Interventions sur "restitution"

36 interventions trouvées.

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

...cours de Ouagadougou, mais également le premier texte législatif faisant sortir des collections des œuvres et objets d’art. Nous savons qu’il existe déjà des demandes pendantes et que d’autres suivront. Les enjeux de ce texte dépassent donc très largement son objet, d’où les inquiétudes que nous avions presque tous exprimées concernant les conditions dans lesquelles le débat public en matière de restitutions avait pu se tenir – si tant est que l’on puisse parler de débat, dans la mesure où les décisions ont relevé du Président de la République et du Gouvernement, sans concertation préalable et avec une simple validation de notre part a posteriori, alors même que le Parlement est seul habilité à faire sortir des biens des collections nationales. C’est ce qui avait amené la Haute Assemblée à i...

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

...ançois Hartog, notre régime d’historicité s’est modifié et le passé tend à s’incruster dans le présent. La mémoire des choses du passé dans notre présent est préférée à l’histoire comme reconstruction et mise à distance des passés. L’effet immédiat du passé dans le présent tend à supplanter la mobilisation du passé dans un discours sur l’avenir. Vous me permettrez de considérer les modalités des restitutions dont nous débattons et surtout du retour de l’ornement du dais malgache, sans aucune forme de procès, comme des symptômes de cet usage présentiste du passé. Je reste persuadé de la dimension universaliste des biens culturels. Je suis pourtant convaincu qu’elle ne peut plus être systématiquement opposée à toutes demandes de restitution ou d’échanges d’œuvres. Néanmoins, je pense qu’elles doivent ...

Photo de Claudine LepageClaudine Lepage :

...ous en conviendrez, de s’exprimer après Pierre Ouzoulias. Nous examinons donc en nouvelle lecture et après l’échec de la commission mixte paritaire le projet de loi relatif au retour de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se félicite tout d’abord de ce que les articles 1er et 2 du projet de loi, qui prévoient la restitution des vingt-six pièces du trésor de Béhanzin, provenant du pillage du palais d’Abomey en 1892, et du sabre d’El Hadj Omar Tall, aient été adoptés conformes. En effet, cette demande répond aux attentes de la société civile africaine, qui agit depuis de nombreuses années pour que reviennent sur son sol les biens culturels dont elle a été privée pendant la colonisation. Nous sommes aussi convaincus q...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

...der cette question avec recul, distance, en vous donnant le temps de la réflexion. Face à cette ouverture, l’Assemblée nationale et le Gouvernement n’ont nullement cherché le compromis. Ils n’ont pas jugé bon de nous entendre sur la nécessité de nous doter d’un conseil national de réflexion, demande pourtant soutenue sur quasiment toutes les travées de la Haute Assemblée. Même l’abandon du mot « restitution », avec sa charge culpabilisante, a été rejeté avec une implacable volonté sémantique de rétablir le texte dans sa version originale, conforme à une certaine vision de l’histoire. Pourtant, les craintes que nous avions exprimées en première lecture étaient justifiées. C’est avec un certain vertige que nous l’avons constaté, en particulier au travers de la désagréable découverte du renvoi en cati...

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

... ce texte dépasse son objet. Il s’agit de la gestion du patrimoine culturel de la France. Le Sénat n’est pas une simple chambre d’enregistrement des décisions gouvernementales, je regrette d’avoir à le rappeler. Nous ne pouvons faire l’impasse d’un débat contradictoire lorsque sont en jeu des collections publiques régies par les principes d’imprescriptibilité et d’inaliénabilité. Les demandes de restitution sont nombreuses et vont probablement se multiplier. À l’heure où nous examinions en première lecture ce projet de loi, une couronne royale conservée au musée de l’Armée à la suite du don d’un particulier était transférée à Madagascar. Encore une fois, la décision du pouvoir exécutif précède celle du Parlement, mis devant le fait accompli. Nous devons retrouver le chemin de nos institutions républ...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

...ts ne sont que la partie émergée de l’iceberg. D’autres pays ont fait des demandes officielles auprès de la France pour récupérer une partie de leur patrimoine. La Côte d’Ivoire, l’Éthiopie, le Tchad, le Mali, Madagascar : au total, ces cinq pays réclament le retour de 13 246 biens appartenant aux collections publiques françaises. Rien n’indique que le mouvement s’arrêtera, bien au contraire. Les restitutions que nous étudions aujourd’hui ne sont donc que le point de départ d’une coopération culturelle avec le continent africain, et nous devons nous en réjouir. Il y va de la réconciliation de la France avec un continent, son passé et sa jeunesse. Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est donc une contribution, modeste certes, mais significative, à ce vaste mouvement de fond qui traverse no...

Photo de Abdallah HassaniAbdallah Hassani :

...vres de leur culture et de leur civilisation. D’une forte portée symbolique et parfois spirituelle, ces œuvres contribuent à un sentiment de fierté, de confiance en soi et d’espoir, nécessaire à l’édification d’une société prospère. Toutefois, la commission mixte paritaire n’a pas été conclusive. Pour une raison de sémantique d’abord. La majorité sénatoriale a préféré le mot « retour » au mot « restitution », qui sous-entendrait une mainmise illégitime. Restitution est un terme pourtant plus précis qui contribue à une exigence de vérité sereinement assumée. Le désaccord des deux assemblées porte ensuite, et surtout, sur la création par le Sénat d’une instance supplémentaire : le conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extraeuropéens. Voilà un ajout qui ouvr...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

...démarche du Sénat. Nous ne nous laisserons jamais enfermer dans un simple rôle de chambre d’enregistrement d’une décision prise, même avec l’avis du Quai d’Orsay et le consentement de la Rue de Valois. Nous ne voulons pas davantage être tenus pour responsables de possibles incidents diplomatiques par un avis non conforme à une décision prise, déjà annoncée et parfois exécutée. En effet, si une « restitution » revêt bien une dimension diplomatique, le « retour » d’un bien culturel relève avant tout d’une réflexion culturelle. C’est pourquoi l’avis d’un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels est indispensable. Celui-ci doit recueillir des expertises en histoire, en histoire de l’art, en ethnologie, comme en droit du patrimoine culturel. Ce n’est qu’après ces c...

Photo de Annick BillonAnnick Billon :

...preuve supplémentaire d’un véritable mépris de la représentation nationale, au moment où nous discutions de ce texte au Sénat une couronne malgache était transférée en catimini. Dernier acte de cette tragédie dans laquelle le Parlement joue le rôle de figurant, il aura fallu attendre la commission mixte paritaire pour apprendre la création d’une cellule interministérielle dédiée à la question des restitutions. Mais s’il ne s’agissait que du Parlement, l’affaire serait entendue, il en a l’habitude. Le problème, c’est qu’une telle dérive met en danger le patrimoine national. La méthode rend le principe d’inaliénabilité théorique et soumet les collections muséales au fait du prince. Le risque est grand de voir les biens et objets culturels français ravalés au rang de goodies diplomatiques – par...

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

... transfert physique sur le territoire béninois. Quoi qu’il en soit, cela signifie que les deux premiers articles ont été adoptés conformes et qu’ils ne sont plus en discussion dans le cadre de la navette parlementaire. Le nœud du problème – je ne saurais trop y insister – est les profondes divergences de fond que nous avons avec l’Assemblée nationale sur la manière d’appréhender les modalités de restitution, c’est-à-dire la méthode. Les discussions que nous avons eues au moment de la commission mixte paritaire l’ont d’ailleurs montré. Schématiquement, d’un côté, le Sénat fait valoir la nécessité d’une procédure pérenne, transparente et démocratique – Pierre Ouzoulias l’a rappelé –, permettant un débat contradictoire auquel la communauté scientifique pourrait et même devrait publiquement prendre par...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

...MP, la rapporteure de la commission nous présente cette motion tendant à opposer la question préalable, afin d’acter les divergences qui séparent les visions des majorités de l’Assemblée nationale et du Sénat. À ces divergences s’ajoute le cynisme de la ministre qui, le 4 novembre dernier, voulait rassurer le Sénat sur la méthode gouvernementale tout en ayant déjà engagé, de façon unilatérale, la restitution de biens à Madagascar. Celle-ci ayant été annoncée le lendemain de nos discussions, le Parlement, une nouvelle fois, a été mis devant le fait accompli, devant assumer le fait du prince. Il y a donc, d’un côté, la vision du Gouvernement privilégiant les accords purement diplomatiques pour les restitutions et, de l’autre, la vision de la majorité du Sénat, qui appelle à la constitution d’un consei...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Je vois déjà arriver les procès sur notre prétendue opposition au retour des biens vers leurs pays d’origine. Je rappelle que nous avons voté les articles 1er et 2. La discussion ne porte plus sur eux ; elle porte sur la méthode, qui est le dévoiement de la convention de dépôt. Cette procédure est utilisée pour faire une restitution camouflée et, en fait, pour conforter le fait du prince, c’est-à-dire l’utilisation de nos collections exclusivement pour des questions liées à la diplomatie. Nous pensons qu’il est urgent que notre pays se dote d’une doctrine – loi-cadre ou pas –, d’une méthode, d’une réflexion et que les scientifiques soient au centre de cette réflexion. C’est la raison de la création du conseil national de ré...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Il s’agit donc que les scientifiques éclairent notre position et notre décision. Il faut les remettre au centre, alors que la méthode actuelle du Gouvernement les écarte. Voilà ce qui nous sépare de la position du Gouvernement. C’est la raison pour laquelle je vous encourage, mes chers collègues, à voter cette motion. Cette dernière ne dit pas que nous sommes opposés à des restitutions ni que nous sommes opposés au dialogue des cultures. Elle prouve que nous voulons, dans ce dialogue des cultures, une collaboration et une coopération entre les scientifiques du pays d’accueil et les scientifiques français, que les collections soient regroupées et que l’on ait une vraie analyse des dépôts et de leur cheminement. La valeur artistique de ces objets est construite par l’histoire, ...

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

... à contribuer au désir de la jeunesse africaine de connaître et de s’approprier son histoire ? Comment ne pas être favorable à l’objectif de renforcer notre dialogue avec l’Afrique, ce continent ami, par le biais d’une coopération culturelle et patrimoniale accrue ? Ce n’est en tout cas pas le Sénat qui pourrait contester ces deux points, lui qui a été à l’initiative tant des deux seules lois de restitution que notre pays ait jamais adoptées que de la consécration législative des droits culturels. À la différence d’autres demandes, qui portent aujourd’hui sans discernement sur l’ensemble des biens conservés dans nos collections et originaires d’un pays d’un pays donné, quelles que soient leur importance ou la manière dont nos musées les ont acquis, les revendications du Bénin et du Sénégal portent ...

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

...de ce projet de loi va bien au-delà de son simple objet. Certains seront déçus qu’il n’ait pas été l’occasion de poser un cadre général ; d’autres, au contraire, craignent l’effet d’entraînement qu’il pourrait avoir. Ces points de vue contradictoires révèlent toute la complexité du sujet. Ils démontrent aussi combien nous sommes conscients de l’ampleur que sont appelées à prendre les questions de restitution dans les années à venir, eu égard aux revendications toujours plus nombreuses que l’on observe dans le cadre de l’Unesco ou d’autres enceintes internationales. En même temps, nos débats en commission ont révélé notre profond attachement au principe d’inaliénabilité des collections, véritable « colonne vertébrale » de nos musées. D’où la nécessité de définir une procédure qui permette à la fois d...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

...ues de leurs propres cultures et de leur civilisation, alors que 90 % de leur patrimoine se situe aujourd’hui hors du continent africain, essentiellement dans les musées européens. Cette nouvelle impulsion démontre la volonté de la France d’établir une amitié renouvelée avec ses partenaires africains. Ce projet de loi vise, en outre, à mettre le droit français en conformité avec une politique de restitution réfléchie dans cette perspective. Il entend également autoriser une dérogation limitée au principe général d’inaliénabilité applicable aux collections publiques françaises, afin de laisser sortir ces objets des collections nationales dans le cadre d’un transfert de propriété. Cette démarche mérite d’être éclairée par un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour d’œuvres d’art...

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

Celles qui font l’objet du présent projet de loi auraient pu s’inscrire dans cette histoire tumultueuse, mais les circonstances particulières de la conquête militaire de l’Afrique de l’Ouest font de cette restitution une péripétie supplémentaire de notre relation complexe avec notre histoire coloniale. Par ailleurs, le choix de ces biens culturels, les formes de l’instruction des demandes par les services du ministère de la culture et du musée de l’Armée, les conditions de leur transport et de leur présentation au Bénin et au Sénégal posent de nombreuses questions. Enfin, nous ne comprenons pas comment ces d...

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

Partant de ce constat, il concluait à la nécessité de renouveler le dialogue franco-africain pas la construction d’un projet commun. Il considérait, à raison, que la culture devait en constituer un chapitre essentiel et souhaitait que les restitutions du patrimoine africain s’organisassent rapidement dans ce cadre.

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

...s par un double processus de reconnaissance. Aimé Césaire disait : « Il y a deux manières de se perdre : par ségrégation murée dans le particulier ou par dilution dans l’“universel”. Ma conception de l’universel est celle d’un universel riche de tout le particulier, riche de tous les particuliers, approfondissement et coexistence de tous les particuliers. » Je regrette vivement que les présentes restitutions n’aient pas porté cette double ambition.

Photo de Claudine LepageClaudine Lepage :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en tant que sénatrice des Français établis hors de France j’ai eu souvent l’occasion et la chance de me rendre en Afrique, notamment au Bénin et au Sénégal. La question de la restitution des biens culturels y a régulièrement été évoquée par mes interlocuteurs, notamment par Marie-Cécile Zinsou, qui a d’ailleurs été entendue dans le cadre de nos travaux préparatoires. Si ces restitutions font suite à la volonté du Président de la République d’œuvrer au retour du patrimoine africain en Afrique et à son discours prononcé à Ouagadougou en 2017, elles trouvent également leur origine ...