Interventions sur "plateforme"

93 interventions trouvées.

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

...onsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne peux, au moment d’examiner cette proposition de loi, m’empêcher d’exprimer ma surprise sur la façon dont la discussion s’engage. Ce texte nous arrive de l’Assemblée nationale avec une disposition essentielle, selon les termes mêmes de Mme Laetitia Avia, son auteur : « Le cœur du texte est l’obligation pour les grandes plateformes de retirer les contenus manifestement haineux dans un délai maximum de vingt-quatre heures après leur signalement. Pour la mettre en œuvre, nous créons un nouveau délit, placé sous le contrôle du juge. » La raison de cette proposition est assez évidente : la loi pour la confiance dans l’économie numérique, telle qu’elle est rédigée aujourd’hui, se révèle impuissante à enrayer le phénomène de la...

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

...utes qui n’osent plus s’exprimer sur les réseaux sociaux, qui ont résilié leur abonnement pour ne plus s’exposer aux attaques racistes, antisémites, homophobes, sexistes, menées sous forme de raids en bande organisée submergeant les pages individuelles à partir de fermes à trolls. C’est là qu’est le scandale ; c’est là qu’est la censure. Il est urgent de défendre les victimes, pas de protéger les plateformes. Quatrième réflexion : certains objectent que ce texte risque de porter atteinte à la liberté d’expression. Comment peut-on soutenir cette position, alors que le mécanisme va exactement dans le même sens que celui qui s’applique à la presse depuis 1881 ? La loi précise que la presse n’a pas le droit de livrer de contenus haineux ou de diffamer. La presse se conforme depuis toujours à ces princ...

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

...upe engage la présente discussion. Or c’est à l’aune d’un postulat de départ plaçant la liberté au second plan, derrière la recherche de l’efficacité, que certaines dispositions de ce texte, pourtant centrales, s’avèrent problématiques et que certains manques se révèlent préoccupants. En la matière, la recherche de l’efficacité revêt la forme de la prédominance donnée au contrôle privé, par les plateformes, au détriment du juge judiciaire, seul compétent, selon moi, en matière de limitation de la liberté d’expression. Plus grave, on prend le risque d’un « sur-retrait » – qualifié par certains de risque de censure – opéré par des opérateurs privés. Il n’est pas anodin que, en sus de nos rapporteurs, le Conseil national du numérique, l’Arcep, la Commission nationale consultative des droits de l’hom...

Photo de Maryse CarrèreMaryse Carrère :

... 1er, constituait la principale de ces difficultés. L’instauration d’un tel délit aurait comme première conséquence de confier la censure sur le web à des géants de l’internet mettant déjà à mal la souveraineté des États. Ces géants auraient été d’autant plus confortés que le texte initial prévoyait de sanctionner en fonction du nombre de connexions, lequel ne détermine en rien les moyens d’une plateforme. C’est simple, on aurait sanctionné de la même manière Facebook, ayant une véritable portée commerciale, et Wikipédia, qui n’a aucune vocation commerciale et dont la communauté régule déjà les contenus. L’autre interrogation posée par l’article 1er est celle des notifications abusives, déjà évoquées. Les premières remontées des pratiques actuelles en Allemagne sont de nature à alerter, avec des...

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

...es contenus et respect de la liberté d’expression. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, portée par la députée Laetitia Avia, dont je souhaite saluer le travail considérable, s’attaque à cette tâche difficile. Issue d’un rapport remis en septembre 2018 au Premier ministre par son auteure elle-même, Karim Amellal et Gil Taïeb, elle a pour ambition de renforcer la pression sur les plateformes numériques, en les soumettant à des sanctions pénales si elles ne retirent pas en vingt-quatre heures les contenus haineux, et met en place une régulation administrative ambitieuse de ces grandes plateformes placée sous l’égide du Conseil supérieur de l’audiovisuel. Ce texte facilite également l’organisation de la réponse judiciaire par la spécialisation d’un parquet et d’une juridiction en mat...

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

...gissant du premier point, qui est de savoir si notre société doit s’armer pour lutter contre les contenus haineux sur internet, la réponse est bien sûr positive. Que nous raisonnions en nous fondant sur les explications de notre excellent rapporteur, lequel a retracé les difficultés rencontrées, que nous reprenions les chiffres qu’il donne dans son rapport – 163 723 signalisations annuelles à la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements, la plateforme Pharos, ou que nous pensions à l’intervention de M. Claude Malhuret nous invitant à lutter contre la « pourriture », pour reprendre son terme, oui, la nécessité de lutter contre le mauvais usage d’internet, contre tous ses excès, contre la polarisation en train de frapper nos sociétés – en France, comme ai...

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

La mesure phare de ce texte est l’article 1er, que la commission des lois a profondément et heureusement modifié : il s’agit de donner un pouvoir de suppression de contenus à ces plateformes internationales. Cela pose un vrai problème, comme l’ont indiqué plusieurs orateurs. En effet, que se passera-t-il dès qu’un contenu sera signalé ? Le compte à rebours pénal et le compte à rebours civil de l’amende seront déclenchés, et ces plateformes préféreront toujours leur portefeuille à nos libertés.

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

...n arsenal juridique et déjà, madame la garde des sceaux, une jurisprudence. Mais nous voulons aller plus loin et proposer des dispositifs plus opérationnels, tout en protégeant nos libertés en termes de viralité, de célérité et d’interopérabilité pour que ceux et celles qui pourraient être concernés par cette haine – il faut bien sûr la dénoncer et la condamner – puissent se réfugier sur d’autres plateformes. Ces points importants ont été étudiés et ont fait ou feront l’objet d’amendements. Pour terminer, je signalerai deux contradictions politiques. Si les réseaux sociaux donnent fréquemment le sentiment d’être les grands déversoirs des mauvaises humeurs, c’est parce qu’ils sont aussi souvent le grand défouloir d’une parole empêchée. Je ne veux rien justifier et surtout pas excuser l’inexcusable,...

Photo de Muriel JourdaMuriel Jourda :

...e condamnation pénale. Le risque de sur-blocage préventif des propos qui pourraient être tenus a déjà été dénoncé. Pour certains, c’est tout à fait louable, car cela permettrait à internet de devenir le lieu d’une aimable conversation civique. Je crains que nous ne puissions d’ores et déjà dessiner les contours de cette aimable conversation civique. En effet, vous le savez sans doute, l’une des plateformes les plus connues proscrit toutes les images de nudité de ses contenus, et ce jusqu’aux œuvres d’art que nous connaissons tous, notamment françaises. La Grande Odalisque d’Ingres, l’un des fleurons de la peinture française, ne sera plus jamais visible par les visiteurs de cette plateforme, …

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

...nt que nous défendrons vise à écarter de la future loi la possible atteinte à la liberté de la presse, qui est constitutive de la liberté d’expression dans notre pays. Je propose de dire d’emblée que la presse, au sens de la loi de 1881, la presse en ligne notamment, n’est pas concernée. Ne pas inscrire ce cadre dans la loi ferait prendre le risque de laisser cette liberté passer sous le joug des plateformes. Or, nous le savons, malgré toutes nos précautions, le risque de voir des algorithmes ne pas tenir compte du contexte et censurer des articles de presse existe. La presse en ligne est d’autant plus sensible qu’elle offre des espaces de contributions qui pourraient apparaître comme des opinions, mais sont pourtant déjà modérées par des éditeurs agréés et couvertes par la loi de 1881. Le retrait ...

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

...on discours à la tribune, j’ai déjà défendu les dispositions de cet amendement, et je devine ce que l’on va me répondre : il va de soi que la loi de 1881 encadre l’ensemble du dispositif et que le présent texte ne peut pas la remettre en question. Mais cela va tellement de soi que je ne vois pas pourquoi on ne l’affirme pas d’emblée ! Cette question a déjà donné lieu à débats. Pour certains, les plateformes doivent pouvoir censurer elles-mêmes, en amont, des contenus de presse – les amendes et autres sanctions qu’elles peuvent encourir sous vingt-quatre heures vont dans ce sens –, alors même qu’elles ne jugent pas toujours du contexte. Mes chers collègues, nous pouvons tous nous retrouver pour voter cet amendement. Les seuls arguments que l’on peut m’opposer, c’est qu’il est satisfait. Or un grand...

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

... des diffamations –, notamment devant une juridiction pénale. Mes chers collègues, ce pan du droit est très formel – certains d’entre vous l’ont peut-être pratiqué. Il faut prendre en compte des éléments de preuve, des délais, qui sont plus resserrés en période électorale, etc. Si j’ai bien compris ce qu’a dit Mme la garde des sceaux, une fois que le présent texte sera entré en application, une plateforme privée pourrait décider de retirer des propos en l’espace de vingt-quatre heures, sans intervention du juge. En effet, ces dispositions engloberaient le champ de la presse. Or, en droit français de la presse, le retrait de parutions est rarissime, pour ne pas dire inexistant. Il suppose des atteintes graves à la vie privée. Nous avons tous en tête un certain nombre d’affaires qui ont pu se produ...

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

...e dans ce champ. » Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, répond à M. le rapporteur l’inverse de ce qu’il voulait entendre : ce faisant, elle me donne raison ! On a pu me reprocher de couper les cheveux en quatre, mais j’avais bien raison de procéder ainsi ! Depuis le début, j’ai suivi les débats relatifs à cette réforme. Je sais ce qui se passe d’ores et déjà sur internet : certaines plateformes ont censuré des articles de presse faute d’avoir évalué la contextualisation opérée par les journalistes. Il ne s’agissait pas de propager tel ou tel propos haineux, mais de le critiquer ! Or les algorithmes ont tout mis dans le même panier… Madame la garde des sceaux, vous nous dites que la presse en ligne peut être censurée. Je vois que les différents collaborateurs du Gouvernement s’agitent ...

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

...rivent et de ceux qui publient. C’est cela, la liberté de la presse. C’est cela, la loi de 1881. Si nous devons l’adapter à la révolution numérique, c’est sur ses principes qu’il faut s’appuyer, pas sur autre chose. Commençons par rappeler cette règle, puis construisons sur cette base, celle de la responsabilité individuelle. On ne peut pas dire aux citoyens : « Fermez les yeux. On s’occupe des plateformes et l’information circulant sur internet sera toujours régulée. » C’est ainsi que l’on fabrique des non-citoyens et que l’on détraque la démocratie !

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

...construire un dispositif adapté à notre époque, en nous appuyant sur la responsabilité individuelle de ceux qui écrivent et de ceux qui publient. Cette proposition de loi a pour ambition d’interdire : mais, avant tout, il faut se demander si l’on peut interdire ! Nous venons de débattre de la légitimité de l’interdiction. Aujourd’hui, nous connaissons les conséquences de telles mesures pour des plateformes basées en France. Mais, au-delà, sont-elles réellement effectives ? Les techniques vont toujours plus vite que la loi ; l’imagination humaine dépassera toujours les algorithmes ; et, sur de tels sujets, l’extraterritorialité est un facteur plus prégnant que tout autre. En invoquant ainsi la sévérité, l’on menace non seulement la liberté d’expression, mais aussi la crédibilité du législateur. No...

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Mes chers collègues, parmi nous, ce constat est presque unanime : confier ces responsabilités aux plateformes n’est franchement pas le bon moyen de lutter contre les propos haineux. Jusqu’à présent, ces plateformes n’ont pas brillé par leur respect des valeurs de la République, par leur vertu et même par leur morale… Nous débattons dans un contexte particulier. Un texte de loi voté à l’unanimité par le Sénat et par l’Assemblée nationale, puis promulgué, oblige les GAFA à payer la production journalisti...

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

La vente en ligne de produits du tabac contrefaits à des mineurs dont l’âge est difficilement vérifiable sur internet soulève des enjeux de santé publique. Par ailleurs, étant absolue, l’interdiction de vendre du tabac en ligne ne requiert aucune appréciation de licéité de la part des opérateurs de plateforme en ligne. Le retrait de ce type de contenus ne risque donc de porter atteinte ni à la liberté d’expression ni au commerce en ligne licite. C’est pourquoi nous proposons que l’obligation de retirer ou de rendre inaccessibles, sous vingt-quatre heures après notification, certains contenus manifestement illégaux soit appliquée aux infractions de vente et d’achat à distance de produits du tabac manu...

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

... pour le fonctionnement de notre démocratie. Nous avons donc tenté de trouver une solution médiane pour ne pas vider l’article 1er de la proposition de loi de son contenu opératoire, contrairement au texte de la commission, avec lequel nous étions en désaccord. Parce que nous sommes attachés à l’État de droit et que nous ne voulons pas que la régulation d’internet soit privatisée et confiée aux plateformes elles-mêmes – elles ne se sont pas montrées vertueuses jusqu’à présent –, nous avons voulu réécrire l’article 1er et donner le dernier mot au juge. Tel était l’objet de l’amendement de Marie-Pierre de la Gontrie, qui, malheureusement, a été rejeté. Nous avons aussi voulu exclure explicitement la presse en ligne du champ de cette loi. Loin d’être superfétatoire, la précision était d’autant plus ...

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

...ces ou du type de contenus. Ainsi, le dispositif envisagé reste déséquilibré au détriment de la liberté d’expression. Il ne manquera pas d’entraîner de nombreux effets pervers : sur-censure, c’est-à-dire blocage par précaution de propos pourtant licites, recours encore plus massif à des filtres automatisés, contournement du juge, délégation de la police de la liberté d’expression en France à des plateformes étrangères. D’ailleurs, l’application concrète de ce nouveau délit n’est pas réglée. Certains représentants du parquet, lors de leur audition par notre commission, ont employé l’expression, plus qu’éloquente, de « droit pénal purement expressif ». Un problème d’imputabilité se pose tout d’abord, s’agissant des personnes physiques – qui, du modérateur sous-traitant indien ou du dirigeant améric...

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

Monsieur le secrétaire d’État, en nous disant que cette proposition de loi, ou plutôt ce projet de loi – il serait plus juste d’employer cette dénomination – ne constituait pas le cadre adapté pour régler, un soir, en fin de session, le problème des grandes plateformes, vous m’avez donné mon argumentaire. Ite missa est