Le deuxième mauvais procès intenté à la TVA sociale a trait au risque d'inflation qu'engendrerait son instauration. Si, parallèlement, nous réduisions franchement les cotisations patronales, le prix hors taxes des produits baisserait de manière significative, et dès lors le consommateur ne paierait pas plus cher qu'avec les taux de TVA actuellement en vigueur.
Souvenez-vous, mes chers collègues, qu'en 1995 les prix étaient restés pratiquement stables en dépit d'un relèvement de deux points du taux de la TVA. J'affirme que, la concurrence jouant, un supplément de TVA ne provoquera pas d'inflation des prix des produits fabriqués en France, grâce au travail de nos concitoyens, dès lors qu'il s'accompagnera d'un allégement significatif des cotisations patronales. Dans la mesure où le prix hors taxes est abaissé, nos produits seront plus compétitifs sur le marché mondial. Certes, les produits importés seront en revanche plus chers, parce que l'augmentation de la TVA s'appliquera à des prix hors taxes qui seront les mêmes qu'aujourd'hui. Cela étant, ce sont à mon avis les importateurs qui disposent des marges les plus substantielles, et ils n'auront pas le front de répercuter intégralement l'augmentation de la TVA sur leurs prix. Quoi qu'il en soit, que recherchons-nous, sinon l'amélioration de la compétitivité de notre économie ?
Ma troisième remarque portera sur l'inquiétude des partenaires sociaux. Notre protection sociale est gérée, au travers de cinq caisses nationales, par les partenaires sociaux. C'est le fait que les cotisations sont assises sur les salaires qui légitime cette gestion paritaire. Certains partenaires sociaux craignent peut-être que celle-ci ne soit remise en cause si, demain, le financement de la protection sociale devait reposer sur une autre assiette. Il nous appartient donc de les rassurer, le cas échéant en élaborant une loi sur le financement de la vie syndicale. En tout état de cause, nous devons sortir de la situation de blocage actuelle, où les partenaires sociaux préfèrent que ce soit la CSG plutôt que la TVA qui finance la protection sociale, parce que l'on a encore la bonté de laisser croire que cette ressource relève du champ social alors qu'il s'agit en fait d'un impôt sur le revenu. D'ailleurs, messieurs les ministres, il faudra bien que vous mettiez au clair la hiérarchie entre la CSG et l'impôt progressif sur le revenu : ce n'est pas un problème facile, le second étant calculé en fonction du revenu de l'année N-1, la première étant prélevée immédiatement.
Le quatrième mauvais procès que l'on fait à la TVA sociale, c'est qu'elle serait un impôt antieuropéen. Au fond, la mettre en place, c'est la dernière dévaluation que l'on puisse se payer ! Aujourd'hui, sur le plan commercial, les comptes de la zone euro considérée dans son ensemble sont pratiquement équilibrés ; ce qui la met en danger, c'est que certains de ses membres présentent un très fort excédent et d'autres un très important déficit. Toute mesure de nature à rétablir un équilibre entre les pays qui la composent est donc conforme à l'intérêt de la zone euro.
Oui, monsieur le ministre de l'économie et des finances, la situation est grave. Il n'est pas question ici de tenir des propos frivoles sur la gouvernance de la zone euro. Redonner de la compétitivité à l'économie française, c'est aller dans le sens du rééquilibrage de la zone euro.
Enfin, M. Cahuzac a rappelé que la part des salaires est finalement assez faible dans les charges supportées par les entreprises. Toutefois, messieurs les ministres, les entreprises transforment des produits, des composants, des prestations qu'elles acquièrent à l'extérieur, et si les prix qui leur sont facturés n'apparaissent pas dans les salaires et les charges sociales, ils sont néanmoins directement corrélés aux salaires et aux charges sociales supportés par les fournisseurs. Par conséquent, il faut abandonner cette conception selon laquelle les salaires pèseraient si peu qu'il serait vain de vouloir alléger les charges sociales !
Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles nous souhaitons que le projet de loi de finances rectificative soit renvoyé à la commission. Ne doutez pas, messieurs les ministres, que nous partageons une même ambition de sortir la France et l'Europe de la crise où elles s'enfoncent. Le groupe de l'Union centriste et républicaine entend profiter de ce renvoi à la commission pour formuler des propositions de nature à alléger les dépenses publiques, mais aussi et surtout pour donner une impulsion décisive à la compétitivité de notre économie, car c'est bien là la condition de la relance de l'emploi et de l'amélioration du pouvoir d'achat de nos concitoyens. §