Mes chers collègues, dans le prolongement de notre réunion du 21 juillet dernier, notre ordre du jour concerne aujourd'hui la désignation des lauréats de la quatrième promotion du Prix de la délégation aux droits des femmes et un échange de vue sur le choix des thématiques de travail de notre délégation pour la session 2022-2023.
Pour commencer, je rappelle que le prix de la délégation a été créé en 2019, pour marquer les vingt ans de la délégation. Les premiers lauréats ont reçu leur prix au cours d'une cérémonie organisée le 10 octobre 2019. Les lauréats de la deuxième promotion ont, quant à eux, reçu leur prix le 15 septembre 2020. Enfin, ceux de la troisième et dernière promotion ont été récompensés au cours d'une cérémonie, le 26 octobre 2021, clôturée par le président du Sénat.
Nous sommes toutes et tous convaincus de la réussite de l'initiative que nous avons prise en 2019. Nos lauréats ont perçu cette récompense comme un geste de soutien du Sénat, même si cette distinction est strictement honorifique. Nous avons souhaité, par ce prix, distinguer des personnalités, associations ou institutions engagées dans la défense des droits des femmes et la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Le Prix de la délégation aux droits des femmes du Sénat récompense chaque année des personnalités ou structures (associations, ONG, etc.) ayant contribué à éclairer les réflexions de la délégation, afin que nos choix soient le reflet de nos travaux et de notre agenda.
Les titulaires de ce prix doivent donc avoir participé à des auditions et tables rondes, à des colloques, ainsi qu'à des réunions ou des rencontres organisées par la délégation.
Au cours de notre réunion du 21 juillet, nous avions arrêté une short list de cinq lauréats potentiels dont les noms figuraient dans le compte rendu de la réunion adressé par mail à l'ensemble des membres de la délégation. Il s'agissait de :
- Catherine Champrenault, procureure générale honoraire, présidente du groupe de travail chargé de proposer des pistes pour mieux lutter contre la prostitution des mineurs : elle avait été auditionnée par notre délégation le 18 novembre 2021 pour présenter les principales conclusions de ce groupe de travail et avait fait un constat très alarmant quant à la recrudescence de ce phénomène ;
- Valérie Bacot, auteure du livre Tout le monde savait, victime de violences, battue, violée et forcée à se prostituer par celui qui fut d'abord son beau-père avant de devenir son mari. Nous l'avions entendue le 4 novembre 2021 au cours d'une audition poignante, accompagnée de son avocate, Maître Nathalie Tomasini ;
- Corinne Desforges, vice-présidente de l'association Femmes de l'Intérieur, inspectrice générale de l'administration, intervenue lors de notre table ronde du 24 février 2022 sur le bilan d'application des dix ans de la loi Sauvadet ;
- Shoukria Haidar, présidente de l'association Negar - Soutien aux femmes d'Afghanistan, qui oeuvre depuis vingt-cinq ans en faveur des droits des filles et femmes afghanes, notamment à travers des actions pour l'éducation.
- du côté des associations et acteurs de terrain, le collectif des trois associations féministes ayant dénoncé les violences dans l'industrie de la pornographie, parties civiles aux dossiers judiciaires en cours : Osez le féminisme !, Les Effronté-es et le Mouvement du Nid.
Je vous rappelle que la délégation choisit habituellement de désigner chaque année quatre lauréats : trois personnalités et une association.
Suite à notre réunion du 21 juillet, notre collègue Laurence Cohen n'ayant pu être présente, a adressé un mail aux membres de la délégation le 29 juillet, pour leur faire part de quelques suggestions de noms à mettre en débat. Il s'agissait de :
- Catherine Champrenault, présente dans la short list ;
- Liseron Boudoul, grand reporter à TF1, auteure d'un reportage sur la situation des femmes et des petites filles en Afghanistan, et qui avait participé à la table ronde de la délégation le 25 novembre 2021 ;
- Marie-George Buffet, ancienne députée, très impliquée en faveur des femmes afghanes et des femmes dans le sport, qui avait également participé à notre table ronde du 25 novembre ;
- Lorraine Questiaux, avocate, impliquée dans la lutte contre les violences faites aux femmes, notamment les violences prostitutionnelles et pornographiques, auditionnée à huis clos avec des victimes par les rapporteures sur l'industrie pornographique ;
- l'association Osez le féminisme !
Je vous propose de passer à un tour de table pour recueillir les avis des uns et des autres et de nous mettre d'accord sur la liste des lauréats pour l'édition 2022 du prix de la délégation.
Je retiens, en premier lieu, la proposition de récompenser Shoukria Haidar, restant fidèle à mes engagements en faveur de l'Afghanistan, ainsi qu'en deuxième position celle de Marie-George Buffet qui a beaucoup oeuvré en tant que ministre des sports et pour les femmes afghanes.
Je pense toutefois qu'il conviendrait d'éviter les doublons parmi les lauréats.
Voici l'ordre de mes préférences : Shoukria Haidar, Catherine Champrenault et Valérie Bacot.
Je trouve important d'honorer le parcours d'une élue. À ce titre, Marie-George Buffet me semble correspondre à nos critères pour le prix. Voici mes préférences : Catherine Champrenault, Marie-George Buffet, Valérie Bacot.
Je soutiens également les propositions suivantes : Catherine Champrenault, Marie-George Buffet au titre de son combat pour les femmes afghanes, enfin Valérie Bacot.
Pour ma part, il me semble qu'un palmarès monothématique se justifierait et je souhaiterais que l'on rende hommage au combat des femmes afghanes. C'est pourquoi je milite pour les noms suivants : Shoukria Haidar, la journaliste Liseron Boudoul et Marie-George Buffet.
Selon moi, il faut traiter des problématiques générales de la délégation. C'est pourquoi, je suis favorable à récompenser Shoukria Haidar, Catherine Champrenault et Valérie Bacot.
J'entends le principe des récompenses monothématiques, spécifiquement sur le thème de l'Afghanistan. C'est pourquoi Shoukria Haidar et Marie-George Buffet me semblent être de bonnes candidates. Pour ma part, je soutiens également Catherine Champrenault.
Je me prononce personnellement en faveur des personnalités suivantes : Shoukria Haidar, Valérie Bacot et Catherine Champrenault.
Après un nouveau tour de table ayant permis de départager les propositions encore en lice, j'annonce que les noms retenus par la délégation pour les lauréats de son prix 2022 sont : Shoukria Haidar, Catherine Champrenault et Marie-George Buffet. En outre, nous sommes toutes et tous d'accord pour récompenser le collectif des trois associations luttant contre les violences pornographiques, Osez le féminisme !, Les Effronté.es et le Mouvement du Nid.
Je vous rappelle que la cérémonie de remise des médailles est, à ce stade, prévue le mardi 25 octobre, à partir de 17 heures, dans la salle Médicis. Le président du Sénat pourrait, à nouveau, nous faire l'honneur de sa présence.
Notre second point à l'ordre du jour concerne le choix de nos thématiques de travail pour la session 2022-2023.
Nous terminons le travail de la délégation sur l'industrie de la pornographie qui sera présenté en délégation mardi 27 septembre et à la presse mercredi 28 septembre.
Au cours de notre réunion du 21 juillet, nous avions évoqué plusieurs axes de travail possibles :
- un rapport commun avec la délégation aux outre-mer sur un sujet qui reste à définir de concert avec nos collègues de cette délégation. La question de la parentalité, et plus spécifiquement de la monoparentalité encore plus prégnante dans les territoires ultramarins, a déjà été évoquée ;
- un sujet sur la santé des femmes avec un focus sur les dépistages spécifiques. Nous pourrions notamment nous concentrer sur leur suivi gynécologique, la santé des femmes et des jeunes filles ;
- une table ronde sur les femmes dans les conflits armés, notamment en Ukraine, est également proposée à l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes du 25 novembre ;
- éventuellement, un sujet sur la mixité des études et des métiers qui pourrait être traité sous la forme d'un colloque ou d'une table ronde.
Nous pourrions, en outre, poursuivre nos déplacements dans les territoires pour présenter le rapport de la délégation sur la situation des femmes dans les territoires ruraux. Un déplacement est d'ores et déjà prévu dans le département de la Vendée en présence de la ministre Isabelle Rome.
S'agissant des événements autour du 8 mars, je compte proposer l'organisation d'un déjeuner dans les salons de la Présidence entre les membres de la délégation et toutes les femmes membres du Gouvernement. Ce déjeuner aurait lieu le mercredi 8 mars, avant les questions d'actualité au Sénat, dans les salons de Boffrand, en présence du président du Sénat. En outre, nous pourrions organiser, le jeudi 9 mars matin, une rencontre avec des femmes élues des territoires ruraux pour évoquer les conclusions de notre rapport Femmes et ruralités : en finir avec les zones blanches de l'égalité.
Je tiens vraiment à aborder la problématique Femmes et sciences que l'on pourrait traiter lors d'un colloque sur la mixité des études et des métiers. Il y a une actualité sur les retraites également, si un amendement est déposé au PLFSS. Je suis d'accord avec les autres thématiques.
J'ai un doute sur la pertinence de la thématique « santé » qui a déjà été largement explorée. Sur le thème ultramarin, j'imagine que le territoire de Mayotte sera inclus. Je pense qu'il serait également intéressant de faire le bilan de quarante ans de politiques publiques en faveur de la mixité des métiers : quelles ont été les avancées et quels sont encore aujourd'hui les freins ? Ce sujet peut être abordé essentiellement à travers le prisme de la place des femmes dans les métiers scientifiques et les métiers d'ingénieurs. Je pense qu'il faudrait également réfléchir à la question du rapport des femmes au travail en ayant une approche genrée de ce débat.
Le bilan des politiques publiques en faveur de l'orientation et de la place des femmes dans les filières scientifiques pourrait remplacer la thématique santé. La question du rapport des femmes au travail pourrait également être traitée sous forme de table ronde.
La question de la mixité des métiers trouve son origine dès la petite enfance. C'est important effectivement de faire le bilan de la lutte contre la sexualisation des métiers.
Je trouverai dommage de faire un travail uniquement historique sur ce sujet.
Ce serait surtout un travail d'évaluation des politiques publiques menées en faveur de la mixité des métiers.
Le sujet de la santé me semble primordial. L'approche de la santé des femmes se dégrade depuis quelques années. On voit apparaître de nouvelles pathologies chez les femmes et certains traitements pour traiter les cancers féminins ne sont pas commercialisés en raison de leur coût.
Je partage l'avis de mon collègue Bruno Belin. La santé, et notamment la recherche dans ce domaine, est « andro-centrée ». Beaucoup de médicaments hormonaux, exclusivement destinés aux femmes, sont aujourd'hui en rupture de stock. Je pense que c'est important de travailler sur ces questions, notamment celle de la recherche. Le sujet de la rupture des médicaments destinés aux femmes est un vrai problème. Le sujet de la place des femmes dans les filières scientifiques est également important. Ma proposition est de traiter sous forme de rapports le sujet ultramarin et celui de la santé et de traiter sous forme de tables rondes le sujet de la présence des femmes dans les filières scientifiques ainsi que le rapport des femmes au travail.
Tous les sujets sont passionnants. La pauvreté et la précarité induisent des comportements nouveaux concernant la santé. Je souhaite également apporter mon soutien à l'organisation d'une table ronde sur la solidarité internationale et les femmes dans les conflits armés.
Je remercie la délégation pour l'attention particulière portée sur les territoires ultramarins. À Mayotte ou dans certains territoires ultramarins, il y a une problématique liée aux grossesses précoces chez de très jeunes filles. Je travaille également sur un autre sujet, celui des enfants de victimes de féminicides, pour lequel j'organise un colloque au Sénat le 11 février prochain.
Au vu de nos échanges de ce matin, je vous propose donc de retenir les deux sujets suivants pour nos rapports : la parentalité en outre-mer et la santé des femmes. S'agissant des tables rondes et colloques, nous traiterons de la question des femmes dans les conflits armés à l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes le 25 novembre ; le 9 mars, nous pourrons consacrer une matinée sur la question du rapport des femmes au travail en présence d'élues de nos territoires ; enfin, nous pourrons organiser un colloque sur la mixité des études et des métiers (bilan des politiques publiques et présence des femmes dans les filières scientifiques).
Le rapport « Femmes et ruralités » a eu un retentissement considérable dans nos territoires.
S'agissant des élues, il est de plus en plus difficile pour les femmes d'être maires. C'est pourquoi, sur la question du rapport des femmes au travail, il faudra également aborder la question de l'organisation du temps de travail.
Je vous propose de nommer, lors d'une prochaine réunion, les différents rapporteurs sur ces thématiques.
Avant de nous quitter, je vous rappelle que le 19 octobre prochain, le Sénat examinera la proposition de loi constitutionnelle relative à la constitutionnalisation de l'IVG. Je souhaite vous exprimer ma position personnelle qui n'engage pas la délégation aux droits des femmes : je voterai ce texte sans hésiter. J'ai conscience que la Constitution doit être modifiée « d'une main tremblante ». Cela étant, elle a été modifiée plus de vingt fois depuis 1958. Je réaffirme à travers ce vote mon attachement à un droit fondamental pour les femmes. Je le fais en mon nom personnel. J'ai conscience qu'une modification par voie de proposition de loi n'a pas vocation à prospérer puisqu'elle supposerait un référendum. Je voterai ce texte aussi parce que le droit actuel n'est pas modifié. Le droit à l'IVG constitue le droit fondamental pour toutes les femmes. Ce vote est l'expression de mon attachement à celui-ci.
Je pense extrêmement important de ne pas en rester à des positions partisanes. Aujourd'hui, en France, le droit à l'IVG est tout de même menacé par le moindre nombre de centres qui pratiquent les interruptions volontaires de grossesse.
Ce sont des sujets de société, chacun reste libre de son vote. C'est une position personnelle que j'exprime, indépendante de ma fonction de présidente de la délégation aux droits des femmes.