Interventions sur "inclusive"

28 interventions trouvées.

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

... du temps et de ses évolutions. Je ne suis ni linguiste ni philosophe. Je suis un humble sénateur inspiré par le bon sens. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je veux dire ici qu’une langue n’est pas le fruit de revendications identitaires et partisanes animées par une forme de militantisme bien désuet. Alors, quand j’ai découvert, indépendamment de toute idéologie, le sujet de l’écriture inclusive, j’ai cru à une fantaisie, à une sorte de caprice de l’esprit. Je vous le confie, tout cela me semblerait dérisoire s’il ne révélait pas l’expression d’une fracture de la société, raison pour laquelle notre groupe vous invite aujourd’hui à réfléchir sur l’écriture inclusive. Avant tout, revenons aux réponses, loin d’être satisfaisantes, de mon professeur. Nombre d’entre vous ont dû entendre les ...

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

... en 1767 ! Vous le savez aussi bien que moi, mes chers collègues, l’écriture de l’histoire ne se regarde pas avec les yeux d’aujourd’hui, mais nous pouvons comprendre la colère que de tels jugements peuvent entraîner et tenter, à la demande de certains mouvements féministes, de corriger ce prétendu déséquilibre. Il n’est pas question d’interdire d’interroger l’orthographe. Toutefois, l’écriture inclusive ne s’arrête pas là. Si j’ai bien compris, elle consiste à insérer des points médians à la fin des noms pour féminiser l’écriture. Cette pratique, loin d’être intuitive, peine à s’imposer. En mars 2017, un premier ouvrage destiné à des élèves de CE2 en écriture inclusive a été publié. Certaines écoles ou universités et même des collectivités territoriales auraient également lancé des initiatives d...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’écriture inclusive alimente régulièrement les polémiques en se faisant l’écho d’un sujet sociétal majeur : l’égalité entre les femmes et les hommes. Pour autant, l’écriture inclusive caricature ce combat et, à mon sens, porte plusieurs dérives, que je veux rappeler ici. La première est issue d’un présupposé : la pratique de la langue doit être une déclinaison des politiques sociales inclusives, donc inclure toutes...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

C’est au masculin que l’on substantive les différentes catégories grammaticales, comme dans le froid, monsieur Sueur, le chaud, le pour, le contre et même le qu’en-dira-t-on. Il s’agit d’un principe d’organisation de la langue et non d’une vision de la société. Dernière dérive : l’écriture inclusive entraîne l’exclusion. La multiplication des lettres muettes, la révision de la ponctuation, la complexité des règles d’accord, la fin de la linéarité de la chaîne écrite sont autant de difficultés nouvelles qui entraînent une perte de compréhension. Quel en sera le coût social ? Quels en seront les bénéfices ? Surtout, quels en seront les bénéficiaires ? Au reste, lorsque l’on nous dit que l’écr...

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

...tribué à cimenter l’identité républicaine, en offrant à chacun un égal accès aux lois, au droit, à l’instruction. Dans le même temps, le français s’est considérablement enrichi et n’a jamais cessé de le faire, en intégrant des mots en patois, des mots étrangers, des innovations lexicales. La langue française est avant tout une langue vivante, à la fois chargée d’histoire et évolutive. L’écriture inclusive a déjà imprimé son empreinte à travers la féminisation des métiers et des fonctions, la suppression du « mademoiselle » dans les documents administratifs ou encore le choix spontané de certains mots neutres pour inclure l’ensemble des interlocuteurs, comme je l’ai d’ailleurs fait au début de mon discours en préférant le mot « collègues » à « sénateurs » ou « sénatrices et sénateurs ». En la mati...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

M. Thomas Dossus. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens à remercier le groupe Les Indépendants – République et Territoires de nous avoir proposé ce débat, d’une importance capitale pour traiter d’un péril civilisationnel aussi majeur que l’écriture inclusive, ou, plus exactement, le terrifiant point médian. Malgré la pandémie, l’explosion des inégalités, la crise sociale, malgré l’effondrement de la biodiversité et la catastrophe climatique qui s’annoncent, vous avez su garder la tête froide et remettre au cœur de la Haute Assemblée les vrais débats qui comptent. Cela doit être salué.

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

...ébattre, faisons-le sérieusement. La langue est une construction culturelle et sociale. Elle reflète notamment les évolutions et les rapports de force dans la société. À son tour, elle forge les esprits : elle détermine en partie la manière dont nous pensons et envisageons le réel. Le langage porte en lui des questions politiques. Il est forcément l’objet d’évolutions et de tensions. L’écriture inclusive, ou plutôt le souci d’une communication inclusive, est une forme de travail sur ce langage. C’est un processus de réappropriation de la langue, pour plus d’égalité. En France, ce débat s’est focalisé sur le point médian, comme nous le voyons aujourd’hui. Pourtant, celui-ci n’est pas l’alpha et l’oméga d’une communication inclusive.

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

...le pour nier l’exigence d’égalité. Les polémiques se cristallisent sur de faux problèmes et l’on finit par disserter ici sur de la typographie. Oui, nous pouvons questionner notre communication, y compris dans nos administrations, quand elle invisibilise parfois 50 % de la population ! Non, le point médian, celui qui coupe les mots pour leur ajouter un suffixe, n’est pas le seul outil d’écriture inclusive ! Non, ce n’est ni un « péril mortel » ni un « risque civilisationnel », contrairement à ce que j’ai pu lire ! Comment diminuer les inégalités qui se trouvent au cœur même de notre manière de nous exprimer, donc de rendre compte du réel ? La langue française est une langue vivante. Elle évolue avec les femmes et les hommes qui la parlent. Il en a toujours été ainsi. Il serait illusoire de voulo...

Photo de Julien BargetonJulien Bargeton :

… c’est un débat piège : on se sent pris en tenailles entre, d’un côté, les partisans d’une forme d’hypermodernité à la mode, consistant à défendre l’écriture inclusive partout, tout le temps, et, de l’autre, les tenants d’une croisade réactionnaire visant à l’interdire par la loi. C’est un débat de talk-show, de chaîne d’information en continu, dont on imagine bien les invités s’étriper durant une heure sur l’écriture inclusive Je crois qu’il y a d’autres façons de faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes, grande cause du quinquennat. Celle-ci es...

Photo de Julien BargetonJulien Bargeton :

Regardons les difficultés que soulève cette question. Il y a d’autres façons de mieux répondre à l’objectif sous-jacent d’égalité entre les femmes et les hommes que poursuivent celles et ceux qui promeuvent l’écriture inclusive.

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

... cause. Il mérite une action résolue, ambitieuse et ininterrompue. En parallèle, l’article 2 de notre Constitution dispose que « la langue de la République est le français ». Il s’agit d’un facteur d’intégration, d’appartenance et de rayonnement de la culture française. Notre langue nationale constitue le socle fondamental de notre fraternité républicaine. Le débat sur l’écriture épicène, dite « inclusive », met en jeu ces deux exigences constitutionnelles. Au-delà, elle interroge notre façon de « faire société » à travers le langage. L’écriture inclusive repose sur deux grands principes. D’une part, il s’agit d’accorder les grades, fonctions, métiers et titres en fonction du genre – on écrira ainsi « une autrice », « une pompière » ou « une sénatrice ». Ce principe ne rencontre pas d’opposition,...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

L’écriture inclusive consacre une rupture sans précédent entre la langue parlée et la langue écrite. Si chacun est libre d’utiliser divers moyens de communication dans son espace privé, les services publics, ainsi que leurs agents, ne doivent pas communiquer par écrit dans une langue aussi incomprise que discriminante.

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

À cet égard, je ne peux que soutenir la décision du ministre de l’éducation nationale de rejeter l’usage de l’écriture inclusive dans les manuels scolaires. Il s’agit d’un barrage à la transmission de notre langue pour tous, raison pour laquelle je m’inscris en opposition, ainsi que l’ensemble de mon groupe, avec cette écriture compliquée. Loin de tout discours réactionnaire, je ne peux me résoudre à lire un « roman épicène » – de grâce, épargnez-moi l’allongement des fameuses phrases de Proust !

Photo de Annick BillonAnnick Billon :

...et les fonctions auxquels elles accèdent sans que l’appellation correspondant à leur activité et à leur rôle réponde pleinement à cette situation nouvelle. L’égalité entre les hommes et les femmes ainsi que la reconnaissance du rôle de ces dernières dans la société est un combat juste, qui me tient particulièrement à cœur en tant que présidente de la délégation aux droits des femmes. L’écriture inclusive, dont nous débattons aujourd’hui, se présente comme un des outils permettant d’offrir une meilleure visibilité aux femmes. Par l’écriture inclusive, on entend un ensemble de pratiques et d’annotations qui vise à donner une représentation égale des femmes et des hommes dans la langue écrite. Mais devons-nous penser qu’une modification des règles grammaticales de la langue française écrite sera un ...

Photo de Annick BillonAnnick Billon :

L’écriture inclusive devient donc, de fait, excluante pour une partie de la population. Elle se transforme en pratique complexe et élitiste. Offrir une meilleure visibilité aux femmes dans nos sociétés est un but à poursuivre avec force et détermination, mais il ne me semble pas que l’écriture inclusive soit le meilleur moyen d’y parvenir. Je ne crois pas qu’une mutation d’ordre syntaxique puisse permettre d’accélér...

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

...s chers collègues, « ce qui n’est pas nommé n’existe pas », écrivait le poète turc Ilhan Berk. C’est incontestable : la langue que nous écrivons, que nous parlons, joue un rôle essentiel dans notre représentation du monde. Au cours des derniers siècles, elle a éludé, invisibilisé les femmes. Leur redonner leur juste place et ainsi ouvrir le champ des possibles, c’est tout le projet de l’écriture inclusive, que je préfère pour ma part qualifier d’écriture « égalitaire », et qui englobe en réalité un éventail de techniques. Je nous invite, pour avoir un débat constructif, à la regarder telle qu’elle est, loin de toute caricature : accord de proximité, féminisation des noms de métiers, titres et fonctions, mots dits « épicènes », formes féminines et masculines pour parler d’un public mixte – abrégée...

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

Mme Marie-Pierre Monier. Je conclurai par une citation d’Éliane Viennot, professeuse émérite de littérature, dont la réflexion sur ces sujets est bien connue : « Réfléchir aux meilleures pratiques de l’écriture inclusive et aux moyens de la diffuser, mesurer sérieusement ses effets psychosociaux et son impact sur les inégalités, n’est-ce pas un programme plus utile que de la peindre, encore et encore, en péril mortel ? La langue est le ciment de notre culture. Réjouissons-nous de la voir pensée, discutée, négociée. »

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

... histoire ; dans le même élan, on cherche à déconstruire la langue qui fait notre socle commun, qui protège le cœur de notre nation et relie, à travers la francophonie, ceux qui l’aiment et ceux qui s’y retrouvent. Mme de La Fayette, la comtesse de Ségur et George Sand n’étaient pas au courant qu’elles utilisaient une langue sexiste. De cette idiotie est née – et maintenant prospère – l’écriture inclusive, qui n’est rien d’autre qu’une écriture de l’exclusion. En prétendant combattre les inégalités, cette nouvelle dérive met la langue française en grand péril et crée de nouvelles disparités : par la succession des points et des ruptures de mots, les malvoyants, les dyslexiques et les étudiants étrangers sont les premières victimes de ces saccades qui sont autant de saccages. L’abolition du genre,...

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

… dont voilà un passage façon écriture inclusive : Le.a poète.sse est semblable au.à la prince.sse des nuées Qui hante la tempête et se rit de l’archer.ère ; Exilé.e sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant.e l’empêchent de marcher. Inutile de torturer davantage cette œuvre, ces quelques mots ainsi défigurés suffisent à démontrer toute l’absurdité et le danger que représente l’écriture inclusive pour la beauté et la compréhensio...

Photo de Micheline JacquesMicheline Jacques :

Madame le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, les difficultés supplémentaires introduites par l’écriture inclusive dans l’apprentissage et l’appropriation de la langue française, à l’écrit comme à l’oral, auraient dû, à elles seules, clore le débat. En effet, pour les personnes « dys » – dyslexiques, dyspraxiques, dysorthographiques – et pour les non-voyants et les malvoyants, elle est sans aucune ambiguïté facteur d’exclusion. La place des femmes dans la société constitue certes un défi éducatif, mais qui n...