psychiatrie, pour promouvoir la coordination entre les médecins généralistes et les psychiatres.

Nous abordons le parcours de santé du point de vue du professionnel, quel que soit le type de population. Par conséquent, nos travaux incluent les enfants.

Ce n'est sans doute pas l'idéal aujourd'hui car l'enfant en difficulté psychiatrique se rend souvent directement chez le psychiatre sans passer par le médecin généraliste. Reste qu'il est important d'associer la médecine générale dans cette démarche. Ce travail devrait aboutir d'ici à la fin de l'année.

Parallèlement, nous travaillons sur tous les troubles « dys » chez l'enfant, grâce à la mise en place d'un groupe de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Vous avez parlé de champ de la santé mentale et défini un certain nombre de pathologies structurées, qui sont de véritables pathologies psychiatriques demandant des réponses d'ordre strictement médical. Toutefois, le champ de la santé mentale n'est pas seulement celui de la maladie mentale.

Quelle est l'articulation entre maladies mentales, santé mentale, maladies psychiatriques, troubles relevant de la neurologie ? L'autisme occupe une place tout à fait particulière : il s'agit d'un sujet délicat sur lequel nous éviterons toute polémique et qui a déjà été abordé par une commission sénatoriale.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Il n'y a pas de réflexion propre sur les classifications en santé mentale, ce n'est pas notre sujet. Nous travaillons à partir des demandes des professionnels ou de la commande publique, laquelle véhicule également la perception et les demandes des professionnels et des associations.

De façon pragmatique, nous essayons de ne pas nous arrêter aux classifications et aux concepts. Nous partons plutôt des situations cliniques. C'est un peu notre marque de fabrique.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Sur la santé mentale, il y a la définition de l'OMS. En psychiatrie et en santé mentale, nous nous appuyons également sur les travaux et les définitions du ministère. Nous n'avons pas mené de travail pour proposer de nouvelles définitions. Nous travaillons en fonction des saisines ou des sujets.

Tout le monde adhère à la définition de la santé mentale fixée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou aux éléments qui sont définis dans le plan Psychiatrie et santé mentale 2011-2015. La santé mentale est une notion très large, qui va au-delà de la pathologie même. Cependant, la pathologie reste notre porte d'entrée. Les « dys » concernent la santé mentale, bien plus que la pathologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

J'ai bien entendu vos remarques sur les travaux du comité de pilotage en direction des généralistes et, sans doute aussi, des pédiatres.

Vous parlez de la reconnaissance possible des maladies bipolaires ou de la dépression. Est-ce le rôle d'un généraliste ou d'un pédiatre de faire le diagnostic d'une maladie bipolaire ? Son rôle n'est-il pas plutôt de dépister un trouble du comportement et d'orienter le patient vers un psychiatre ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Effectivement, le médecin généraliste ou le pédiatre a pour rôle de repérer pour adresser l'enfant au psychiatre. Sur la dépression de l'adolescent, certains médecins généralistes ont des formations et parviennent à l'identifier. Dès qu'il y a doute, c'est prévu dans les recommandations, le généraliste doit adresser le passant au psychiatre.

L'une des recommandations - elle est d'ailleurs labellisée - portait sur la coordination entre le généraliste et le psychiatre. La communication entre eux se développe : psychiatres et médecins généralistes s'y emploient. La situation s'améliore.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

La HAS est bien connue pour ses préconisations et ses fiches de préconisations dans divers domaines. Pour l'ensemble des pathologies que vous avez évoquées, une fois le diagnostic établi, on peut formuler des préconisations, sachant que certains diagnostics ne sont pas évidents à établir immédiatement.

Attardons-nous sur la notion de parcours. Vous avez rappelé que le parcours de soins commençait chez le généraliste, dont le rôle consiste à dépister, repérer et orienter. Tout cela semble aller de soi, mais, dans la pratique, les difficultés sont nombreuses. Pour qu'il y ait diagnostic, encore faut-il avoir accès à celui qui peut l'établir. Les délais sont souvent très longs pour obtenir des consultations spécialisées en pédopsychiatrie. Quelle est la part de décisions de la HAS pour améliorer ce parcours ?

Debut de section - Permalien
Marie-Hélène Rodde-Dunet, chef du service Évaluation de la pertinence des soins et amélioration des pratiques et des parcours

La HAS a son mot à dire mais nous n'avons pas tous les leviers entre les mains pour améliorer le parcours. Nous formulons des préconisations et réalisons un énorme travail de synthèse à partir d'un socle de connaissances de tout ce qui se passe à l'étranger. Le document sur la coordination entre médecine générale et psychiatrie sera bientôt publié. Nous souhaitons que nos productions deviennent des leviers.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La HAS a un rôle d'acculturation envers les professionnels. C'est pour cela que le comité de pilotage a toute sa pertinence. Il favorise le lien entre les professionnels et différentes disciplines. Mais il reste certains leviers, par exemple ceux qui sont propres à la région ou à la direction générale de l'organisation des soins.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Ce sont des régulateurs de l'offre. Dans ce domaine, nous n'avons ni levier ni compétence. Nous pouvons porter un regard en termes d'évaluation, notamment proposer des changements. Quelle que soit la pathologie, notre ligne, c'est la coopération entre les professionnels. Il s'agit de rétablir la place du généraliste dans le parcours.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La santé mentale chez l'enfant ne concerne pas seulement le domaine sanitaire ou médico-social. Elle suppose une prise en charge globale et couvre un champ très large, jusqu'à l'éducation nationale. Les leviers sont donc multiples et ne relèvent pas seulement des instances ou des régulateurs qui s'occupent du médical ou du médico-social. C'est nettement plus complexe.

Les travaux de la HAS présentent l'intérêt de mettre en exergue la coordination qui doit avoir lieu, dans un champ assez large.

Les recommandations de bonnes pratiques impliquent les professionnels de différents horizons, afin qu'ils participent et puissent prendre conscience de cette situation et la répercuter auprès des différents décideurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Monsieur le directeur, vous dites qu'il faut mettre le médecin généraliste au coeur du dispositif, mais cela fait quarante ans que l'on entend cela ! Le généraliste est au coeur de tout et se retrouve finalement en dehors de tout, tellement il est accaparé par différentes tâches.

En matière de repérage et de dépistage, il faut de la précocité : celle-ci doit concerner à la fois le diagnostic et la prise en charge. À quoi sert un diagnostic précoce si le patient n'est pas pris en charge ?

Avez-vous une approche évaluative du parcours de soins ou est-ce en dehors du champ de vos compétences ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Ce n'est évidemment pas hors cadre. Les professionnels que nous réunissons font bien évidemment part de leur expérience - laquelle est capitalisée dans les recommandations - et rapportent très souvent les propos que vous venez de tenir, monsieur le rapporteur.

L'évaluation des situations et des dysfonctionnements constatés dans l'offre trame les travaux. Sur le plan institutionnel, nous n'avons pas de compétences en termes d'évaluation de la politique de santé mentale de l'enfant : cela relève du Haut Conseil de la santé publique. La HAS n'a fait l'objet d'aucune saisine.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Pour avoir des évaluations, il faut de la donnée. C'est également l'une des problématiques auxquelles nous sommes confrontés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Quelle est votre approche des établissements susceptibles d'intervenir dans le champ de la santé mentale ?

Madame, vous avez évoqué un certain nombre d'expériences et d'innovations étrangères. Quel regard critique portez-vous ? Quelles préconisations formuleriez-vous dans ce domaine ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

La certification est la base de l'évaluation des établissements, qu'ils soient publics ou privés. Il n'existe pas de dispositif spécifique de certification des établissements de santé mentale, la majorité des services de psychiatrie se trouvant au sein d'hôpitaux pluridisciplinaires. On prend en compte la dimension psychiatrique, notamment celle de l'enfant, avec différentes approches servant à la certification, par exemple le parcours de soins, au travers des audits de processus.

La notion de « patient traceur » est la nouvelle méthode de la HAS. Il s'agit de mobiliser les processus non pas en analysant la structure de façon transversale, mais en examinant la trajectoire du patient, la façon dont l'établissement s'est organisé, dont les professionnels ont géré la situation clinique.

Aujourd'hui, dans la certification de 2014, 300 établissements ayant une compétence en santé mentale ont été vus et 130 patients traceurs ont été mobilisés. C'est une mine d'informations sur l'organisation des établissements.

Dans le champ qui est celui de cette mission d'information, les capacités sont très limitées : on dénombre peu de services de pédopsychiatrie et peu de services avec des hospitalisations conventionnelles. L'essentiel se passe au sein des hôpitaux de jour ou des structures de secteur.

Les professionnels de la santé mentale ont bien compris les avantages de la certification et l'acculturation des professionnels de psychiatrie à la certification dans le champ de la santé mentale a beaucoup progressé ces dernières années. Avant, les professionnels de la psychiatrie avaient l'impression que l'on importait dans leur champ des approches qui étaient plutôt celle des soins somatiques. L'analyse par les processus, le patient traceur répondent beaucoup plus à leurs attentes.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Je reviens sur la notion d'évaluation. Nous faisons toujours un benchmark et regardons ce qui se passe dans les autres pays.

En matière de recommandations, cela pose problème. Faut-il aller jusqu'à proposer des nouveautés organisationnelles dans le système de soins ? En général, nous nous limitons au système organisationnel existant.

J'en viens aux innovations que l'on trouve en région. Il faut les évaluer, car elles dépendent souvent des personnes et ne sont pas forcément reproductibles. Pourraient-elles avoir la même qualité sur tout le territoire ? Ce sont des questions lourdes de conséquences.

Debut de section - Permalien
Marie-Hélène Rodde-Dunet, chef du service Évaluation de la pertinence des soins et amélioration des pratiques et des parcours

Les innovations existent mais il faut définir des critères d'évaluation. La plupart du temps, ce sont les promoteurs mêmes de ces innovations qui déclarent qu'elles sont de qualité. Notre rôle consiste à vérifier que l'évaluation est vraie.

Dans le travail sur la coopération entre médecine générale et psychiatrie, nos préconisations tiendront compte des évaluations internationales.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Formuler des préconisations sur ce qui relève de l'organisation est délicat et difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Quelles préconisations formuleriez-vous pour améliorer les dispositifs en pédopsychiatrie ? Nous le savons, la France n'est pas la meilleure dans cette discipline.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Cela s'explique par différentes raisons qui peuvent être liées à des questions d'organisation ou de personnels disponibles.

Pour la HAS, il est difficile de formuler une préconisation englobant les paramètres que nous ne pouvons modifier car nous ne disposons pas des leviers nécessaires.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

La recommandation sur l'actualisation du diagnostic des enfants dans le champ de l'autisme s'appuie sur l'état des lieux et l'état des difficultés organisationnelles. La HAS n'est pas directement saisie pour formuler des préconisations de caractère organisationnel, ce n'est pas la voie que les pouvoir publics ont choisie dans les plans de santé publique.

La HAS est surtout mobilisée pour formuler des recommandations dans un champ où l'on sait qu'il existe de fortes controverses entre les professionnels, et pour établir des plaques de convergence, des zones de consensus. Je pense à l'autisme. L'approche organisationnelle, qui aurait pu passer par l'analyse de l'efficience des organisations, aurait été différente. Le rapport aux professionnels aurait été plus distancé. Là, nous avons rendu des recommandations pour les professionnels, élaborées par les professionnels et les représentants des patients.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Je vais être provocateur, puisque vous avez évoqué l'autisme. Allez-vous préconiser de chasser les psychanalystes de l'approche des autistes, comme certains de nos collègues l'ont fait à l'Assemblée nationale ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

En 2012, sur ce champ, nous n'avons pas pu tirer de conclusions parce que nous n'avions pas de données de littérature. En outre, aucun consensus ne se dégageait au sein du groupe de pilotage, malgré une consultation publique, les avis étant demeurés divergents. Aujourd'hui, nous ne savons pas si ces pratiques doivent être bannies ou préconisées. La réponse de la HAS, c'est que l'on ne sait pas et que l'on ne peut pas conclure.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Dans les groupes de travail actuels sur l'autisme, on met autour de la même table des professionnels de la psychiatrie avec des représentants de courants, portés par les associations de patients, qui se situent hors champ de la psychiatrie dite classique. Notre feuille de route, c'est de les faire travailler ensemble. Il est impossible d'élaborer une recommandation concernant le champ de la santé mentale sans les professionnels de ce secteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

C'est un vieux débat. Il n'est qu'à lire la correspondance entre Freud et Bleuler !

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La recommandation a bien montré qu'il n'y avait pas de consensus entre les professionnels et les patients, pas plus qu'entre les professionnels eux-mêmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Le législateur n'a pas à faire de prescription médicale. Il doit simplement créer les conditions de prise en charge optimale.

Il semble ressortir de vos propos que la santé mentale de l'enfant est assez mal prise en compte en France. La pédopsychiatrie est en effet l'un des parents pauvres des spécialités médicales françaises.

Pouvez-vous affirmer, en tant que structure d'évaluation, que la pédopsychiatrie est une spécialité à part entière et doit être valorisée ? Pourriez-vous définir la bipolarité ? Cette pathologie semble s'étendre de façon importante ! On entend dire de certaines personnes qu'elles sont, de temps en temps, bipolaires. Ce terme ne masque-t-il pas des pathologies moins faciles pour les familles à entendre ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La définition de la bipolarité est très complexe, cette pathologie présentant plusieurs types. On le voit bien, ce terme est victime d'un phénomène de mode. Car, en réalité, il faut entre sept ans à neuf ans pour diagnostiquer un trouble bipolaire, qui revêt souvent une manifestation dépressive, pour laquelle un traitement de l'humeur est nécessaire.

Heureusement, nous n'avons pas tous une humeur constante. La question est de savoir à quel moment les changements d'humeur deviennent pathologiques. Effectivement, à la suite d'une énorme médiatisation, on confond la bipolarité et les troubles de l'humeur.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Nous établissons les recommandations concernant la pédopsychiatrie avec les pédopsychiatres. Dans le cadre des recommandations de 2012, les pédopsychiatres ont été présents jusqu'au terme de la démarche.

Les recommandations concernant le diagnostic, sur lesquelles nous commencerons à travailler en 2017, seront vraisemblablement pilotées par des pédopsychiatres. Il s'agit de prendre en compte cette qualification et cette spécialité dans leur dimension académique et universitaire. La pédopsychiatrie est valorisée par l'appel à des professeurs des universités-praticiens hospitaliers pour l'élaboration des recommandations qui les concernent.

Dans le cadre de l'autisme, par exemple, ces recommandations sont très structurantes et influent sur l'organisation des soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je partage tout à fait ce que Catherine Génisson a dit sur le rôle des parlementaires.

Il est sage de faire en sorte que tous les professionnels puissent travailler ensemble. En France, on a tendance à encenser une pratique et à la rejeter ensuite. Il faut permettre à chacun de travailler.

Vous avez souligné l'importance d'un diagnostic et d'une prise en charge précoces. Comment intervenez-vous pour l'encourager ?

Vous avez également signalé que la majorité des établissements psychiatriques se trouvent dans des établissements généralistes. Je le rappelle, la psychiatrie en France a été avant-gardiste. Ne convient-il pas de réfléchir à la mise en place d'établissements psychiatriques dédiés ? Je pense surtout aux établissements psychiatriques destinés aux enfants et aux adolescents, qui sont peu nombreux. À Gentilly, il y a un centre hospitalier public de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, la Fondation Vallée. Des pratiques innovantes sont menées, qui pourraient sans doute être mieux partagées. Avez-vous des recommandations qui permettraient d'aider à cette réflexion ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Depuis les années 80, la volonté politique a été d'organiser les secteurs de santé mentale, y compris les intersecteurs de pédopsychiatrie, en fonction d'un maillage prenant en compte l'ensemble des établissements. Pour autant, sur les 300 établissements que nous avons visités en 2014, la moitié est en mono-activité.

Il existe donc une pluralité d'organisations. Nous n'avons pas de doctrine, n'ayant pas été questionnés sur ce sujet. On observe, dans le champ de la certification, au travers des groupements hospitaliers de territoire (GHT) que les établissements en mono-activité sont encouragés à créer des coopérations avec des centres hospitaliers généraux.

Par ailleurs, de nombreux partenariats sont organisés pour la prise en charge des adolescents entre les établissements spécialisés et des centres organisés par les hôpitaux, dans un souci de non-ségrégation. On observe donc un certain polymorphisme. Il n'existe pas de clivage entre les psychiatres représentant la tradition pédopsychiatrique et leurs confrères à la tête de secteurs dans des hôpitaux généraux. Je le souligne, les questions portent non pas sur l'organisation des établissements, mais sur l'intégration et la coopération entre les acteurs.

S'agissant des préconisations concernant l'organisation des prises en charge, la HAS s'intéresse, je le rappelle, aux recommandations de pratiques cliniques. La recommandation de 2012, issue des travaux des groupes de travail, sur les interventions concernant les enfants autistes portait sur le repérage précoce, la continuité et l'intégration, et fournissait des données sur les taux d'encadrement des enfants. Il est demandé à la HAS de travailler sur l'organisation transversale du point de vue du praticien ou du patient plutôt que du point de vue du régulateur.

Certes, nous pourrions travailler sur une recommandation à destination des décideurs, à savoir la ministre et les différents régulateurs en région, relative à l'organisation et l'organisation d'un champ particulier comme la pédopsychiatrie, l'autisme ou les prises en charge polypathologiques. Telle n'est pas aujourd'hui la volonté des pouvoirs publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Madame Cohen, il faudra reposer votre question à la Direction générale de l'offre de soins (DGOS).

Monsieur Maigne, vous disiez avoir réussi à réunir les différents courants, comme si une certaine unité se dessinait concernant l'organisation territoriale. Ce n'est pas ce qu'on entend sur le terrain, notamment à propos des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Si l'on a des GHT en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) qui fonctionnent plus ou moins bien, la demande est forte pour ce qui concerne les GHT psychiatrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Vous avez évoqué la coordination entre les professionnels de santé, en faisant brièvement référence au médico-social et à l'éducation. On le voit bien, la prise en charge psychiatrique des mineurs se situe au carrefour des champs sanitaire, médico-social, éducatif et, parfois, judiciaire - cela se vérifie avec les centres éducatifs fermés, où beaucoup d'enfants présentent des troubles du comportement - ou carcéral.

Je l'entends bien, vos préconisations concernent des pratiques cliniques. Toutefois, celles-ci se situent dans un contexte.

Par ailleurs, à vous écouter, on a le sentiment que la médecine mentale devrait faire partie des GHT généralistes. Tel est le cas dans certains départements, même si une telle évolution n'a pas été facile, les psychiatres redoutant une OPA sur leurs finances. Pouvez-nous nous donner votre sentiment personnel sur ce point ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Les pouvoirs publics ont sans doute raison de nous saisir sur des recommandations de pratiques cliniques, pour permettre aux professionnels de dépasser les limites des approches institutionnelles, par ailleurs respectables, d'organisation territoriale et de gouvernance. Ainsi, ces derniers appréhendent mieux les besoins de coordination, de continuité, d'intégration et d'ouverture.

C'est la compétence de la DGOS de savoir comment les mariages se sont faits. La HAS se contente d'accompagner le mouvement au travers de la certification. Vos propos, madame la sénatrice, illustrent notre action : nous ne prenons pas en compte la dimension institutionnelle. Sanctuariser les ressources et disposer d'organisations plus cohérentes ne font pas partie du champ de compétences de la Haute Autorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Avez-vous des recommandations particulières pour les médecins de la protection maternelle et infantile (PMI) ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Les bonnes pratiques s'appliquent à tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Ma question portera sur les troubles du déficit de l'attention, avec ou sans hyperactivité. Vous avez publié un guide des bonnes pratiques professionnelles en la matière. Que pensez-vous de l'affirmation selon laquelle les psychiatres contrôleraient les enfants qui ont du mal à se concentrer avec la Ritaline ? Je ne pense pas être hors sujet, car il semble qu'il s'agisse d'une vraie question pour la HAS.

Par ailleurs, que pensez-vous des personnes qui opposent les droits de l'enfant ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Peu d'enfants sont sous Ritaline. Je rappelle qu'il s'agit d'un traitement de deuxième intention. Les chiffres sont faibles, contrairement aux pays anglo-saxons. Il existe en effet de réelles contraintes d'autorisation de mise sur le marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Qu'entendez-vous par « des chiffres faibles » ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Un ratio inférieur à 10 % mais je n'ai pas les chiffres.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Dans les critères de l'évaluation, prenez-vous en compte les délais entre le dépistage et la prise en charge ? Sont-ils longs ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Les recommandations ne permettent pas de délai particulier.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La santé mentale n'est pas le champ médical le mieux organisé en termes de logiciels et d'ordinateurs. Même en oncologie, spécialité mieux organisée, il n'est pas si facile de fournir un indicateur concernant le délai entre la première consultation et la première opération.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Ce niveau d'imprécision des recommandations est-il lié à un manque de moyens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Peut-être serai-je hors sujet mais je voudrais rebondir sur certains de vos propos, à savoir les préconisations que vous aviez émises et qui sont relatives à un taux d'encadrement des enfants autistes.

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Il s'agit de nos recommandations publiées en 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

En s'appuyant sur la demande des parents et sur les recommandations émises par l'éducation nationale, il a été décidé que les enfants autistes seraient de plus en plus nombreux à être accueillis à l'école, et ce dès le plus jeune âge. Avez-vous formulé des préconisations sur les conditions dans lesquelles ces enfants doivent être accueillis ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

En 2012, on a pointé un certain nombre d'exigences en termes de taux d'encadrement. Ce n'est d'ailleurs pas ce qui a généralement été retenu de nos recommandations. L'intérêt s'est davantage porté sur les types d'intervention et les écoles de pensée auxquelles nous nous référions. Pour autant, dans le cadre du plan Autisme, nos recommandations, que nous avons rendues conjointement avec l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM), ne faisaient pas référence à des plans d'organisation, qui ne nous étaient pas demandés.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Diagnostic, approche, prise en charge et suivi : existe-t-il une spécificité « enfants » et « adolescents » ou bien ne considère-t-on qu'une seule population, celle des mineurs ?

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

La dépression et l'anorexie concernent plutôt les adolescents. Vous le voyez, j'ai tendance à réagir en fonction des situations cliniques.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Avez-vous une approche épidémiologique en la matière ? En effet, il peut être intéressant de considérer certaines pathologies en fonction de l'âge, du contexte social ou du contexte géographique.

On le sait, certaines pathologies psychiatriques sont spécifiques au monde occidental, tandis que d'autres apparaissent chez les migrants.

Debut de section - Permalien
Michel Laurence, chef du service Bonne pratiques professionnelles, représentant la Haute Autorité de santé

Pour ce qui concerne l'approche épidémiologique, nous nous fondons sur la littérature existante, en la contextualisant. Nous réunissons ensuite les experts et les professionnels de santé. Toutes les données apparaissent dans l'argumentaire scientifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Je tiens à le souligner, une expérience de GHP régional en psychiatrie est actuellement menée, avec des établissements publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Madame, messieurs, merci de vos réponses. N'oubliez pas de nous envoyer les chiffres que nous vous avons demandés.

La réunion est close à 19 h 40.