Nous avons entendu hier le président du conseil régional des Hauts-de-France et nous ne pouvions faire l'impasse sur l'autre grande région sidérurgique, le Grand Est. La délégation s'est rendue dans les centres de recherche d'Arcelor à Maizières-lès-Metz ainsi qu'à Metafensch et nous avons tous en mémoire l'évolution de Florange, que M. Marzorati nous a rappelée lors de son audition. Nous suivons également attentivement le dossier de Saint-Gobain Pont-à-Mousson, nous avons entendu M. Ludovic Weber la semaine dernière et je pense m'y rendre sans doute lundi 24 juin.
Je vous remercie de vous être libéré et si nous avons insisté pour vous entendre, c'est en raison naturellement de la place de la filière sidérurgique dans l'histoire, l'économie et le patrimoine culturel dans la région que vous présidez et principalement en Lorraine, région désormais identifiée par la Commission européenne comme région en « transition industrielle ».
Le Grand Est est la deuxième Région industrielle de France, avec 16 % des emplois dans l'industrie, et avec une spécialisation sectorielle dans la fabrication d'équipements et de machines, la métallurgie, l'industrie du bois et les industries agro-alimentaires. Vous avez récemment déclaré « croire en son avenir industriel », si cette région sait relever les nombreux défis, dont les transitions numériques, technologiques et écologiques, auxquels elle est confrontée. Vous voulez faire du Grand Est l'un des leaders européens en matière d'Industrie du futur. Pouvez-vous décliner ce projet pour la filière sidérurgique ?
Nous avons entendu mardi le délégué interministériel aux restructurations d'entreprises. Quel jugement portez-vous sur son action dans le domaine de la sidérurgie ?
Il était accompagné du secrétaire général du Comité interministériel de restructuration industrielle : le CIRI associe-t-il de façon suffisante et satisfaisante la région dans l'instruction des dossiers d'entreprises en difficultés ou se contente-t-il de solliciter des crédits régionaux à la fin du processus de restructuration, vous mettant ainsi devant le fait accompli ?
Nous entendions également le délégué aux Territoires d'Industrie qui porte des projets co-pilotés par des élus et des entreprises, émanant des territoires, mais ne mobilisant aucun financement nouveau. Quelle est votre appréciation de cette action ?
Vous l'avez compris, Monsieur le Président, nous nous intéressons à l'ensemble de la sidérurgie qui est pour nous une filière stratégique et porteuse d'avenir y compris dans le cadre de la transition énergétique que ce soit pour la construction d'éoliennes, de véhicules électriques ou pour son apport à l'économie circulaire avec le recyclage de la ferraille.
Pour accompagner cet avenir, comment voyez-vous les rapports entre l'État et les régions ? Votre collègue Xavier Bertrand revendiquait hier davantage de cohérence dans les compétences : puisque les régions ont la compétence économique depuis la loi NOTRe, il faut qu'elles aient les moyens, juridiques et financiers, de mener des politiques d'accompagnement des mutations industrielles.
Faut-il aller jusqu'au droit à la différenciation pour mener des politiques industrielles adaptées à la réalité des territoires ?
Votre collègue Xavier Bertrand soulignait hier à juste titre que l'économie de l'Allemagne marche sur deux jambes : une industrie traditionnelle compétitive qui se modernise avec l'industrie 4.0, une économie de l'innovation numérique.
Vous avez déclaré que votre stratégie de développement économique régional était de « devenir un territoire aÌ énergie positive et bas carbone » : quelle place occupe la sidérurgie dans le schéma qui doit « faire du Grand Est une Région leader en matière de mix énergétique et de verdissement de son économie » ?
La sidérurgie évoque la Lorraine, fière de son passé sidérurgique et fière de la construction européenne, qui s'est faite avec Robert Schuman par la création de la Communauté européenne du charbon et d'acier - Robert Schuman est un enfant de notre région, même s'il partage plusieurs nationalités.
La région Grand Est est la deuxième région industrielle de France. La sidérurgie occupe environ 53 000 salariés, avec des noms forts : Arcelor, Ascometal, que nous partageons avec d'autres régions ; si on s'éloigne un peu de la Lorraine, les Aciéries Hachette et Driout de Saint-Dizier, GHM Wassy en Haute-Marne, terre de fondeurs, de traditions et en même temps de modernité car le territoire de Nogent produit un tiers des prothèses de hanches et de genoux au monde aujourd'hui, à partir de cette tradition des forges. Ces territoires ont de fortes capacités en termes de transition, d'innovation et de rebond.
ArcelorMittal emploie 10 000 salariés en France, mais la moitié de ses salariés se trouve dans le Grand Est. C'est une entreprise avec laquelle la collaboration et le partenariat sont réels. Le groupe a d'ailleurs tenu ses engagements : après la fermeture du haut-fourneau, ArcelorMittal devait investir 180 millions d'euros. Ils ont investi à ce jour 200 millions d'euros et ont fait du centre de recherche et développement que vous avez eu la chance de visiter leur centre de référence mondiale. Ce n'est pas rien et je tiens à le souligner.
Il a fallu se battre, mais cela montre que le partenariat avec un industriel mondial est possible. Nous continuons ces actions aujourd'hui : ArcelorMittal va probablement devenir actionnaire dans la réunification des ports de Moselle que nous venons de réussir. Cela témoigne du souci du groupe de participer au développement, aux mobilités et au fret.
L'année 2019 pour la sidérurgie est assez difficile : je ne reviendrai pas sur les crispations commerciales au niveau mondial, principalement entre les États-Unis et la Chine, que vous maîtrisez parfaitement. Je me permettrais peut-être de citer quelques exemples qui me semblent importants - qui importent également à mon homologue des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, que vous avez rencontré hier. Entre 2008 et 2017, la sidérurgie a perdu 21 % d'emplois : c'est autant de reconversions, de plans sociaux, d'accompagnement et de formations sur lesquelles travaillent les régions. Il s'agit là de notre coeur de métier. Lorsque Xavier Bertrand en appelle à une forme de décentralisation renouvelée, différente, il attire l'attention sur l'écart entre la volonté de l'État d'être le grand sauveur de l'emploi et la réalité du terrain. Les régions réclament aujourd'hui non pas de pouvoir traiter le chômage mais plutôt, à travers une politique de l'emploi de proximité, d'avoir une collaboration renouvelée, organisée de manière différente avec l'État.
La sidérurgie est une activité stratégique. Elle l'est au niveau national, même si cette filière ne représente aujourd'hui que 2 % de l'emploi industriel. Elle est aussi très importante dans la chaîne de valeur, et l'innovation peut sauver cette filière. En région Grand Est, la filière automobile est ainsi extrêmement importante. Notre région possède 40 % de la frontière terrestre française, ce qui nous oblige à adopter une position européenne tout à fait singulière et à considérer des collaborations avec de grands groupes comme PSA. Je suis particulièrement vigilant au devenir de cette filière automobile. Carlos Tavarès a raison de pointer du doigt les hésitations, les choix qui ne sont pas totalement assumés.
En réalité, tout un pan de notre industrie va muter : dans les aciéries, s'agissant des process et des matériaux de production, dans la filière automobile, avec l'évolution des boîtes de vitesses, des moteurs... Cela ne peut pas se faire lorsque l'on est dos au mur. Il faut avoir une collaboration extrêmement forte, non pas simplement entre l'État et la région, mais entre l'État, la région et les filières. Le travail que nous faisons avec Luc Chatel au sein de la filière automobile est tout à fait productif : c'est un des exemples où il y a un lien très fort entre la sidérurgie, l'industrie en général, des métiers qu'il va falloir réinventer, des formations qu'il va falloir créer pour ces nouveaux métiers et pour lesquelles il nous faudra susciter des vocations chez les jeunes.
Nous ne revendiquons pas tant la stratégie économique, qui doit être fixée par l'État, que l'application des choix, l'accompagnement, la proximité. Nous nous inscrivons en cela dans la loi NOTRe, qui nous impose d'avoir construit le Schéma Régional de Développement Économique d'Innovation et d'Internationalisation (SRDEII). Nous l'avons bâti dans le Grand Est sur une grande écoute du système économique - avec plus de 3 000 remontées des acteurs économiques - et nous l'avons fondé sur deux jambes : l'industrie du futur et la bio-économie. Le déploiement territorial se fait à travers des outils d'action, de coordination, à travers les agences de développement économique que nous avons voulu au plus près des acteurs, à l'échelle départementale ; une agence d'innovation à l'échelle régionale ; une agence d'internationalisation, qui se situera probablement aussi à l'échelle régionale. Nous articulons tout cela dans un réseau de développement économique, nous visitons des entreprises, ce qui nous permet de considérer les signaux faibles comme les signaux importants et de ne pas les négliger.
Le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) est en cours de finalisation : il traduit la conversion bas-carbone de toute la région, mais c'est également un schéma qui traite des mobilités. Ce n'est pas simplement une réglementation supplémentaire, il s'agit aussi d'un schéma dynamique, vivant, évolutif qui prend en considération tous les pans de la vie quotidienne.
S'agissant de la formation dans les métiers de l'industrie et de la sidérurgie, il existe un écart important entre l'offre et la demande qui ne concerne pas simplement ma région. Il faut que, de manière commune entre élus de la nation et élus locaux, nous nous penchions sur ce sujet. Il y a dans l'orientation probablement beaucoup à faire. Les régions ont aujourd'hui en charge ce secteur. Je souhaite prendre ce sujet à bras le corps et travailler le plus précocement possible avec les départements, car l'orientation doit débuter dès la classe de 4ème avec une forte action vis-à-vis des parents, du public féminin, principalement dans les métiers de l'industrie et du numérique, qui sont encore des métiers trop genrés et masculins. Nous le faisons de manière coordonnée avec Philippe Varin, à la tête du Centre national de l'industrie (CNI), avec l'UIMM dirigée par Philippe Darmayan et avec l'Alliance pour l'industrie du futur, où territoire par territoire, nous avons décidé de renforcer et de coordonner les efforts dans le cadre du plan industrie 4.0 que nous souhaitons développer.
Dans ce plan, 400 entreprises ont été diagnostiquées. Nous devrions nous situer à 250, il y a donc un réel engouement. En fin de mandat, nous souhaitons avoir diagnostiqué entre 700 et 1 000 entreprises. La question de la disponibilité des ressources capables de faire ce diagnostic se pose ainsi que celle des offreurs de solutions : autant la banque publique d'investissement (BPI) que le CNI et l'UIMM sont mobilisés pour que les briques technologiques et les solutions apportées aux entrepreneurs puissent l'être le plus rapidement possible. Il y a encore trop de délai dans ce plan industrie du futur entre le diagnostic et la transformation de l'entreprise : il est actuellement de 8 mois chez nous, je souhaite le faire diminuer. Nous faisons de même au niveau de l'artisanat, de l'agriculture - nous avons lancé un plan ferme du futur qui a un vrai succès.
Nous devons aussi mieux faire connaître ces outils au service des entrepreneurs. J'ai réalisé deux jours de visite d'entreprises cette semaine : j'ai rencontré un chef d'entreprise en Lorraine, d'origine allemande. Il me disait qu'il ne voyait jamais d'homme ou de femme politique dans les entreprises en Allemagne et s'inquiétait de ma venue. Je lui ai dit que je venais simplement l'écouter, comprendre ce dont il a besoin, ce qu'il produit pour que je puisse en être le premier promoteur. Cette culture de proximité, de suivi, doit encore être amplifiée. Ce n'est pas nous qui faisons la politique économique, ce sont les chefs d'entreprise, les acteurs économiques. Nous devons être à leurs côtés, leur faciliter la tâche, les accompagner.
J'ai rencontré hier l'ensemble des acteurs de la filière bois. Cette industrie est importante pour notre région. La pression sociale oblige aujourd'hui à prendre beaucoup de précautions lorsque l'on abat un arbre, mais il faut également penser à la stratégie internationale dans une concurrence mondiale où l'aspiration de la production de bois par la Chine pose de vrais problèmes. C'est également un sujet dont il faut saisir, car cette industrie appartient à cette chaîne de valeur. Il n'y a pas de fondeurs sans réflexion historique sur le rôle du bois et sur la présence du bois.
Les deux régions que sont les Hauts-de-France et le Grand Est, terres d'industrie, collaborent de plus en plus, par exemple sur la bio-économie. Nous envisageons de mutualiser nos démarches s'agissant de l'intelligence artificielle ; nous avons également des intérêts communs dans la filière automobile. Avec Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, nous avons signé un bio-pacte l'année dernière à la foire de Châlons-en-Champagne. Ces initiatives recouvrent des communautés de destin économique, industriel, des bassins de proximité, mais aussi des intérêts plus larges, qui pèsent à l'échelle européenne.
Nous sommes un peu les marins de la terre, dans le continent européen, coincés entre deux régions très puissantes, la région parisienne et le Land de Bavière. Nous sommes en quelque sorte le trait d'union, sans vouloir forcément ressembler à ces deux régions. La région Grand Est connaît un regain d'intérêt industriel, de vraies réussites, mais aussi des difficultés qu'il faut savoir entourer. Ainsi, l'année dernière, nous avons attiré 2,3 milliards d'euros d'investissements industriels étrangers - un milliard d'euros au premier trimestre 2019. Une dynamique existe, encouragée par des liens avec l'industrie allemande qui sont extrêmement forts, historiques. L'industrie allemande était implantée chez nous avant même que le mur de Berlin ne tombe ! Nos exportations sont largement positives aujourd'hui grâce à cette position stratégique dont bénéficie l'ensemble de la région. La taille de nos régions, dans le concert des régions européennes, permet de peser, de développer de nouveaux réseaux, de nouvelles collaborations.
Aujourd'hui, l'Alsace et la Lorraine, ont appris, autour de ce destin industriel, à travailler ensemble. Le poids économique de la région intrigue désormais de l'autre côté de la frontière : nos voisins allemands portent aujourd'hui un regard différent sur le Grand Est, même si nous ne pesons que 3 milliards d'euros - face à la Bavière voisine qui en pèse 35.
Il fait partie des ovnis que nous voyons parfois arriver sans avoir été consultés au préalable. Je trouve cela particulièrement regrettable. Nous n'avons pas pu anticiper ce dispositif ni répondre aux questions de nos collègue élus, ce qui est dommage.
Cette initiative a été créée « entre la poire et le fromage », avec un choix des territoires qui a pu en frustrer, tandis que certains ont réussi à se greffer à l'initiative. Ce n'est pas la bonne méthode. Je recommande un travail continu, régulier avec le Gouvernement.
L'initiative n'est pas mauvaise, mais la manière dont elle a été présentée est contestable. Elle ne comporte aucun moyen supplémentaire. Elle propose des stratégies de bassin d'emploi, des stratégies industrielles. Mais nous avons déjà en Grand Est le dispositif « Pacte offensif croissance emploi » (POCE), une contractualisation entre les intercommunalités et la région. C'est tout à fait vertueux car certaines intercommunalités ne s'étaient jamais saisies de ces sujets industriels ou économiques. Cela a instauré des dialogues qui n'avaient jamais existé. Les Territoires d'Industrie s'ajoutent à tout cela, suscitent de l'incompréhension dans nos territoires, ce qui pose également la question de l'articulation de ces dispositifs : POCE, « Action coeur de ville », Territoires d'Industrie.
Les Territoires d'Industrie ont toutefois permis de croiser les expériences des uns et des autres et d'accélérer ce croisement lorsqu'il existait déjà. D'autres territoires ont besoin de plus de temps. Certains sont confrontés à des enjeux économiques et industriels importants. Les exemples de Bure et de Cigéo nécessitent de se projeter à un horizon de 150 ans, de construire un dialogue qui n'a jamais existé sur certains sujets entre les départements. La question se pose aussi pour Fessenheim, c'est aussi une reconversion industrielle qui recouvre de plus larges enjeux de mobilité.
Territoires d'Industrie propose un binôme entre un élu local et un chef d'entreprise que je trouve très pertinent. Je souhaite d'ailleurs que les agences de développement économique soient présidées par un chef d'entreprise et non par un élu.
Ce dispositif a donc permis de renforcer une intelligence collective, des communautés industrielles locales. Je citerais l'exemple d'Haguenau, où un « réseau résiliant » a été créé par des entrepreneurs dans une communauté industrielle de proximité. Il facilite l'échange de bonnes pratiques, même parfois l'accès à des formations, voire même l'accès à des salariés - lorsqu'une entreprise connaît une baisse d'activité et qu'une entreprise en s'adaptant, est capable de prendre le relais.
Ces bonnes expériences doivent être partagées : Territoires d'Industrie peut y participer, l'idée n'est pas mauvaise en soi, mais il y avait des dispositifs et des stratégies régionales qui avaient été mis en place avant, et je regrette l'absence de discussion préalable à la mise en oeuvre du dispositif par le Gouvernement.
Vous avez rappelé qu'à l'échelle régionale, la coopération entre les filières industrielles régionales et l'action régionale existe. Estimez-vous qu'à l'échelle nationale, l'État associe suffisamment les filières industrielles, dans la coopération et l'anticipation des mutations, ou joue-t-il uniquement un rôle de « pompier » ?
Faut-il renforcer le partage des responsabilités entre le niveau national et le niveau régional ? J'ai suivi la construction du SDREII dans la région de Hauts-de-France. Je craignais à l'époque que les régions s'engagent avec les acteurs économiques sur une organisation territoriale industrielle, sans que la coordination soit faite avec la réflexion au niveau national sur l'avenir des filières. Comment les choix effectués au niveau régional et au niveau national sur les filières s'articulent-ils ? Estimez-vous que la coordination entre les régions, l'État et les acteurs des filières soit suffisante ?
La structuration en filières effectuée par le CNI est une bonne chose. Le président du conseil régional peut être en interaction directe avec le président de la filière au niveau régional, ce qui permet une déclinaison locale de l'organisation des filières au niveau national.
Ce qui est plus critiquable, ce sont les initiatives comme Territoires d'Industrie.
En outre, les diagnostics posés au niveau de l'entreprise pourraient être davantage partagés avec les filières. Nous pouvons encore davantage croiser les expériences des uns et des autres pour être plus performants. Nous essayons de le faire avec la filière bois, avec la filière eau - le dossier Pont-à-Mousson est un sujet industriel majeur : j'attends sur ce sujet des réponses gouvernementales. Je ne suis pas dirigeant d'entreprise. Je reste donc respectueux des choix stratégiques de l'entreprise, tout en étant à ses côtés, pour éventuellement accompagner la transformation. On ne peut pas laisser dépérir un outil industriel brillant, avec un centre de recherche et de développement qui sort de nombreux brevets tous les ans.
Il importe de connaître les entreprises du territoire, et qu'élus régionaux, nous fassions le lien avec les filières au niveau national.
L'articulation entre les filières à l'échelle régionale fonctionne. Est-ce qu'au niveau national, l'État tient compte des préconisations des filières et des alertes sur les difficultés qu'elles pourraient rencontrer ? Les entreprises nous ont parlé des enjeux que représente le prix du carbone au niveau européen et de l'importance stratégique du coût de l'énergie.
Je prenais l'exemple de la filière bois et des relations avec la Chine. Seuls deux pays n'imposent pas de quotas à la Chine : la France et la Belgique. C'est pourtant stratégique ! Mais nous avons également la possibilité, en cas de tempête ou en cas de surplus, d'écouler les stocks ou de valoriser. Mais où discuter de ces questions ? Il manque un lieu de partage entre les filières, l'État et les régions. C'est le cas aussi pour la sidérurgie. Comment savoir si tel acier est stratégique ou pas ?
Nous ne revendiquons de négocier avec l'Union européenne à la place de l'État, mais nous souhaitons avoir des interactions avec l'échelon européen.
Enfin, je tiens à souligner que ce qui est fait avec Territoires d'Industrie au niveau local, nous serions incapables de le faire au niveau national !
Je le regrette, effectivement. Un ministre dédié à l'industrie est un symbole, il permet d'incarner réellement cette priorité. Un ministre de l'industrie est un porteur du maillot jaune de l'industrie française !
Nous avons entendu hier Xavier Bertrand. Notez-vous également une distorsion entre ce vous ressentez et les moyens apportés par l'État sur vos dossiers ? Avez-vous le sentiment d'être considéré comme le financeur en dernier recours sur certains dossiers, sans avoir été associé au préalable ?
Qui assume la régénération des lignes de fret ? La région et la SNCF. Qui avance des sommes à l'État pour financer les petites lignes ? La région ! La région Grand Est a déjà avancé de l'argent à l'État pour trois lignes. L'État promet de nous rembourser dans deux ans, dans le cadre d'un Contrat de plan État-région (CPER). Le président de région se trouve face à ses concitoyens sur ces sujets-là !
Si l'on veut garder PSA en France, il faut se battre, et cela veut parfois dire qu'il faut contribuer financièrement. La région Hauts-de-France le fait, nous le faisons également, car nous sommes en concurrence avec des centres de production en Hongrie.
Si les collectivités territoriales ne contribuaient pas financièrement, certaines entreprises partiraient en en Hongrie. La confiance dans l'action publique locale est importante. L'inscription de notre action dans une chaîne de valeur est également cruciale. Si on ne participait pas financièrement, PSA ne serait plus là. La région Grand Est, mais aussi la région Hauts-de-France, apportent plusieurs dizaines de millions d'euros pour garantir la pérennité de ces centres de production.
Nous passons aussi par des aides à recherche et l'innovation. Pour bénéficier de fonds publics, l'entreprise doit entrer dans une logique d'innovation. On crée un écosystème viable par la confiance et la connaissance mutuelle. ArcelorMittal a pu fermer définitivement ses hauts fourneaux, en contrepartie de 200 millions d'euros d'investissement ainsi que de l'implantation d'un centre de recherche.
Je souhaiterais enfin mentionner le sujet des friches...
Les fonds structurels européens ont-ils un rôle à jouer dans l'aménagement économique du territoire ?
Ils sont aujourd'hui sous-utilisés. Ces fonds sont attribués à l'État et délégués au niveau régional. Pourquoi ne pas faire confiance aux régions d'emblée ? Nous attendons des réponses sur l'avenir de ces fonds. Faisons davantage confiance aux régions sur les sujets liés à l'aménagement.
S'agissant des friches, les intercommunalités n'ont pas toujours les reins suffisamment solides pour traiter ces sujets, et les régions n'ont plus forcément la compétence pour le faire. L'établissement public foncier local va s'étendre dans la région en « peau de léopard ». Nous voulons en faire un outil supplémentaire à disposition des territoires. Le sujet des friches pourrait également s'envisager au niveau interrégional : encore une fois, nous pouvons partager nos expériences.
La réunion est close à 12 heures.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.